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Un Chien de cour l'arrête : épieux et fourches fières(4)

L'ajustent de toutes manières.

Que veniez-vous chercher en ce lieu ? lui dit-on.
Aussi-tôt il conta l'affaire.

Merci de moi ! lui dit la mère,
Tu mangeras mon fils! L'ai-je fait à dessein
Qu'il assouvisse un jour ta faim?

On assomma la pauvre bête.

Un manant lui coupa le pied droit et la tête;
Le Seigneur du village à sa porte les mit ;
Et ce dicton picard à l'entour fut écrit :

Biaux chires (5) Leups, n'écoutez mie
Mere tenchent chen fieux qui crie.

(Depuis La Fontaine.) Benserade, fab. 94. Fables en chansons, L. II. fab. 43. M. l'abbé Aubert (la Mère et la Mort) (*).

OBSERVATIONS DIVERSES.

(1) Attendoit chape-chúte. Madame de Sévigné : « Je lui dis que ce n'est point là la vie d'un honnête bomme, qu'il trouvera quelque chape-chúte, et qu'à force de s'exposer, il aura son fait.»

(2) Enfin bonne provende. Mot ancien, dont l'étymologie est dans le latin provenire; hon produit; plutôt que dans præbenda, d'où on le fait venir. Selon Pasquier (Recherch. L. III. ch. 37:) « Les biens assignés aux clercs pour leurs vivres, s'appeloient provende. Ce mot a été depuis étendu à toute sorte de provision de bouche ».

(3) La mère aussitôt. Aphtone substitue une nourrice à une

(*) Une mère, dans un mouvement d'indignation contre les écarts de son fils, appelle la mort pour l'en punir. La mort vient; la mère aussitôt de s'écrier:

O mort! corrige-le, mais ne l'emporte pas.

mère.

mère. C'est mettre un cœur mercenaire à la place du chef-d'œuvre de la nature.

(4) Fourches fières. Fourches de fer attachées à de longues perches. Fières ne viendroit-il pas du vieux mot férir, en latin ferire, couper, trancher? On connoît ce proverbe « Tel fiert

(frappe) qui ne tue pas. >>

(5) Biaux chires, etc. Beaux sires ( messieurs les ) Loups ! n'écoutez point mère grondant son fils qui crie. Beaux sires comme dans la fable du Loup et du Chien: Il ne tiendra qu'à vous, beau sire. Mère tenchent, participe de tencher, tanser, de tangere, gronder, frapper; chen fieux, son enfant; de filiolus, petit enfant.

On lit dans le fabliau du Villain qui done ses Bues au Lou (ses boeufs au loup): Un Vilain (homme de la campagne) conduisoit sa charrue. Ses boeufs ne voulant pas marcher droit: je voudrois, dit-il, les voir dans le ventre d'un loup. Un loup passoit par-là, et entendant le propos, s'offre à satisfaire le vœu du laboureur; mais

Li Villain ne li volt bailler,

Ne li Lou ne li volt laisser.

(Le paysan ne veut point les livrer; le loup refuse de les lâcher.') ( Manusc. de la Biblioth. de S. Germain-des-Près,

n°. 1830. fol. 10.)

Le prototype de ces contes pourroit être ce mot de Théocrite, ainsi traduit par un vieux écrivain français: Qu'une femme-nourrice menace son enfant de la sabouë (singe) et du marmot, etc. (Bouchat, série 24.)

Tome I.

Q

FABLE XVII.

Parole de Socrate.

(Avant La Fontaine). LATINS. Phèdre, L. III. fab. 9.

SOCRATE un jour faisant bâtir,

Chacun censuroit son ouvrage :

L'un trouvoit les dedans, pour ne lui point mentir,
Indignes d'un tel personnage;

L'autre blàmoit la face; et tous étoient d'avis
Que les appartemens en étoient trop petits.
Quelle maison pour lui! l'on y tournoit à peine.
Plût au ciel que de vrais amis,

Telle qu'elle est, dit-il, elle pût être pleine!

Le bon Socrate avoit raison (1)

De trouver pour ceux-là trop grande sa maison.
Chacun se dit ami, mais fou qui s'y repose.
Rien n'est plus commun que ce nom (2),
Rien n'est plus rare que la chose.

(Depuis La Fontaine). FRANÇAIS. M. de Lacour Damonville, dans le Fablier franç. L. XII. fab. 9, pag. 373. Fables en chansons, L. II. fab. 11. ITAL. Luig. Grillo, fav. 16.

OBSERVATIONS DIVERSES.

SOCRATE, célèbre philosophe grec. L'oracle d'Apollon le déclara le plus sage des hommes: il justifia cet éloge par l'exercice constant de toutes les vertus. La force de sa raison l'éleva jusqu'à la connoissance d'un seul Dieu; découverte sublime qui lui valut un arrêt de mort. Il fut condamné à boire la ciguë. L'histoire

son

de ses derniers momens nous a été transmise par Platon, disciple, dans le traité de l'Immortalité de l'Ame. Il mourut avec une constance admirable, 400 ans avant l'ère chrétienne, âgé de 70 ans. Un poète moderne n'a pas craint de l'appeler le demi-Dieu d'Athènes, d'après Erasme et Cicéron (M. Aubert, L. V. fab. 7).

(1) Le bon Socrate avoit raison. Phèdre voulant donner au mot de sa fable plus d'autorité, l'attribue à Socrate, contre le silence de toute l'antiquité. Notre poète l'a imité; mais en corrigeant le titre de l'apologue latin, ainsi conçu: Socrates ad Amicos. Un savant observe avec justesse que « cette fable traite des amis, mais ne s'adresse pas à des amis ». ( Jos. Scheffer, Edit. Phœdri ad argumenta.) La Fontaine a suivi la lumière que le bon sens lui présentoit.

(2) Rien n'est plus commun que ce nom. Quelqu'un a dit de l'Amour, qu'il ressemble aux esprits: «Tout le monde en parle, et personne n'en a vu ». Ne pourroit-on pas en dire à-peu-près autant de l'amitié? (Poggiana, T. I. p. 298.)

FABLE XVII I.

Le Vieillard et ses Enfans.

(Avant La Fontaine). ORIENTAUX. Salom. Eccle. ch. IV. ▼. 12. —Grecs. Esope, f. 174. Plutarque (voyez plus bas, note 4).

TOUTE puissance est foible, à moins que d'être unie (1). Ecoutez là-dessus l'Esclave de Phrygie (2).

Si j'ajoute du mien à son invention,

C'est pour peindre nos mœurs, et non pas par envie ; Je suis trop au-dessous de cette ambition (3). Phèdre enchérit souvent par un motif de gloire: Pour moi, de tels pensers me seroient mal-séants.

Mais venons à la fable, ou plutôt à l'histoire (4)
De celui qui tâcha d'unir tous ses enfans.

Un Vieillard près d'aller où la mort l'appeloit,
Mes chers enfans, dit-il (à ses fils il parloit),
Voyez si vous romprez ces dards liés ensemble:
Je vous expliquerai le nœud qui les assemble.
L'aîné les ayant pris, et fait tous ses efforts,
Les rendit en disant : Je le donne aux plus forts.
Un second lui succède, et se met en posture;
Mais en vain. Un cadet tente aussi l'aventure.
Tous perdirent leur temps, le faisceau résista:
De ces dards joints ensemble un seul ne s'éclata (5).
Foibles gens! dit le père: il faut que je vous montre
Ce ma force
que
semblable rencontre.
peut en

On crut qu'il se moquoit, on sourit, mais à tort.
Il sépare les dards, et les rompt sans effort.
Vous voyez, reprit-il, l'effet de la concorde :
Soyez joints, mes enfans, que l'amour vous accorde.
Tant que dura son mal, il n'eut autre discours.
Enfin se sentant près de terminer ses jours:
Mes chers enfans, dit-il, je vais où sont nos pères:
Adieu, promettez-moi de vivre comme frères;
Que j'obtienne de vous cette grace en mourant.
Chacun de ses trois fils l'en assure en pleurant.
Il prend à tous les mains, il meurt ; et les trois frères
Trouvent un bien fort grand, mais fort mêlé d'affaires.
Un créancier saisit, un voisin fait procès :

D'abord notre trio s'en tire avec succès.

Leur amitié fut courte autant qu'elle étoit rare.

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