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compense ni à la punition, ni au paradis ni à l'enfer, ni à la mort ni à l'éternité. Elle ne doit plus avoir aucun désir des vertus, ni de sa propre sanctification, ni même de son salut, dont elle doit perdre l'espérance.

4o Dans ce même état de perfection, la pratique de la confession, de la mortification et de toutes les bonnes œuvres extérieures, est inutile et même nuisible, parce qu'elle détourne l'âme du parfait repos de la contemplation.

5o Dans l'oraison parfaite, il faut demeurer en quiétude, dans un entier oubli de toute pensée particulière, même des attributs de Dieu, de la Trinité, et des mystères de Jésus-Christ. Celui qui, dans l'oraison, se sert d'images, de figures, d'idées, ou de ses propres conceptions, n'adore point Dieu en esprit et en vérité.

6o Le libre arbitre étant une fois remis à Dieu, avec le soin et la connoissance de notre âme, il ne faut plus avoir aucune peine des tentations, ni se soucier d'y faire aucune résistance positive. Les représentations et les images les plus honteuses qui affectent alors la partie sensitive de l'âme, sont tout à fait étrangères à la partie supérieure. L'homme n'est plus comptable à Dieu des actions les plus honteuses, parce que son corps peut devenir l'instrument du démon, sans que l'âme, intimement unie à son créateur, prenne aucune part

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13.

Progrès de ses erreurs; leur condamnation.

à ce qui se passe dans cette maison de chair qu'elle

habite.

7° Ces terribles épreuves sont une voie courte et assurée, pour parvenir à purifier et éteindre toutes les passions. L'âme qui a passé par cette voie intérieure, ne sent plus aucune révolte, et ne fait plus aucune chute, même vénielle.

1 On peut s'étonner, au premier abord, qu'une doctrine si révoltante ait pu trouver en Italie, et même à Rome, des partisans parmi des personnes éminentes en piété, et que la dignité de leur caractère, jointe à la pureté bien connue de leurs mœurs, auroient dû préserver d'une pareille séduction. Toutefois, on sera moins étonné de cette illusion, si l'on fait attention que Molinos lui-même, soit qu'il n'eût pas aperçu d'abord les affreuses conséquences de son système, soit qu'il n'osât pas les tirer, ne les manifesta pas dès le principe. Il est d'ailleurs certain, que ses erreurs étoient dissimulées sous l'apparence d'une grande piété, et sous un langage de spiritualité, qui, aux yeux des personnes simples et trop peu précautionnées, excluoient naturellement toutes les idées grossières et les conséquences révoltantes de son système.

1 Mais, quelles qu'aient pu être, dans le principe, les causes de l'illusion, les personnes éclairées ne tardèrent pas à voir que la doctrine de Molinos tendoit à précipiter l'homme, non-seulement dans une

monstrueuse indifférence sur son salut, et sur les pratiques de piété les plus essentielles, mais encore dans le plus affreux débordement de mœurs. Aussi

le

pape Innocent XI ne se borna point à condamner, par sa bulle du 20 novembre 1687, les principales assertions de Molinos, comme respectivement hérétiques, scandaleuses et blasphématoires; il l'obligea de plus à rétracter sa doctrine, en habit de pénitent, devant toute la cour romaine et le peuple assemblés; et ce ne fut qu'en considération de son repentir, qu'on se borna à le condamner à une pénitence et à une prison perpétuelles, dans lesquelles il finit pieusement ses jours, le 29 décembre 1696(1). I La doctrine et les écrits de ce novateur firent

peu

de bruit en France, avant la condamnation solennelle dont nous venons de parler; mais il est à remarquer, que, dans le temps même où les erreurs de Molinos commençoient à se répandre en Italie, le quiétisme s'introduisoit en France, sous une forme plus spirituelle et plus séduisante. Dès l'an 1670, on vit paroître à Paris l'ouvrage de François Malaval, intitulé: Pratique facile pour élever l'áme à la contemplation (in-12); ouvrage bien éloigné

(1) Dupin et le P. d'Avrigny placent la mort de Molinos au 28 novembre 1692; nous corrigeons cette erreur d'après les Actes de la condamnation des Quietistes, qu'on voit à la suite de l'Instruct. de Bossuet sur les états d'oraison; édit. de 1697. (ÉDIT.)

sans doute des erreurs grossières de Molinos, mais plein d'une spiritualité raffinée, qui, sous prétexte de contemplation, de repos en Dieu, et de parfait abandon, autorise une complète inaction dans l'oraison, la suppression des actes les plus essentiels à la piété, et l'indifférence même par rapport au salut (1).

(1) L'ouvrage de Malaval, publié d'abord en françois en 1670, fut presque aussitôt traduit en italien (1673 et 1676), et répandu en Italie, à l'époque où les erreurs de Molinos commençoient à faire du bruit. Le P. Segneri combattit fortement la doctrine de cet ouvrage dans plusieurs écrits, dont le principal est celui qui a pour titre : I sette principj su cui si fonda la nuova orazione di quiete, riconosciuti per poco saldi. (Voyez, à ce sujet, la Préface des Méditations du P. Segneri. Paris, 1724, in-12.) L'année même de la condamnation de Molinos, on vit paroître une traduction françoise de cet ouvrage du P. Segneri, sous ce titre : Le Quiétiste, ou les illusions de la nouvelle oraison de quiétude. (Paris, 1687, in-12.) Cette traduction, sans nom d'auteur, étoit de l'abbé Dumas, qui en publia une nouvelle édition en 1690. Le P. Bourdaloue, dans une Lettre à madame de Maintenon, écrite en 1694, et dont nous parlerons bientôt plus en détail (ci-après, n. 27), témoigne une estime particulière pour cet ouvrage et pour l'auteur, le premier, selon lui, qui ait combattu la secte de Molinos. Tous les ouvrages du P. Segneri sur cette matière sont réunis dans le t. IV de ses OEuvres, publiées à Venise en 1712 (4 vol. in-4), et plusieurs fois réimprimées depuis. Une partie seulement de ces écrits se trouve dans la traduction latine des OEuvres du P. Segneri, publiée par le P. Rassler, Jésuite. (Munich, 1706, in-4.) (ÉDIT.)

Il ne paroît pas que la lecture de cet ouvrage,

ni celle des écrits de Molinos, aient pu influer sur les erreurs de madame Guyon, qui se rendit, vers le même temps, si malheureusement célèbre par la singularité de ses opinions. Elle a souvent déclaré, dans la suite, qu'elle ne se souvenoit pas d'avoir jamais lu le livre de Malaval, et qu'elle n'avoit parcouru celui de Molinos, que longtemps après avoir écrit les siens (1). Toutefois, il est certain que sa doctrine étoit au fond celle de Malaval et de quelques autres quiétistes, avec lesquels elle avoit pu avoir des rapports, soit en France, soit en Italie, où elle fit un assez long séjour, à l'époque où les erreurs de Molinos commençoient à se répandre (2).

¶ Cette doctrine étoit présentée, dans les écrits de madame Guyon, sous une forme si séduisante, qu'elle fit d'abord illusion, pendant quelque temps,

(1) Voyez la Déclaration de madame Guyon, du 1er juillet 1695, dans la Correspondance de Fénelon, t. VII, p. 189, note. (ÉDIT.)

(2) La doctrine de madame Guyon avoit aussi beaucoup de rapport avec celle du P. Jean Falconi, religieux de l'ordre de la Merci, auteur d'unc Lettre sur la contempla tion, composée en espagnol, et publiée pour la première fois à Madrid, en 1657. Cette lettre fut traduite en italien, et publiée à Rome en 1676. Vers le même temps, on en publia à Paris une traduction françoise, qui fut reproduite, én forme d'appendice, à la suite de l'ouvrage de madame Guyon, Moyen court et facile, etc. (ÉDIT.)

14.

Quiétisme moins grossier

de madame

Guyon.

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