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jours. C'est Dieu plutôt que moi qui vous les demande. Espérez-vous la paix en prenant un parti de désespoir dans un trouble visible, où, loin d'écouter Dieu en silence, vous n'écoutez que votre passion? C'est une fureur d'amour-propre qui vous transporte. Ne porterez-vous pas au bout du monde cet amour-propre forcené? Prétendez-vous l'apaiser en lui obéissant? Croyez-vous que l'absence de certains objets ôtera à cet amour-propre, si ingénieux pour vous tourmenter, des prétextes pour vous troubler encore? Votre imagination vive ne vous rendra-t-elle pas présent ce que vous aurez quitté ? L'absence ajoutera le remords et le désespoir à toutes vos peines. » Cette lutte se prolongera pendant plusieurs années et ne se terminera qu'avec la correspondance. Il y a là tout un côté bien curieux de l'histoire intime de la direction au dix-septième siècle.

En lisant ces lettres si intéressantes pour nous, même par ce que j'oserais appeler les charmantes faiblesses de Fénelon, je ne puis me défendre d'un rapprochement. Fénelon, si inhumain dans la doctrine, est tendre presque jusqu'à l'excès envers les âmes qui lui sont confiées. Tout au contraire, il y a bien plus d'humanité dans la doctrine de Bossuet, et en même temps plus de sévérité dans sa manière de conduire les âmes. Il a des affections graves, austères, mâles comme tout son génie. Il

a le ton du maître spirituel, attendri seulement par la charité. Ce n'est pas lui qui prolongerait pendant plusieurs années une discussion avec des jalousies et des défiances obstinées. La sœur Cornuau, dans son Second avertissement sur les lettres de Bossuet, raconte que plusieurs personnes, trèsparfaites d'ailleurs et très-considérées de ce prélat, furent abandonnées par lui pour avoir apporté trop de retardements à se soumettre et trop de raisons. La direction, disait-il, tournera en vain amusement dès qu'un directeur, par mollesse et par complaisance, pliera sous la volonté des âmes qu'il dirige, et souffrira leur peu de soumission. Aussi peut-on considérer la correspondance spirituelle de Bossuet comme une œuvre accomplie de charité et de raison. Tout y est d'une fermeté continue, d'une sagesse qui, pas un seul instant, ne languit et ne s'amuse. Tout y est tourné à une instruction vigoureuse et saine. C'est la direction dans sa vraie grandeur et sa simplicité.

Nous avons pensé qu'il pourrait y avoir quelque intérêt dans cette étude de psychologie religieuse qui est en même temps une étude sur la vie morale du dix-septième siècle. Il y aurait, je le sais, une contre-partie à écrire, qui se composerait des abus, des ingérences de toute sorte, des usurpations d'influence, si fréquentes même au dix-septième siècle, et surtout des abaissements de cette

pratique de la direction spirituelle qui tomba au dix-huitième siècle, sous le règne des abbés de cour et de boudoir, dans la plus ridicule et la plus méprisable frivolité. Mais j'ai tenu à écarter pour le moment ces tristes souvenirs pour ne considérer la direction des âmes que sous son aspect le plus noble, au moment où ce phénomène religieux produisit de lui-même, dans une littérature trop oubliée, la plus haute expression et la plus pure image.

QUATRIÈME ÉTUDE.

M. DE LAMENNAIS

D'APRÈS SA CORRESPONDANCE.

Dans ces dernières années, l'attention publique a été ramenée sur M. de Lamennais par des publications très - importantes, qui se composent, pour la plus grande part, de la correspondance 1. - Il est inutile de revenir sur les débats qui se sont élevés entre les représentants de la famille de M. de Lamennais et le mandataire désigné pour éditer ses œuvres posthumes. L'arrêt intervenu entre les parties faisait défense à M. Forgues de publier un certain nombre de lettres qu'il avait recueillies de différents côtés, en vue de compléter son œuvre, et qui n'étaient pas strictement com

1. OEuvres posthumes de Lamennais, publiées, selon le vœu de l'auteur, par E. Forgues. Correspondance, 2 vol. in-8, Correspon

1862.

OEuvres inédites publiées par A. Blaise. dance, 2 vol. in-8. 1866.

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