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l'humanité vient de Dieu, tous les faits vrais et nécessaires dérivent de lui. Il produit l'enthousiasme du grand homme et le vertige du despote, la force et la faiblesse de cœur. En conséquence, il ne faut pas confondre des langages très-différens et chercher un accident surnaturel partout où ce nom est prononcé. Pour

ne l'avoir pas fait, des philosophes eux-mêmes sont tombés dans des erreurs singulières, et ont donné quelque poids à des déclamations railleuses, dont le législateur, s'il les eût entendues, aurait bien eu le droit à son tour de se railler.

Manéthon, à qui l'on ne conteste plus sa bonne foi, raconte, d'après les annales sacrées de l'Égypte, qu'il avait à sa disposition, et d'après les traditions populaires, deux événemens remarquables, séparés par deux siècles environ, et entre lesquels on avait à choisir celui qui s'appliquait à la sortie des Hébreux. L'un et l'autre présentent la chose sous l'aspect militaire; mais, dans le second, elle est enveloppée d'un conte que l'amour-propre national avait propagé, et que Josèphe foudroie en deux

mots.

Voici le plus ancien, qu'il a puisé dans les annales sacrées. « Sous le règne de Timaüs, l'un de nos rois, dit-il en substance, Dieu, irrité contre nous, permit qu'une grande armée ve

nue de l'Orient se rendît sans peine maître de notre pays, le dévastât, le réduisît en servitude, et établît un roi nommé Salatis. Ce nouveau prince, arrivé à Memphis, imposa un tribut aux provinces tant supérieures qu'inférieures, et y mit de fortes garnisons. Ayant trouvé dans la contrée de Saïte, à l'orient du fleuve Bubaste, une ville nommée Avaris, dont la situation lui parut très-avantageuse, il la fortifia, et y renferma, ainsi qu'aux environs, deux cent quarante mille hommes. Ce roi et ses successeurs régnèrent cinq cent onze ans. On les nommait hyesos, c'est-à-dire rois pasteurs; car hye, en langue sainte, signifie roi, et sos, en langue vulgaire, signifie pasteurs. Quelques uns disent qu'ils étaient Arabes.

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>> Ce temps écoulé, les rois de la Thébaïde et de toutes les parties de l'Égypte qui n'avaient pas été domptées leur déclarèrent la guerre. Enfin Alisfragmoutophis les vainquit et les chassa du territoire. Ce qui en resta fut se réfugier dans le canton d'Avaris, qui contenait dix mille mesures de terre. Thémosis, fils du vainqueur, les attaqua avec quatre cent quatre-vingt mille hommes; mais, désespérant de les forcer, il leur fit cette condition, qu'ils sortiraient librement de l'Egypte. Leur nombre était de deux cent quarante mille. Ils emportèrent tous

leurs biens, traversèrent le désert de Syrie, et craignant les Assyriens, qui dominaient alors dans toute l'Asie, ils se retirèrent dans un pays que l'on nomme aujourd'hui Judée, où ils bâtirent une ville assez grande pour contenir cette multitude, et qui est Jérusalem. Remarquez, ajoute Manéthon, que j'ai trouvé dans d'autres livres, que ce mot hycsos ne signifie pas rois pasteurs, mais pasteurs captifs; car hyc, en langue égyptienne, et hac, quand on le prononce avec aspiration, doit signifier captif; et cela paraît plus conforme à l'ancienne histoire 44.

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Or le motif qui ferait adopter cet événement pour celui qui correspond à la sortie d'Égypte, est, que l'Écriture semble placer la retraite des Hébreux peu de temps après le nouveau roi, dont Joseph n'était pas connu; en con séquence, il faudrait rejeter la presque totalité des quatre siècles qu'ils passèrent dans ce royaume, sur les cinq cent onze ans déjà cités; et Moïse, loin d'être né dans le seizième siècle, appartiendrait au dix-huitième. Mais d'après M.Champollion, deux cent soixante ans forment toute la durée des rois pasteurs, et deux cent quarante huit ans la durée de la dix-huitième dynastie, par laquelle ils furent expulsés; de sorte que c'est sous les derniers règnes de cette dynastie, aux époques déjà marquées, qu'arri

vèrent et l'exode et le second événement dont Manéthon parle comme d'une ancienne tradition.

Le roi Aménophis ambitionna, à l'exemple d'un de ses prédécesseurs, de voir les dieux. Un prêtre des plus savans lui déclara qu'il fallait pour cela chasser tous les hommes atteints de lèpre et de maladies semblables. On en compta quatre-vingt-dix mille, parmi lesquels plusieurs prêtres, et on les envoya travailler dans des carrières à l'orient du Nil. Ils obtinrent bientôt pour demeure la ville d'Avaris; ils s'y fortifièrent, levèrent l'étendard de la révolte, et reçurent des secours des pasteurs qui habitaient la Palestine. Le roi marcha contre eux à la tête de trois cent mille hommes; mais, sur la foi d'une prédiction qui leur assurait la domination de l'Égypte pendant treize ans, il n'osa pas risquer la bataille, et il se réfugia en Éthiopie. Les insurgés se livrèrent à toutes sortes de violences : ils eurent pour législateur un prêtre d'Héliopolis, qui leur apprit à mépriser les simulacres des dieux et les animaux sacrés, et dont le nom d'Osarsiph fut changé en celui de Moïse 45........ Mais quelle étrange armée pour épouvanter trois cent mille hommes, qu'une armée de lépreux! Et ce qui est bien plus étrange, dit l'historien juif, c'est que le chef de ces masses lépreuses aurait commencé par

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faire des lois qui éloignaient du camp et de l'assemblée tout individu seulement soupçonné de cette maladie.

De tout cela cependant résulte la connaissance des mouvemens dont l'Égypte a été le théâtre. Et en rappelant toutes les circonstances le roi nouvellement porté au trône, et qui n'avait pas entendu parler de Joseph; la crainte de voir les pasteurs captifs se joindre aux pasteurs du dehors; les prétendus lépreux. livrés aux travaux des carrières; leur révolte ; le mépris que leur dicte leur chef pour les dieux du pays et les animaux sacrés; leur résistance à trois cent mille hommes; les conditions qu'un roi égyptien aurait accordées aux guerriers qu'il n'avait pu vaincre ; les conditions que Moïse voulut obtenir du pharaon, et le soulèvement unanime des Hébreux pour échapper à l'esclavage, on reste convaincu de l'existence absolue du fait principal et du caractère guerrier qui renforçait la puissance intellectuelle à laquelle cette révolution était due, de la même manière qu'on distingue très-bien la masse d'un édifice placé hors de la portée ordinaire des yeux, sans pouvoir se rendre un compte exact de tous les détails et de ses rapports avec les objets qui l'en

tourent.

Mais pour opérer avec quelque sûreté la re

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