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les mots intercalés détruisent la magnifique suspension du texte oriContinuons de citer le même discours, et soyons brefs.

ginal.

Texte des éditions.

Il n'y a qu'une injustice infinie qui soit capable de s'opposer à la justice infinie de Dieu, d'autant plus que celui qui refuse de lui obéir, se porte de tout le poids de sa volonté à anéantir sa justice]. La volonté de Dieu la choque nécessairement en tout ce qu'elle est dans toute son étendue 1.

Texte du manuscrit.

Il n'y a qu'une injustice infinie qui soit capable de s'opposer à la justice infinie de Dieu, d'autant plus que celui qui attaque la volonté de Dieu la choque nécessairement en tout ce qu'elle est dans toute son étendue.

Je demande l'explication du texte expliqué par Déforis.— Le passage suivant se trouve dans un plan de sermon, et l'auteur parle de l'hérésie :

Elle a retranché la confirmation contre [la pratique expresse des apôtres], tu la justifies [en montrant si peu de zèle pour cette foi à laquelle tes pères ont tout sacrifié, que tu t'étois engagé de défendre aux dépens même de ta vie, en recevant ce sacrement]. Elle a retranché l'extrême-onction, pour ne pas mourir comme entre les mains des apôtres; tu la justifies [par l'opposition de toute ta vie aux maximes, à l'esprit, aux exemples de ces fondateurs de ta religion.] Elle a retranché le sacrement de pénitence contre [l'institution sainte de Jésus-Christ, l'usage constant de toute l'antiquité.] Tu la justifies, [par l'abus continuel que tu fais de ce sacrement, pour perpétuer tes désordres]. Elle a retranché le sacrement [de l'eucharistie. ] Je ne veux croire, [dit-elle,] que ce que je vois, etc.; tu la justifies, le croyant et le profanant... [par tes irrévérences, le peu de préparation que tu apportes à la réception de ce sacrement auguste, le peu de fruit que tu en retires, l'indécence et l'irréligion avec laquelle tu assistes au sacrifice redoutable de nos autels.] Appuyer sur l'un et sur l'autre; sur le tort de l'hérésie et le plus grand tort des catholiques, qui méprisent (ou tournent à leur perte tant de moyens de salut.] Tout parcouru, quelle espérance pour toi ??.....

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▲ Edition de Versailles, vol. XI, pag. 102. — 2 Ibid., vol. XII, pag. 583.

Tout le plan du discours est arrangé de cette façon. Les esquisses de Bossuet sont infiniment curieuses dans leur forme primitive; elles nous montrent en quelque sorte, comme les cartons de Raphaël, le commencement et les progrès de l'œuvre du génie; mais la main téméraire qui entreprend de les finir, en fait disparaitre tout ensemble et le charme et l'utilité; le peintre avoit tracé des traits éclatans, le rapin couvre toute la toile sous la couche épaisse de son badigeon! On a dit mille fois que les sermons du grand orateur renferment partout des phrases incomplètes, des propositions tronquées, des sens mutilés. Si l'on regarde comme défaut d'expression les pensées plutôt suggérées que signifiées, les suspensions qui frappent vivement l'esprit, les réticences qui parlent plus éloquemment que tous les discours; si l'on altère le texte original par une lecture vicieuse, par des interpolations maladroites ou par des remaniemens inintelligens, on a raison. Mais qu'on donne au langage la mission, non pas de prêter un signe à chaque nuance d'idée, mais d'émouvoir les cœurs et d'éclairer les intelligences; ensuite qu'on prenne la parole de Bossuet dans sa pureté première, en la dégageant de tout mélange étranger, on verra que cette parole, circonspecte et vive, correcte et rapide tout à la fois, n'a besoin ni de complémens ni de correctifs.

Mais Déforis ne se contente pas d'intercaler des commentaires inutiles dans le texte du grand écrivain, il lui prête ses propres traductions.

III.

On sait que Bossuet n'a jamais cessé d'étudier l'Ecriture sainte ; toujours suivi du divin Livre, il le lisoit et le relisoit sans cesse, et ne passoit pas un jour sans tracer quelque note sur son exemplaire. Ainsi pénétré des divins oracles, il en prend partout dans ses sermons, comme il le dit lui-même de saint Augustin, « les plus hauts principes, pour les manier en maître et avec la diversité des sujets qu'il a entrepris de traiter. » Et quand il les rapporte textuellement, il en fait ressortir le sens dans une vive lumière ou il les éclaircit dans les développemens qui les amènent, ou il les explique après la citation dans la suite du discours, ou encore il en donne la traduction dans notre langue; mais, ô ciel! quelles traductions! quelle grandeur et quelle majesté! Si l'on nous permet encore d'emprunter son langage, il jette des éclairs comme le divin Apôtre et fait entendre le tonnerre des prophètes. Déforis a regardé comme un devoir de compléter ce sublime interprète des Ecritures; chose incroyable, il l'aide à chaque page de ses traductions! Donnons quelques exemples.

Bossuet dit dans le second sermon pour la fète de tous les Saints : «L'œil, qui voit tout ce qu'il y a de beau dans le monde, n'a rien vu

de pareil; l'oreille, par laquelle notre ame pénètre les choses les plus éloignées, n'a rien entendu qui approche de la grandeur de ces choses; l'esprit, à qui Dieu n'a point donné de bornes dans ses pensées..., ne pourroit se figurer rien de semblable: Neque oculus vidit, neque auris audivit, neque in cor hominis ascendit quæ præparavit Deus diligentibus se. Malgré la brillante explication de l'auteur, Déforis se hâte de donner sa traduction : « L'œil n'a point vu, l'oreille n'a point en» tendu, l'esprit de l'homme n'a jamais conçu ce que Dieu a préparé » pour ceux qui l'aiment1. »

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Dans le quatrième sermon pour la mème fète, Déforis et ses successeurs disent « Si vous voulez qu'il (Dieu) vous exauce toujours, ne lui demandez rien de médiocre, rien moins que lui-même, « rien de » petit au grand » : A magno purva: son trône, sa gloire, sa vérité 2. On voit que la traduction prend, et c'est assez dire qu'elle est de Déforis, le contre-pied du latin. A magno parva ne signifie pas « rien de petit au grand; » mais ces mots veulent dire, au contraire : Allez du grand au petit, c'est-à-dire ne demandez les petites choses qu'après avoir demandé les grandes. Au reste, la traduction nuit à la clarté de la phrase.

Dans le sermon suivant, Déforis, après avoir traduit plusieurs textes, dit au commencement du premier point : « En vérité, en vérité, je vous >> le dis, l'heure vient, et elle est déjà venue, où les morts entendront la >> voix du Fils de Dieu; et ceux qui l'entendront, vivront » : Amen, amen dico vobis, quia venit hora, et nunc est, quando mortui audient vocem Filii Dei; et qui audierint, vivent. « L'heure vient, et elle est déjà 3. » Ces derniers mots sont de Bossuet. Trouvant donc la place prise après le texte latin, Déforis a mis sa traduction avant; car c'est lui qui a fabriqué cette longue phrase: « En vérité, en vérité..., » jusqu'au latin. L'auteur dit souvent dans la suite du discours: Venit hora; et l'éditeur de répéter toujours : « L'heure vient; » « l'heure vient. » Mème répétition fastidieuse dans le plan du sermon sur la Vigilance chrétienne.

Toujours les éditeurs, dans le sermon pour le cinquième dimanche après l'Epiphanie: « Le vin signifie la joie; Vinum lætificat: « le vin >> réjouit; » et l'eau, les tribulations : Salvum me fac, Deus, quoniam intraverunt aquæ : « Sauvez-moi, mon Dieu, parce que les eaux sont entrées » jusque dans mon ame >>. A-t-on bien compris? Qu'on lise le texte original; on aura tout simplement : « Le vin signifie la joie, et l'eau les tribulations. >>

5

Mais revenons au commencement de notre volume, et montrons par 'Edition de Versailles, vol. XI, pag. 42. — 2 Ibid., pag. 107. Dans les premiers Sermons, l'édition de Versailles met les guillemets tantôt avant, tantôt après la ponctuation; plus loin, elle les met ordinairement avant, ce qui est contraire aux premiers principes de l'art typographique. -Ibid., pag. 116. - ▲ Ibid., pag. 172. — Ibid., pag. 619.

une confrontation rapide la manière générale de Déforis. Bossuet dit, dans le premier sermon pour la fête de tous les Saints, que nous ne pouvons entrer dans le ciel que par grace; puis il continue:

Texte des éditions.

Le Sauveur nous le dit dans notre Evangile Misericordiam consequentur: «ils obtiendront miséricorde ». Quelle est cette miséricorde que le Fils de Dieu leur promet? Je soutiens que c'est la vie éternelle: Regnum cœlorum, « le royaume des cieux » : Deum videbunt, « ils verront Dieu » : possidebunt terram, « ils posséderont la » terre » : terram viventium, « la terre » des vivans» : saturabuntur, « ils seront >> rassasiés » : inebriabuntur, «< ils seront >> enivrés»>: satiabor cùm apparuerit gloria tua, « je serai rassasié lorsque votre » gloire se manifestera»: consolabuntur, «ils seront consolés » : absterget Deus omnem lacrymam, «Dieu essuiera toutes » leurs larmes » : ainsi, misericordiam consequentur, « ils obtiendront la mi» séricorde 1».

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Est-ce du Déforis ou du Bossuet que nous avons dans la première colonne ? Voici un autre exemple pris dans le second sermon pour

la même fête :

Texte des éditions.

C'est la gradation de saint Paul : Omnia vestra sunt, vos autem Christi, Christus autem Dei; « Tout est à vous, » et vous êtes à Jésus-Christ, et Jésus» Christ est à Dieu ». Mais il ne faut pas séparer Jésus-Christ d'avec ses élus, d'autant que c'est le même esprit de Jésus-Christ qui se répand sur eux : tanquam unguentum in capite : «< comme >> le parfum répandu sur la tête, qui des»cend sur toute la barbe d'Aaron ». Ce sont ses membres, et la glorification n'est que la consommation du corps de Jésus-Christ: Donec occurramus ei in virum perfectum secundùm mensuram plenitudinis Christi : « Jusqu'à ce

Texte de Bossuet.

C'est la gradation de saint Paul : Omnia vestra sunt, vos autem Christi, Christus autem Dei. Mais il ne faut pas séparer Jésus-Christ d'avec ses élus, d'autant que c'est le même Esprit de Jésus qui se répand sur eux, tanquam unguentum in capite. Ce sont ses membres, et la glorification n'est que la consommation du corps de JésusChrist, donec occurramus ei in virum secundùm mensuram plenitudinis Christi. Et nous sommes tous bénis en Jésus-Christ, tanquam in uno. Donc les prédestinés sont ceux qui ont toutes les pensées de Dieu dès l'éternité, ce sont ceux à qui aboutissent tous ses des

'Edition de Versailles, vol. XI, pag. et 3. Voir, pour la place des guillemets, la note 2 de la page précédente.

Texte des éditions.

» que nous parvenions à l'état d'un >> homme parfait, à la mesure de l'âge » et de la plénitude selon laquelle Jésus>> Christ doit être formé en nous ». Et nous sommes tous bénis en JésusChrist; tanquam in uno : « comme en » un seul ». Donc les prédestinés sont ceux qui ont toutes les pensées de Dieu dès l'éternité, ce sont ceux à qui aboutissent tous ses desseins. C'est pourquoi, omnia propter electos : « tout est » pour les élus ». C'est pourquoi encore, diligentibus Deum omnia cooperantur in bonum: « tout contribue au bien » de ceux qui aiment Dieu » : omnia; tout 1; etc.

Texte de Bossuet.

seins. C'est pourquoi, omnia propter electos. C'est pourquoi encore, diligentibus Deum omnia cooperantur in bo

num: omnia.

Il est inutile de multiplier les citations. On dit que Bossuet traduisoit en chaire les textes de l'Ecriture. Cela peut être et n'être pas, selon les circonstances; mais, dans tous les cas, nous devons imprimer ce qu'il a écrit, non ce qu'il a dit peut-être ; mais personne n'a le droit de lui prêter des phrases et des versions; mais à coup sûr il ne traduisoit pas comme un élève de quatrième. Ecoutez comment il rend un passage dont Déforis translatoit tout à l'heure une partie : « Salvum me fac, Domine.... Sauvez-moi, sauvez-moi, Seigneur, de la corruption du siècle : ses eaux, ses faux plaisirs, ses fausses maximes ont pénétré le fond de mon ame; je suis enfoncé et englouti dans le limon de l'abîme, et je ne trouve ni de pied ni de consistance. » Toutes les traductions du grand orateur portent ce cachet; on reconnoît la main du maître dès les premiers mots. Depuis Pascal qui l'entendoit avec tant de bonheur, jusqu'aux écrivains qui l'admirent de nos jours, tous les hommes de goût proclament que Bossuet n'est nulle part plus sublime que dans la traduction des paroles divines.

On a recueilli dans une longue lecture, mis laborieusement en ordre et publié sous le titre de Traduction de l'Ecriture sainte, par Bossuet, les textes bibliques que ses œuvres présentent dans notre langue. L'intention est louable; mais la plupart de ces passages recueillis avec tant de peine, presque toutes ces traductions sortent de la plume de Déforis.

Mais voici un autre genre d'interpolations qui déparent le texte de Bossuet Déforis choisit mal les variantes ou les accumule les unes sur les autres.

Edition de Versailles, vol. XI, pag. 23 et 24.

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