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CHAPITRE XXXV.

Jésus-Christ.

Pour connoître Jésus-Christ selon tout ce qu'il est, il faut s'élever au-dessus du temps, et pénétrer avec l'apôtre jusque dans le sein de l'Être infini.

<< Au commencement le Verbe étoit, et le Verbe étoit en Dieu, et le Verbe étoit Dieu. Il étoit en Dieu au commencement. Tout a été fait par lui, et rien de ce qui a été fait n'a été fait sans lui. En lui étoit la vie, et la vie étoit la lumière des hommes. Il étoit la vraie lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde. Et le Verbe s'est fait chair, et il a habité parmi nous; et nous avons vu sa gloire, la gloire du Fils unique du Père, plein de grâce et de vérité (1). »

Il suffit tout est révélé ; nous savons ce qu'est le Christ. Il est le Verbe de Dieu, son Fils unique engendré de toute éternité, et qui, en demeurant ce qu'il ne peut jamais cesser d'être, a daigné prendre

(1) In principio erat Verbum, et Verbum erat apud Deum. Hoc erat in principio apud Deum. Omnia per ipsum facta sunt, et sine ipso factum est nibil quod factum est; in ipso vita erat, et vita erat lux hominum... Erat lux vera quæ illuminat omnem hominem venientem in hunc mundum... Et Verbum caro factum est, et habitavit in nobis et vidimus gloriam ejus, gloriam quasi unigeniti à Patre, plenum gratiæ et veritatis. Joan., I, 1 seqq.

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notre nature et se revêtir de notre chair mortelle : et le Verbe s'est fait chair, et il a habité parmi nous. II réunit donc en lui-même et la nature divine et la nature humaine; et ces deux natures, toujours distinctes, ne forment qu'une seule personne, Jésus-Christ, le Dieu-homme qui étoit l'attente des nations (1). Elles ne l'ont point attendu en vain : il a paru aux jours marqués, et nous avons vu sa gloire, la gloire du Fils unique du Père, plein de grâce et de vérité. Étonnant mystère sans doute, et mystère néanmoins si analogue à nos besoins, à notre raison, si croyable enfin, qu'il a été perpétuellement cru depuis l'origine des siècles.

Mais quel but le Verbe divin s'est-il proposé en s'incarnant? quels secrets desseins l'ont porté à s'unir à notre nature? Pourquoi l'homme-Dieu, pourquoi Jésus-Christ? Qu'est-il venu faire ici-bas? Il est venu, dit saint Paul, régénérer toutes choses dans les cieux et sur la terre (2): telle est sa mission. La trouvez-vous assez grande? est-elle digne de celui par qui tout a été fait, et qui seul pouvoit tout régénérer ?

Ces paroles de l'apôtre répondent suffisamment aux questions que l'homme peut former sur l'objet de l'incarnation du Verbe ; mais elles y répondent sans satisfaire pleinement sa curiosité, parce que Dieu, qui

(1) Ipse erit exspectatio gentium. Genes., XLIX, 10.

(2) Instaurare omnia in Christo, quæ in cœlis, et quæ in terrâ sunt in ipso (Ep. ad Ephes., I, 10). Et per eum reconciliare omnia in ipsum, pacificans per sanguinem crucis ejus, sive quæ in terris, sive quæ in cœlis sunt. Ep. ad. Coloss., I, 20.

ne lui cache aucune vérité réellement utile, ne s'est pas engagé à satisfaire sa curiosité vaine et insatiable. Qu'on ne nous demande donc point ce que c'est que cette régénération des cieux, dont parle saint Paul : nous l'ignorons entièrement; et que nous importe de le savoir, à nous qui ne sommes encore que de la terre? Nous le saurons un jour, si nous méritons que Dieu nous en instruise. Tout ce qu'il nous est donné de comprendre maintenant, c'est que l'amour divin a éclaté par l'incarnation non seulement dans le monde que nous habitons, mais par-delà tous les mondes, jusque dans les hauteurs les plus sublimes des cieux.

N'étendons point nos désirs sans fin et sans limites; renfermons-nous dans les bornes que nous a prescrites la sagesse suprême nous ne pourrions, en les franchissant, que nous égarer. La régénération de la nature humaine opérée par Jésus-Christ, voilà ce qui nous intéresse immédiatement; et aussi Dieu nous at-il accordé sur ce point toutes les lumières nécessaires : il n'y a point de ténèbres au pied de la croix.

Un crime que l'homme ne pouvoit expier, le séparoit à jamais de son auteur, c'est-à-dire, du souverain bien et de la vérité souveraine. Repoussé dès-lors en lui-même comme dans un premier enfer, enfoncé douloureusement dans la nuit de ses pensées, dans le vide immense de son cœur, où le mal seul germoit, que lui restoit-il après sa chute, qu'une irrémédiable corruption, et la sentence de mort qui brisa au fond de son âme l'espérance même ? Elle eût été détruite

pour toujours, si la promesse d'un Rédempteur n'avoit fait luire un rayon de salut aux yeux de cette créature dégradée.

Le Verbe divin, ému de pitié à l'aspect des ruines de l'homme, résolut de les réparer, et de satisfaire pour nous à la justice de son Père. Il s'offrit à lui pour être notre victime, le prix de notre réconciliation ; et pendant quatre mille ans que la terre attendit ce grand sacrifice, la nature humaine en souffrance ne cessa d'aspirer à son accomplissement.

Et qu'on ne s'étonne point que le Fils de Dieu, voulant être aussi le Fils de l'homme et semblable à nous en toutes choses, excepté le péché, afin que l'innocent expiât le crime du coupable, ait différé si longtemps son incarnation. Il convenoit que les hommes dominés par l'orgueil, apprissent à sentir de plus en plus la nécessité d'un libérateur, à reconnoître la foiblesse de leur raison, son impuissance, et à trembler en contemplant la profonde plaie de leur cœur (1). D'ailleurs que de siècles ne falloit-il pas pour préparer les de la mission de Jésus-Christ, que preuves toutes les passions devoient attaquer; pour qu'il fût annoncé par les prophètes, et préfiguré dans la loi ; pour que la vérité de ces prophéties, attestée par un

(1) Conturbatus est in visu cordis sui. Ecclesiast., XL, 7. — Malgré la tradition universelle du genre humain, malgré tant de tristes preuves de la dégradation originelle de l'homme, n'avonsnous pas vu de nos jours la philosophic soutenir que l'homme naît bon? Que seroit-ce donc, si la rédemption eût suivi presque immédiatement sa chute ?

peuple miraculeusement établi, miraculeusement conduit, miraculeusemeut conservé au milieu de tous les autres peuples, ne pût jamais offrir le plus léger sujet de doute? Qu'on suive cette pensée si digne de la sagesse de Dieu, et l'on verra que le même dessein exigeoit que la Rédemption s'opérât, pour ainsi dire, en présence du monde entier réuni sous un seul empire, lorsque la philosophie, les sciences, les lettres, brilloient du plus vif éclat, en même temps que l'incertitude sur les vérités les plus essentielles, l'erreur, la dépravation, étoient parvenues à leur comble: en un mot, à l'époque où visiblement les nations ne pouvoient être sauvées que par un secours surnaturel ; et où il étoit le moins possible qu'elles fussent ou séduites par le mensonge, ou aveuglées par la prévention.

La domination romaine embrassoit presque tout l'univers connu, quand Jésus-Christ naquit d'une vierge au moment précis et dans le lieu où les sacrés oracles avoient prédit qu'il naîtroit. Sorti du sang des rois, et dans son indigence privé même du plus humble asile sur cette terre qu'il venoit sauver, il représente en ce double état l'humanité tout entière. Infortunés qui portez le poids du travail et de la peine, innombrable famille de la Providence, venez à Bethlehem contempler cet enfant couché dans une crèche et enveloppé de quelques pauvres langes, venez et reconnoissez votre frère: rois, venez aussi; et humiliez-vous devant le Roi des rois. Exilés, bannis, tribu errante, suivez ce même enfant dans la terre étrangère où il fuit la persécution. Elle s'apaise,

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