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II. Du participe passé conjugué avec avoir, et accompagné
d'un complément direct.

I. Le participe passé d'un verbe transitif conjugué avec avoir, et accompagné d'un complément direct, est:

1° Invariable quand le complément direct le suit :

Autre n'a mieux que toi soutenu cette guerre ;
Autre de plus de morts n'a couvert cette terre.

(Corneille.)

Les Arcadiens et les Lydiens ont NÉGLIGÉ les SCIENCES et CULTIVé les arts.

(Barthélemy.)

C'est le christianisme qui, après avoir CONSERVÉ le DÉPÔT des sciences, des arts, des lettres, leur a DONNÉ une IMPULSION puissante. (V. Cousin.)

2o Variable si le complément direct le précède:

Les meilleures harangues sont celles que le cœur A DICTÉES. (Marmontel.) J'entrevois en vous des sentiments dangereux, et je ne sais trop qui vous LES A INSPIRÉS. (Voltaire.)

Le courage se remarque dans les animaux qui sentent leurs forces, c'est-à-dire qui LES ONT ÉPRouvées, mesurées et TROUVÉES supérieures à celles des autres.

(Buffon.)

(Corneille.)

Quelle guerre intestine avons-nous allumée? Quels OBSTACLES a jamais TROUVÉs là-dessus la volonté de ceux qui tiennent en leurs mains la fortune publique? (Massillon.)

Comme on le voit, le participe prend le genre et le nombre que le pronom complément direct emprunte lui-même du nom qu'il représente, et cet accord lieu avec le pronom même lorsque le terme qu'il représente est placé après lui, comme dans le premier de ces vers:

Oui, je l'ai vue aussi cette cour peu sincère,
A ses maîtres toujours trop soigneuse de plaire;
Des crimes de Néron approuvant les horreurs,
Je l'ai vue à genoux consacrer ses fureurs.

(Racine.)

II. Les compléments directs qui précèdent les participes sont rarement représentés par un substantif; on n'en trouve d'exemples que dans les pcëtes antérieurs au dix-huitième siècle :

Ainsi les justes dieux ont mes vœux exaucés,
Puisque Horace est vainqueur, et vous a repoussés.

Il est de tout son sang comptable à la patrie;

(Duryer.)

Chaque goutte épargnée a sa gloire flétrie. (Corneille.)

Voltaire fait, à l'occasion de ces vers, cette remarque assez singulière « La sévérité de la grammaire, dit-il, ne permet pas ce fle» trie: il faut, à la rigueur, a flétri sa gloire; mais a sa gloire flé»trie est plus beau, plus poétique, plus éloigné du langage ordi»> naire, sans causer d'obscurité. »

Ce que la grammaire ne permet pas, c'est l'invariabilité dans cette construction; car toutes les fois que le complément direct est énoncé le premier, le participe en prend le genre et le nombre. Racine a donc eu raison d'écrire :

La valeur d'Alexandre a la terre conquise.

Et Molière :

Enfin les gens sensés ont leurs têtes troublées
De la confusion de telles assemblées.

Et la Fontaine :

Il avait dans sa terre une somine enfouie.

Ce que Voltaire a voulu dire, sans doute, c'est que l'usage n'admet plus cette construction, que quelques poëtes modernes ont à tort essayé de rajeunir.

OBSERVATION. - Dans certains cas, le verbe avoir et le participe passé qui le suit peuvent être tout à fait indépendants l'un de l'autre; avoir alors n'est pas auxiliaire, mais verbe transitif, et le participe est un qualificatif qui modifie le complément direct auquel il se rapporte :

Ainsi, dans la phrase suivante, on écrira nécessairement le participe passé invariable, si l'on considère le verbe avoir comme auxiliaire :

Nous AVONS RÉUNI et CLASSÉ par ordre chronologique deux cents lettres inédites de Voltaire.

C'est l'action de réunir et celle de classer qu'on a ici en vue, et on les exprime par le passé indéfini de chaque verbe.

Mais si le verbe avoir est pris comme verbe transitif et qu'il exprime la possession, alors les participes passés deviennent deux qualificatifs modifiant le complément direct lettres, et s'accordant avec lui; on devra donc alors écrire :

Nous avons, RÉUNIES et CLASSÉES par ordre chronologique, deux cents lettres inėdites de Voltaire.

L'exemple suivant, que nous empruntons à la préface d'une trèsremarquable étude littéraire et philologique publiée par M. Romain Cornut, démontre avec la plus complète évidence que le verbe avoir et le participe passé peuvent, dans certains cas, être placés l'un à côté de l'autre sans former cependant une même expression verbale :

Ce modeste travail de correcteur serait, je n'en doute pas, un des monuments de la gloire de Bossuet lui-même, si nous avions ÉCRITES par lui toutes les pensées qui lui vinrent à l'esprit et qui determinèrent son goût.

(Les Confessions de Mlle de la Vallière.)

PREMIÈRE OBSERVATION.

Du complément grammatical et du complément logique.

Aujourd'hui, beaucoup de personnes confondent encore, comme on le faisait autrefois, le complément grammatical et le complément logique, et prennent pour le premier une partie complémentaire purement accessoire; il résulte de cette fausse appréciation une orthographe vicieuse.

Nous allons nous expliquer.

Le complément grammatical est représenté par un mot unique, qui est l'expression de l'idée principale; le complément logique est représenté au contraire par plusieurs termes, au nombre desquels figure en première ligne le complément grammatical; ainsi, dans cette phrase :

Dieu a créé LES HOMMES mortels,

le complément grammatical est le mot hommes, et le complément logique est hommes mortels, qui se compose du terme principal hommes et du terme accessoire mortels.

Si donc on donnait à écrire cette phrase:

Les hommes QUE Dieu a CRÉÉS MORTELS périront tous,

nous aurions pour terme principal que, complément grammatical, et pour terme accessoire mortels, partie du complément logique ; or, comme le mot important, le véritable complément grammatical, précède le participe, celui-ci est variable, et quoiqu'il soit suivi d'un terme complémentaire, il prend le genre et le nombre de que, pronom masculin pluriel, représentant son antécédent hommes. On écrira donc d'après ce principe:

Les Perses, adorateurs du soleil, ne souffraient point les idoles, ni les rois Qu'on y avait FAITS dieux. (Bossuet.)

Il passa par des chemins qu'on avait CRUS IMPRATICABLES. (Fénelon.)

Il ouvre de grands yeux, il frotte ses mains, il se baisse, il la voit de plus près, il ne l'a jamais vue SI BELLE, il a le cœur épanoui de joie. (La Bruyèrc.)

Vous m'avez crue attachée à vous nuire,

Dans le fond de mon cœur vous ne pouviez pas lire.

(Racine.)

Dieu a non-seulement donné la forme à la poussière de la terre, mais il l'a RENDUE VIVANTE et ANIMÉE. (Buffon.)

Aujourd'hui il n'est plus permis d'écrire :

Il L'a TROUVÉ fort grande et fort jolie. (Racine.)

Vous m'avez CRU guérie. (J.-J. Rousseau.).

Je LES at CRU tous deux mes fils. (Voltaire.)

Combien de fois a-t-elle, en ce lieu, remercié Dieu humblement de deux grandes grâces: l'une de L'avoir FAIT chrétienne; l'autre, Messieurs, qu'attendez-vous? Peut-être d'avoir rétabli les affaires du roi son fils? Non. C'est de L'avoir FAIT reine malheureuse. (Bossuet.)

Il ne vous a pas fait une belle personne

Afin de mal user des choses qu'il vous donne.

(Molière.)

Dans les meilleures éditions modernes, on a établi l'accord de ces participes avec le complément grammatical qui les précède.

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DEUXIÈME OBSERVATION.

De la place du sujet.

Voltaire, dans ses Commentaires sur Corneille, fait une remarque assez curieuse à l'occasion de ces deux vers de Cinna:

Là, par un long récit de toutes les misères

Que, durant notre enfance, ont endurė nos pères. . .

« Ont enduré, dit-il, paraît une faute aux grammairiens; ils voudraient, les misères qu'ont endurées nos pères. Je ne suis point du » tout de leur avis. Il serait ridicule de dire les misères qu'ont » souffertes nos pères, quoiqu'il faille dire les misères que nos » pères ont souffertes. S'il n'est pas permis à un poëte de se servir >> en ce cas du participe absolu, il faut renoncer à faire des vers. » Si l'on acceptait cette doctrine grammaticale émise par Voltaire, le participe d'un verbe transitif se trouverait alors sous la double dépendance du complément et du sujet; il y aurait accord quand le complément et le sujet précéderaient tous deux le participe, tandis que, précédé du complément et suivi du sujet, le participe resterait invariable.

Cette opinion ne mérite pas d'être combattue. Ici, et dans tous les cas analogues, le sujet ne peut exercer aucune influence sur le participe, qui n'est en rapport grammatical qu'avec le complément direct.

Laissons à Voltaire poëte le soin de réfuter Voltaire grammairien :

Va, cours, informe-toi des funestes effets

Et des crimes nouveaux qu'ont produits nos forfaits.

Votre âme impatiente était trop alarmée

Des bruits qu'a répandus l'aveugle renommée.

Allons, je trouverai dans l'empire infernal

Les monceaux de Romains qu'a frappés Annibal.

Le dernier vers prouve que c'est bien là l'orthographe de Vol

taire; car si l'on écrivait frappé invariable, comme enduré de Corneille, il n'y aurait plus de vers.

Quand on trouve, dans Voltaire, l'emploi du participe qu'il appelle absolu, c'est toujours une négligence et un moyen de rimer plus facilement. Une pareille licence serait aujourd'hui une impardonnable faute.

On écrit donc, sans tenir compte de la place du sujet :

La froideur qu'avaient TÉMOIGNÉE les TRIBUNS déconcertait ses vues. (Vertot.)

Il ne peut rien offrir, aux yeux de l'univers,
Que de vieux parchemins qu'ont épargnés les vers.
Il est des bords fameux que l'on nomme Hespérie,
Qu'autrefois ont peuplés des enfants d'OEnotrie.
J'attends encor de toi ces secours généreux
Que jamais sans succès n'ont implorés mes vœux.

TROISIÈME OBSERVATION.

Participe passé précédé d'un collectif.

(Boileau.)

(Delille.)

(Le Brun.)

I. Nous avons dit dans le premier volume que l'accord du verbe qui a pour sujet un collectif suivi d'un complément, est toujours subordonné à l'importance des idées, et par conséquent des termes qui les traduisent.

Si le collectif exprime l'idée principale, c'est avec le collectif que le verbe s'accorde :

La totalité des perfections de Dieu m'accable. (Académie.)

Si, au contraire, l'idée exprimée par le complément a plus d'importance, c'est avec ce terme que l'accord a lieu :

Un nombre infini d'OISEAUX FAISAIENT résonner ces bocages de leurs doux chants. (Fénelon.)

II. Ces principes de concordance sont applicables à tout participe passé précédé d'un collectif. Selon le sens, il s'accorde soit avec le collectif, soit avec le complément; ainsi l'on écrira :

Une foule d'enfants COMPOSÉE d'écoliers couraient dans la rue. (Boniface.)
Une troupe d'hommes ARMÉs a paru tout à coup à mes yeux. (Florian.)

III. On doit donc se conformer à ces principes lorsque le participe est précédé d'un pronom complément direct, ayant pour antécédent un des termes d'une expression collective:

Comment pourrai-je, Madame, arrêter CE TORRENT de larmes que le temps n'a pas ÉPUISÉ, QUE tant de sujets de joie n'ont pas TARI? (Bossuet.)

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