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personne. Avec toute votre puissance, vous ne pou« vez lui donner aucun bien qu'elle désire; et il n'y <«< a aucun mal qu'elle ne souffrît de bon cœur, pour « vous faire connoître les vérités nécessaires à votre « salut. Si elle vous parle fortement, n'en soyez pas étonné; c'est que la vérité est libre et forte. Vous « n'êtes guère accoutumé à l'entendre. Les gens ac« coutumés à être flattés, prennent aisément pour

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chagrin, pour âpreté et pour excès, ce qui n'est « que la vérité toute pure. C'est la trahir, que de ne « vous la montrer pas dans toute son étendue. Dieu <«< est témoin, que la personne qui vous parle, le fait « avec un cœur plein de zèle, de respect, de fidélité, « et d'attendrissement sur tout ce qui regarde votre « véritable intérêt. »

1 Après ce préambule, Fénelon adresse au Roi les plus fortes remontrances, sur divers objets de son administration; sur l'accroissement excessif que ses ministres ont donné à son autorité, au mépris des anciennes maximes du royaume ; sur l'injustice de plusieurs guerres, principalement de celle de Hollande, en 1692; sur les funestes résultats de ces guerres, au dedans et au dehors du royaume; sur la confiance aveugle que le Roi accorde à des sujets indignes, dont les uns l'entraînent dans les démarches les plus funestes au bien public, et les autres fomentent le mal par leur foiblesse et leur timidité. Dans le développement de ces observations, Fénelon

insiste principalement sur l'article des guerres entreprises sans motifs suffisants, quelquefois même par un pur motif de vanité ou de vengeance (1). Pour conclusion de ces remontrances, Fénelon engage le monarque à s'humilier enfin sous la main de Dieu, et à réparer, par le sacrifice même d'une partie de ses conquêtes, les injures qu'il a faites à Dieu et aux hommes. « Vous me demanderez peut<«< être, Sire, qu'est-ce que doivent vous dire, en de pareilles conjectures, des ministres fidèles? Le « voici : ils doivent vous représenter, qu'il faut vous « humilier sous la puissante main de Dieu, si vous << ne voulez qu'il vous humilie; qu'il faut demander « la paix, et expier, par cette honte, toute la gloire « dont vous avez fait votre idole; qu'il faut rejeter « les conseils injustes des politiques flatteurs ; qu'en« fin, il faut rendre au plus tôt à vos ennemis, pour

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(1) Il est à remarquer que les plus graves auteurs ont blâmé, sur ce point, la conduite de Louis XIV; et que ce prince lui-même se la reprocha fortement au lit de la mort, jusqu'à recommander expressément à son successeur de ne pas imiter son exemple à cet égard. Voyez le Journal historique de la dernière maladie et de la mort de Louis XIV (par Lefèvre de Fontenay); Paris, 1715, in-12. Voyez aussi le jugement porté sur ce prince, à l'occasion de sa mort, par le P. d'Avrigny, Mémoires sur l'hist. de l'Europe, t. IV, année 1715. -Berault-Bercastel, Hist. de l'Eglise. Mémoires pour servir à l'histoire ecclésiastique (par M. Picot), etc. etc. (EDIT.)

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«< sauver l'État, des conquêtes que vous ne pouvez « d'ailleurs retenir sans injustice. N'êtes-vous pas << trop heureux dans vos malheurs, que Dieu fasse « finir les prospérités qui vous ont aveuglé, et qu'il vous contraigne de faire des restitutions <«< essentielles à votre salut, que vous n'auriez ja« mais pu vous résoudre à faire, dans un état paisi«< ble et triomphant? La personne qui vous dit ces vérités, Sire, bien loin d'être contraire à vos in«< térêts, donneroit sa vie pour vous voir tel que

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« Dieu vous veut; et elle ne cesse de prier pour

« vous. »

9.

de cette lettre; rien ne prouve

¶ Malgré le témoignage de d'Alembert, qui avoit Authenticité donné cette lettre comme fidèlement transcrite sur l'original de la propre main de Fénelon, on a long- qu'elle ait été temps douté de l'authenticité de cette pièce (1).

(1) Le cardinal de Bausset lui-même, dans toutes les éditions qu'il a données de l'Histoire de Fénelon, révoque en doute l'authenticité de cette lettre. (Voyez, dans les éditions précédentes de cette Histoire, le n. I des Pièces justific. du livre II.) Mais il y a lieu de douter qu'il eût, sur ce point, une opinion bien arrêtée. Il est du moins certain qu'il a beaucoup varié sur ce sujet; car nous avons sous les yeux deux notes manuscrites, dont le titre fait supposer qu'elles étoient destinées à entrer dans l'Hist. de Fénelon, et dans lesquelles l'illustre auteur incline beaucoup à reconnoître l'authenticité de la lettre dont il s'agit. Il regarde même comme vraisemblable que Fénelon l'avoit rédigée à l'instigation de madame de Maintenon, « qui se chargea de la remettre elle

remise.

Mais tous les doutes à cet égard ont été dissipés, en 1825, par la découverte du manuscrit original, dont M. Augustin Renouard, libraire, fit l'acquisition, le 26 février, à la vente des livres de M. Gentil, et dont il publia aussitôt une édition très-soignée, avec un fac-simile de la première page du manuscrit. Nous avons cu la liberté d'examiner à loisir, chez M. Renouard, ce manuscrit original, qui contient 24 pag. in-4°; et nous nous sommes convaincus de l'authenticité de cette pièce. Non-seulement elle est écrite en entier de la propre main de Fénelon; mais on y remarque plusieurs corrections qui indiquent le travail de la composition, et qui ne permettent pas de regarder cette lettre comme une simple copie d'une pièce étrangère, que Fénelon auroit désiré de conserver.

¶ Mais si l'authenticité de cette lettre est aujourd'hui incontestable, rien ne prouve qu'elle ait été remise à Louis XIV; et il est tout à fait invraisem

<< même au Roi, en laissant supposer qu'elle lui avoit été << remise par une main inconnue. » Cette conjecture est bien difficile à concilier avec les reproches que l'auteur de la lettre se permet contre le duc de Beauvilliers et contre madame de Maintenon elle-même, Aussi le cardinal de Bausset, frappé de cette difficulté, et n'osant d'ailleurs garantir l'authenticité d'une lettre si extraordinaire, sur le seul témoignage de d'Alembert, prit le parti d'en parler seulement dans les Pièces justific, de son Histoire, comme d'une pièce douteuse. (ÉDIT.)

blable qu'elle lui ait été remise dans l'état où nous l'avons maintenant, c'est-à-dire, sans adoucissement ni modification quelconque. Comment croire en effet, comment supposer, sans les preuves les plus décisives, qu'un homme du caractère de Fénelon, c'est-à-dire, l'homme de son siècle qui a le mieux connu et le plus constamment observé toutes les bienséances religieuses et sociales, se soit jamais décidé à mettre sous les yeux de Louis XIV, des observations si peu mesurées, et par conséquent si évidemment incapables d'atteindre le but qu'on auroit pu se proposer en les lui adressant? Tout porte donc à croire que Fénelon, après un plus mûr examen, a mis cette lettre de côté, comme un simple projet dont l'exécution offroit peu de chances de succès, et pouvoit avoir de graves inconvénients. Nous ne croyons pas qu'on puisse rien opposer de solide au jugement d'un sage critique, sur ce point, à l'époque de la découverte du manuscrit original : « Cette lettre, dit-il, peut être considérée comme une de « ces notes, qu'on jette sur le papier dans un mo<«<ment de loisir, ou lorsqu'on a l'esprit vivement

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frappé d'un objet, et qu'on serre ensuite dans son portefeuille, sans y attacher d'importance (1). Quoi qu'il en soit de cette conjecture, c'est au moment où ce que l'on appelle la fortune commençoit

(1) L'Ami de la Religion, 1er juin 1825. (t. XLIV, p. 96.)

10.

Controverse du quiétisme.

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