Afin de le guérir, le sort officieux Les conseillers muets dont se servent nos dames: Miroirs aux ceintures des femmes. Que fait notre Narcisse (1)? Il se va confiner Il s'y voit, il se fache; et ses yeux irrités Qu'il ne le quitte qu'avec peine. On voit bien où je veux venir. Je parle à tous; et cette erreur extrême Est un mal que chacun se plaît d'entretenir. Notre âme, c'est cet homme amoureux de lui-même ;; Tant de miroirs, ce sont les sottises d'autrui, Miroirs, de nos défauts les peintres légitimes: Et quand au canal, c'est celui Que chacun sait, le livre des Maximes (2) (1) On appelle Narcisse un homme amoureux de sa figure, par allusion à ce que la fable dit de Narcisse, qui, en se regardant dans l'eau, fut si épris de lui-même qu'il en perdit la vie. (2) Réflexions morales du duc de la Rochefoucauld. XII. Le Dragon à plusieurs tétes, et le Dragon à plusieurs queues. UN envoyé du grand seigneur Préféroit, dit l'histoire, un jour, chez l'empereur, Notre prince a des dépendants. Que chacun d'eux pourroit soudoyer une armée,, Lui dit; Je sais par renommée. Ce que chaque électeur peut de monde fournir; D'une aventure étrange, et qui pourtant est vraie. J'étois en un lieu sûr, lorsque je vis passer- Et je crois qu'à moins on s'effraie. Ne put venir vers moi, ni trouver d'ouverture. Quand un autre dragon, qui n'avoit qu'un seul chef, Ce chef passe, et le corps, et chaque queue aussi :.. Je soutiens qu'il en est ainsi De votre empereur et du nôtre.. POUR un âne enlevé deux voleurs se battoient: . Qui saisit maître aliboron (1). (1) Nom burlesque qu'on donne à un âne, et dont on se gert au figuré en parlant d'un homme qui fait le connoisseur en tout et qui ne se connoît en rien. L'âne, c'est quelquefois une pauvre province :- Comme le Trausilvain, le Turc et le Hongrois. De nul d'eux n'est souvent la province conquise: (2) De l'âne. XIV. Simonide préservé par les dieux. On ne peut trop louer trois sortes de personnes; Simonide (2) avoit entrepris L'éloge d'un athlète (3); et, la chose essayée,, Le poète d'abord parla de son héros. Après en avoir dit ce qu'il en pouvoit dire, propos De Castor et Pollux (4u; ne manque pas d'écrire (1) Poète françois. (2) Fameux philosophe et poète grec. (3) Celui qui combattoit dans les jeux solennels de la Grèce. (4) Fils de Jupiter et de Léda, qui s'étant rendus fameux par leur adresse dans les exercices du corps et par leur valeur, furent placés parmi les constellations après leur mort. Où ces frères s'étoient signalés davantage:: Faisoit les deux tiers de l'ouvrage. L'athlète avoit promis d'en payer un talent: N'en donna que le tiers; et dit, fort franchement, Venez souper chez moi: nous ferons boune vie ;: Mes parents, mes meilleurs amis. Simonide promit. Peut-être qu'il eut peur Un domestique accourt, l'avertit qu'à la porte Ces deux hommes étoient les gémeaux de l'éloge. Un pilier manque; et le plafond, Tombe sur le festin, brise plats et flacons, Ce ne fut pas le pis: car, pour rendre complète Une poutre cassa les jambes à l'athlète Pour la plupart estropiés. (5) Outre l'argent qui lui étoit dû, la reconnoissance qu'on lui devoit encore pour sa louange, (6) Faire festin. Il est familier. (7) Mot qui au propre signifie l'officier qui sert à boire à un roi, ou à un prince.. La renommée eut soin de publier l'affaire :" Que méritoient les vers d'un homme aimé des dieux. Qui, les payaut à qui mieux mieux, Pour ses ancêtres n'en fit faire. Je reviens à mon texte: et dis premièrement Jadis l'Olympe (9) et le Parnasse (10) Etoient frères et bons amis. (8) Une des neuf muses. Ce mot est mis ici pour les poètes qu'elle inspire. (9) Séjour des dieux. (10) Montagne habitée par les muses. XV. La Mort et le Malheureux. UN malheureux appeloit tous les jours O Mort! lui disoit-il, que tu me sembles belle ! Mécénas (1) fut un galant homme: (1) Favori de l'empereur Auguste. Ce sujet a été traité d'une autre façon par Esope, comme la |