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Le cocher reprit : Yu-koung-tchi-sse est le plus habile archer du royaume de Wei. Maître, pourquoi 'avez-vous dit que vous aviez la vie sauve?

-Yu-koung-tchi-sse apprit l'art de tirer de l'arc de Yin-koung-tchi-ta. Yin-koung-tchi-ta apprit de moi l'art de tirer de l'arc. Yin-koung-tchi-ta est un homme à principes droits. Celui qu'il a pris pour ami est certainement aussi un homme à principes droits. Yu-koung-tchi-sse l'ayant atteint, lui dit : Maître, pourquoi ne tenez-vous pas votre arc en main?

- Aujourd'hui je me trouve mal; je ne puis tenir

mon arc.

- J'ai appris l'art de tirer de l'arc de Yin-koungtchi-ta; Yin-koung-tchi-ta apprit l'art de tirer de l'arc de vous, maître. Je ne supporte pas l'idée de me servir de l'art et des principes de mon maître au préjudice du sien. Quoiqu'il en soit ainsi, l'affaire que j'ai à suivre aujourd'hui est celle de mon prince; je n'ose pas la négliger. Alors il prit ses flèches, qu'il ficha sur la roue du char, et leur fer se trouvant enlevé, il en lança quatre, et s'en retourna.

25. MENG-TSEU dit: Si la belle Si-tseu s'était couverte d'ordures, alors tous les hommes se seraient éloignés d'elle en se bouchant le nez.

Quoiqu'un homme ait une figure laide et difforme, s'il se purifie et tient son cœur sans souillure, s'il se fait souvent des ablutions, alors il pourra sacrifier au souverain suprême ( Chang-ti).

26. MENG-TSEU dit: Lorsque dans le monde on disserte sur la nature rationnelle de l'homme, on ne doit parler que de ses effets. Ses effets sont ce qu'il y a de plus important dans ces facultés de la raison (qui ne tombent pas sous les sens).

C'est ainsi que nous éprouvons de l'aversion pour un (faux) sage, qui use de captieux détours. Si ce sage agissait naturellement comme Yu en dirigeant les eaux (de la grande inondation), nous n'éprouverions point d'aversion pour sa sagesse. Lorsque Yu dirigeait les grandes eaux, il les dirigeait selon leur cours le plus naturel et le plus facile. Si le sage dirige aussi ses actions selon la voie naturelle de la raison et la nature des choses, alors sa sagesse sera grande aussi.

Quoique le ciel soit très-élevé, que les étoiles soient très-éloignées, si on porte son investigation sur les effets naturels qui en procèdent, on peut calculer ainsi, avec la plus grande facilité, le jour où après mille ans le solstice d'hiver aura lieu.

27. Koung-hang-tseu1 ayant'eu à faire des funérailles à son père en fils pieux, un commandant de la droite du prince fut envoyé près de lui pour assister aux cérémonies funèbres.

Lorsqu'il eut franchi la porte, de nombreuses personnes entrèrent en s'entretenant avec le com

Premier ministre du roi de Thsi.

mandant de la droite du prince. D'autres l'accompaguèrent jusqu'à son siége en s'entretenant aussi avec lui.

MENG-TSEU n'adressa pas la parole au commandant de la droite du prince. Celui-ci en fut mortifié, et il dit: Une foule de personnes distinguées sont venues s'entretenir avec moi qui suis revêtu de la dignité de Houan; MENG-TSEU seul ne m'a point adressé la parole; c'est une marque de mépris qu'il m'a témoignée !

MENG-TSEU ayant entendu ces paroles, dit : On lit dans le Livre des Rites : « Étant à la cour, il ne « faut pas se rendre à son siége en s'entretenant avec « quelqu'un ; il ne faut point sortir des gradins que « l'on occupe pour se saluer mutuellement. » Moi, je ne désirais qu'observer les rites; n'est-il pas étonnant que Tseu-ngao pense que je lui ai témoigné du mépris?

28. MENG-TSEU dit: Ce en quoi l'homme supérieur diffère des autres hommes, c'est qu'il conserve la vertu dans son cœur. L'homme supérieur conserve l'humanité dans son cœur, il y conserve aussi l'urbanité.

L'homme humain aime les hommes; celui qui a de l'urbanité respecte les hommes.

Celui qui aime les hommes est toujours aimé des nommes celui qui respecte les hommes est toujours respecté des hommes.

Je suppose ici un homme qui me traite avec grossièreté et brutalité; alors en homme sage, je dois faire un retour sur moi-même et me demander si je n'ai pas été inhumain, si je n'ai pas manqué d'urbanité : autrement, comment ces choses me seraient-elles arrivées?

Si après avoir fait un retour sur moi-même je trouve que j'ai été humain; si après un nouveau retour sur moi-même je trouve que j'ai eu de l'urbanité; la brutalité et la grossièreté dont j'ai été l'objet existant toujours, en homme sage, je dois de nouveau descendre en moi-même et me demander si je n'ai pas manqué de droiture?

Si après cet examen intérieur je trouve que je n'ai pas manqué de droiture; la grossièreté et la brutalité dont j'ai été l'objet existant toujours, en homme sage, je me dis: Cet homme qui m'a outragé n'est qu'un extravagant, et rien de plus. S'il en est ainsi, en quoi diffère-t-il de la bête brute? Pourquoi donc me tourmenterais-je à propos d'une bête

brute?

C'est pour ce motif que le sage est toute sa vie intérieurement plein de sollicitudes (pour faire le bien), sans qu'une (peine ayant une cause extérieure1) l'affecte pendant la durée d'un matin.

Quant aux sollicitudes intérieures, le sage en éprouve constamment. [Il se dit ]: Chun était un

1 Glose.

homme, je suis aussi un homme; Chun fut un exemple de vertus et de sagesse pour tout l'empire, et il put transmettre ses instructions aux générations futures; moi, je n'ai pas encore cessé d'être un homme de mon village (un homme vulgaire). Ce sont là pour lui de véritables motifs de préoccupations pénibles et de chagrins; il n'aurait plus de sujets d'affliction, s'il était parvenu à ressembler à Chun. Quant aux peines qui ont une cause extérieure, étrangère, le sage n'en éprouve pas. Il ne commet pas d'actes contraires à l'humanité; il ne commet pas d'actes contraires à l'urbanité. Si une peine ayant une cause extérieure l'affectait pendant la durée d'un matin, cela ne serait pas alors une peine pour le sage.

29. Yu et Tsi étant entrés dans l'âge de l'égalité d'âme (dans cet âge de la raison où l'on a pris de l'empire sur ses passions et ses penchants'), ils passèrent trois fois devant leur porte sans y entrer (pour ne pas interrompre les soins qu'ils donnaient à l'intérêt public). KHOUNG-TSEU loua leur conduite dans ces circonstances.

Yan-tseu, dans l'âge des passions turbulentes, habitait une ruelle obscure et déserte, mangeait dans une écuelle de roseaux, et buvait dans une courge. Les hommes n'auraient pu supporter ses privations et ses tristesses. Mais Yan-tseu ne perdit pas son air serein et satisfait. KHOUNG-TSEU loua sa conduite dans cette circonstance.

MENG-TSEU dit: Yu, Tsi et Kan-hoei se conduisirent d'après les mêmes principes.

Yu agissait comme s'il avait pensé que l'empire, étant submergé par les grandes eaux, il avait luimême causé cette submersion. Tsi agissait comme s'il avait pensé que l'empire, épuisé par la famine, il avait lui-même causé cette famine. C'est pourquoi ils éprouvaient une telle sollicitude.

Si Yu, Tsi et Yan-tseu s'étaient trouvés à la place l'un de l'autre, ils auraient agi de même.

Maintenant, je suppose que les personnes de ma maison se querellent ensemble, je m'empresserai de les séparer. Quoique leurs cheveux et les bandes de leurs bonnets soient épars de côté et d'autre, je devrai également m'empresser de les séparer.

Si ce sont les hommes d'un même village ou du voisinage qui se querellent ensemble, ayant les cheveux et les bandelettes de leurs bonnets épars de côté et d'autre, je fermerai les yeux sans aller m'interposer entre eux pour les séparer. Je pourrais même fermer ma porte, sans me soucier de leurs différends.

30. Koung-tou-tseu (disciple de MENG-TSEU) dit: Tout le monde dans le royaume prétend que Khouang-tchang n'a point de piété filiale. Maître,

1 Glose.

• Voyez ci-devant, pag. 186, art.

comme vous avez avec lui des relations fréquentes, que vous êtes avec lui sur un pied de politesse trèsgrande, oserais-je vous demander pourquoi on a une telle opinion de lui?

MENG-TSEU dit : Les vices que, selon les mœurs de notre siècle, on nomme défauts de piété filiale, sont au nombre de cinq. Laisser ses quatre membres s'engourdir dans l'oisiveté, au lieu de pourvoir à l'entretien de son père et de sa mère, est le premier défaut de piété filiale. Aimer à jouer aux échecs', à boire du vin, au lieu de pourvoir à l'entretien de son père et de sa mère, est le second défaut de piété filiale. Convoiter les richesses et le lucre, et se livrer avec excès à la passion de la volupté, au lieu de pourvoir à l'entretien de son père et de sa mère, est le troisième défaut de piété filiale. S'abandonner entièrement aux plaisirs des yeux et des oreilles, en occasionnant à son pere et à sa mère de la honte et de l'ignominie, est le quatrième défaut de piété filiale. Se complaire dans les excès d'une force brutale, dans les rixes et les emportements, en exposant son père et sa mère à toute sorte de dangers, est le cinquième défaut de piété filiale. Tchang-tseu a-t-il un de ces défauts?

Ce Tchang-tseu étant fils, il ne lui convient pas d'exhorter son père à la vertu; ce n'est pas pour lui un devoir de réciprocité.

Ce devoir d'exhorter à la vertu est de règle entre égaux et amis; l'exhortation à la vertu entre le père et le fils, est une des causes qui peuvent le plus altérer l'amitié.

Comment Tchang-tseu peut-il désirer que le mari et la femme, la mère et le fils demeurent ensemble (comme c'est un devoir pour eux)? Parce qu'il a été coupable envers son père, il n'a pu demeurer près de lui; il a renvoyé sa femme, chassé son fils, et il se trouve ainsi jusqu'à la fin de sa vie privé de l'entretien et des aliments qu'il devait en attendre. Tchang-tseu, dans la détermination de sa volonté, ne paraît pas avoir voulu agir comme il a agi (envers sa femme et son fils 2). Mais si après s'être conduit comme il l'a fait (envers son père, il avait en outre accepté l'alimentation de sa femme et de son fils 3), il aurait été des plus coupables. Voilà l'explication de la conduite de Tchang-tseu (qui n'a rien de répréhensible).

31. Lorsque Thseng-tseu habitait dans la ville de Wou-tching, quelqu'un, en apprenant l'approche d'un brigand armé du royaume de Youet, lui dit : Le brigand arrive; pourquoi ne vous sauvez-vous pas? Il répondit (à un de ceux qui étaient préposés à la garde de sa maison 4) : Ne logez personne dans

1 Po-i; on voit par là que ce jeu était déjà beaucoup en usage du temps de MENG-TSEU.

⚫ Glose.

3 Ibid.

Ibid.

ma maison, afin que les plantes et les arbres qui se trouvent dans l'intérieur ne soient pas détruits; et lorsque le brigand se sera retiré, alors remettez en ordre les murs de ma maison, car je reviendrai 'habiter.

Le brigand s'étant retiré, Thseng-tseu retourna à sa demeure. Ses disciples dirent : Puisque le premier magistrat de la ville a si bien traité notre maitre (en lui donnant une habitation ), ce doit être un homme plein de droiture et de déférence! Mais fuir le premier à l'approche du brigand, et donner ainsi un mauvais exemple au peuple, qui pouvait l'imiter; revenir ensuite, après le départ du brigand, ce n'est peut-être pas agir convenablement.

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Elle se leva de grand matin, et suivit secrètement son mari dans les lieux où il se rendait. Il traversa le royaume sans que personne vînt l'accoster et lui parler. Enfin, il se rendit dans le faubourg oriental où, parmi les tombeaux, se trouvait un homme qui offrait le sacrifice des ancêtres, dont il mangea les restes, sans se rassasier. Il alla encore ailleurs avec la même intention. C'était là sa méthode habituelle de satisfaire son appétit.

Chin-yeou-hing (un des disciples de Thseng tseu) dit: C'est ce que vous ne savez pas. Autrefois la famille Ching-yeou ayant eu à souffrir les calamités Sa femme légitime, de retour à la maison, s'ad'une grande' dévastation, des soixante et dix hom- dressant à la concubine, lui dit : Notre mari était mes qui accompagnaient notre maître (Thseng-tseu) l'homme dans lequel nous avions placé toutes nos aucun ne vint l'aider dans ces circonstances difficiles. espérances pour le reste de nos jours, et maintenant Lorsque Tseu-sse habitait dans le royaume de voici ce qu'il a fait. Elle raconta ensuite à la conWei, quelqu'un, en apprenant l'approche d'un bri- cubine ce qu'elle avait vu faire à son mari, et elles gand armé du royaume de Thsi, lui dit : Le brigand pleurèrent ensemble dans le milieu du gynécée. Et arrive; pourquoi ne vous sauvez-vous pas ? le mari, ne sachant pas ce qui s'était passé, revint Tseu-sse répondit : Si moi Ki, je me sauve, qui le visage tout joyeux du dehors se vanter de ses protégera le royaume avec le prince?

MENG-TSEU dit: Thseng-tseu et Tseu-sse eurent les mêmes principes de conduite. Thseng-tseu était précepteur de la sagesse ; il était par conséquent dans les mêmes conditions (de dignité et de sûreté à maintenir) qu'un père et un frère aîné; Tseu-sse était magistrat ou fonctionnaire public; il était par conséquent dans une condition bien inférieure (sous ces deux rapports). Si Thseng-tseu et Tseu-sse se fussent trouvés à la place l'un de l'autre, ils auraient agi de même.

32. Tchou-tseu, magistrat du royaume de Thsi, dit: Le roi a envoyé des hommes pour s'informer secrètement si vous différez véritablement, maître, des autres hommes.

MENG-TSEU dit : Si je diffère des autres hommes: Yao et Chun eux-mêmes étaient de la même nature que les autres hommes.

33. [MENG-TSEU] dit : Un homme de Thsi avait une femme légitime et une seconde femme qui habitaient toutes deux dans sa maison.

Toutes les fois que le mari sortait, il ne manquait jamais de se gorger de vin et de viande avant de rentrer au logis. Si sa femme légitime lui demandait qui étaient ceux qui lui avaient donné à boire et à manger, alors il lui répondait que c'étaient des hom

mes riches et nobles.

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bonnes fortunes auprès de sa femme légitime et de sa femme de second rang.

Si le sage médite attentivement sur la conduite de cet homme, il verra par quels moyens les hommes se livrent à la poursuite des richesses, des honneurs, du gain et de l'avancement, et combien ils sont peu nombreux ceux dont les femmes légitimes et de second rang ne rougissent pas et ne se désolent pas de leur conduite.

CHAPITRE III,

COMPOSÉ DE 9 ARTICLES.

1. Wen-tchang (disciple de MENG- TSEU) fit une question en ces termes : « Lorsque Chun se « rendait aux champs (pour les cultiver ), il verrait « des larmes en implorant le ciel miséricordieux. ▪ Pourquoi implorait-il le ciel en versant des larmes?

aimé de ses parents), et il pensait aux moyens de MENG-TSEU dit: Il se plaignait (de ne pas être

l'être.

Wen-tchang dit : Si son père et sa mère l'aimaient, il devait être satisfait, et ne pas oublier leur tendresse. Si son père et sa mère le détestaient, il devait supporter ses chagrins sans se plaindre. S'il en est ainsi, Chun se plaignait donc de ses pa rents?

'Quelques interprètes pensent qu'ici Koué, royaume, siguifie ville.

MENG-TSEU dit: Tchang-si, interrogeant Kong ming-kao, dit: En ce qui concerne ces expressions : Lorsque Chun se rendait aux champs, j'ai entendu là-dessus vos explications; quant à celles-ci, il versait des larmes en implorant le ciel miséricordieux, j'en ignore le sens.

Koung-ming-kao dit: Ce n'est pas une chose que vous puissiez comprendre.

Koung-ming-kao (continua MENG-TSEU) pensait que le cœur d'un fils pieux ne pouvait être ainsi exempt de chagrins. « Pendant que j'épuise mes for◄ces (se disait-il) à cultiver les champs, je ne fais ⚫ que remplir mes devoirs de fils, et rien de plus. Si ⚫ mon père et ma mère ne m'aiment pas, y a-t-il ⚫ de ma faute? D

L'empereur (Yao) lui envoya ses fils, neuf jeunes gens vigoureux, et ses deux filles, et il ordonna à un grand nombre de magistrats ainsi que d'officiers publics de se rendre près de Chun avec des approvisionnements de bœufs, de moutons, et de grains pour son service. Les lettrés de l'empire en trèsgrand nombre se rendirent près de lui.

L'empereur voulut en faire son ministre et lui transmettre l'empire. Ne recevant aucune marque de déférence ( ou de soumission au bien) de ses père et mère, il était comme un homme privé de tout, qui ne sait où se réfugier.

Causer de la joie et de la satisfaction aux hommes dont l'intelligence est la plus éclairée dans l'empire, c'est ce que l'on désire le plus vivement, et cependant cela ne suffisait pas pour dissiper les chagrins (de Chun). L'amour d'une jeune et belle femme est ce que les hommes désirent ardemment; Chun reçut pour femmes les deux filles de l'empereur, et cependant cela ne suffisait pas pour dissiper ses chagrins. Les richesses sont aussi ce que les hommes désirent vivement; en fait de richesses, il eut l'empire en possession, et cependant cela ne suffisait pas pour dissiper ses chagrins. Les honneurs sont ce que les hommes désirent ardemment; en fait d'honneurs, il fut revêtu de la dignité de fils du ciel (ou d'empereur), et cependant cela ne suffisait pas pour dissiper ses chagrins. Le sentiment de causer de la satisfaction et de la joie aux hommes de l'empire dont l'intelligence est la plus éclairée, l'amour de jeunes et belles femmes, les richesses et les honneurs, ne suffisaient pas pour dissiper les chagrins de Chun. Il n'y avait que la déférence de ses père et mère à ses bons conseils qui auraient pu dissiper ses chagrins.

L'homme, lorsqu'il est jeune, chérit son père et sa mère. Quand il sent naître en lui le sentiment de l'amour, alors il aime une jeune et belle adolescente; quand il a une femme et des enfants, alors il aime sa femme et ses enfants; quand il occupe un emploi public, alors il aime le prince. Si (dans ce dernier cas)

il n'obtient pas la faveur du prince, alors il en éprouve une vive inquiétude.

Celui qui a une grande piété filiale, aime jusqu'à son dernier jour son père et sa mère. Jusqu'à cinquante ans, chérir (son père et sa mère) est un sentiment de piété filiale que j'ai observé dans le grand Chun.

2. Wen-tchang continua ses questions:
Le Livre des Vers dit :

a

Quand un homme veut prendre une femme, « que doit-il faire ?

« Il doit consulter son père et sa mère. ▾

Personne ne pouvait pratiquer plus fidèlement ces paroles que Chun. Chun cependant ne consulta pas ses parents avant de se marier. Pourquoi cela?

MENG-TSEU répondit: S'il les avait consultés, il n'aurait pas pu se marier. La cohabitation ou l'union sous le même toit, de l'homme et de la femme, est le devoir le plus important de l'homme. S'il avait consulté ses parents, il n'aurait pas pu remplir ce devoir, le plus important de l'homme, et par là il aurait provoqué la haine de son père et de sa mère C'est pourquoi il ne les consulta pas.

Wen-tchang continua : J'ai été assez heureux pour obtenir de vous d'être parfaitement instruit des motifs qui empêchèrent Chun de consulter ses parents

avant de se marier; maintenant comment se fit-il

que l'empereur ne consulta pas également les pa

rents de Chun avant de lui donner ses deux filles

en mariage?

MENG-TSEU dit: L'empereur savait aussi que s'il les avait consultés, il n'aurait pas obtenu leur consentement au mariage.

Wen-tchang poursuivit : Le père et la mère de Chun lui ayant ordonné de construire une grange à blé, après avoir enlevé les échelles, Kou-seou (son père) y mit le feu. Ils lui ordonnèrent ensuite de creuser un puits, d'où il ne se fut pas plutôt échappé (par une ouverture latérale qu'il s'était ménagée 3), qu'ils le comblèrent.

«

Siang 4 dit : « C'est moi qui ai suggéré le dessein « d'engloutir le prince de la résidence impériale (Chun); j'en réclame tout le mérite. Ses bœufs et « ses moutons appartiennent à mon père et à ma mère; ses granges et ses grains appartiennent à « mon père et à ma mère ; son bouclier et sa lance, à << moi; sa guitare, à moi; son arc ciselé, à moi: à ses << deux femmes j'ordonnerai d'orner ma couche.

Siang s'étant rendu à la demeure de Chun (pour s'emparer de ce qui s'y trouvait, le croyant englouti), il trouva Chun assis sur son lit et jouant de la guitare.

1 Ode Nan-chan, section Koué-foung.

2 Parce qu'il n'aurait pas obtenu leur essentiment, et qu'il n'aurait pas voulu leur désobéir.

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a

R

Siang dit « J'étais tellement inquiet de mon prince, que je pouvais à peine respirer; » et son visage se couvrit de rougeur. Chun lui dit : «Veuillez, je vous prie, diriger en mon nom cette foule de « magistrats et d'officiers publics. » Je ne sais pas si Chun ignorait que Siang avait voulu le faire mourir. MENG-TSEU dit: Comment l'aurait-il ignoré? I lui suffisait que Siang éprouvât de la peine pour en éprouver aussi, et qu'il éprouvât de la joie pour en éprouver aussi.

Wen-tchang répliqua : S'il en est ainsi, Chun aurait donc simulé une joie qu'il n'avait pas? Aucunement. Autrefois des poissons vivants furent offerts en don à Tseu-tchan, du royaume de Tching. Tseu-tchan ordonna que les gardiens du vivier les entretinssent dans l'eau du lac. Mais les gardiens du vivier les firent cuire pour les manger. Étant venus rendre compte de l'ordre qui leur avait été donné, ils dirent : Quand nous avons commencé à mettre ces poissons en liberté, ils étaient engourdis et immobiles; peu à peu ils se sont ranimés et ont repris de l'agilité; enfin ils se sont échappés avec beaucoup de joie. Tseu-tchan dit: Ils ont obtenu leur destination!

ils ont obtenu leur destination!

Lorsque les gardiens du vivier furent partis, ils se dirent entre eux : Qui donc disait que Tseu-tchan était un homme pénétrant? Après que nous avons eu fait cuire et mangé ses poissons, il dit : Ils ont ob

tenu leur destination! Ils ont obtenu leur destination! Ainsi donc le sage peut être trompé dans les choses vraisemblables; il peut être difficilement trompé dans les choses invraisemblables ou qui ne sont pas conformes à la raison. Siang, étant venu près de Chun avec toutes les apparences d'un vifsentiment de tendresse pour son frère aîné, celui-ci y ajouta une entière confiance et s'en réjouit. Pourquoi aurait-il eu de la dissimulation?

3. Wen-tchang fit cette nouvelle question: Siang ne pensait chaque jour qu'aux moyens de faire mourir Chun. Lorsque Chun fut établi fils du ciel (ou empereur), il l'exila loin de lui; pourquoi cela? MENG-TSEU dit : 11 en fit un prince vassal. Quelques-uns dirent qu'il l'avait exilé loin de lui.

Wen-tchang dit: Chun exila le président des travaux publics (Koung-kong) à Yeou-tcheou; il relégua Houan-teou à Tsoung-chan; il fit périr (le roi des) San-miao à San-weï; il déporta Kouan à Yu-chan. Ces quatre personnages étant châtiés, tout l'empire se soumit, en voyant les méchants punis. Siang était un homme très-méchant, de la plus grande inhumanité; pour qu'il fût établi prince vassal de la terre de Yeou-pi; il fallait que les hommes de Yeou-pi fussent eux-mêmes bien criminels? L'homme qui serait véritablement humain, agiraitil ainsi ? En ce qui concerne les autres personnages (coupables), Chun les punit; en ce qui concerne son frère cadet, il le fit prince vassal!

MENG-TSEU repondit : L'homme humain ne garde point de ressentiments envers son frère; il ne nourrit point de haine contre lui. Il l'aime, le chérit comme un frère; et voilà tout.

Par cela même qu'il l'aime, il désire qu'il soit élevé aux honneurs; par cela même qu'il le chérit, il désire qu'il ait des richesses. Chun, en établissant son frère prince vassal des Yeou-pi, l'éleva aux honneurs et l'enrichit. Si pendant qu'il était empereur son frère cadet fût resté homme privé, auraiton pu dire qu'il l'avait aimé et chéri?

Oserais-je me permettre de vous faire encore une question. dit Wen-tchang? « Quelques-uns di« rent qu'il l'avait exilé loin de lui. » Que signifient ces paroles?

MENG-TSEU dit: Siang ne pouvait pas posséder la puissance souveraine dans son royaume. Le fils du ciel (l'empereur) fit administrer ce royaume par un délégué, et c'est de celui-ci dont il exigeait les tributs. C'est pourquoi on dit que son frère (ainsi privé d'autorité) avait été exilé. Comment Siang aurait-il pu opprimer le peuple de ce royaume (dont il n'était que le prince nominal)? Quoique les choses fussent ainsi, Chun désirait le voir souvent; c'est pourquoi Siang allait le voir à chaque instant. Chun n'attendait pas l'époque où l'on apportait les tributs, ni celle où l'on rendait compte des affaires administratives pour recevoir le prince vassal des Yeou-pi. Voilà ce que signifient les paroles que vous avez citées.

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lui fit une question en ces termes : Un ancien pro4. Hian-khieou-ming (disciple de MENG-TSEU) verbe dit : « Les lettrés (quelque) éminents et doués « de vertus qu'ils soient, ne peuvent pas faire d'un prince un sujet, et d'un père, un fils (en attribuant a la supériorité au seul mérite). » Cependant, lorsque Chum se tenait la face tournée vers le midi (c'estde l'empire), Yao, à la tête des princes vassaux, à-dire, présidait solennellement à l'administration la Kou-seou, aussi la face tournée vers le nord, lui renface tournée vers le nord, lui rendait hommage; laissait voir sur son visage l'embarras qu'il éprou dait hommage. Chun, en voyant son père Kou-seou, vait. KHOUNG-TSEU disait à ce propos: «En ce temps-là, l'empire était dans un danger imminent; << il était bien près de sa ruine. » Je ne sais si ces paroles sont véritables.

«

MENG-TSEU dit: Elles ne le sont aucunement. Ces

paroles n'appartiennent point à l'homme éminent auquel elles sont attribuées. C'est le langage d'un homme grossier des contrées orientales du royaume de Thsi.

Yao étant devenu vieux, Chun prit en main l'administration de l'empire. Le Yao-tian1 dit : « Lorsque après vingt-huit ans (de l'administration de Chun)

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Chapitre du Chou-king Voyez ci-devant, pag. 4b.

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