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31.

Conclusion

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draperies pleines et flottantes à longs plis, sont agréables et majestueuses. »

Mais, par une espèce de pressentiment de l'exagération qu'une nation mobile et légère apporte toujours dans ses goûts et dans ses modes, Fénelon ajoute: « Il ne faut pas souhaiter qu'elles prennent «<l'extérieur antique; il y auroit de l'extravagance « à le vouloir : il faut seulement qu'elles prennent « le goût de cette simplicité d'habits, si noble, si gracieuse, et d'ailleurs si convenable aux mœurs chrétiennes... Les véritables graces suivent la «nature, et ne la génent jamais. »

Les derniers chapitres de l'ouvrage sont consade l'ouvrage. crés à l'instruction des femmes et des gouvernantes, appelées à suppléer ou à seconder les mères dans l'éducation de leurs enfants (1). Tout ce qu'on a jamais écrit de plus raisonnable et de plus solide pour l'instruction des mères de famille, sur la manière de conduire leurs enfants, de traiter leurs domestiques, de régler l'intérieur de la maison, de surveiller tous les détails du ménage, se trouve ici réuni en quelques pages, mais avec cet intérêt et ce charme inexprimables dont le secret semble réservé à Fénelon. Chacun de ses avis et de ses préceptes est éclairci par des détails et des exemples qui en rendent la vérité

(1) De l'Éduc. des filles, ch. 11, 12 et 13.

sensible; qui en mettent, pour ainsi dire, la pratique sous les yeux du lecteur; et qui supposent, dans l'auteur, un esprit d'observation et de sagesse, une profondeur de vues et de réflexions, un sentiment des usages et des convenances, que très-peu d'écrivains ont possédés dans un si haut degré. Rien ne lui échappe dans la vie intérieure des familles, ni dans le tableau du monde où elles sont destinées à vivre. Il finit par cet éloge si touchant, que l'Écriture fait, dans le livre des Proverbes, « de la femme vraiment admirable,

que ses enfants ont dite heureuse, que son mari « a louée, et qui a été louée par ses propres « œuvres dans l'assemblée des sages, et par les regrets et les pleurs de tous ceux qui l'ont <«< connue, aimée et respectée (1). »

On ne peut s'empêcher, en lisant cet ouvrage, d'admirer le ton de modestie et de simplicité

avec lequel Fénelon y présente plusieurs observations de détail, aussi fines que justes et profondes. L'étonnement augmente encore si l'on compare cette simplicité avec le faste des auteurs plus récents, qui nous ont reproduit ces mêmes observations comme des découvertes qui sembloient leur appartenir. « Je ne donne pas ces petites

(1) De l'Éduc, des filles, ch. 13.

32. Mérite

de ce traité. et importance

choses pour grandes, » dit Fénelon (1). Mais que Fénelon paroît grand, lorsqu'il ne donne que comme de petites choses ces observations fines et délicates, qui tenoient à une attention si suivie, à des réflexions si profondes et si variées, qui supposoient tant de goût et de tact, et qui étoient l'expression du cœur le plus sensible et le plus vertueux!

pre

Nous nous sommes un peu étendu sur ce traité d'éducation, non-seulement parce qu'il fut le mier ouvrage de Fénelon, et qu'il réunit tous les genres de mérite qui peuvent appartenir à un pareil sujet; mais encore parce qu'il indiqua, pour ainsi dire, d'avance, au duc de Beauvilliers, le précepteur des petits-fils de Louis XIV.

Il y a loin, sans doute, du gouvernement domestique des familles au gouvernement d'un grand empire. Mais la différence des objets ne change rien au caractère du génie, qui les considère chacun sous son véritable point de vue. Le même esprit d'observation et de sagesse, qui sait donner à chaque sujet toute la profondeur et toute l'étendue dont il est susceptible, sans jamais sortir des bornes où il doit se renfermer, suppose toujours cette surabondance de génie et de talent, qui ne demande qu'un libre essor et des circonstances propices,

(1) De l'Éduc. des filles, ch. 3.

pour embrasser un plus vaste espace, et atteindre les points les plus élevés.

Lorsqu'on a lu le traité De l'Éducation des filles,

33.

Vie sérieuse

et retirée de Fénelon,

composa cet ouvrage.

à

on est disposé à croire que Fénelon n'avoit pu acquérir un sentiment si juste et si délicat des usages, l'époque où il des convenances et des travers de la société, que par un commerce habituel avec le monde. Cependant, à l'époque où il composa cet ouvrage, il étoit dans la retraite, uniquement occupé de ses devoirs ecclésiastiques. Il logeoit, à la vérité, chez le marquis de Fénelon, son oncle, qui avoit autrefois beaucoup vécu à la cour et dans le monde. Mais cet oncle vivoit alors lui-même fort retiré, livré tout entier à la méditation des grandes vérités de la religion, et n'ayant conservé, de toutes ses anciennes relations, qu'un petit nombre d'amis qui partageoient ses principes et ses sentiments. Il est vrai que ces amis étoient des hommes du premier mérite, par leur vertu et leur caractère ; prévenus favorablement pour le neveu, par leur amitié pour l'oncle, ils éprouvoient déjà pour Fénelon cette espèce d'attrait, qui lui tint si étroitement unis, pendant toute sa vie, tous ceux qui avoient une fois commencé à l'aimer. Ce fut dans la société de ces hommes distingués, déjà désabusés du monde, ou qui avoient eu la sagesse d'y conserver l'indépendance de leur caractère, en se retirant souvent dans la solitude de leurs pensées, que Fénelon ap

prit à connoître le monde, beaucoup mieux qu'il ne l'auroit connu, en s'abandonnant inconsidérément au tourbillon des sociétés. D'ailleurs, ce seroit une illusion de croire qu'on ne connoît bien le monde, qu'en se livrant au tumulte insensé de ses plaisirs bruyants, à ses joies si vaines, à son oisive activité. Il reste bien peu de temps et de moyens pour l'observation, lorsqu'on est soi-même entraîné par le mouvement rapide qui précipite les jours et les années de la vie, dans ce vide immense de soins inutiles, de distractions pénibles, de vains projets, d'espérances trompeuses. C'est de la solitude qu'il faut voir le monde, ses passions, ses ennuis, ses vicissitudes; la connoissance des hommes n'est point attachée à l'observation superficielle des formes et des usages de la société. L'habitude de la politesse et des égards contribue sans doute à répandre plus de douceur dans les mœurs, et plus d'élégance dans les manières; mais il n'est pas nécessaire de consumer sa vie entière dans ces soins frivoles, pour avoir un grand usage du monde; il suffit de porter en soi-même le sentiment des convenances, et cette aménité d'esprit et de caractère qui forme la véritable urbanité.

Il est, en effet, assez remarquable que tous les bons ouvrages du siècle de Louis XIV, ceux dans lesquels on retrouve le sentiment le plus exquis de tout ce qui constitue le bon goût dans la littéra

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