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tout ce qu'il est, et obéir selon tout ce qu'ilest, et qu'ensuite on se souvient que ces deux actes également parfaits de la puissance suprême ont pour objet la régénération de l'homme déchu, l'esprit s'abîme dans ces merveilles, et il adore en silence la justice, la sainteté, l'amour, qui éclatent dans la Rédemption.

Mais il ne suffit pas de l'admirer pour en recueillir le fruit, il est nécessaire que l'homme concoure à son propre salut par une obéissance libre, semblable à celle de Jésus-Christ, et par une pleine conformité de sa volonté à la volonté divine. « Tous ceux qui me disent: Seigneur, Seigneur, n'entreront pas dans le royaume des cieux; mais celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans le ciel, celui-là entrera dans le royaume des cieux (1). Chacun de nous doit accomplir en soi le sacrifice du Rédempteur : sa grâce nous en donne la force; et, uni au sien, notre sacrifice devient digne du Dieu à qui nous l'offrons, et à qui le Christ lui-même l'offrira éternellement.

Et pour entendre en quoi consiste ce sacrifice de nous-mêmes que nous devons à Dieu, considérons celui de son Fils. Par là nous apprendrons encore mieux quelle expiation exigeoit le péché, et ce que le Sauveur a fait pour réparer la nature humaine.

L'homme tomba premièrement par l'orgueil : il voulut s'égaler à Dieu, et, chose remarquable, ce

(1) Non omnis qui dicit mihi, Domine, Domine, intrabit in regnum cœlorum; sed qui facit voluntatem Patris mei qui in cœlis est, ipse intrabit in regnum cœlorum. Matth., VII, 21.

désir si stupide et si criminel est resté au fond de son cœur, et il se manifeste de nouveau toutes les fois que l'homme cesse de reconnoître une loi supérieure à sa raison; et nous l'avons vu, après dix-huit siècles de christianisme, séduit encore par cette parole: Vous serez comme des dieux, proclamer sa divinité, se consacrer des autels, et, à la face des cieux qui racontent la gloire du Très-Haut, lui disputer l'empire, et s'adorer lui-même.

La perfection de l'humilité expiera l'excès de l'orgueil. Par un abaissement incompréhensible, le Verbe divin descendra jusqu'à nous, il se revêtira de notre chair mortelle et de toutes nos misères, il se fera homme pour effacer le péché de l'homme qui voulut se faire Dieu; et par cet ineffable anéantissement, qui forme l'essence du sacrifice volontaire, non seulement il satisfera pleinement à la justice divine, ce qui étoit évidemment au-dessus du pouvoir de l'homme, mais encore il confondra l'orgueil même du prince de l'enfer, en montrant que ce que sa haine jugeoit impossible, l'amour infini peut l'effectuer. L'ange rebelle avoit vaincu l'homme en le flattant d'être Dieu, et l'esprit séducteur sera lui-même vaincu, et l'homme sera sauvé par l'homme-Dieu.

Tout ce qui blesse l'orgueil, Jésus-Christ a voulu l'éprouver. Roi par le droit de sa naissance, il s'est réduit à la plus humble condition. N'est-ce pas là, disoient les Juifs, le fils du charpentier (1)? Il partage,

(1) Nonne hic est fabri filius? Matth., XIII, 55.

en venant au monde, la demeure des animaux, parce qu'il n'y avoit point de place pour ses parens dans l'hô– tellerie (1). Une crèche, un peu de paille, quelques langes, voilà les richesses, voilà la pompe du libérateur des hommes. Pendant trente ans il vit du travail de ses mains dans une obscurité profonde. Il en sort pour exercer la charge du Messie, pour prêcher la pénitence et annoncer le salut au peuple ; et son dénûment croît à mesure que ses fonctions s'élèvent. Les renards ont leur tanière, et les oiseaux du ciel leur nid; mais le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête (2). Pauvre jusqu'à la fin, il reçoit tout de la charité, et le pain qui le nourrit, et les vêtemens qui le couvrent, et le linceul dans lequel on l'ensevelit.

Il se soumet encore à une humiliation plus grande : lui qui est le Saint par excellence, lui qui doit écraser la tête du serpent, il souffre que le démon le tente, afin d'être en tout semblable à ses frères (3). O Jésus! c'en est trop, arrêtez-vous: notre orgueil n'est-il donc pas assez expié, assez confondu? Non : tant qu'il restera quelque opprobre à subir, l'homme-Dieu ne sera pas satisfait; il manquera quelque chose à la plénitude de son sacrifice. Il faut qu'il recueille, pour

(1) Quia non erat eis locus in diversorio. Luc., II, 7. (2) Vulpes foveas habent, et volucres cœli nidos: Filius autem hominis non habet ubi caput reclinet. Matth., VIII, 20.

(3) Debuit per omnia fratribus similari, ut misericors fieret..... In eo enim, in quo passus est ipse et tentatus, potens est eis, qui tentantur, auxiliari... Tentatum autem per omnia pro similitudine absque peccato. Ep. ad Hebr., II, 17, 18; et IV, 16.

prix de son amour, le mépris et la calomnie; il faut qu'on le représente comme un séducteur (1), comme un homme de bonne chère et qui aime le vin (2), comme un ministre de Béelzebub (3); il faut qu'il soit livré à l'insulte, à la dérision, traité comme un insensé (4), moqué, outragé, maudit par la populace, et enfin qu'il meure du supplice des scélérats, au milieu des railleries et des exécrations d'un peuple entier.

Le sacrifice est-il complet? de la droite du Père au sommet du Golgotha, la distance est-elle assez grande, et le Fils de Dieu a-t-il assez descendu? Vous qu'il racheta par son abaissement, apprenez à vous abaisser à son exemple; car cette étonnante expiation est aussi un modèle qui vous est offert, et une leçon qui vous est donnée. « Ayez en vous, nous dit l'apôtre, les sentimens qui ont été ceux de JésusChrist, qui, égal à Dieu, s'est anéanti lui-même en prenant la forme d'un esclave, en se rendant semblable aux hommes, et se faisant reconnoître pour homme, par ce qui a paru de lui au dehors. Il s'est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu'à la mort, et la mort de la croix. C'est pourquoi Dieu l'a élevé, et lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans le ciel, sur la terre et dans les enfers, et que

(1) Joan., VII, 12.

(2) Homo vorator et potator vini. Matth., XI, 19.

(3) Ibid., XII, 24.

(4) Luc., XXIII, 11.

toute langue confesse que le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de Dieu le Père (1). »

Il n'y a point à hésiter : l'immolation de l'orgueil est le premier acte de la vie chrétienne, le fondement de notre régénération; et l'homme ne commence à se retrouver qu'en prononçant en lui-même qu'il n'est rien. Cet intime anéantissement, qui renferme une pleine reconnoissance de la souveraineté du seul Être existant par lui-même, est l'état naturel de toute créature devant Dieu, et plus encore celui d'une créature déchue; là seulement elle est dans l'ordre. Plus elle s'abaisse, plus elle se rapproche de la perfection de l'homme-Dieu, plus elle se rend digne d'entrer comme lui dans la gloire du Père; «< car celui qui s'élève sera humilié, et celui qui s'humilie sera élevé (2). » Et maintenant plaignez-vous d'être abject aux yeux du monde, plaignez-vous du mépris, du dédain, de l'opprobre; plaignez-vous de votre grandeur!

L'orgueil avoit rompu la société entre l'homme et Dieu; le sacrifice de nous-mêmes la rétablit : il nous replace au rang de ses sujets, nous redevenons ses

(1) Hoc sentite in vobis, quod et in Christo Jesu, qui cùm in formâ Dei esset, non rapinam arbitratus est esse se æqualem Deo : sed semetipsum exinanivit formam servi accipiens, in similitudinem hominum factus, et habitu inventus ut homo. Humiliavit semetipsum factus obediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus exaltavit illum, et donavit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nomine Jesu omne genu flectatur cœlestium, terrestrium, et infernorum; et omnis lingua confiteatur, quia Dominus Jesus-Christus in gloriâ est Dei Patris. Ep. ad Philipp., II, 5-10.

(2) Qui autem se exaltaverit, humiliabitur ; et qui se humiliaverit, exaltabitur. Matth., XXIII, 12.

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