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CHAPITRE XXXIV.

Miracles.

Une religion fondée sur des prophéties certaines est évidemment l'œuvre de Dieu, puisque Dieu seul connoît l'avenir; or le christianisme est fondé sur des prophéties qu'on ne peut contester sans nier l'histoire des Juifs, l'histoire évangélique, et même la tradition universelle et perpétuelle du genre humain, c'est-àdire sans renverser la base de toute certitude: donc le christianisme est divin.

Mais la divinité de la religion chrétienne se manifeste encore avec non moins d'éclat dans les miracles opérés pour lui servir de preuve depuis l'origine du monde. En se révélant à l'homme, en lui dictant des lois, jamais Dieu ne sépara les prodiges de sa puissance des merveilles de sa pensée, afin que, reconnoissant à ce signe infaillible l'autorité suprême à qui l'univers obéit, l'homme, incapable de comprendre toutes les vérités qu'il doit croire, obéit luimême sans hésiter à la parole de l'Etre infini.

Pour se former une idée juste des miracles et de leur objet il faut se souvenir que la religion, ou l'ensemble des lois de notre nature intelligente, n'a pu nous être connue que par la révélation. Comment pourrions-nous savoir ce qu'est Dieu et ce que nous

sommes, si Dieu lui-même ne nous en avoit pas instruits? et si nous ignorions ce que nous sommes, et ce que Dieu est, comment connoîtrions-nous les rapports qui nous unissent à lui, et qui dérivent nécessairement de sa nature et de la nôtre? Donc point de dogmes ou de vérités-lois, point de devoirs, point de religion, à moins que Dieu ne l'ait révélée. Et comme il est impossible qu'aucune société subsiste sans religion, et que l'homme lui-même ne subsiste que dans la société, il s'ensuit que la révélation des lois qui rendent seules la société possible est une condition nécessaire de l'existence de l'homme; et son existence prouve celle de la révélation, attestée d'ailleurs, ainsi qu'on l'a vu, par tout le genre humain.

Mais de quel moyen Dieu s'est-il servi pour pour révéler à l'homme les vérités qu'il devoit connoître, les devoirs qu'il étoit obligé de remplir? Sans doute, d'un moyen naturel ou conforme à la nature de l'homme : car il seroit absurde de supposer que le moyen par lequel Dieu a révélé à l'homme les lois de sa nature, fût opposé à cette même nature. Il y a contradiction dans les termes mêmes.

Or telle est la nature de l'homme que, dans son état présent, la parole est l'unique moyen de communication entre les esprits, et par conséquent le lien naturel ou nécessaire de la société; et l'on peut défier tous les hommes ensemble de révéler à un autre homme une seule idée par un moyen différent. Il falloit donc que Dieu, ou changeât la nature des êtres et détruisît l'ordre qu'il avoit établi, ou qu'il employât le moyen naTOME 4.

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turel de la parole pour révéler aux hommes la religion et dès-lors il est clair qu'à moins de multiplier à l'infini les révélations immédiates, ou d'anéantir la société en rendant chaque esprit indépendant, un homme a dû être l'organe de pensées et des volontés divines, toutes les fois que Dieu a voulu parler au genre humain.

Cela posé, il ne reste à résoudre qu'une seule question A quels signes reconnoîtra-t-on certainement l'envoyé divin? quels seront les titres de sa mission? La doctrine qu'il annonce en est-elle une preuve suffisante? Mais c'est la vérité de cette doctrine même. qu'il s'agit de prouver. Chacun en sera-t-il juge? Alors elle n'est plus une loi, mais une opinion philosophique, qu'on est libre de rejeter, d'admettre et de modifier à son gré. D'ailleurs la plupart des hommes, incapables même d'examiner, seroient éternellement dans l'impuissance de savoir s'il existe une véritable révélation. Loin que la doctrine prouve la mission, c'est au contraire la mission qui autorise la doctrine. La foi n'est due qu'à Dieu avant d'exiger que je me soumette à vos enseignemens, apprenez-moi donc comment je pourrai m'assurer sans aucun doute que c'est réellement lui qui vous envoie.

:

Un homme dit: Je suis l'organe de la Divinité, écoutez-moi. Mais quel est l'imposteur ou l'enthousiaste qui n'en puisse dire autant? Sa parole seule ne suffit donc pas, ainsi que l'avoue Julien lui-même (1): il faut

(1) Τὴν δὲ ἀλήθειαν τὸν ἔνεςιν ἐκ φιλοῦ ῥήματος, ἀλλὰ χρή τι, ακι πα

qu'elle soit appuyée d'une sanction; il faut, en un mot, que le Tout-Puissant accrédite son envoyé près de ceux auxquels il doit parler en son nom.

Or, par cela même qu'il est choisi pour promulguer ses commandemens, il est aisé de comprendre quelle doit être la nature de cette sanction indispensable dont tous les hommes, savans ou ignorans, doivent être également frappés. Le pouvoir se manifeste par des actes; l'Envoyé divin devra donc manifester un pouvoir divin. Voilà son titre, on ne peut ni l'imiter, ni le contester; et il est naturel que celui-là soit le ministre d'une action divine, qui s'annonce comme l'organe des volontés de Dieu.

Cette action divine est ce qu'on appelle miracle. Donc point de révélation sans miracle; c'est-à-dire point de volonté divine manifestée aux hommes par la parole, sans action divine aperçue de l'homme par

ses sens.

Ici nous ferons remarquer une inconséquence des déistes. S'imaginant qu'une révélation faite à chaque homme individuellement, seroit plus conforme à la sagesse de Dieu qu'une révélation générale faite au genre humain, ils nient cette dernière révé– lation, et se croient par là autorisés à nier la nécessité des miracles. Mais ils s'abusent étrangement; car, supposé que Dieu révèle particulièrement à chacun de

ρακολούθηται τοῖς λόγοις ἐναργές σημείον. Le simple discours ne sumit pas pour établir la vérité; il faut encore que les paroles soient accompagnées de quelque signe évideut. Julian, ap. Cyril., lib. X sub fin.

nous les devoirs de notre cœur et de notre raison, ils devroient plutôt en conclure la nécessité d'autant de miracles qu'il y a d'hommes et qu'il y a de pensées dans l'esprit de chaque homme, puisqu'aucun d'eux n'étant infaillible, aucun d'eux ne peut être certain, si Dieu ne l'en assure par quelque signe extérieur, que ce qui lui paroît vrai soit réellement vrai, ou ne peut avec certitude distinguer de ses propres pensées, les vérités que Dieu lui révèle : d'où il suit qu'un déiste conséquent doit nécessairement devenir ou sceptique ou visionnaire; son système plein de contradictions ne lui permet de s'arrêter que dans le doute, ou dans le fanatisme (1).

Nous avons dit que l'homme envoyé de Dieu devoit prouver sa mission en se montrant le ministre du pouvoir divin, c'est-à-dire par des actions divines ou par des miracles. Mais à quels caractères reconnoîtrons-nous le miracle ou l'action de la puissance divine?

1° Toute action est extérieure, donc tout miracle doit être sensible.

2o Il faut que la puissance divine soit clairement manifestée; donc le miracle doit être évidemment audessus du pouvoir naturel de celui qui l'opère.

Toute action qui a ce caractère est un miracle, et l'auteur du miracle est sans aucun doute l'organe de la Divinité, puisqu'il est visiblement le dépositaire de sa puissance.

(1) Les Martinistes et tous les illuminés sont les fanatiques du déisme.

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