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Elle en dit tant, que monsieur à la fin,
Lassé d'entendre un tel lutin (2),
Vous la renvoie à la campagne

Chez ses parents. La voilà donc compagne
De certaines Philis qui gardent les dindons,
Avec les gardeurs de cochons (3).
Au bout de quelque temps qu'on la crut adoucie,
Le mari la reprend. Eh bien ! qu'avez-vous fait ?
Comment passiez-vous votre vie?

L'innocence des champs est-elle votre fait(4)?
Assez, dit-elle: mais ma peine
Etoit de voir les gens plus paresseux qu'ici:
Ils n'ont des troupeaux nul souci.
Je leur savois bien dire, et m'attirois la haine
De tous ces gens si peu soigneux.
Eh! madame, reprit son époux tout à l'heure,
Si votre esprit est si hargneux
Que le monde qui ne demeure

Qu'un moment avec vous, et ne revient qu'au soir,
Est déjà lassé de vous voir,

Que feront des valets qui, toute la journée,.
Vous verront contre eux déchaînée?
Et que pourra faire un époux

Que vous voulez qui soit jour et nuit avec vous ?
Retournez au village: adieu. Si de ma vie

Je vous rappelle, et qu'il m'en prenne envie,
Puissé-je chez les morts avoir, pour mes péchés,
Deux femmes comme vous sans cesse à mes côtés!

(2) Une femme si tourmen

taute.

(3) Avec les femmes et les

valets de la basse-cour.

(4) Vous convient-elle ?

III. Le Rat qui s'est retiré du monde.

LES Levantins (1) en leur légende (2)
Disent qu'un certain rat, las des soins d'ici-bas,
Dans un fromage de Hollande
Se retira loin du tracas.

La solitude étoit profonde,
S'étendant partout à la ronde.

Notre hermite nouveau subsistoit là-dedans.
Il fit tant, des pieds et des dents,
Qu'en peu de jours il eut au fond de l'hermitage.
Le vivre et le couvert (3): que faut-il davantage?
Il devint gros et gras: Dieu prodigue ses biens
A ceux qui font vou d'être siens.

Un jour, au dévot personnage
Des députés du peuple rat

S'en vinrent demander quelque aumône légère:
Ils alloient en terre étrangère

Chercher quelque secours contre le peuple chat;
Ratopolis (4) étoit bloquée:

On les avoit coutraint de partir sans argent,
Attendu l'état indigent

De la république attaquée.

Ils demandoient fort peu, certains que le secours
Seroit prêt dans quatre ou cinq jours.
Mes amis, dit le solitaire,

Les choses d'ici-bas ne me regardent plus:
En quoi peut un pauvre reclus
Vous assister? que peut-il faire,
Que de prier le ciel qu'il nous aide en ceci?
J'espère qu'il aura de vous quelque souci.
Ayant parlé de cette sorte,

Le nouveau saint ferma sa pórte.

(1) Les peuples du Levant.
(2) Livre de la vie des saints.

(3) De quoi se nourrir et se mettre a l'abri.

(4) La capitale des rats..

Que désigné-je, à votre avis,

Par ce rat si peu secourable?

Un moiue? Non, mais un dervis (5):

Je suppose qu'un moine est toujours charitable.

(5) Espèce de moine chez les Turcs,

IV. Le Héron.

UN jour sur ses longs pieds alloit je ne sais où
Le héron au long bec emmanché d'un long cou:
Il côtoyoit une rivière.

L'onde étoit transparente ainsi qu'aux plus beaux jours;
Ma commère la carpe y faisoit mille tours
Avec le brochet son compère.
Le héron en eût fait aisément son profit:

Tous approchoient du bord, l'oiseau n'avoit qu'à prendre.
Mais il crut mieux faire d'attendre
Qu'il eût un peu plus d'appétit :
Il vivoit de régime (1), et mangeoit à ses heures.
Après quelques moments, l'appétit vint: l'oiseau
S'approchant du bord, vit sur l'eau

Des tanches qui sortoient du fond de ces demeures.
Le mets ne lui plut pas; il s'attendoit à mieux,
Et montroit un goût dédaigneux

Comme le rat du bon Horace (2) :

B

Moi, des tanches! dit-il: moi, héron, que je fasse
Une si pauvre chère! Et pour qui me prend-on ?
La tanche rebutée, il trouva du goujon.

Du goujon! c'est bien là le dîner d'un héron!
J'ouvrirois pour si peu le bec aux dieux ne plaise!

(1) Observoit, pour conserver sa santé, un certain ordre dans sa manière de vivre.

(2) Le rat de ville qui ne

mangeoit que d'un air dédaigneux ce que lui offroit le rat des champs,

Il l'ouvrit pour bien moins: tout alla de façon
Qu'il ne vit plus aucun poisson.

La faim le prit: il fut tout heureux et tout aise
De rencontrer un limaçon.

Ne soyons pas si difficiles:

Les plus accommodauts, ce sont les plus habiles;
On hasarde de perdre en voulant trop gagner.
Gardez-vous de rien dédaigner.

Surtout quand vous avez à peu près votre compte.
Bien des gens y sont pris. Ce n'est pas aux hérons
Que je parle : écoutez, humains, un autre conte;
Vous verrez que chez vous j'ai puisé ces leçons.

V. La Fille.

CERTAINE fille, un peu trop fière,
Prétendoit trouver un mari

Jeune, bien fait, et beau, d'agréable manière,
Point froid et point jaloux: notez ces deux points-ci.
Cette fille vouloit aussi

Qu'il eût du bien, de la naissance,

De l'esprit, enfin tout. Mais qui peut tout avoir?
Le destin se montra soigneux de la pourvoir:
Il vint des partis d'importance.
La belle les trouva trop chétifs de moitié:
Quoi, moi! quoi! ces gens-là! l'on radote, je pense.
Voyez un peu la belle espèce !
L'un n'avoit en l'esprit nulle délicatesse,
L'autre avoit le nez fait de cette façon-là:
C'étoit ceci, c'étoit cela;

C'étoit tout, car les précieuses

Font dessus tout (1) les dédaigneuses.

Après les bons partis, les médiocres gens
Vinrent se mettre sur les rangs.

(1) Sur. Dessus ne peut être suivi d'un régime.

Elle de se moquer. Ah! vraiment je suis bonne
De leur ouvrir la porte! Ils pensent que je suis
Fort en peine de ma personne:
Grâce à Dieu, je passe les nuits
Sans chagrin, quoiqu'en solitude (2).

La belle se sut gré de tous ces sentiments.
L'âge la fit déchoir: adieu tous les amants.
Un an se passe et deux avec inquiétude :
Le chagrin vient ensuite; elle sent chaque jour
Déloger quelques ris, quelques jeux, puis l'amour;
Puis ces traits choquer et déplaire:

Puis cent sortes de fards. Ses soins ne purent faire
Qu'elle échappât au temps, cet insigne larron.
Les ruines d'une maison

Se peuvent réparer: que n'est cet avantage (3)
Pour les ruines du visage!

Sa préciosité (4) changea lors de langage.
Son miroir lui disoit, prenez vite un mari!.
Je ne sais quel désir le lui disoit aussi :
Le désir peut loger chez une précieuse.
Celle-ci fit un choix qu'on n'auroit jamais cru,
Se trouvant à la fin tout aise et tout heureuse
De rencontrer un malotru (5).

(2) Sans mari. (3) Pourquoi cet avantage n'existe-t-il pas ?

(4) Son humeur précieuse et dédaigneuse. L'autorité de la

Fontaine n'a pas pu faire adopter ce mot.

(5) Terme de mépris, et par lequel on désigne en même temps une personne maussade, mal faite, mal bátie.

VI. Les Souhaits.

IL est au Mogol des follets (1)
Qui font office de valets,

(1) Esprits familiers.

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