Oldalképek
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Je vous rends grace de ce zèle. ́

Vous m'êtes, en dormant, un peu triste apparu :

J'ai craint qu'il ne fût vrai ; je suis vîte accouru.
Ce maudit songe en est la cause.

Qui d'eux aimoit le mieux? Que t'en semble, lecteur? Cette difficulté vaut bien qu'on la propose.

Qu'un ami véritable est une douce chose!

Il cherche vos besoins au fond de votre cœur;
Il vous épargne la pudeur

De les lui découvrir vous-même :

Un songe, un rien, tout lui fait

Quand il s'agit de ce qu'il aime.

peur

FABLE XII.

Le Cochon, la Chèvre, et le Mouton.

UNE chèvre, un mouton, avec un cochon gras,
Montés sur même char, s'en alloient à la foire.
Leur divertissement ne les y portoit pas ;

On s'en alloit les vendre, à ce que dit l'histoire :
Le charton n'avoit pas dessein

De les mener voir Tabarin,

Dom pourceau crioit en chemin

Comme s'il avoit eu cent bouchers à ses trousses:
C'étoit une clameur à rendre les

gens sourds.

Les autres animaux, créatures plus douces,
Bonnes gens, s'étonnoient qu'il criât au secours;
Ils ne voyoient nul mal à craindre.

Le charton dit au porc : Qu'as-tu tant à te plaindre?
Tu nous étourdis tous : que ne te tiens-tu coi?
Ces deux personnes-ci, plus honnêtes que toi,
Devroient t'apprendre à vivre, ou du moins à te taire:
Regarde ce mouton; a-t-il dit un seul mot?

Il est sage. Il est un sot,
Repartit le cochon : s'il savoit son affaire,
Il crîroit, comme moi, du haut de son gosier;
Et cette autre personne honnête

Crîroit tout du haut de sa tête.

Ils pensent qu'on les veut seulement décharger,
La chèvre de son lait, le mouton de sa laine:
Je ne sais pas s'ils ont raison;

Mais quant à moi, qui ne suis bon
Qu'à manger, ma mort est certaine.
Adieu mon toit et ma maison.

Dom pourceau raisonnoit en subtil

Mais

que

personnage:

lui servoit-il? Quand le mal est certain,

La plainte ni la peur ne changent le destin;

Et le moins prévoyant est toujours le plus sage.

FABLE XIII.

Tircis et Amarante.

POUR MADEMOISELLE DE SILLERY.

J'AVOIS Ésope quitté,

Pour être tout à Bocace;

Mais une divinité

Veut revoir sur le Parnasse
Des fables de ma façon.
Or, d'aller lui dire, Non,
Sans quelque valable excuse;
Ce n'est pas comme on en use
Avec des divinités,

Sur-tout quand ce sont de celles
Que la qualité de Belles

Fait reines des volontés.

Car, afin que l'on le sache,

C'est Sillery qui s'attache

A vouloir que, de

nouveau,

Sire loup, sire corbeau,

Chez moi se parlent en rime.

Qui dit Sillery dit tout:

Peu de gens en leur estime
Lui refusent le haut bout;
Comment le pourroit-on faire?

Pour venir à notre affaire,
Mes contes, à son avis,
Sont obscurs : les beaux esprits
N'entendent pas toute chose.
Faisons donc quelques récits
Qu'elle déchiffre sans glose:

Amenons des bergers; et puis nous rimerons
disent entre eux les loups et les moutons.

Ce que

Tircis disoit un jour à la jeune Amarante :
Ah! si vous connoissiez comme moi certain mal
Qui nous plaît et qui nous enchante,
Il n'est bien sous le ciel qui vous parût égal!
Souffrez qu'on vous le communique;
Croyez-moi, n'ayez point de

peur :

Voudrois-je vous tromper, vous, pour qui je me pique Des plus doux sentiments que puisse avoir un cœur?

Amarante aussitôt réplique:

Comment l'appelez-vous, ce mal? quel est son nom? —
L'amour.-Ce mot est beau! dites-moi quelques marques
A quoi je le pourrai connoître : que sent-on? -
Des peines près de qui le plaisir des monarques
Est ennuyeux et fade: on s'oublie, on se plaît

Toute seule en une forêt.

Se mire-t-on près d'un rivage,

Ce n'est pas soi qu'on voit; on ne voit qu'une image Qui sans cesse revient, et qui suit en tous lieux: Pour tout le reste on est sans yeux.

Il est un berger du village

Dont l'abord, dont la voix, dont le nom fait rougir:
On soupire à son souvenir;

On ne sait pas pourquoi, cependant on soupire;
On a peur de le voir, encor qu'on le desire.
Amarante dit à l'instant:

Oh! oh! c'est là ce mal que vous me prêchez tant!
Il ne m'est pas nouveau : je pense le connoître.
Tircis à son but croyoit être,

Quand la belle ajouta : Voilà tout justement
Ce que je sens pour Clidamant.
L'autre pensa mourir de dépit et de honte.

Il est force gens comme lui,

Qui prétendent n'agir que pour leur
Et qui font le marché d'autrui.

propre compte,

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