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dans les diverses parties des arts un progrès réel, dont, après certaines époques, on peut suivre la trace, déterminer, classer et nommer les résultats, si bien que ce qui fut d'abord la découverte des grands génies, tombe un jour dans le domaine commun, et devient insuffisant pour intéresser ou charmer les lecteurs. Il faut alors, si l'on veut faire euvre qui dure, non pas renoncer aux mérites anciens, mais y en ajouter de nouveaux, et c'est là le fait des grands poëtes ou des grands écrivains aux différents âges. Cette vérité établie historiquement dans nos deux premières thèses, se reproduira sous des formes plus dogmatiques dans les pièces suivantes : elle présentera sous un jour que je crois nouveau, l'ancienne querelle des anciens et des modernes, dont celle des classiques et des romantiques n'était, à vrai dire, qu'un épisode, et modifiera beaucoup, du moins je l'espère, l'idée qu'on s'en est faite jusqu'ici, et que nos professeurs nous ont transmise.

Je ne dissimulerai pas que la forme tantôt dialoguée, tantôt dramatique, sous laquelle j'ai mis aussi bien dans mes Thèses de grammaire que dans mes Etudes sur quelques points des sciences dans l'antiquité, quelques-unes des doctrines que je tâchais d'établir, n'a pas eu l'approbation de tout le monde. Plusieurs personnes ont regardé comme puéril et même comme impatientant, le petit drame dans lequel j'enveloppais mon sujet; il est bon toutefois d'ajouter que cette forme blâmée par quelques-uns est justement ce dont d'autres critiques, en assez grand nombre, m'ont le plus loué, ce qui m'a confirmé dans l'habitude que j'ai prise depuis longtemps de ne jamais disputer des goûts avec qui que ce soit.

Je crois cependant pouvoir dire, au point de vue, non pas du plaisir qu'on éprouve, mais de l'intelligence de la doctrine, que la forme critiquée ici, est beaucoup moins indifférente au fond des choses que quelques érudits ne le supposent. J'avoue que pour ce qui forme une science entière, ou mème, parmi les simples branches ou sections des sciences, pour ce qui comprend une grande quantité de vérités particulières, la meilleure route à prendre est, sans comparaison, l'exposition directe et bien ordonnée dans la forme rigoureusement dogmatique, c'est-à-dire un traité proprement dit.

Il n'en est pas de même quand c'est une idée seulement qu'il s'agit de faire entrer dans l'entendement, autrement dit, lorsque la difficulté d'une théorie gît tout entière dans la façon de concevoir la chose. On ne saurait imaginer combien certains esprits, fort développés et richement doués d'ailleurs, sont rebelles à cette abstraction même qui fait le sujet de la thèse : la rapidité de conception, et la ténacité de mémoire dont ils se félicitent avec raison dans leurs études habituelles, loin d'être alors un avantage, est au contraire un danger, presque un péril: il ont glissé là-dessus sans rien comprendre au point précis que l'on discute. La forme du dialogue ou du conte a le mérite de leur présenter la même idée sous beaucoup de faces, de montrer en vingt façons comment elle est bien, et comment elle est mal saisie; et malgré cela, ils n'arrivent pas toujours à la concevoir pleinement. Que seraitce si l'auteur ordonnait son exposition et serrait ses raisonnements comme on le fait dans un traité où rien n'est douteux, ni la suite des idées, ni le genre de la démonstration, ni surtout le point de départ. C'est là ce qui a, chez les anciens comme chez nous, recommandé la

forme du dialogue dans Platon ou Cicéron, celle du dialogue des morts dans Lucien ou Fontenelle, celle du conte enfin dans Voltaire. Là quoique le fond ait assurément une grande valeur, et qu'on puisse par la pensée le séparer de la forme, je ne crains pas d'affirmer que celle-ci contribue beaucoup au mérite des œuvres; qu'elle y est en un mot aussi bien placée qu'elle le serait mal s'il s'agissait d'enseigner complétement l'éloquence, la morale ou la métaphysique.

J'annonce clairement, en parlant ainsi, qu'on trouvera dans ce volume plusieurs points traités encore sous une forme non dogmatique ; j'avertis que je n'ai pas seulement désiré par là répandre plus d'agré ment sur mon travail (en quoi j'aurais fort bien pu me tromper); j'ai surtout voulu rendre plus précise et plus complète la connaissance du sujet sur lequel j'élevais des doutes, et plus assurée la conclusion à laquelle je m'arrêtais.

Je ne finirai pas cette préface sans ajouter deux observations importantes. La première se rapporte au caractère d'une ou deux de ces thèses. Le livre n'est pas fait pour des adolescents, mais bien pour des hommes dans la force de l'âge, ou sortis depuis longtemps du collège. Or, les questions littéraires sont profondément liées aux mœurs et aux coutumes des diverses époques : il y a donc, particulièrement lorsqu'il s'agit de l'antiquité, mille détails que l'érudit ou le critique doit connaître, dont le livre même peut exiger le rappel en un endroit donné, et qu'il importe pourtant d'écarter des mains ou des yeux de l'adolescence: c'est une raison pour que les hommes qui prendront intérêt aux questions traitées ici, ne laissent lire à leurs enfants ou aux écoliers, que celles où rien ne serait de nature à leur donner des idées fâcheuses.

La seconde observation est relative aux auteurs critiqués ici, dont quelques-uns sont aujourd'hui dans l'infortune ou même dans l'exil. Les pièces où il est question d'eux sont toutes antérieures aux événements qui les ont frappés; et s'il s'était trouvé dans mes jugements quelque chose qui y fit la moindre allusion, qui touchât à l'un de leurs actes ou à leur caractère, je les aurais sévèrement exclus. Mais il ne s'agit que de littérature proprement dite; il n'y avait donc aucune raison d'écarter leurs noms de ces thèses; et je les ai laissés subsister, ne pensant pas que ce qui n'est, au fond, qu'une différence d'opinion sur des questions d'agrément et de goût, pût leur être jamais pénible.

9,

24,

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ERRATA.

Page 5, ligne 28 : le poëme épique, lisez les poëmes épiques. 1: Phérécyde de Scyros, lisez de Syros.

4 et 5 parce que nous en avons, lisez par ce que nous

avons.

retranchez peut-être.

voyez aussi, lisez voyez.

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220,

258,

:

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5 en remontant l'Atlantide, lisez l'Atlantiade.

19 s'il n'y a, lisez s'il y a.

5 les intérêts des humains, lisez les intérêts humains.

31 des conditions, lisez les conditions.

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COUP D'OEIL

SUR L'HISTOIRE

DES GENRES LITTÉRAIRES'.

Les orateurs, les écrivains, les poëtes ont fait leurs ouvrages longtemps avant qu'on s'avisât de les classer, ou même de leur assigner une dénomination spéciale. Ensuite vinrent des savants curieux de ces diverses œuvres, qui remarquant entre elles soit des ressemblances, soit des différences dans le fond ou dans la forme, mirent ensemble celles qui paraissaient analogues, et inventèrent pour cha

1. Dans cet exposé écrit en 1846, revu et complété depuis, je reprends la thèse soutenue par Perrault dans son Parallèle des anciens et des modernes, que les arts en général se perfectionnent avec le temps et augmentent sans cesse leurs moyens et leurs ressources. Je prends seulement la question d'un autre biais, je tâche de la circonscrire plus exactement, et surtout la manière dont je la traite n'a rien de commun avec celle de l'antagoniste de Boileau. Je remarquerai seulement ici que la supériorité du génie et du style chez celui-ci, a singulièrement offusqué nos esprits. Elle nous a même fait oublier la question, ou l'a déplacée. Nous lisons très-lėgėrement en France, nous acceptons les jugements tout faits, et n'appelons pas des arrêts de nos grands auteurs. La vérité est pourtant que le Parallèle est, quant au fond, un excellent ouvrage, dont la pensée fondamentale n'est pas exposée par Boileau, comme le lui a souvent reproché son éditeur Saint Marc; que ce qui est soutenu par Perrault, est, sauf l'exagération que comporte le dialogue, parfaitement vrai et raisonnable; et qu'il n'y aura guère dans la thèse ci-dessous qu'une autre manière de voir et de présenter les mêmes choses.

cune des classes ainsi formées, un nom générique qui en rappelait à la fois la nature et les qualités distinctives.

Ce travail de critique et de classification se fit sans doute assez tard et, surtout dans l'origine, un peu au hasard; il ne prit une forme précise que quand les arts s'étant suffisamment développés dans la Grèce, on y jouit en même temps d'assez d'aisance et de repos pour se livrer sans danger aux plaisirs de l'esprit et à l'étude qu'ils exigent.

Il s'opéra donc dans les habitudes, le langage, la conversation du peuple, un travail préparatoire, antérieur à tout ouvrage écrit sur la matière, et par lequel on s'entendait assez bien sur la nature des œuvres qu'on apprenait à nommer. Ce travail, important sans doute, mais intérieur et caché, n'a guère laissé de traces que dans la langue même. Toutefois on peut encore, d'après ces légers indices, se représenter avec une grande vraisemblance, comme nous le ferons tout à l'heure, le mouvement de l'esprit humain à cette époque reculée.

Dans tous les cas, c'est là le début de la science appelée aujourd'hui littérature, science qui classe, caractérise et permet de juger avec intelligence les ouvrages en prose ou en vers, mais qu'il ne faut pas confondre avec ces ouvrages mêmes, comme on le fait trop souvent dans le monde. En effet, quand, sous le nom de littérature d'un pays, on comprend tous les ouvrages écrits dans la langue de ce pays, par la littérature grecque, la littérature latine on entend l'ensemble des ouvrages grecs ou latins qui nous restent; et la grandeur ou la beauté de la littérature, prise dans ce sens, consiste précisément dans le nombre ou la perfection de ceux qui y entrent.

La littérature conçue en général et comme science abstraite n'est pas cela : c'est une collection bien ordonnée de définitions, de règles, et s'il se peut d'exemples. Sa grandeur lui vient du nombre d'objets divers qu'elle peut em

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