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blesse indolente qui nous livre sans attaques victorieuses de l'ennemi.

défense aux

Voilà la vé

rité, saisie dans son trait juste et sa vraie proportion, la vérité physiologique à la fois et morale. Mais Goethe n'exagère-t-il pas, quand il nous dit ailleurs, dans son Egmont, que l'homme n'appartient qu'à lui-même, et qu'il peut ordonner à la nature d'éliminer de son être tous les éléments étrangers, cause de maladie et de souffrance? C'est au fond la même vérité, mais sous deux formes, l'une précise et scientifique, l'autre toute poétique et sensiblement agrandie. J'ai peur que plus d'une fois M. de Feuchtersleben n'oublie qu'il est médecin et ne devienne poëte. Parfois sa pensée touche le point au delà duquel la science s'aventure dans les régions d'un idéalisme crépusculaire. Je ne citerai que cette page, empreinte sans doute d'une certaine beauté poétique, mais d'où le caractère scientifique a complétement disparu :

Ces phénomènes (de la volonté et de l'imagination) sont les symboles de beaucoup d'autres faits, des faits les plus importants qui s'accomplissent dans le monde. Il est une sorte d'atmosphère morale qui enveloppe la terre comme l'atmosphère extérieure; il s'y fait un flux et un reflux de pensées, de sentiments, d'idées, qui flottent dans l'air, invisibles, que l'homme respire, s'assimile et communique sans en avoir nettement conscience. On pourrait appeler cette atmosphère morale: l'âme extérieure du monde; l'esprit du temps est son reflet, la mode en est le mirage.

Aucune sphère de la société n'échappe aux effets de l'influence secrète que l'opinion publique exerce sur le intelligences les plus libres; mais le milieu moral qui agit sur les individus peut être à son tour modifié par l'action d'une force individuelle. Le courage du héros se transmet comme un fluide magnétique; la crainte a une sorte de puissance contagieuse; le rire, la gaieté se communiquent d'une manière irrésistible et gagnent même l'homme le plus morose. De même les bâillements ou l'ennui ne sont-ils pas épidémiques? N'ont-ils pas le même effet que la présence d'un traître au milieu d'une société d'amis? Et l'on refuserait de comprendre comment des hommes bien portants ont pu, sincèrement et de bonne foi, attester la réalité de certains miracles et voir des revenants conjurés par l'exorciste! Oui, la foi est une force toute-puissante; la foi accomplit des merveilles: la foi transporte des montagnes. Regardez votre frère comme un homme de bien, et il le sera. Ayez confiance dans celui qui n'est bon qu'à demi, et il le deviendra tout à fait. Supposez des aptitudes chez votre élève, il les développera. Si vous le jugez incapable, il restera tel. Persuadez-vous que votre santé est bonne, elle pourra le devenir; car la nature n'est qu'un écho de l'esprit, et la loi suprême qui la régit, c'est que l'idée est la mère du fait, et qu'elle façonne graduellement le monde à son image.

Sans doute, il y aurait manière d'interpréter dans un sens exact ces vagues et poétiques formules, visiblement inspirées par l'esprit de Hégel. Il y a d'ailleurs, dans cette page, beaucoup de vérités de détail qu'il serait facile de mettre en pleine lumière, en les dégageant des hypothèses et des hyperboles voisines. C'est néanmoins un grave péril

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pour un savant physiologiste de parler de cette manière La nature est l'écho de l'esprit.... L'idée est la mère du fait, elle façonne graduellement le monde à son image. Auprès de beaucoup de bons esprits, ce genre de sublime compromettrait son crédit.

Revenons à l'hygiène morale. Se soustraire aux influences organiques ou extérieures, croire au pouvoir réel de l'esprit sur le corps, telle est la condition de cette science. Élever son cœur et son intelligence, cultiver les plus hautes et les plus délicates parties de son âme, voilà l'œuvre. Et pour prendre le langage même du docteur allemand, se posséder est la première loi de l'hygiène morale; s'agrandir en est le second précepte.

S'agrandir! C'est prendre le contre-pied de toutes nos mesquineries, de toutes nos misères, de toutes nos défaillances morales; c'est élever et fortifier l'homme intérieur; c'est remplacer par de nobles amours les vulgaires tentations d'une sensibilité troublée, par des contemplations idéales les étroites et lâches préoccupations du moi; c'est se désintéresser de l'égoïsme en s'intéressant aux destinées générales de l'humanité; c'est élargir l'horizon de la pensée à la mesure de l'infini: c'est se délivrer des mortelles langueurs du doute pour prendre dans de viriles convictions le point d'appui de sa volonté et de sa vie. Certes, le mot n'est pas trop fort pour exprimer ce que l'auteur veut dire,

et quand l'homme aura accompli ce travail d'Hercule sur lui-même, on pourra bien dire qu'il sortira de ce rude effort, agrandi.

Voici, en ce sens, d'utiles conseils. La volonté et le sentiment, nous dit-on, et, par conséquent, la joie et la tristesse, dépendent en nous du point de vue d'où nous envisageons le monde et nousmêmes Ce point de vue est déterminé par la culture de notre esprit. C'est en soi que l'on puise ou la consolation, ou le découragement; en soi l'on porte et le paradis et l'enfer. Nos idées agissant sur notre humeur, elles agissent même sur notre bien-être et notre santé. Une conviction forte et raisonnée devient, dans l'individu qui la possède, comme une partie intégrante de sa personne. C'est, pour l'homme fatigué, un appui; pour celui qui souffre, un adoucissement à ses maux. Représentéz-vous le monde dans son ensemble et dans son enchaînement, et votre regard se rassérénera; ne perdez pas de vue le but final, et les maux passagers vous paraîtront plus légers et plus supportables. La cause principale d'une foule de maladies, c'est l'égoïsme. Élargissons donc le cercle de nos sentiments et de nos idées. Comprenons que la vie n'est pas un don gratuit de la nature; que c'est avant tout une tâche, une mission à remplir, et que, si elle confère des droits, elle impose des devoirs. Il n'est pas de meilleur remède à opposer à

l'égoïsme qui dissout le principe vital que les hautes conceptions de l'esprit qui retrempent la volonté, et par la volonté, la vie.

N'est-ce pas ce que disait Spinoza dans un de ses axiomes moraux : « plus s'étendent les conceptions de notre esprit, plus nous approchons du vrai bonheur. » M. de Feuchtersleben ne fait guère que commenter cette grande pensée. Qui a rempli la mesure extrême de l'existence accordée à l'homme sur cette terre, sinon les esprits sérieux tournés avec ardeur vers les plus hautes idées, depuis Pythagore jusqu'à Goethe? Une vue sereine de l'ensemble des choses est une condition nécessaire de la santé, et l'intelligence seule peut donner à l'homme cette sérénité nécessaire. C'est alors seulement que l'homme sait se comprendre comme une partie du tout, et se rapprocher des autres parties du même tout. On peut dire que c'est avec cette conception que commencent la véritable culture intellectuelle et en même temps un état de satisfaction réelle, de bonheur même physique. La sérénité de l'âme, acquise par l'habitude de ces hautes pensées, entretient la santé par une influence douce mais continue que l'auteur compare à la vertu bienfaisante d'un aliment exquis et nourrissant. Il est bon, dit-il, de pouvoir montrer ces individualités brillantes, symboles de la puissance de l'esprit sur la matière, qui sont placées

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