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mour de Dieu, et trouvant sa consolation dans l'espérance d'une gloire et d'une couronne infiniment plus désirable que la sienne; en un mot, je me le représentois comme un autre saint Louis. En tout cela, je n'avois, ce me semble, aucune vue intéressée; car j'étois prêt à demeurer toute ma vie privé de la consolation de voir le Roi en cet état, pourvu qu'il y fût. Je consentirois à une perpétuelle disgrâce, pourvu que je susse que le Roi seroit entièrement selon le cœur de Dieu. Je ne lui désire que des vertus solides, et convenables à ses devoirs. Voilà, mon bon duc, quelle a été mon occupation de la fête d'hier. J'y priai beaucoup aussi pour notre petit Prince, pour le salut duquel je donnerois ma vie avec joie. Enfin je priai pour les principales personnes qui approchent du Roi, et je vous souhaitai un renouvellement de grâce dans les temps pénibles où vous vous trouvez. Pour moi, je suis en paix avec une souffrance presque continuelle. En faisant un éclat scandaleux, on ne m'aigrira point, s'il plaît à Dieu, et on ne me découragera point. On ne me fera point hérétique en disant que je le suis. J'ai plus d'horreur de la nouveauté, que ceux qui paroissent si ombrageux : je suis plus attaché à l'Église; je ne respire, Dieu merci, que sincérité et soumission sans réserve. Après avoir représenté au Pape toutes mes raisons, ma conscience sera déchargée; je n'aurai qu'à me taire et à obéir. On ne me verra point, comme d'autres l'ont fait, chercher des distinctions pour éluder les censures de Rome. Nous n'aurions pas eu besoin d'y recourir, si on avoit agi avec moi avec l'équité, la bonne foi, et la charité

chrétienne qu'on doit à un confrère. Je prie Dieu qu'il me détrompe, si je suis trompé; et si je ne le suis pas, qu'il détrompe ceux qui se sont trop confiés à des personnes passionnées.

Je suis en peine de la santé de la bonne duchesse: priez pour moi. J'écrirai à notre Prince sur divers morceaux de l'histoire.

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Sur le mariage récent de Mlle de Chevreuse, et sur l'affaire du livre des Maximes.

A Cambrai, 4 février (1698.)

LE mariage de mademoiselle de Chevreuse (1) m'a fait un grand plaisir, mon bon duc, et je prie Dieu qu'il le bénisse. Je vous remercie de tout mon cœur de l'amitié avec laquelle vous m'en apprenez les circonstances. Dieu vous a donné un gendre qui a beaucoup de naissance avec un bien proportionné. On assure qu'il a le mérite de sa profession. Trouver un tel homme dans un temps où presque toute la jeunesse d'une condition distinguée est ruinée, et abîmée

(1) Marie-Françoise d'Albert, fille de Charles-Honoré d'Albert, duc de Luynes, de Chevreuse et de Chaulnes, et de Jeanne-Marie Colbert fille aînée du grand Colbert. Elle étoit née le 15 avril 1678, et avoit épousé, le 26 janvier 1698, Charles-Eugène de Lévis, comte de Charlus, depuis duc de Lévis, pair de France. Elle fut ensuite dame du palais de la duchesse de Bourgogne, dauphine de France.

dans

dans le vice, ce n'est pas un médiocre bonheur. Madame la duchesse de Chevreuse doit avoir le cœur bien content sur une affaire qui paroît si solide; et je prends part à toute la joie qu'elle en doit ressentir. Mais comme les plus belles apparences de ce monde sont fort trompeuses, et se tournent souvent en amertume, il faut prier Dieu pour les jeunes mariés, et ne compter point sur un si bel arrangement: on mérite du mécompte dès qu'on s'appuie sur les consolations d'ici-bas, pour s'y attacher.

Je ne saurois vous dire des nouvelles bien précises de mon affaire de Rome. J'y ai envoyé mes défenses, que j'ai tâché de rendre simples, claires et douces. J'aurois bien souhaité de les rendre courtes; mais quel moyen d'être court, lorsqu'il faut rapporter plusieurs fois toutes les paroles de ses adversaires; citer aussi un grand nombre de celles du livre contesté, y ajouter beaucoup de passages des Pères, etc. et répondre par des raisonnemens à ceux qu'on veut détruire? Je n'ai donc pu être court: mais j'ai tâché de n'être pas d'une longueur énorme, quoique je n'aie pu éviter de rebattre souvent certains points essentiels sur lesquels je ne puis trop me justifier contre des accusations terribles. Mes défenses étant finies, je n'ai pas un moment à perdre pour la conclusion. Je la désire, je la demande; et je souhaite que mes parties aient le cœur aussi content, si on me justifie, que je l'aurai, s'il plaît à Dieu, si on me condamne. J'ai été enfin réduit à imprimer des choses que j'aurois bien voulu ensevelir; mais on m'y a forcé. Je les ai écrites dans les termes les plus doux que j'ai pu trouver, et fort différens de ceux par lesquels on CORRESP. I.

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a cherché à me confondre. Je ne publie point encore mes imprimés, et j'attendrai encore un peu des nouvelles de Rome, pour ne le faire que quand je n'aurai plus d'autre voie pour ma justification, à laquelle je suis obligé en conscience à travailler, pour l'intérêt de mon troupeau et l'honneur de mon ministère. Je n'ai ni ressentiment, ni aigreur, ni éloignement pour ceux qui m'ont si violemment attaqué. Voilà, mon bon duc, devant Dieu ma disposition. Aimez-moi toujours vous savez avec quel zèle je

vous suis dévoué.

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16 **.

AU MÊME.

La soumission à la volonté de Dieu seul moyen de réformer la nôtre: comment on peut arriver à cette résignation.

.......

Je ne suis nullement surpris de la crainte que M. le vidame a d'écrire à ....: la nature ne peut souffrir qu'à peine qu'on la détache ou plutôt qu'on l'arrache à ses amusemens. Je me souviens que feu M. son aîné m'écrivit une fois pour me prier de ne pas prier Dieu pour lui, de peur de perdre une attache qu'il avoit. C'est un effet de la corruption de notre volonté propre, qui se passionne de tout, et qui ne peut se résoudre à quitter ce qui l'attache. Vous saurez que cette volonté ne peut se réformer, changer, et enfin quitter, que par la soumission à la volonté de Dieu, la résignation, l'union, et même

la perte de notre volonté en celle de Dieu. Comme c'est le contraire qui fait tout le dérèglement de notre vie, cette même vie se règle à mesure que notre volonté se tourne vers Dieu efficacement; et plus notre volonté est tournée efficacement vers Dieu, plus elle se détourne de ces vains amusemens qui l'arrêtent et l'attachent, parce que ce retour de la volonté ne se fait que par la charité, qui commande cette puissance, et qui est plus ou moins parfaite, selon que le retour de la volonté est plus ou moins parfait. Aussi il ne s'agit pas que l'esprit soit éclairé; ce n'est pas ce que Dieu demande, mais le cœur.

Je ne sais pourquoi on se met dans l'esprit qu'il faut quitter ses amis pour être à Dieu. Je ne vois pas pour quelle raison M. le vidame s'imagine que, pour être à Dieu à son âge, il faille quitter les compagnies qui ne sont ni dangereuses ni crimiuelles, ni même trop attachantes : il faut voir ses amis courtement, mais fréquemment. Je dois dire que ce ne sera jamais la conviction seule qui fera un homme parfaitement à Dieu; il n'y a que la volonté gagnée et tournée qui le puisse faire : tous raisonnemens sont stériles et infructueux, si le cœur n'est gagné pour Dieu; et c'est à quoi il faut travailler. Je voudrois donc le faire de cette sorte: m'exposer tous les jours quelques momens devant Dieu, non en raisonnant, mais après avoir dit ces paroles; Fiat voluntas tua, donner ma volonté à Dieu afin qu'il en dispose, et l'exposer ainsi devant lui sans lui dire autre chose que de rester quelques momens dans un silence respectueux, où le cœur seul prie

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