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et l'abbé de Fénelon fit bientôt connoître que son nom seroit aussi un titre de gloire pour le siècle de Louis XIV.

Il entroit avec d'autant plus de satisfaction dans cette nouvelle carrière, qu'elle le ramenoit indirectement à ses premières pensées et à ses premiers vœux pour les missions. Elle ne lui présentoit pas sans doute des travaux aussi étendus, des dangers aussi glorieux, ni des sacrifices aussi pénibles: mais elle avoit aussi ses difficultés. Il est souvent plus difficile de triompher de l'erreur que de l'idolâtrie, et de détruire des opinions: adoptées comme plus pures et plus sévères, que des superstitions extravagantes, qui ne peuvent ni séduire l'esprit, ni satisfaire l'amour-propre.

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L'abbé de Fénelon montra dans son nouvel emploi le mérite si rare et si nécessaire de donner toujours à l'instruction cette forme simple, claire, précise, qui la met à portée de tous les esprits, en la variant selon le degré de leur intelligence. Il y réunissoit le don précieux de faire aimer la vertu par ce langage sensible et pénétrant qui parle à l'ame avant d'arriver à la raison, et qui dispose à cette sorte de confiance, dont on ne peut jamais se défendre pour celui qui a commencé par nous convaincre de sa vertu, de sa bonne foi et de son intérêt pour notre bonheur.

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La

La seule distraction que l'abbé de Fénelon se permît de mêler à des occupations, qui paroîtroient aujourd'hui si rebutantes pour un homme de son âge, étoit d'entretenir avec M. Tronson cette correspondance de piété qu'il avoit appris à goûter sous sa direction, et de cultiver avec assiduité les bontés de son oncle, qui étoit pour lui un second directeur.

Le marquis de Fénelon avoit un grand nombre d'amis, auxquels il fit connoître son jeune neveu. Parmi ces hommes distingués qui faisoient profession d'aimer et d'estimer le marquis de Fénelon, et qui vivoient avec lui d'une manière plus intime, on remarquoit le duc de Beauvilliers, déjà prévenu en faveur de l'abbé de Fénelon, sur les témoignages de M. Tronson. On y remarquoit aussi le célèbre Bossuet qui fut frappé, dès les premiers lie avec Bosmomens, du mérite extraordinaire qu'annonçoit suet. ce jeune ecclésiastique.

Son oncle l'avoit également présenté à M. de Harlai, archevêque de Paris, qui jouissoit alors d'un grand crédit à la Cour, et qui réunissoit à un extérieur agréable et noble de grands talens pour l'administration, et une heureuse facilité de s'exprimer avec autant de grâce que de dignité. Il présida pendant trente-cinq ans les assemblées du clergé, et il sut toujours les diriger d'une maFENELON. Tom. 1.

4

XVIII.

Fénelon se

nière aussi convenable pour le clergé, que conforme aux vues du gouvernement. M. de Harlai accueillit l'abbé de Fénelon avec une bienveillance particulière; il lui prodigua tous ces témoignages de goût, de confiance et de bonne volonté, qui étoient dans l'habitude de son caractère et de ses manières, et auxquels un grand usage du monde et de la Cour prêtoit la séduction la plus flatteuse pour un jeune homme encore étranger au monde et aux affaires.

Mais M. de Harlai vit avec peine l'abbé de Fénelon s'attacher avec une prédilection marquée à Bossuet, que sa grande réputation et sa qualité de précepteur du Dauphin présentoient déjà à l'archevêque de Paris comme un concurrent redoutable à la Cour et dans les affaires du clergé. Blessé d'une préférence aussi sensible, M. de Harlai ne fut pas assez maître de lui-même, pour ne pas laisser apercevoir à Fénelon combien il en étoit affecté. Peut-être aussi s'imagina-t-il que des considérations d'un autre genre empêchoient Fénelon de le cultiver avec tout l'empressement qu'il avoit attendu de lui.

Quoi qu'il en soit, Fénelon ne se présentoit à l'archevêché que très-rarement, et dans les seules circonstances où le respect et la bienséance lui en faisoient un devoir. Ce fut dans une de ces

occasions, que M. de Harlai lui dit d'un ton de reproche, où il entroit plus d'amertume que de bienveillance: M. l'abbé, vous voulez être oublié, vous le serez.

Rien n'est peut-être plus propre à donner une juste idée de la sagesse de caractère et du jugement prématurée de Fénelon, que cette vénération filiale qu'il montroit pour un évêque, dont le génie, les talens et les vastes connoissances commandoient sans doute l'admiration, mais dont l'austérité de principes et de mœurs pouvoit effrayer un jeune homme à peine admis à sa familiarité. Fénelon fut entraîné rapidement par un sentiment irrésistible vers ce grand homme dont les vertus, les leçons et les exemples lui rappeloient les Pères des premiers siècles du christianisme; chaque jour lui acquit de nouveaux droits à l'estime et à la confiance de Bossuet, qui vit avec satisfaction s'élever sous ses yeux un jeune ecclésiastique, qui promettoit déjà tout ce qu'il fut dans la suite. Malgré ses grandes occupations, il se chargea de le diriger dans la carrière qui s'ouvroit devant lui, et dans laquelle il est si facile de s'égarer, ou du moins de perdre un temps précieux, lorsqu'on n'est pas conduit par une main habile et exercée. Bossuet y mit une complaisance et un intérêt qui indiquent le sentiment

XIX.

L'évêque de

Sarlat rési

de goût et d'estime qu'il avoit pris pour son jeune élève. Il se montroit toujours disposé à l'accueillir, à répondre à tous ses doutes, et à lui ouvrir tous ces trésors de science que son vaste génie et de longs travaux l'avoient mis à portée d'acquérir.

Cette liaison subsista pendant un très-grand nombre d'années avec la même intimité. Nous en retrouverons fréquemment des témoignages jusqu'à l'époque affligeante qui mit en opposition de sentimens ces deux grands hommes; mais nous aurons occasion d'observer que, même dans leurs discussions les plus animées, ils ne cessèrent jamais d'avoir l'un pour l'autre une estime mutuelle, fondée sur l'opinion qu'ils avoient de leur vertu et de leur sincère attachement à l'Eglise et à la religion.

Fénelon fut obligé, en 1681, de suspendre 'momentanément ses fonctions de supérieur des gne à Féne- Nouvelles-Catholiques, pour faire un voyage à lon le prieu- Sarlat. L'évêque de Sarlat, son oncle, venoit de

ré de Care

nac.

lui résigner son prieuré de Carenac, pour l'aider

à se soutenir à Paris. Ce bénéfice, de la valeur de 3 ou 4000 liv. de rente, fut le seul qu'eut Fénelon jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans.

Nous trouvons parmi ses manuscrits une lettre qu'il écrivit en cette occasion à la marquise de Laval, sa cousine. Il lui fait, dans un style plein

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