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tant que dura la république. J'ai lu que lo duc d'Epernon, rencontrant un jour le duc de Sully, voulait lui chercher querelle, mais que n'ayant que six cents gentilshommes à sa suite il n'osa attaquer Sully qui en avait huit cents. Je doute qu'un luxe de cette espèce laisse une grande place à celui des colifichets, et l'exemple du moins n'en séduira pas les pauvres. Ramenez les grands en Pologne à n'en avoir que de ce genre, il en résultera peut-être des divisions, des partis, des querelles, mais il ne corrompra pas la nation. Après celui-là tolérons le luxe militaire, celui des armes, des chevaux, mais que toute parure efféminée soit en mépris; et si l'on n'y peut faire renoncer les femmes, qu'on leur apprenne au moins à l'improuver et dédaigner dans les hommes.

Au reste, ce n'est pas par des lois somptuaires qu'on vient à bout d'extirper le luxe: c'est du fond des cœurs qu'il faut l'arracher, en y imprimant des goûts plus sains et plus nobles. Défendre les choses qu'on ne doit pas faire est un expédient inepte et vain, si l'on ne commence par les faire haïr et mépriser, et jamais l'improbation de la loi

n'est efficace que quand elle vient à l'appui de celle du jugement. Quiconque se mêle d'instituer un peuple doit savoir dominer les opinions et par elles gouverner les passions des hommes. Cela est vrai sur-tout dans l'objet dont je parle. Les lois somptuaires irritent le désir par la contrainte x plutôt qu'elles ne l'éteignent par le châtiment. La simplicité dans les mœurs et dans la parure est moins le fruit de la loi que celui de l'éducation.

CHAPITRE IV.

Education.

C'EST ici l'article important. C'est l'édu→

cation qui doit donner aux ames la forme nationale, et diriger tellement leurs opinions et leurs goûts qu'elles soient patriotes par inclination, par passion, par nécessité. Un enfant en ouvrant les yeux doit voir la patrie, et jusqu'à la mort ne doit plus voir qu'elle. Tout vrai républicain suça avco le lait de sa mère l'amour de sa patrie, c'est-à-dire des lois et de la liberté. Cet amour fait toute son existence; il ne voit

que la patrie, il ne vit que pour elle; sitôt qu'il est seul, il est nul: sitôt qu'il n'a plus de patrie, il n'est plus ; et s'il n'est pas mort, il est pis.

L'éducation nationale n'appartient qu'aux hommes libres; il n'y a qu'eux qui aient une existence commune et qui soient vraiment liés par la loi. Un Français, un Anglais, un Espagnol, un Italien, un Russe sont tous à-peu-près le même homme; il sort du collége déjà tout façonné pour la licence, c'est-à-dire pour la servitude. A vingt ans un Polonais ne doit pas être un autre homme; il doit être un Polonais. Je veux qu'en apprenant à lire il lise des choses de son pays, qu'à dix ans il en connaisse toutes les productions, à douze toutes les provinces, tous les chemins, toutes les villes, qu'à quinze il en sache toute l'histoire, à seize toutes les lois, qu'il n'y ait pas eu dans toute la Pologne une belle action ui un homme illustre dont il n'ait la mémoire et le cœur pleins, et dont il ne puisse rendre compte à l'instant. On peut juger par-là que ce ne sont pas les études ordinaires dirigées par des étrangers et des prêtres, que je voudrais faire suivre

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aux enfans. La loi doit régler la matière, l'ordre et la forme de leurs études. Ils ne doivent avoir pour instituteurs que des Polonais tous mariés, s'il est possible, tous distingués par leurs mœurs, par leur probité, par leur bon seus, par leurs lumières, tous destinés à des emplois, nou plus importans ni plus houorables, car cela n'est pas possible, mais moins pénibles et plus éclatans, lorsqu'au bout d'un certain nombre d'années ils auront bien rempli celui-là. Gardez-vous sur-tout de faire uu métier de l'état de pédagogue. Tout homme public en Pologne ne doit avoir d'autre. état permanent que celui de citoyen. Tous les postes qu'il remplit, et sur-tout ceux qui sont importans comme celui-ci, ne doivent être considérés que comme des places d'épreuve et des degrés pour monter plus haut après l'avoir mérité. J'exhorte les Polonais à faire attention à cette maxime, sur laquelle j'insisterai souvent: je la crois la clef d'un grand ressort dans l'Etat. On verra ci-après comment on peut, à mon avis, la rendre, praticable sans exception.

Je n'aime point ces distinctions de col-. léges et d'académies qui font que la uoblesse

riche et la noblesse pauvre sont élevées différemment et séparément. Tous étant égaux par la constitution de l'Etat doivent être élevés ensemble et de la même manière; et si l'on ne peut établir une éducation publique tout-à-fait gratuite, il faut du moins la mettre à un prix que les pauvres puissent payer. Ne pourrait-on pas fonder dans chaque college un certain nombre de places purement gratuites, c'est-à-dire aux frais de l'Etat, et qu'on appelle en France des bourses? Ces places données aux enfans des pauvres gentilshommes qui auraient bien mérité de la patrie, nor comme une aumône, mais comme une récompense des bons services des pères deviendraient à ce titre honorables et pourraient produire un double avantage qui ne serait pas à négliger. Il faudrait pour cela que la nomination n'en fût pas arbitraire, mais se fit par une espèce de jugement dont je parlerai ci-après. Ceux qui rempliraient ces places seraient appelés enfans de l'Etat et distingués par quelque marque honorable qui donnerait la préséaucesur les autres enfans de leur âge saus excepter eux des grands.

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