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mens publics d'une société, les titres de son origine, de ses lois, de ses croyances, ont-ils moins d'autorité que les titres domestiques d'un seul individu? Un homme pourra-t-il venir sans renverser l'ordre entier des choses humaines, et sans blesser le bon sens universel, opposer de simples conjectures, de vagues possibilités qu'il a conçues dans son esprit, au témoignage formel, constant, uniforme, d'une nation attestant des faits qui la concernent et qu'elle n'a pu ignorer? Et qu'y aura-t-il de certain si on rejette ce témoignage?

Quoi! l'on ne seroit pas écouté si l'on disputoit à Hérodote son histoire, à Sophocle ses tragédies, à Cicéron ses harangues, et l'on auroit le droit de disputer au législateur des Hébreux le livre où il a consigné les lois invariables qui ont perpétuellement régi sa nation; livre sacré aux yeux de cette nation, qui, pour le préserver des altérations les plus légères, ne cessa jamais d'employer des précautions tellement multipliées, j'ai presque dit tellement minutieuses, qu'il n'en existe aucun autre exemple (1)! On auroit le droit de disputer aux apôtres et à leurs disciples les ouvrages que tous les chrétiens leur attribuent, qu'ils leur ont toujours attribués! On auroit le droit de nier

(1) Voyez Fabricy, Des titres primitifs de la Révélation, ou considérations critiques sur la pureté et l'intégrité du texte original des livres saints de l'Ancien-Testament. Rome, 1772.—« Les écrits qu'ils » faisoient (les prophètes) étoient entre les mains de tout le peuple, » et soigneusement conservés en mémoire perpétuelle aux siècles » futurs (Exod. XVII, 14). » Bossuet; Disc. sur l'hist. univers., II• part., ch. V, p. 225. Edit. de Versailles.

ce qu'ils affirment unanimement; le droit de leur dire Vous ne connoissez ni l'origine de votre religion, ni son histoire, ni celui même que vous adorez!

En vérité, j'admire la confiance de certains hommes, qui, après une si longue et si paisible possession, se présentent seuls pour contester à deux grands peuples leurs actes publics; qui veulent que leur assertion prévale sur le témoignage de tant de siècles. Mais si ce témoignage ne suffit pas pour produire la certitude, si ce qu'ont attesté uniformément de génération en génération des millions d'hommes éclairés et sincères, peut être révoqué en doute, que sera-ce donc du témoignage isolé de quelques hommes? et sur quel fondement les croira-t-on, si on refuse de croire à un témoignage d'une autorité incomparablement supérieure? Ne voit-on pas qu'en l'attaquant, on détruit toute certitude, toute croyance, toute raison; qu'on ne peut plus rien admettre comme vrai, rien rejeter comme faux, puisqu'il n'y a plus de preuves possibles; en un mot, qu'on établit le scepticisme absolu? Otez celle foi, dit Aristote en parlant du consentement commun, vous ne direz rien de plus croyable (1).

Dès qu'on a reconnu l'authenticité de l'Écriture (2),

(1) Quod omnibus ità videtur, id ità esse dicimus; qui verò hanc fidem velit tollere, nihilo ipse credibiliora dicet. Árist. Ethic. Nicomach., lib. X, cap. II.

(2) Newton, qui avoit fait une étude particulière des livres saints, disoit au docteur Smith, chef du collège de la Trinité : « Je trouve » plus de marques certaines d'authenticité dans la Bible, que dans » aucune histoire profane quelconque. » Watson, an Apology for

on ne peut former de doute raisonnable sur la vérité des faits qu'elle contient. Presque tous ces faits, et principalement les plus merveilleux, sont des faits publics; ils se sont passés à la vue d'une multitude d'hommes à qui l'on n'a pu faire illusion, et qui n'ont pu vouloir se tromper eux-mêmes. Ils composent une histoire dont toutes les parties s'enchaînent, se supposent mutuellement, et qu'il est impossible d'ébranler sans renverser toutes les autres histoires. Enfin, sous quelque rapport qu'on les envisage, ils offrent des caractères de vérité si manifestes, tant de preuves de tout genre les environnent, ils sont appuyés sur tant de témoignages et des témoignages si divers, qu'à peine s'explique-t-on comment quelques esprits peuvent résister à de si nombreux motifs de croyance. Considérons d'abord l'Ancien-Testament. Il commence par le récit de la création. Dieu appelle l'univers, il sort du néant; son auteur en dispose successivement toutes les parties, et y établit ce bel ordre que nous admirons (1). Il dit : Que la lumière soit, et

Christianity, in a series of letters addressed to Ed. Gibbon, pag. 62.

(1) Dieu lui-même déclare que ce qu'il a fait est bon: Et vidit quod esset bonum. Ce n'est pas sans motif que cette expression est répétée sept fois dans le premier chapitre de la Genėse. En inculquant que Dieu n'a rien fait que de bon, Moïse, ou plutôt l'Esprit saint qui l'inspiroit, célèbre la sagesse du Créateur aussi bien que sa puissance, et renverse le système des deux principes, fondé sur la tradition de la révolte des anges, que quelque philosophes avoient défigurée. Ce système, ancien dans l'Orient, et renouvelé par Manės, qui y mêla des rêveries nouvelles, ne s'est répandu que parce que l'homme coupable, en voyant le mal dans l'univers, a cru que l'univers lui même étoit mauvais, et par conséquent l'ouvrage d'un

elle fut (1). L'homme est formé d'un peu de limon; le souffle de vie l'anime, et il devient l'image de Dieu, qui, en le créant à sa ressemblance, voulut le rendre digne d'entrer en société avec lui : magnifique prérogative qui le rapproche des purs esprits, et annonce ses hautes destinées. Il prend possession de la terre en donnant à chaque être vivant son nom (2), et c'est par la parole qu'il exerce premièrement sa puissance, qu'il se fait reconnoître comme souverain. Cependant il n'étoit pas bon que l'homme fut seul. Faisons-lui, dit le Seigneur, une aide semblable à lui (3). Alors, de la substance même d'Adam il forme la femme; il la lui donne pour compagne (4), et désormais ils seront deux dans une même chair (5). expression qui nous montre, dans l'unité de la première famille, l'unité du genre humain.

Dieu place ces créatures heureuses dans un lieu de

mauvais principe. Si Rousseau avoit dit : « Tout étoit bien, sortant » de la main de l'Auteur des choses,» il auroit parlé comme Moïse, et n'eût pas nié la chute de l'homme, qui seule a dérangé l'harmonie de la création.

(1) Dixitque Deus : Fiat lux, et facta est lux. Gen., I, 3. L'hébreu est plus concis encore: Sit lux, et fuit

lux. Suivant le récit de la Genèse, les corps célestes ne furent créés qu'après la lumière. C'est, ce nous semble, une preuve très forte que ce récit n'est point une invention de Moïse. Accoutumé, comme tous les hommes, à regarder le soleil comme le principe et le foyer de la lumière, il n'auroit jamais pensé à séparer ces deux choses, s'il n'avoit écrit que d'après ses propres idées.

(2) Genes., II, 19, 20.

(3) Dixit quoque Dominus Deus: Non est bonum esse hominem solum; faciamus ei adjutorium simile sibi. Ibid., II, 18.

(4) Ibid., 21 et 22.

(5) Et erunt duo in carne unâ. Ibid., 24.

délices, que l'Écriture appelle le Paradis de volupté (1). La nature leur étoit soumise, mais à la condition qu'ils seroient eux-mêmes soumis à son auteur. A moins d'être privés de toute espèce de rapports avec les autres êtres, ils ne pouvoient vivre indépendans. Pour entrer dans la société dont ils devoient être membres, dans la société des intelligences dont Dieu est le roi, il falloit qu'ils connussent un ordre moral, des lois, des devoirs; pour mériter, il falloit qu'ils obéissent librement. En cela consiste la perfection des créatures raisonnables; et puisque Dieu avoit daigné les appeler à cette perfection, il ne pouvoit leur refuser le moyen d'y parvenir : sa bonté leur devoit un commandement, afin qu'ils pussent s'élever jusqu'à l'obéissance libre, jusqu'à la vertu.

En effet «< il donne un précepte à l'homme, pour >> lui faire sentir qu'il a un maître; un précepte atta>>ché à une chose sensible, parce que l'homme étoit » fait avec des sens; un précepte aisé, parce qu'il >> vouloit lui rendre la vie commode tant qu'elle seroit >> innocente.

>> L'homme ne garde pas un commandement d'une » si facile observance il écoute l'esprit tenta>>teur (2), » l'antique serpent (3), chef des anges

(1) Tulit ergo Dominus Deus hominem, et posuit eum in Paradiso voluptatis. Genes., II, 15.

(2) Bossuet; Disc. sur l'hist. univers., II° part., ch. I, pag. 266. Edit de Versailles.

(3) Draco ille magnus, serpens antiquus, qui vocatur Diabolus, et Satanas, qui seducit universum orbem Apocal., XII, 9.-Scheitam, Satan, signifie en arabe, dit d'Herbelot, non seulement le Diable, mais un serpent. Biblioth. orient., tom. V, p. 192.

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