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pent le monde, à ceux qui l'amusent par de vains prétextes, à ceux qui le scandalisent; ainsi, dis-je, leur sera rendue à la face de tout le genre humain, des hommes et des anges, l'éternelle confusion qui est leur juste salaire, leur naturel apanage qu'ils ont si bien mérité.

PREMIER POINT.

« L'insensé a dit en son cœur: Il n'y a point de Dieu : » Dixit insipiens in corde suo: Non est Deus'. Les saints docteurs nous enseignent que nous pouvons nous rendre coupables en plusieurs façons de cette erreur insensée. Il y a en premier lieu les athées et les libertins qui disent tout ouvertement que les choses vont à l'aventure, sans ordre, sans gouvernement, sans conduite supérieure. Insensés, qui dans l'empire de Dieu, parmi ses ouvrages, parmi ses bienfaits, osent dire qu'il n'est pas et ravir l'être à celui par lequel subsiste toute la nature! Il y a peu de ces monstres; le nombre en est petit parmi les hommes, quoique, hélas! nous pouvons dire avec tremblement qu'il n'en paroit toujours que trop dans le monde. Il y en a d'autres, dit le docte Théodoret 2, qui ne vont pas jusqu'à cet excès de nier la Divinité; mais pressés et incommodés dans leurs passions déréglées par ses lois qui les contraignent, par ses menaces qui les étonnent, par la crainte de ses jugemens qui les trouble, ils désireroient que Dieu ne fût pas, ils voudroient pouvoir croire que Dieu n'est qu'un nom (a); et ils disent dans leur cœur, non par persuasion, mais par désir : « Il n'y a pas de Dieu. »> « Insensés, dit saint Augustin 3, qui parce qu'ils sont déréglés, voudroient détruire la règle et souhaitent qu'il n'y ait ni loi, ni justice, à cause qu'ils ne sont pas justes. » Je laisse encore ceux-ci; je veux croire qu'il n'y a aucun de mes auditeurs qui soit si dépravé et si corrompu. Je viens à une troisième manière de dire que Dieu n'est pas, de laquelle vous avouerez que la plupart de mes auditeurs ne se peuvent pas excuser. Je veux parler de ceux qui en confessant que Dieu est le comptent néanmoins tellement pour rien, qu'ils pensent en effet n'avoir rien à craindre, quand ils n'ont que lui pour témoin. Ceux-là manifes1 Psal. LII, 1. 2 In Psal. LII, tom. I, 3 Tract. xc in Joan., n. 3. p. 603. (a) Var. Ils voudroient même le pouvoir croire.

tement comptent Dieu pour rien; et ils disent donc en leur cœur : « Il n'y a point de Dieu. >>

Eh! qui de nous n'est pas de ce nombre? Qui de nous n'est pas arrêté dans une action malhonnête par la rencontre d'un homme qui n'est pas de notre cabale? et cependant de quel front savonsnous soutenir le regard de Dieu? N'apportons pas ici l'exemple de ceux qui roulent en leur esprit quelque noir dessein; tout ce qu'ils rencontrent les trouble, et la lumière du jour et leur ombre même leur fait peur; ils ont peine à porter eux-mêmes l'horreur de leur funeste secret, et ils vivent cependant dans une souveraine tranquillité des regards de Dieu. Laissons ces tragiques attentats, disons ce qui se voit tous les jours. Quand vous déchirez en secret celui que vous caressez en public; quand vous le percez incessamment de cent plaies par les coups mortels de votre dangereuse langue; quand vous mêlez artificieusement le vrai et le faux pour donner de la vraisemblance à vos histoires malicieuses; quand vous violez le sacré dépôt du secret qu'un ami trop simple a versé tout entier dans votre cœur, et que vous faites servir à vos intérêts sa confiance qui vous obligeoit à penser aux siens, combien de précautions pour ne point paroître? combien regardez-vous à droite et à gauche? Et si vous ne voyez pas de témoin qui vous puisse reprocher dans le monde votre lâcheté, si vous avez tendu vos piéges si subtilement qu'ils soient imperceptibles aux regards humains, vous dites : Qui nous a vus? Narraverunt ut absconderent laqueos, dixerunt: Quis videbit eos 1? « Ils ont consulté ensemble sur les moyens de cacher leurs piéges, et ils ont dit : Qui pourra les découvrir? » Vous ne comprenez donc pas parmi les voyans celui qui habite au ciel? Et cependant entendez le même Psalmiste: « Quoi! celui qui a formé l'oreille, n'écoute-t-il pas? et celui qui a fait les yeux est-il aveugle? Qui plantavit aurem, non audiet? aut qui finxit oculum, non considerat?? Au contraire ne savez-vous pas qu'il est tout vue, tout ouïe, tout intelligence; que vos pensées lui parlent, que votre cœur lui dit tout, que votre conscience est sa surveillante et son témoin contre vous? Et cependant sous ces yeux si vifs et sous ces regards si perçans, vous jouissez

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sans inquiétude du plaisir d'être caché? N'est-ce pas le compter pour rien, et « dire en son cœur insensé : Il n'y a point de Dieu? » Dixit insipiens in corde suo: Non est Deus.

Il n'est pas juste, Messieurs, que les pécheurs se sauvent toujours à la faveur des ténèbres de la honte qui leur est due. Non, non, que ces femmes infidèles et que ces hommes corrompus se couvrent, s'ils peuvent, de toutes les ombres de la nuit et enveloppent leurs actions déshonnêtes dans l'obscurité d'une intrigue impénétrable, si faut-il que Dieu les découvre un jour et qu'ils boivent la confusion, car ils en sont dignes. C'est pourquoi il a destiné ce dernier jour « qui percera les ténèbres les plus épaisses et manifestera, comme dit l'Apôtre, les conseils les plus cachés : » Qui et illuminabit abscondita tenebrarum, et manifestabit consilia cordium1. Alors quel sera l'état des grands du monde, qui ont toujours vu sur la terre et leurs sentimens applaudis et leurs vices mêmes adorés? Que deviendront ces hommes délicats, qui ne peuvent supporter qu'on connoisse leurs défauts, qui s'inquiètent, qui s'embarrassent, qui se déconcertent quand on leur découvre leur foible? Alors, dit le prophète Isaïe, « les bras leur tomberont de foiblesse, » omnes manus dissolventur; « leur cœur angoissé défaudra, » omne cor hominis contabescet; « un chacun sera confus devant son prochain, » unusquisque stupebit ad proximum suum; « les pécheurs mêmes se feront honte mutuellement, leurs visages seront enflammés, » facies combustæ vultus eorum2; tant leur face sera toute teinte et toute couverte de la rougeur de la honte. O ténèbres trop courtes! ô intrigues mal tissues! ô regard de Dieu trop perçant et trop injustement méprisé! ô vices mal cachés! ô honte mal évitée!

Mais de tous les pécheurs qui se cachent, aucuns ne seront découverts avec plus de honte que les faux dévots et les hypocrites. Ce sont ceux-ci, Messieurs, qui sont des plus pernicieux ennemis de Dieu, qui combattent contre lui sous ses étendards. Nul ne ravilit davantage l'honneur de la piété que l'hypocrite, qui la fait servir d'enveloppe et de couverture à sa malice. Nul ne viole la sainte majesté de Dieu d'une manière plus sacrilége que l'hypoIsa., XIII, 7 et 8.

1 I Cor., IV, 5.

crite, qui s'autorisant de son nom auguste, lui veut donner part à ses crimes et le choisit pour protecteur de ses vices, lui qui en est le censeur. Nul donc ne trouvera Dieu juge plus sévère que l'hypocrite, qui a entrepris de le faire en quelque façon son complice. Mais ne parlons pas toujours de ceux qui contrefont les religieux. Le monde a encore d'autres hypocrites. N'y a-t-il pas des hypocrites d'honneur, des hypocrites d'amitié, des hypocrites de probité et de bonne foi, qui en ont toujours à la bouche les saintes maximes, mais pour être seulement des lacets aux simples et des piéges aux innocens; si accommodans, si souples et si adroits, qu'on donne dans leurs filets, et ceux même qui les connoissent? Il faut qu'ils soient confondus. Venez donc, abuseurs publics, toujours contraints, toujours contrefaits, làches et misérables captifs de ceux que vous voulez captiver; venez, qu'on lève ce masque et qu'on vous ôte ce fard; mais plutôt il faut le laisser sur votre face confuse, afin que vous paroissiez doublement horribles, comme une femme fardée et toujours plus laide, dans laquelle on ne sait ce qui déplaît davantage, ou sa laideur ou son fard. Ainsi viendront rougir devant Jésus-Christ tous ces trompeurs vainement fardés; ils viendront, dis-je, rougir non-seulement de leur crime caché, mais encore de leur honnêteté apparente. Ils viendront rougir encore une fois de ce qu'ils ont assez estimé la vertu pour la faire servir de prétexte, de montre et de parade; et ne l'ont pas toutefois assez estimée pour la faire servir de règle: Ergo et tu confundere, et porta ignominiam tuam 1.

Si cependant ils marchent la tête levée et jouissent apparemment de la liberté d'une bonne conscience, s'ils trompent le monde, si Dieu dissimule, qu'ils ne pensent pas pour cela avoir échappé ses mains. Il a son jour arrêté, il a son heure marquée, qu'il attend avec patience. Pourrai-je bien vous expliquer un si grand mystère par quelque comparaison tirée des choses humaines? Comme un roi qui sent son trône affermi et sa puissance établie, s'il apprend qu'il se fait contre son service quelques secrètes pratiques (car il est malaisé de tromper un roi qui a les yeux ouverts et qui veille); il pourroit étouffer dans sa naissance cette cabale découEzech., XVI, 52.

verte; mais assuré de lui-même et de sa propre puissance, il est bien aise de voir jusqu'où iront les téméraires complots de ses sujets infidèles et ne précipite pas sa juste vengeance, jusqu'à ce qu'ils soient parvenus au terme fatal où il a résolu de les arrêter; ainsi et à plus forte raison ce Dieu tout-puissant, souverain arbitre et dispensateur des temps, qui du centre de son éternité développe tout l'ordre des siècles, et qui devant l'origine des choses a fait la destination de tous les momens selon les conseils de sa sagesse, à plus forte raison, chrétiens, n'a-t-il rien à précipiter ni à presser. Les pécheurs sont sous ses yeux et sous sa main. Il sait le temps qu'il leur a donné pour se repentir et celui où il les attend pour les confondre. Cependant, qu'ils cabalent, qu'ils intriguent, qu'ils mêlent le ciel et la terre pour se cacher dans la confusion de toutes choses, ils seront découverts au jour arrêté; leur cause sera portée aux grandes assises générales de Dieu, où comme leur découverte ne pourra être empêchée par aucune adresse, aussi leur conviction ne pourra être éludée par aucune excuse. C'est ma seconde partie, que je joindrai pour abréger avec la troisième dans une même suite de raisonnement.

SECOND POINT.

Le grand pape saint Grégoire, dans la troisième partie de son Pastoral, compare les pécheurs à des hérissons. Lorsque vous êtes éloigné, dit-il, de cet animal et qu'il ne craint pas d'être pris, vous voyez sa tête, ses pieds et son corps; quand vous approchez pour le prendre, vous ne trouvez plus qu'une masse ronde qui pique de tous côtés; et celui que vous découvriez de loin tout entier, vous le perdez tout à coup aussitôt que vous le tenez entre vos mains : Intra tenentis manus totum simul amittitur, quod totum simlu antè videbatur. C'est l'image, dit saint Grégoire, de l'homme pécheur qui s'enveloppe dans ses raisons et dans ses excuses. Vous avez découvert toutes ses menées et reconnu distinctement tout l'ordre du crime; vous en voyez les pieds, le corps et la tête. Aussitôt que vous pensez le convaincre en lui racontant ce détail, il retire ses pieds, il couvre tous les vestiges de son entreprise, il 1 S. Greg. Magn., Pastor., part. III, cap. XI.

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