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certain que l'accomplissement de la prophétie n'est pas un simple effet du hasard, il ne dit rien que tous les hommes n'avouent sans difficulté; et tous encore ils lui diront, avec l'orateur romain, « que >>le hasard n'imite jamais parfaitement la vérité, >> qu'il ne lui ressemble jamais en tout point (1), » que le sens commun distingue aisément ce qui peut être un effet fortuit, de ce qu'on doit attribuer à une cause certaine, sans quoi, ne pouvant pas même soupçonner l'existence de l'ordre, nous n'en aurions aucune idée.

« Je ne dois point être surpris qu'une chose arrive lorsqu'elle est possible, et que la difficulté de l'é>> vénement est compensée par la quantité des jets, >> j'en conviens. Cependant si l'on me venoit dire que >> des caractères d'imprimerie, projetés au hasard, >> ont donné l'Enéide tout arrangée, je ne daignerois >> pas faire un pas pour aller vérifier le mensonge. >> Vous oubliez, me dira-t-on, la quantité des jets; ›› mais de ces jets-là combien faut-il que j'en suppose » pour rendre la combinaison vraisemblable? Pour >> moi, qui n'en vois qu'un seul, j'ai l'infini à parier

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(1) Quidquam casu esse factum, quod omnes habet in se numeros veritatis? Quatuor tali jacti casu venereum efficiunt; numetiam cen-tum venereos, si CCCC talos jeceris, casu futuros putas? Adspersa temerè pigmenta in tabula, oris lineamenta effingere possunt; num etiam Veneris Coœ pulchritudinem effingi posse adspersione fortuitâ putas? Sus rostro si humi A litteram impresserit, num proptereà suspicari poteris Andromacham Ennii ab eà posse describi?... Sic enim se profectò res habet, ut nunquàm perfectè veritatem casus imitetur. Cicer. de Divinat., lib. I, cap. XIII, n. 23.

>> contre un que son produit n'est point l'effet du ha>> sard (1). »

Sophiste, reconnoissez vos paroles ; et ne dites plus que la clarté d'une prophétie ne rendant pas son accomplissement impossible, cet accomplissement, quand il a lieu, ne prouve rien, à la rigueur, pour celui qui l'a prédit car la possibilité que cet accomplissement soit l'effet du hasard peut être telle, de votre aveu, qu'elle n'ait en sa faveur qu'une chance unique contre une infinité d'autres chances. Or quand il y a l'infini à parier contre un qu'un homme est véritablement prophète, on ose penser qu'à la rigueur cela prouve quelque chose pour lui; et cette preuve est si forte à vos propres yeux, que vous l'employez pour établir l'existence du souverain Etre.

Mais allons plus loin en excluant la condition contradictoire d'une impossibilité absolue dans l'accomplissement, toutes les conditions requises par Rousseau pour qu'une prophétie fasse autorité, conditions dont il juge le concours impossible, peuvent se rencontrer, et se sont en effet rencontrées réellement. Les apôtres ont entendu, ou ils ont pu entendre JésusChrist prédire sa résurrection. Les apôtres ont vu, ou ils ont pu voir Jésus-Christ ressuscité. La résurrection d'un mort est un événement que le husard n'a pu opérer. Donc il peut y avoir des prophéties qui, suiyant Rousseau lui-même, fassent autorité, et les Pères ont eu raison d'enseigner que la prophétie est un ca

(1) Emile, liv. IV, tom. II, p. 312.

ractère distinctif et le témoignage authentique de la Divinité, qui connoît seule l'avenir; parce qu'elle seule connoît ses volontés et les volontés libres des créatures (1).

En considérant la nature de l'homme et les lois qui en dérivent, nous avons reconnu que la prophétie est une suite nécessaire de ces lois, et que l'ordre entier de nos devoirs repose sur la révélation de l'avenir. Mais quand nous serions incapables de concevoir la récessité ou même l'utilité de la prophétie, quand ses rapports avec l'ordre général échapperoient à notre raison; son existence attestée par tous les peuples dans tous les siècles, seroit encore un fait au-dessus du plus léger doute, un fait aussi certain que l'existence de l'homme même.

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Cet accord universel, qui forme, suivant Aristote, la plus puissante preuve (2), avoit frappé Cicéron. C'est, dit-il, une opinion très ancienne, descendue » des temps héroïques jusqu'à nous, et affermie par » le consentement du peuple romain et de toutes les »> nations, qu'il existe parmi les hommes une certaine

(1) « La prophétie est le caractère distinctif de la Divinité : la con >> noissance des choses futures est au-dessus de l'intelligence hu» maine. L'accomplissement de la prophétie est donc une preuve » sans réplique que Dieu en est l'auteur.» Orig. contr. Cels., lib. VI, n. 10. — Idoneum, opinor, testimonium Divinitatis veritas divinationis. Tertull., Apoiog., cap. XX.-S. Iren., lib. I, c. XIII, n. 2. Aut. quæst. et respons. ad orihod. resp. ad qu. 146. Minut. Felix in Octavio.-S. Hilar., lib. IX de Trinit.-S. August. de Divinat. Dæmon., cap. V.

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(3) Κράτος του πάντας ἀνθρώπους, κ. τ. λ. Potentissima probatio est, si in id quod dicitur omnes consentiant. Arist.

>> divination que les Grecs appellent d'un nom qui >> signifie le pressentiment et la science des choses fu>>tures. Chose magnifique et salutaire, si elle existe » réellement, et qui, plus qu'aucune autre, rapproche »> notre nature de la nature divine........... Or je ne vois >> aucune nation, si polie qu'elle soit et si savante, ou » si grossière et si barbare, qui ne croie que l'avenir » est annoncé, que plusieurs le connoissent et peuvent >> le prédire (1). »

Cette croyance étoit fondée, en premier lieu, sur la tradition primitive. Il y a eu des prophètes dès le commencement (2). Le premier homme apprit de Dieu qu'il sortiroit de la femme une semence bénie qui écraseroit la tête du serpent (3). Hénoch, suivant saint Jude et Philon (4); Noé (5), Abraham (6),

ver

(1) Vetus opinio est, jam usque ab heroicis ducta temporibus, eaque et populi romani et omnium gentium firmata consensu, sari quamdam inter homines divinationem, quam Græci. pastizÀY appellant, id est, præsensionem et scientiam rerum futurarum. Magnifica quidem res et salutaris, si modo est ulla; quâque proximė ad deorum vim natura mortalis possit accedere... Gentem quidem nullam video, neque tam humanam atque doctam, neque tam immanem atque barbaram, quæ non significari futura, et à quibusdam intelligi, prædicique posse censeat. Cicer. de Divinat., lib. I, cap. I, n. 1 et 2. · Vid. et. Origen. contr. Cels., lib. I, n. 36. Machiavel, Disc. sur Tite-Live, I, 56. M. de Maistre, Soirées de Saint-Pétersbourg, XIe entret., nol., tom. II, p. 348 et suiv.

(2) S. Epiphan. adv. Hæres., p 6.

(3) S. Jud. epist. 14.

p. 517.

(4) Genes., III, 15.

(5) Ibid. VI.

(6) Ibid., XX, 7.

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Phil. lib. Quis rerum divin. hæres.,

Isaac (1), Jacob (2), Joseph (3), recurent de Dieu l'esprit prophétique, et l'on a vu que tout le genre humain avoit conservé le souvenir des antiques oracles qui annonçoient au monde un Libérateur (4).

Secondement, Dieu ne cessa point, même depuis la loi écrite, de susciter parmi les Gentils de véritables prophètes, pour procurer à tous les hommes le moyen de parvenir au salut, et pour assurer en particulier celui des élus. Balaam en offre un exemple. « Dans >> tous les temps, dit Origène, la sagesse divine des>>cendant dans les âmes des justes, en a fait des prophètes et amis de Dieu (5). »

Saint Augustin s'exprime sur ce point en des termes non moins exprès. « S'il y a eu des prophètes chez le » peuple juif, il y en a eu aussi chez les autres peu>> ples, et ils ont prédit des choses qui regardent Jésus>> Christ (6). » Et encore : « On croit avec raison >> qu'il y a eu chez les autres nations des hommes à qui le mystère de Jésus-Christ a été révélé, et qui » ont été poussés à le prédire (7).

(1) Genes., XXVII, 27 et seq.

(2) Ibid., XLIX.

(3) Ibid., XXXVII

(4) Voyez le chapitre XXVII.

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(5) Origen. contr. Cels., lib. IV, n. 7. Traduct. de Gourcy. (6) Siquidem de populo Judæorum fuerunt prophetæ, per quos Evangelium, cujus fide credentes justificantur, ante promissum esse testatur....; fuerunt enim et prophetæ non ipsius, in quibus etiam aliqua inveniuntur quæ de Christo audita cecinerunt. S. Aug. Epist. ad Rom. inchoat. Exposit., cap. III, part. II, tom. III,

col. 926.

(7) Non incongruè creditur fuisse et in aliis gentibus homines, quibus hoc mysterium revelatum est, et qui hoc etiam prædicere

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