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ris et je préserve, je nettoie et je fortifie; je suis également établie et pour ôter les péchés que tu as commis, et pour empêcher ceux qui pourroient naître. Tu m'honores en qualité de remède, tu me méprises en qualité de préservatif; ces deux fonctions sont inséparables pour quelle raison me divises-tu? Ou prends-moi toute, ou laisse-moi toute. Que répondrez-vous, chrétiens? d'où vient que vous vous préparez à vous confesser? d'où vient que vous examinez votre conscience? d'où vient que vous faites effort pour vous exciter à la contrition? Ah! dites-vous, je ne veux point faire un sacrilége en empêchant l'effet de la pénitence. C'est une fort bonne pensée; mais songez-vous que la pénitence a deux qualités ? Vous croyez faire un sacrilége, si vous empêchez son effet dans la vertu qu'elle a d'effacer les crimes; pensez-vous que l'irrévérence soit moindre, de l'empêcher dans celle qu'elle a de les prévenir ?

C'est là tout le fruit du remède : si c'étoit tout l'effet de la pénitence d'obtenir seulement pardon aux pécheurs et qu'elle ne les aidât pas à se corriger, vous voyez qu'elle ne feroit que flatter le vice, au lieu que Dieu l'a établie pour en arracher jusqu'aux plus profondes racines. Mais pour mettre ce raisonnement dans sa force, joignons à la qualité de remède celle que nous avons réservée pour le dernier point, je veux dire la qualité de sacrement, et considérons, chrétiens, quel sacrement c'est que la pénitence.

TROISIÈME POINT.

Toute l'antiquité chrétienne nous répond que c'est un second baptême. Apprenons donc du divin Apôtre quel doit être l'effet du baptême : C'est, dit-il, de nous faire mourir au péché et de nous ensevelir avec Jésus-Christ'. Il en est de même de la pénitence, d'autant plus que c'est un baptême de larmes, un baptême pénible et laborieux. « Et si nous sommes morts au péché, comment pourrons-nous désormais y vivre ? » Mais si la pénitence doit être une mort, comprenons qu'on ne demande pas de nous un changement médiocre, ni une réformation extérieure et superfi1 Rom., VI, 3, 4. — 2 Ibid., 2.

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cielle. C'est-à-dire qu'il faut couper jusqu'au vif, c'est-à-dire qu'il faut porter le couteau jusqu'aux inclinations les plus chères, c'est-à-dire qu'il faut arracher du fond de nos cœurs tous ces objets qui leur plaisent trop, quand ils nous seroient plus doux que nos yeux, plus nécessaires que notre main droite, plus aimables même que notre vie; coupons, tranchons: Abscide illam'. Ce n'est pas sans raison que l'Apôtre ne nous prêche que mort: entrons en cette pieuse méditation, et considérons encore quelle est cette mort. C'est une mort spirituelle et mystérieuse, par laquelle nous appliquons sur nous-mêmes la mort effective du Sauveur des ames par une sainte imitation. Et c'est, fidèles, ce que nous faisons lorsque nos cœurs sont de glace pour les vains plaisirs, nos mains immobiles pour les rapines, nos yeux fermés pour les vanités, et nos bouches pour les blasphèmes et les médisances. C'est alors que nous sommes morts avec Jésus-Christ. Et comme il n'y a sur son corps aucune partie qui n'ait éprouvé la rigueur de quelque supplice, nous devons crucifier en nous le vieil homme dans tout ce qu'il a de mauvais désirs, et pour cela les rechercher jusqu'à la racine. La pénitence nous dévoue à l'imitation de la mort de Jésus-Christ : c'est à quoi nous nous obligeons par la pénitence.

Telle est la vertu de ce sacrement. Tu te trompes donc, chrétien, si tu crois qu'il soit temps de te reposer après avoir reçu l'absolution; ce n'est que le commencement du travail. Ce remède sacré de la pénitence n'a fait que la moitié de son opération; n'empêche pas l'autre par ta négligence; autrement nous sommes coupables de la profanation de ce sacrement, le violant dans sa partie la plus nécessaire, c'est-à-dire dans le secours qu'il nous donne pour nous corriger. Quand ce ne seroit qu'un simple remède, ce seroit toujours beaucoup de le rejeter de la main de ce médecin charitable; mais c'est un remède sacré, il y a de la profanation et du sacrilége; et comme Dieu ne venge rien tant que la profanation de ses saints mystères, sa colère s'élèvera enfin contre nous, et il ne nous permettra pas de nous jouer ainsi de ses dons.

1 Marc., IX, 42.

C'est une parole bien remarquable du sacré concile d'Elvire: « Ceux, dit-il, qui retomberont dans leurs premiers crimes après le remède de la pénitence, il nous a plu qu'on ne leur permît pas de se jouer encore une fois de la communion : » Placuit eos non ludere ulteriùs de communione pacis '. Voilà une terrible parole. Vous voyez que cette assemblée vénérable estime qu'on se joue des sacrés mystères, lorsqu'après les avoir reçus on retourne à ses premières ordures; et cela quand ce ne seroit qu'une fois. Si nous avions à rendre compte de nos actions en présence de ces saints évêques, quelles exclamations feroient-ils ? Nous prendroient-ils pour des chrétiens, nous qui faisons comme un jeu d'enfant de la grace de la pénitence? Cent fois la quitter, cent fois la reprendre; cent fois promettre, cent fois manquer; n'est-ce pas se jouer des saints sacremens? Mais, ô jeu funeste pour nous, qu'une créature impuissante ose ainsi se jouer à Dieu, et ce qui est bien plus horrible, se jouer de Dieu! C'est se jouer de Dieu que de se jouer de ses dons. Ah! il est temps enfin que ce jeu finisse; il y a déjà trop longtemps qu'il dure, il y a déjà trop longtemps que nous abusons de la pénitence.

Et ne me dites pas que sa miséricorde est infinie. Il est vrai qu'elle est infinie, mais ses effets ont leurs limites que sa sagesse leur a marquées. Elle qui a compté les étoiles, qui a borné l'étendue du ciel dans une rondeur finie, qui a prescrit des bornes aux flots de la mer, a marqué aussi la hauteur jusqu'où elle a résolu de laisser croître nos iniquités. Dieu a dit que ses miséricordes n'ont point de mesure; mais il a dit aussi dans son Evangile : << Remplissez la mesure de vos pères 2. » Il a dit qu'il recevroit tous les pénitens; mais il a dit aussi à certains pécheurs : « Vous mourrez dans votre péché . » Il a pardonné à l'un des larrons; mais l'autre a été condamné dans le trône même de miséricorde, à la croix, Il a reçu Madeleine et Pierre; mais il a fermé les oreilles aux prières d'Antiochus; il a endurci Pharaon; il a puni d'une mort soudaine le premier péché d'Ananias et de Sapphira. Ne croyez pas qu'il nous laisse pécher des siècles entiers. Il faut mettre fin à tous ces désordres; et il n'y a que ces deux moyens d'arrêter 1 Cap. XLVIII. Labb., tom. I, col. 975.- 2 Matth., XXIII, 32.— 3 Joan., VIII, 24.

le cours de nos crimes, ou le supplice, ou la pénitence : si nous ne l'arrêtons une fois par une pénitence fidèle, Dieu sera contraint de l'arrêter par une vengeance implacable. Tu disputes contre Dieu depuis si longtemps à qui emportera le dessus, toi à pécher, lui à pardonner; ta malice conteste contre sa bonté ; enfin elle te laissera la victoire. Ah! victoire funeste et terrible, par laquelle ayant mis à bout sa miséricorde, nous tomberons inévitablement dans les mains de sa rigoureuse justice.

Prévenons, fidèles, un si grand malheur. C'est pour cela que Dieu nous envoie cette grace extraordinaire du saint jubilé, afin que nous rentrions en nous-mêmes. Si nous ajoutons le mépris d'une telle grace à celui de tous ses autres bienfaits, Dieu s'irritera d'autant plus que la libéralité méprisée aura été plus considérable; sa haine s'allumera avec plus d'aigreur, si nous rompons le sacré lien de cette réconciliation solennelle; nos mauvaises inclinations reprendront de nouvelles forces, après qu'elles auront résisté à un remède si efficace; nos cœurs s'endurciront davantage, si cette grace extraordinaire ne les amollit; et il vengera d'autant plus rigoureusement la sainteté de ses sacremens profanés, après qu'il aura voulu les accompagner d'une rémission si universelle.

Corrigeons donc enfin notre vie passée; recevons le remède de la pénitence dans l'une et dans l'autre de ses qualités; qu'elle efface les fautes passées, qu'elle prévienne les maux à venir. Recevons-la comme un remède qui purge et comme un préservatif qui prévient. La disposition pour la recevoir comme remède des péchés passés, c'est une véritable douleur de les avoir commis; la disposition pour la recevoir en qualité de précaution, c'est une crainte filiale d'y retourner, et une fuite des occasions dans lesquelles nous savons par expérience que notre intégrité a déjà tant de fois fait naufrage. Renouvelons-nous si bien dans la vie présente, que nous allions jouir avec Dieu de ce grand et éternel renouvellement qu'il a prédestiné à ses serviteurs pour la gloire de la grace de Jésus-Christ son Fils bien-aimé, qui avec lui et le Saint-Esprit vit et règne aux siècles des siècles. Amen.

SERMON

POUR

LE VENDREDI APRÈS LES CENDRES (a).

Diligite inimicos vestros, benefacite his qui oderunt vos, et orate pro persequentibus et calumniantibus vos.

Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour ceux qui vous persécutent et vous calomnient. Matth., v, 44.

L'homme est celui des animaux qui est le plus né pour la concorde, et l'homme est celui des animaux où l'inimitié et la haine font de plus sanglantes tragédies. Nous ne pouvons vivre sans société, et nous ne pouvons aussi y durer longtemps: Nihil est (a) Exorde.

La charité, une dette. Quelle nature de dette?

Premier point. C'est-à-dire qu'on doit l'amour pour ses frères, non pas aux hommes. Par conséquent la dette est indispensable. La colère se change en haine; elle s'aigrit comme une liqueur. La charité ne s'épuise jamais. Elle se fortifie dans les rebuts. O generatio incredula et perversa.....; afferte huc illum ad me (Matth., XVII, 16).

Second point. Lorsque l'ennemi est à nos pieds, alors c'est le temps de lui bien faire; exemple, David. Noli vinci à malo, ut sit bonus contra malum, non ut sint duo mali (S. August., serm. 11 in Psal. xxxiv, n. 1).

Troisième point. · Ipsa est sincera et plena justitiæ et misericordiæ vindicta martyrum, ut evertatur regnum peccati (S. August., De Serm. Domin. in monte, lib. 1, n. 77). Elle fait deux choses: 1o Elle les venge de leurs ennemis. Saint Paul et saint Etienne. 2o Elle fait que leurs ennemis les vengent. Nonne tibi v detur in seipso Stephanum martyrem vindicare (S. August., Serm. cccv, n. 7)? — Qui accipit gladium, gladio peribit (Matth., XXVI, 52).

Prêché le vendredi 20 février 1660, à Paris, dans la maison des Nouvelles Catholiques.

Etablie pour recevoir les juives et les protestantes qui rentroient dans le sein de l'Eglise, cette institution se trouvoit rue Sainte-Avoye, près du Temple. Dans la péroraison de son discours, Bossuet sollicita la charité de ses auditeurs avec son zèle et son éloquence ordinaire : « Ces pauvres filles, dit-il, sont venues à l'Eglise et n'y peuvent trouver du pain, elles ont couru à nous et notre lâcheté les abandonne ! » En même temps qu'il alloit ainsi plaider la cause des pauvres dans les églises de Paris, il prêchoit le Carême aux Minimes : on le voit dans la liste des prédicateurs qui se firent entendre pendant cette station. Ajoutons en passant qu'il annonça la sainte parole aux Nouveaux Catholiques le jour suivant.

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TOM. VIII.

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