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« rien qui attirât, étoit tout à fait propre à éloia gner. Il avoit un air froid, sec et austère; mais « tout ce qu'elle vit en lui, dans ses rapports avec « Saint-Cyr, parut à madame de Maintenon si saint, « si vertueux, si sage, si modéré, si prudent, qu'elle « se décida à lui donner sa confiance. Elle fit part « de son projet à l'abbé Brisacier, qui, avec une << droiture merveilleuse, et sans profiter de l'ou<< verture pour la porter à le choisir lui-même, ou « l'abbé Tiberge, son intime ami, pour qui elle << avoit une égale estime, dit à madame de Mainte<< non: Vous ne sauriez mieux faire, Madame, que « de prendre M. l'abbé des Marais pour votre di« recteur; il a tout ce qui vous convient et qui vous « est nécessaire. Elle pria l'abbé Brisacier de lui en « faire la proposition. L'abbé des Marais le refusa

d'abord, regardant cette charge comme formidable, ainsi qu'il le lui écrivit à elle-même quel« que temps après. Il fallut employer l'autorité de « M. Tronson, supérieur général de Saint-Sulpice, « pour qui l'abbé des Marais avoit une entière dé

sa fondation jusqu'à l'an 1731, ne font aucune mention de l'abbé Godet des Marais. Peut-être y avoit-il quelque emploi, sans être supérieur; mais divers documents semblent indiquer qu'il demeuroit habituellement au séminaire de Saint-Sulpice. Voyez le VIII Entretien de madame de Maintenon (p. 175), et l'Hist. de la maison royale de Saint-Cyr (par le duc de Noailles), p. 49. (EDIT.)

férence, et qui le décida à se charger de la con<< science de madame de Maintenon. »

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C'est de madame de Maintenon elle-même que nous empruntons ces détails; et elle ajoutoit : « J'ai « souvent pensé depuis, pourquoi je ne pris pas l'abbé de Fénelon, dont toutes les manières me plaisoient, dont l'esprit et la vertu m'avoient si fort prévenue en sa faveur. Comment, au milieu de « tout ce qui devoit me déterminer d'un côté, me jetois-je de l'autre?» Elle s'exprimoit ainsi, longtemps après l'affaire du quiétisme et la disgrâce de Fénelon; elle attribuoit cette détermination à une bonté particulière de la Providence, qui avoit voulu la préserver des erreurs de M. de Cambrai (1).

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(1) On lit dans les notes placées à la suite de l'Éloge de Fénelon, par le cardinal Maury (édit. de 1804): « Madame de Maintenon prit Fénelon pour son directeur à la mort de « l'abbé Gobelin; et cette direction, qui pouvoit donner « la plus grande influence sur le gouvernement, effraya ses « ennemis, qui dès lors conjurèrent sa perte: il y avoit << alors contre lui plusieurs cabales à la cour. L'affaire du quiétisme décida enfin madame de Maintenon à le quitter, « et à choisir pour confesseur M. Godet des Marais, évêque « de Chartres, ennemi très-passionné de l'archevêque de « Cambrai. >>

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On vient de voir, par le témoignage de madame de Maintenon elle-même, que Fénelon n'a jamais été son directeur, et qu'elle avoit donné sa confiance spirituelle à l'abbé des Marais, longtemps avant l'affaire du quiétisme. On verra, dans la suite, que l'abbé des Marais, depuis évêque de Char

7.

Combien elle

et son désintéressement.

Mais à l'époque où elle parut indécise entre l'abbé estime sa vertu de Fénelon et l'abbé des Marais, pour la direction de sa conscience, elle étoit bien éloignée de lui supposer des erreurs. On voit, par tous les rapports de confiance qu'elle conserva avec lui, lors même que l'affaire du quiétisme eut commencé à faire un certain éclat, combien elle goûtoit ses maximes, vénéroit sa vertu, et admiroit son désintéressement.

Cette dernière qualité devoit surtout frapper madame de Maintenon; elle en offroit elle-même le modèle le plus admirable, dans une place qui, mettant tout à sa disposition, mettoit à ses pieds toute la cour et tous les ambitieux. On aura peine à croire que Fénelon fut cinq ans précepteur des enfants de France, sans recevoir la plus foible grâce. Le seul revenu ecclésiastique dont il ait joui jusqu'à l'âge

de

quarante-trois ans consistoit dans le petit doyenné de Carenac, que l'évêque de Sarlat, son oncle, lui avoit résigné, pour l'aider à subsister à Paris, pendant qu'il y exerçoit les fonctions du saint ministère. Ce fut cependant l'époque où il jouit du plus grand crédit auprès de madame de Maintenon; mais madame de Maintenon et le duc de Beauvilliers, aussi désintéressés que Fénelon, pensoient pour lui comme ils pensoient pour eux-mêmes.

tres, fut opposé à la doctrine de Fénelon, mais qu'il ne fut jamais son ennemi très-passionné.

Il fallut que Louis XIV s'occupât des intérêts de Fénelon, puisque personne ne s'en occupoit pour lui. Il parut même honteux de s'en être ressouvenu si tard. Il le nomma, en 1694, à l'abbaye de Saint-Valery (1); il voulut le lui annoncer lui-même, et lui fit, pour ainsi dire, des excuses d'un témoignage si tardif de sa reconnoissance et de sa bonté.

¶ Cette nouvelle faveur, ajoutée à celles que Fénelon avoit déjà reçues de la bonté du Roi, ne l'éblouissoit pas au point de lui inspirer une admiration aveugle pour le prince qui lui donnoit des marques si particulières de bienveillance. Obligé, par la nature même de ses fonctions auprès des petits-fils de Louis XIV, d'étudier à fond les règles de la politique, et l'application de ces règles au gouvernement de la France, il observoit avec un vif intérêt la marche suivie par Louis XIV dans toutes les parties de son administration, et les résultats de sa politique, pour le bonheur et la gloire du royaume. Il étoit bien difficile qu'un examen si attentif ne lui découvrît, dans le gouvernement du Roi, bien des abus, dont les plus sages gouvernements ne sont pas

(1) L'abbaye de Saint-Valery, située à l'embouchure de la Somme, dans le diocèse d'Amiens, étoit un monastère de l'ordre de Saint-Benoît. Cette abbaye étoit du nombre de celles qui se conféroient alors en commende, à des ecclésiastiques séculiers. Voyez la Gallia christ. t. X, p. 1231, etc. ( ÉDIT.)

8.

Idées

de Fénelon,

à cette époque, sur le gouver

nement

de Louis XIV; sa lettre ano

nyme à ce prince.

1694.

exempts; il étoit même impossible qu'il ne fût vivement frappé de quelques-uns de ces abus, ouvertement signalés par la voix publique, et par l'opinion commune des hommes les plus sages. Il étoit surtout impossible, qu'une âme aussi ardente que celle de Fénelon, ne fût profondément émue à la vue de ces abus, et ne conçût un vif désir d'attirer sur eux l'attention du Roi.

par

¶ Ce fut dans cette vue que Fénelon rédigea, vers la fin de l'année 1694, le projet d'une lettre anonyme à Louis XIV, publié pour la première fois d'Alembert en 1787, dans le troisième volume de son Histoire des membres de l'Académie françoise (1). Il suffit de lire le début de cette lettre, pour voir qu'elle étoit inspirée à Fénelon par les plus vifs sentiments de zèle et d'intérêt pour le bonheur et la véritable gloire du Roi. « La personne, « Sire, qui prend la liberté de vous écrire cette lettre, << n'a aucun intérêt en ce monde. Elle ne l'écrit ni « par chagrin, ni par ambition, ni par envie de se « mêler des grandes affaires. Elle vous aime sans « être connue de vous; elle regarde Dieu en votre

(1) La date que nous donnons à cette lettre, est clairement établie par plusieurs événements dont elle parle, ou auxquels elle fait allusion. Voyez les notes jointes à cette lettre, dans la Corresp. de Fénelon, t. II, p. 333. Voyez aussi l'Hist. littér. de Fénelon, Ire part, art. 6, sect. 3, p. 165. (ÉDIT.)

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