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1.

de Fénelon à

la Cour.

céder au fracas des conquêtes et aux illusions de

la gloire,

Avec cette brillante perspective devant les Situation yeux, Fénelon jouissoit de tout le bonheur qu'il avoit su réunir autour de lui. Presque tous ses momens étoient remplis par les devoirs de sa place. La société de quelques amis vertueux lui offroit la seule distraction dont son cœur avoit besoin. Une entière conformité de principes et de sentimens religieux l'unissoit intimement à M. de Beauvilliers. Son esprit, ses talens, le charme de sa conversation et l'heureuse séduction de ses manières lui avoient concilié tous les suffrages.

La Cour de Louis XIV, devenue plus sérieuse, conservoit toujours ce bon goût, cette noblesse et cette décence si bien assortis au caractère de l'abbé de Fénelon. L'exemple du monarque, qui se montroit de jour en jour plus religieux et plus régulier dans ses mœurs, donnoit une nouvelle direction à l'opinion publique. La considération et la faveur alloient chercher la vertu; et si elles se trompèrent quelquefois, en se reposant sur ceux qui n'en avoient que l'apparence, elles parurent se fixer avec l'approbation générale sur Fénelon.

Le charme de son caractère avoit entraîné

madame de Maintenon; elle lui montroit une confiance qu'elle n'avoit éprouvée pour personne au même degré. Fénelon avoit été à portée de la voir souvent chez M. de Beauvilliers. Madame de Maintenon, qui avoit autant de tact que d'esprit, ne put être indifférente au mérite d'un homme dont l'imagination brillante et la conversation toujours animée ne s'écartoient jamais de ce bon goût et de cette parfaite raison, dont elle avoit le sentiment et le besoin. On remarque dans quelques-unes de ses lettres les premières traces de l'impression qu'il produisit sur elle; elle écrivoit à madame de Saint-Géran : Votre abbé de Fénelon est fort bien venu ici. Tout le monde ne lui rend pourtant pas justice, et il voudroit étre aimé avec ce qu'il faut pour l'être.

M. de Saint-Simon, qui ne voit jamais les personnages dont il parle, que sous leurs rapports avec le monde, ou avec des intérêts politiques, nous dit que Fénelon possédoit plus que personne le don de plaire; «< qu'il avoit pour cela » des talens faits exprès; une douceur, une insi»nuation, des grâces naturelles qui couloient » de source; un esprit facile, ingénieux, fleuri, >> dont il faisoit toujours un usage convenable à chaque chose et à chaque personne; un abord » facile à tous, une conversation aisée, légère, et

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» toujours décente; un commerce enchanteur; >> une aisance qui en donnoit aux autres; cet air, » ce bon goût, qu'on ne tient que de l'usage de la » meilleure compagnie et du grand monde, qui » se trouvoit répandu de soi-même dans toutes

>> ses conversations ».

Mais madame de Maintenon observoit l'abbé de Fénelon sous des rapports plus sérieux et non moins attachans. Lorsque sa liaison avec lui commençoit à s'établir d'une manière plus suivie, elle écrivoit à madame de Saint-Géran : « J'ai vu en» core aujourd'hui l'abbé de Fénelon. Il a bien » de l'esprit; il a encore plus de piété; c'est juste» ment ce qu'il me faut ».

Ce fut donc la piété de Fénelon, encore plus que son esprit, qui inspira à madame de Maintenon le désir de le voir et de l'entretenir plus habituellement. Elle étoit alors occupée à donner à la maison de Saint-Cyr des réglemens conformes à l'esprit de religion et aux vues de sagesse qu'elle s'étoit proposées dans cet établissement.

Madame de Maintenon avoit autant de modestie que de lumières; elle ne se crut pas capa ble, avec le seul secours de son excellent esprit et de sa droite raison, de donner à Saint-Cyr l'ordre et la régularité qui devoient garantir ce magnifique établissement de toutes les variations, dont

les institutions nouvelles sont encore plus souvent menacées, que celles que le temps et l'expérience ont affermies. Elle réclama les conseils et les instructions de tout ce que l'Eglise de Paris offroit alors de plus vertueux et de plus éclairé. C'étoient des hommes aussi célèbres par leurs connoissances que par leur piété; c'étoient le père Bourdaloue, MM. Tiberge et Brisacier, supérieurs des missions étrangères; M. Joly, supérieur général de SaintLazare; l'abbé Godet-des-Marais, depuis évêque de Chartres. Fénelon fut associé à ces hommes respectables.

On reconnut bientôt que, par la flexibilité de son esprit, il étoit propre à tous les genres d'instruction, et que tout ce qui pouvoit être utile à la religion et au bien public avoit un droit égal à l'activité de son zèle et à l'emploi de ses talens. Par un contraste singulier, on vit le même homme qui élevoit le petit-fils de Louis XIV et préparoit à la France un grand roi, enseigner à des religieuses les vertus humbles et cachées du cloître, et à de jeunes pensionnaires les premiers élémens du christianisme. Il étonnoit par son habileté et son expérience dans la conduite des ames ces hommes vénérables qui avoient blanchi dans l'exercice de ces pénibles et difficiles fonctions. Ses écrits et ses instructions passoient par les

III.

mains de madame de Maintenon, qui y trouvoit chaque jour de nouveaux motifs pour goûter le caractère et les principes de l'abbé de Fénelon. Il réunissoit tout ce qui pouvoit convenir à sa piété et plaire à son goût. Elle voulut peut-être éprouver sa sincérité, en exigeant de lui un service, toujours délicat à demander, toujours difficile à rendre. Elle le pria de lui exposer par écrit les défauts qu'il avoit pu observer en elle, et Fénelon donna à madame de Maintenon le tableau des défauts de madame de Maintenon. L'idée étoit singulière (1): l'exécution en est remarquable. Si madame de Maintenon s'étoit méfiée de sa sincérité, elle dut être rassurée; et la franchise de Fé nelon dut ajouter à son estime et à sa confiance pour lui. Nous n'en rapporterons que les traits les plus saillans; ils suffiront ponr montrer que madame de Maintenon étoit aussi digne d'entendre la vérité, que Fénelon de la lui dire.

« Je ne puis, Madame, vous parler sur vos Madame de » défauts qu'au hasard. Vous n'avez jamais agi de

Maintenon

(1) Madame de Maintenon avoit copié de sa main ces avis de l'abbé de Fénelon; on les trouva après sa mort parmi ses papiers. Madame de Glapion, supérieure de Saint-Cyr, confia cet écrit au maréchal de Villeroi, qui lui répondit : « Je vous >> renvoie le petit livret que vous m'avez confié. Avcuez qu'il » y a un petit mouvement de vanité à faire parler de ses dé>> fauts »>.

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