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comme des flots les unes les autres; elles s'enflent, elles s'élèvent démesurément : il n'y a rien de si élevé dans le ciel, ni rien de si caché dans les profondeurs de l'enfer où ils ne s'imaginent de pouvoir atteindre Ascendunt usque ad cælos; et les conseils de sa Providence, et les causes de ses miracles, et la suite impénétrable de ses mystères, ils veulent tout soumettre à leur jugement: Ascendunt. Malheureux, qui s'agitant de la sorte, ne voient pas qu'il leur arrive comme à ceux qui sont tourmentés par la tempête: Turbati sunt, et moti sunt sicut ebrius : « Ils sont troublés comme des ivrognes; » la tête leur tourne dans ce mouvement: Et omnis sapientia eorum devorata est1 : « Là toute leur sagesse se dissipe; » et ayant malheureusement perdu la route, ils se heurtent contre des écueils, ils se jettent dans les abîmes, ils s'égarent dans des hérésies. Arius, Nestorius, votre curiosité vous a perdus. Voilà la tempête élevée par la curiosité des hérétiques : c'est par là qu'ils séduisent les simples, parce que, dit saint Augustin, « toute ame ignorante est curieuse : » Omnis anima indocta curiosa est : Cela est nouveau, écoutons. Arius, Nestorius, etc., pourquoi cherchez-vous ce qui ne se peut pas trouver? Ampliùs quærere non licet, quàm quod inveniri licet 3.

Pour empêcher les égaremens de cette curiosité pernicieuse, le seul remède, mes frères, c'est d'écouter la voix de l'Eglise et de soumettre son jugement à ses décisions infaillibles. Je parle à vous, enfans nouveaux nés que l'Eglise a engendrés : c'est sur la fermeté de cette Eglise qu'il faut appuyer vos esprits, qui seroient flottans sans ce soutien. Etes-vous curieux de la vérité? voulezvous voir? voulez-vous entendre? Voyez et écoutez dans l'Eglise : Sicut audivimus, sic vidimus: « Nous avons ouï et nous avons vu,» dit David; et où? In civitate Domini virtutum : « En la cité de notre Dieu, » c'est-à-dire en sa sainte Eglise. « Celui qui est hors de l'Eglise, dit saint Augustin, quelque curieux qu'il soit, de quelque science qu'il se vante, il ne voit ni n'entend; quiconque est dans l'Eglise, il n'est ni sourd ni aveugle : » Extra illam qui est, nec audit nec videt; in illà qui est, nec surdus nec cœcus est3.

27.

1 Psal. CVI, • Psal. XLVII, 9.

2 De Agon. Christ., n. 4. 3 Tertull., De Anima, n. 2. 5 In Psal. XLVII, n. 7.

Donc s'il est ainsi, chrétiens, que notre curiosité n'aille pas plus loin. L'Eglise a parlé, c'est assez : cet homme est sorti de l'Eglise; il prêche, il dogmatise, il enseigne : - Que dit-il? que prêche-t-il? quelle est sa doctrine? - O homme vainement curieux! je ne m'informe pas de sa doctrine; il est impossible qu'il enseigne bien, puisqu'il n'enseigne pas dans l'Eglise. Un martyr illustre, un docteur très-éclairé, saint Cyprien... Antonianus, un de ses collègues, lui avoit écrit au sujet de Novatien, schismatique, pour savoir de lui par quelle hérésie il avoit mérité la censure; le saint docteur lui fait cette belle réponse: Desiderasti ut rescriberem tibi quam hæresim Novatianus introduxisset..... Quisque ille fuerit, multùm de se licet jactans et sibi plurimùm vindicans, profanus est, alienus est, foris est': « Pour ce qui regarde Novatien, duquel vous désirez que je vous écrive quelle hérésie il a introduite, sachez premièrement que nous ne devons pas même être curieux de ce qu'il enseigne, puisqu'il enseigne hors de l'Eglise; quel qu'il soit et de quoi qu'il se vante, il n'est pas chrétien, n'étant pas en l'Eglise de Jésus-Christ. >>

L'orgueil des hérétiques s'élève : Quoi! je croirai sur la foi d'autrui! Je veux voir, je veux entendre moi-même. — Langage superbe! Reconnoissez-le, mes chers frères; c'est celui que vous parliez autrefois. L'Eglise l'a dit: n'est-ce pas assez? - Mais elle se peut tromper?-Enfant qui déshonores ta mère, en quelle Ecriture as-tu lu que l'Eglise puisse tromper ses enfans? Tu reconnois qu'elle est mère; elle seule peut engendrer les enfans de Dieu; si elle peut les engendrer, qui doute qu'elle puisse les nourrir? Certes la terre, qui produit les plantes, leur donne aussi leur nourriture; la nature ne fait jamais une mère, qu'elle ne fasse en même temps une nourrice. L'Eglise sera-t-elle seule qui engendrera des enfans et n'aura point de lait à leur donner? Ce lait des fidèles, c'est la vérité, c'est la parole de vie. Enfans dénaturés, si j'ai des entrailles qui vous ont portés, j'ai des mamelles pour vous allaiter (a) voyez, voyez le lait qui en coule, la parole de vérité qui en distille; approchez-vous, sucez et vivez, et ne portez pas 1 Cypr., Epist. LII ad Anton., p. 66, 68.

(a) Var. Qui sortez des entrailles et rejetez les mamelles, voyez...

Mais il faut connoître

votre bouche à des sources empoisonnées. quelle est cette Eglise.- Ah! qu'il est bien aisé d'exclure la vôtre. dressée de nouveau, ô Eglise bâtie sur le sable! Vous croyez, ô divin Jésus, avoir bâti sur la pierre; c'est sur un sable mouvant : c'est la confession de foi. Donc votre édifice est tombé par terre, il a fallu que Luther et Calvin vinssent le dresser de nouveau. Mes enfans, respectez mes cheveux gris; voyez cette antiquité vénérable : je ne vieillis pas, parce que je ne meurs jamais; mais je suis ancienne. Pourquoi vous vantez-vous de m'avoir rétablie? Quoi! vous avez fait votre mère! Mais si vous l'avez faite, d'où êtes-vous nés? Et vous dites que je suis tombée! Je suis sortie de tant de périls.

1

Laissons-les errer, mes frères; Dieu n'a perdu pour cela pas un des siens. Ils étoient de la paille, et non du bon grain : le vent a soufflé, et la paille s'en est allée; « ils s'en sont allés en leur lieu 1 : ils étoient parmi nous, mais ils n'étoient point des nôtres. » Pour nous, enfans de l'Eglise, et vous que l'on avoit exposés dehors comme des avortons, et qui êtes enfin rentrés dans son sein, apprenez à n'être curieux qu'avec l'Eglise, à ne chercher la vérité qu'avec l'Eglise, et retenez cette doctrine. Dieu auroit pu sans doute, car que peut-on dénier à sa puissance? il auroit pu nous conduire à la vérité par nos connoissances particulières; mais il a établi une autre conduite; il a voulu que chaque particulier fit discernement de la vérité, non point seul, mais avec tout le corps et toute la communion catholique, à laquelle son jugement doit être soumis. Cette excellente police est née de l'ordre de la charité, qui est la vraie loi de l'Eglise. Car si quelqu'un cherchoit en particulier, et si les sentimens se divisoient, les cœurs pourroient enfin être partagés. Mais pour nous unir tous ensemble par le lien d'une charité indissoluble, pour nous faire chérir davantage la communion et la paix, il a établi cette loi. Voulez-vous entendre la vérité, allez au sein de l'unité, au centre de la charité; c'est l'unité catholique qui sera la chaste mamelle d'où coulera sur vous le lait (a) de la doctrine évangélique, tellement que l'amour de la 1 Act., I, 25.

2 I Joan., II, 19. (a) Var.: D'où vous prendrez le lait.

vérité est un nœud qui nous lie à l'unité et à la société fraternelle. Nous sommes membres d'un même corps: cherchons tous ensemble, laissons faire les fonctions à chaque membre, laissons voir les yeux, laissons parler la bouche. Il y a des pasteurs à qui le Saint-Esprit même a appris à dire sur toutes les contestations qui sont nées : « Il a plu au Saint-Esprit et à nous 1. » Arrêtons-nous là, chrétiens, et « ne soyons pas plus sages qu'il ne faut; mais soyons sages avec retenue 2» et selon la mesure qui nous est donnée.

TROISIÈME POINT.

Jusqu'ici, mes frères, tout ce que j'ai dit est glorieux à l'Eglise j'ai publié sa constance dans les tourmens, sa victoire sur les hérésies; tout cela est grand et auguste; mais que ne puis-je maintenant vous cacher sa honte, je veux dire les mœurs dépravées de ceux qu'elle porte en son sein? Mais puisqu'à ma grande douleur cette corruption est si visible et que je suis contraint d'en parler, je commencerai à la déplorer par les éloquentes paroles d'un saint et illustre écrivain. C'est Salvien, prêtre de Marseille, qui dans le premier livre qu'il a adressé à la sainte Eglise catholique, lui parle en ces termes : « Je ne sais, dit-il, ô Eglise, de quelle sorte il est arrivé que ta propre félicité combattant contre toi-même, tu as presque autant amassé de vices que tu as conquis de nouveaux peuples : » Nescio quomodo pugnante contrà temetipsam tuâ felicitate, quantùm tibi auctum est populorum, tantùm penè vitiorum3. « La prospérité a attiré les pertes; la grandeur est venue, et la discipline s'est relâchée. Pendant que le nombre des fidèles s'est augmenté, l'ardeur de la foi s'est ralentie; et l'on t'a vue, ô Eglise, affoiblie par ta fécondité, diminuée par ton accroissement et presque abattue par tes propres forces: » Quantùm tibi copiæ accessit, tantùm disciplinæ recessit... Multiplicatis fidei populis, fides imminuta est...., factaque es, Ecclesia, profectu tuæ fœcunditatis infirmior atque accessu relabens, et quasi viribus minùs valida . Voilà une plainte bien éloquente; mais, mes frères, à notre honte elle n'est que trop véritable. L'Eglise 1 Act., XV, 2 Rom., XII, 3. 3 Advers. Avarit., lib. I, n. 1. — ↳ Ibid.

28.

n'est faite que pour les saints: il est vrai, les enfans de Dieu y sont appelés de toutes parts, tous ceux qui sont du nombre y sont entrés; mais plusieurs y sont entrés par-dessus le nombre : » Multiplicati sunt super numerum1. L'ivraie est crue avec le bon grain; et la charité s'étant refroidie, le scandale s'est élevé jusque dans la maison de Dieu. Voilà ce qui scandalise les foibles, voilà la tentation des infirmes. Quand vous verrez, mes frères, l'iniquité qui lève la tête au milieu même du temple de Dieu, Satan vous dira: Est-ce là l'Eglise ? sont-ce là les successeurs des apôtres ? et il tàchera de vous ébranler, imposant à la simplicité de votre foi.

Il faudroit peut-être un plus long discours pour vous fortifier contre ces pensées; mais étant pressé par le temps, je dirai seulement ce petit mot, plein de consolation et de vérité. Ne croyez pas, mes frères, que l'homme ennemi qui va semer la nuit dans le champ, puisse empêcher de croître le bon grain du père de famille, ni lui ôter sa moisson. Il peut bien la mêler, remarquez ceci, il peut bien semer par-dessus; mais il ne peut pas ni arracher le froment, ni corrompre la bonne semence. Il y en a qui profanent les sacremens; mais il y en a toujours qu'ils sanctifient. Il y a des terres sèches et pierreuses où la parole tombe inutilement; mais il y a des champs fertiles où elle fructifie au centuple. Il y a des gens de bien, il y a des saints: le bras de Jésus-Christ n'est pas affoibli; l'Eglise n'est pas devenue stérile; le sang de Jésus-Christ n'est pas inutile; la parole de son Evangile n'est pas infructueuse à l'égard de tous. Déplorez donc, quand il vous plaira, la prodigieuse corruption de mœurs qui se voit même dans l'Eglise; je me joindrai à vous dans cette plainte; je confesserai, avec saint Bernard, « qu'une maladie puante infecte quasi tout son corps. » Non, non, le temple de Dieu n'en est pas exempt : Jésus-Christ en enrichit qui le déshonorent; Jésus-Christ en élève qui servent à l'Antechrist; l'iniquité est entrée comme un torrent; on ne peut plus noter les impies, on ne peut plus les fuir, on ne peut plus les retrancher; tant ils sont forts, tant ils sont puissans, tant le nombre en est infini; la maison de Dieu n'en est pas exempte. Mais au milieu de tous ces désordres, sachez 1 Psal. XXXIX, 6.- 2 Matth., XIII, 24 et seq.3 Serm, XXXIII in Cant., n. 15.

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