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et que les hommes plus positifs qui se tromperent sur les véritables besoins des peuples et de l'humanité, imaginèrent une mythologie incohérente qui donna la plus fàcheuse direction aux esprits.

En même temps les passions individuelles obtinrent une part immense dans ces combinaisons. Les hommes capables de se livrer aux idées spéculatives ou à la recherche des besoins privés et publics sont toujours en petit nombre. Ils se réunirent, ils firent corps, et bientôt songeant plus à leurs intérêts personnels qu'aux intérêts des masses, ils tirèrent des choses extérieures les conséquences les plus favorables à euxmêmes, ils réglèrent leur mythologie selon leurs propres désirs.* Voilà de quelle manière. l'Inde et l'Égypte, sans marcher absolument dans le même sentier, atteignirent le même but, qui est le point de fait; savoir : l'établissement des castes privilégiées qui, se croyant d'une nature supérieure, s'approprièrent les pro

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'Il est probable que cet ordre de choses fut préparé par l'établissement de quelques tribus victorieuses, au milieu des peuples qu'elles avaient subjugués, comme cela est arrivé dans le premier âge des États modernes. Tout porte à croire que les Éthiopiens furent les premiers dominateurs de l'Égypte. L'histoire des hommes offre toujours plusieurs causes qui les poussent vers le même but ou qui les en écartent. Je fais ici ressortir celle qui dépend du développement même de l'intelligence, et qui ́est la plus importante pour mon sujet.

grès intellectuels, le monopole des croyances, et ne négligèrent rien pour confirmer et pour étendre leur pouvoir.

Alors tout ce que la mythologie primitive renfermait de philosophie s'effaça devant l'avantage politique qu'ils en retiraient; alors à des intentions pures, mais mal appliquées, succédèrent des intentions perfides suivies avec art. L'ignorance et la superstition des peuples furent mises en système. L'idolâtrie régna dans toute sa laideur : la foule prosternée devant les créatures les plus abjectes, se traîna dans la fange; elle immola son semblable à des dieux immondes; elle n'oublia rien de ce qui pouvait être imaginé de plus puéril et de plus extravagant.

Dans cette confusion déplorable, un homme apparut soudain, qui, fort de la sagesse des temps anciens et de l'énergie de sa pensée, renversa, d'un seul coup, tout cet appareil dégradant; qui ramena toutes les idées spéculatives à un seul principe sublime de simplicité; qui reconnut le salut du peuple pour suprême loi ; qui imprima enfin une nouvelle impulsion à l'espèce, et posa sur ses œuvres un sceau indestructible. C'est

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Moïse: lors même qu'il aurait payé un tribut inévitable aux mœurs de son siècle, en serait-il moins prodigieux?

Mais avant de parler de sa naissance et des

événemens qui nous conduisent au temps où il commença à dicter ses lois, exposons les principes de la constitution égyptienne, à l'aide des documens les plus anciens. Je ne garantis pas la rigoureuse exactitude des détails; l'esprit général en est incontestable. Elle confirmera ce que j'ai dit de l'ambition des hautes castes de l'Orient pour un pouvoir avec lequel elles s'emparaient, au nom de l'intelligence et du ciel, des jouissances de la terre : elle indiquera les principaux motifs de la première caste de l'Égypte, lorsqu'elle regarda comme un souverain bien les superstitions et la séquestration des castes inférieures : elle montrera enfin des points de ressemblance si frappans avec certaines époques des plus rapprochées de nous, que je serai forcé de m'écrier encore : qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil.

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L'Égypte fut soumise à une monarchie théocratique, c'est-à-dire, à un gouvernement dans lequel les lois venaient des dieux, et dans lequel la faculté de faire parler les dieux et d'interpréter leurs volontés était dévolue à une caste particulière qui comptait dans son sein le roi, soit qu'il en fût membre-né, soit qu'il y fût entré par adoption. Un prêtre égyptien qui vivait dans le troisième siècle, avant l'ère vulgaire, sous Ptolémée-Philadelphe, et qui doit

en grande partie à un historien juif la conservation de sa mémoire, de même qu'à un savant Français, sa réhabilitation complète, comme écrivain fidèle, Manéthon de Sebennytus, nous apprend qu'elle comptait trente dynasties de rois dont le premier s'appelait Mènes, et qui remontent à plus de cinq mille ans avant Alexandre. Certaines chroniques égyptiennes portaient leur antiquité à trente-six mille ans, y compris l'âge des dieux et des demi-dieux : mais c'est aux recherches déjà si heureuses du philologue dont j'ai parlé, et à l'esprit d'investigation avec lequel il a pénétré le langage des monumens, qu'il appartient de dissiper toute l'obscurité qui a couvert jusqu'à nos jours cette chronologie.

Trois castes principales divisaient l'État : l'une s'était réservé de représenter l'intelligence; je continuerai à lui donner le nom de sacerdotale, sous lequel on l'a toujours désignée, sans ajouter à ce mot l'idée que tous ses membres exerçassent la prêtrise, mais parce que cette attribution, et la faculté de faire parler les dieux, formaient son caractère essentiel, son lien le plus puissant. La seconde, ou la caste militaire, représentait la force. Le peuple ou le vulgaire, qui composait la troisième, trouvait dans la matière son analogue. Combien

cette division par castes fut chère aussi aux dominateurs de l'Inde! Au premier rang brillait la caste sacerdotale des Bramines, qui, émanée du cerveau de Brama, l'emportait par essence sur toutes les autres.

Dans les changemens de dynastie, qui n'étaient pas la suite forcée des invasions étrangères, le nouveau roi sortait du sein de la première classe, ou du sein des guerriers 5.

Le peuple ne participait en rien à cette élection, et les suffrages n'avaient pas une égale valeur chez les deux classes privilégiées. Les prêtres, ou sages, inférieurs en nombre, avaient balancé ce désavantage en opposant leur qualité de sorte que le suffrage d'un prêtre, ou sage de première classe, équivalait aux suffrages de cent guerriers; d'un prêtre, ou sage de seconde classe, à ceux de vingt; et d'un prêtre, ou sage de troisième classe, aux suffrages de dix. Au cas, enfin, où l'élection restait incertaine, l'oracle, rendu par les prêtres eux-mêmes, en décidait".

S'il arrivait que le roi fût tiré du sein des guerriers, les prêtres s'empressaient de l'initier à leurs mystères et de l'agréger au corps sacerdotal'; ensuite ils s'efforçaient de le tenir sous leur dépendance immédiate jusque dans les choses du moindre intérêts.

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