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lui donna bientôt pour épouse Séphora, dont il eut deux fils 29.

Devenu pasteur de son beau-père, Moïse promena sa science et ses méditations dans les vallées du Sinaï et d'Horeb, et sur les bords de la mer Rouge. La solitude et l'observation continuelle de la nature portèrent au plus haut degré son enthousiasme, le jetèrent dans de fréquentes extases et imprimèrent dans son imagination la teinte poétique qui se réfléchit sur toute sa vie. Alors il se proposa non-seulement de rendre la liberté à ses frères, mais de former un peuple qui deviendrait à jamais l'étonnement, peut-être un jour le type des nations.

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Toutefois avant de mettre à exécution ses desseins, que de difficultés ne se présentèrent pas à sa pensée, que d'objections ne s'adressat-il pas à lui-même ? Il redoutait surtout un bégaiement auquel il était sujet depuis son enfance et qui le força de s'attacher son frère aîné Aaron, doué de l'organe sonore 30 dont l'homme qui doit émouvoir des masses retire des avantages si grands. Il redoutait la puissance égyptienne, et l'indifférence avec laquelle les Hébreux accueilliraient ses énergiques paroles : enfin toutes ses incertitudes s'évanouirent, et il commença sa carrière, entraîné, comme malgré lui, par cette flamme intérieure dont le

buisson ardent et incombustible d'Horeb est l'heureux symbole, et par la voix puissante qui, appelant à elle l'homme supérieur, lui impose d'illustres travaux. « As-tu entendu réciter l'histoire de Moïse? s'écrie Mahomet dans le Coran; il a dit en voyant le buisson : Voilà le feu sacré! Peut-être en emporterai-je une étincelle qui servira à me conduire 31. »

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A l'âge de quatre-vingts ans, au plus cinquante ou soixante de notre époque, il rentra en Égypte. Combien sa position differe de celle de tous les législateurs! Licurgue, Numa Dracon, Solon, au milieu d'hommes réunis, déjà soumis à des lois et possesseurs d'une patrie, sont portés par le cours ordinaire des choses à leurs fonctions élevées : Confucius dicte paisiblement de sages préceptes à ses concitoyens : Mahomet enfin, ce puissant génie, après avoir médité quinze ans dans la solitude, présente à des peuples établis un code nouveau, mélange curieux d'anciennes sentences, qu'il approprie à leur imagination et à leurs mœurs, et dont il confirme la vérité par le succès de ses armes. Mais Moïse arrive seul, sans force matérielle à sa disposition : les hommes dont il va faire un peuple n'ont point de patrie: avant de leur proposer des lois, il faudra, pour ainsi dire, les conquérir eux-mêmes, triompher de leurs.

oppresseurs, du découragement dont ils sont saisis, et d'une foule effrayante de circonstances contraires!...

SORTIE D'ÉGYPTE.

Moïse en Egypte se hâta de se découvrir aux anciens ou aux plus expérimentés des Hébreux. L'usage s'était conservé parmi ce peuple de soumettre ses différens aux vieillards qui se réunissaient, comme un conseil de famille, autant que pouvait le permettre l'oppression dans laquelle ils vivaient. Le gouvernement avait établi des commissaires qui les forçaient à remplir leur tâche, et qui, choisissant à leur tour des agens inférieurs parmi les opprimés, les rendaient responsables, ainsi que les chefs de famille, de la négligence ou de l'insubordination des détachemens rangés sous leurs ordres 32. Moïse exposa ses desseins aux anciens, leur promit la liberté, répondit à leurs objections 33, commanda la confiance.

Mais les fils de Jacob avaient allié aux sages pensées de leurs aïeux, la plupart des superstitions égyptiennes ; mais la servitude qui pesait sur eux depuis tant d'années, avait, autant que la superstition, énervé leurs âmes; car une longue servitude est comme un trop long som

meil, qui, loin de ranimer l'homme, le dispose à dormir encore.

Il fallait donc offrir aussitôt à leurs esprits un appât matériel et puissant ainsi fit Moïse en leur promettant la possession d'une terre heureuse où coulaient des ruisseaux de miel et de lait. Il fallait ramener vers un même but leurs imaginations pleines de rêveries opposées, les pénétrer de la certitude du succès par la persuasion qu'ils étaient placés sous une égide invincible; captiver surtout l'attention d'une multitude ignorante, et mettre à sa portée les principes de la plus haute science et de la plus saine raison. Or il y parvint, en les assurant de la protection immédiate du Dieu qui s'était dévoilé à leurs pères; du juste et du fort: en leur apprenant qu'ils étaient consacrés à ce Dieu même, en ce sens, qu'ils seraient le premier peuple dont l'institution reposerait sur le principe de l'unité universelle, et aurait pour dernier objet la conservation de ce principe éternel. Enfin il remplit toutes les conditions exigées, lorsqu'après avoir solennellement déclaré que la forme d'aucun des êtres qui couvrent la terre ou qui se montrent dans le ciel n'était applicable à son Dieu, il le revêtit de formes vulgaires, et, selon les circonstances et les impressions qu'il avait à produire, il lui

prêta des sensations, des actions et un langage ressemblant à ceux du commun des mortels.

« Pour qu'un peuple naissant pùt goûter les saines maximes de la politique, a dit JeanJacques, il faudrait que l'esprit social, qui doit être l'ouvrage de l'institution, présidât à l'institution même, et que les hommes fussent, avant les lois, ce qu'ils doivent devenir par elles. Voilà ce qui força de tout temps les pères des nations à recourir à l'intervention du Ciel...

pour entraîner par l'autorité divine ceux que ne pourrait ébranler la prudence humaine. Mais il n'appartient pas à tout homme de faire parler les dieux... La grande âme du législateur est le vrai miracle qui doit prouver sa mission 34. >>

<< N'avons-nous pas déjà vu, s'écriait vers le milieu du douzième siècle le plus savant des docteurs juifs dont je dirai bientôt le nom, que notre Dieu n'a aucune forme connue? Mais vous répondez aussitôt : A quoi bon alors ces expressions de la loi qui nous parle de choses placées sous ses pieds, de choses écrites par son doigt, des mains de Dieu, 'de ses yeux, de ses oreilles? Tout cela a pour but de se faire comprendre aux hommes. Ce sont des métaphores, des allégories, des paraboles. Etcroyez-vous, par exemple, que cette menace, Si j'aiguise ma redoutable épée, soit littérale? non. Les uns ont aperçu Dieu vêtu

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