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dante de toutes les faveurs de la fortune, et de tous les calculs de l'ambition. La mère Angélique, leur sœur, abbesse de Port-Royal, avoit acquis et mérité une grande considération, par la réforme qu'elle avoit établie dans son monastère, et par une régularité de mœurs dignes des siècles les plus purs de la discipline monastique. Attachée à sa famille par une entière conformité de mœurs et d'opinions, elle vivoit avec ses frères et avec ses proches dans un commerce habituel, que les grands intérêts de la religion et le goût de la piété sembloient encore ennoblir et épurer. Ses parents et les amis de ses parents vinrent habiter les déserts qui environnoient l'enceinte des murs de son monastère, Port-Royal-des-Champs devint un asile sacré, où de pieux solitaires, désabusés de toutes les illusions de la vie, alloient se recueillir, loin du monde et de ses vaines agitations, dans la pensée des vérités éternelles. On y voyoit des hommes autrefois distingués à la cour et dans la société, par leur esprit et leurs agréments, déplorer avec amertume les frivoles et brillants succès qui avoient consumé les inutiles jours de leur jeunesse, gémir de la célébrité encore attachée à leurs noms, et s'étonner de ne pouvoir être oubliés d'un monde qu'ils avoient eux-mêmes oublié.

Une conquête plus récente et plus éclatante encore répandoit sur les déserts de Port-Royal cette

sorte de majesté que les grandeurs et les puissances de la terre communiquent à la religion, au moment même où elles s'abaissent devant elle. La duchesse de Longueville, qui avoit joué un rôle si actif dans les troubles de la Fronde, et que la religion avoit désabusée des illusions de l'ambition. et des erreurs où son cœur l'avoit entraînée, offroit à un siècle encore religieux le spectacle d'un long et solennel repentir. Cette conversion étoit l'ouvrage de Port-Royal; et une si illustre pénitente environnoit de son éclat et de sa protection les directeurs austères qui avoient soumis une princesse du sang à ces règles saintes et inflexibles du ministère évangélique, qui n'admettent aucune distinction de naissance, de rang et de puissance.

La vie simple des solitaires de Port-Royal servoit à ajouter un nouveau lustre à la gloire que leur avoit méritée leurs écrits. Ces mêmes hommes, qui écrivoient sur les objets les plus sublimes de la religion, de la morale et de la philosophie, ne craignoient pas de s'abaisser, en descendant jusqu'aux éléments des langues, pour l'instruction des générations naissantes. Leurs ouvrages offroient les premiers modèles de l'art d'écrire avec toute la précision, le goût et la pureté dont la langue françoise pouvoit être susceptible. Cette glorieuse prérogative sembloit leur appartenir exclusivement; et le mérite d'avoir fixé la langue françoise est

resté à l'école de Port-Royal. Les noms des deux Arnauld, des deux Le Maistre, de Pascal, de Lancelot, de Nicole, de Racine, sont placés à la tête des grands écrivains qui ont illustré le siècle de Louis XIV.

La gloire qu'eut Port-Royal de fixer la langue françoise, contribua à lui concilier des partisans. On fit servir l'empressement que toutes les classes de la société montroient à lire ses écrits, pour accréditer ses opinions théologiques. Un habile critique observe, à cette occasion, que tous les novateurs des derniers siècles ont employé cette méthode avec succès (1). Rien n'est plus propre à séduire et à égarer la multitude, que cette espèce d'hommage qu'on rend à ses lumières et à son autorité; elle ne manque jamais de se ranger du côté de ceux qui invoquent les premiers son jugement, et qui traduisent leurs adversaires à son tribunal.

Quel bonheur pour la religion, 'l'Église, les sciences et les lettres, si l'école de Port-Royal, satisfaite de la gloire d'avoir ouvert le beau siècle de Louis XIV, ne se fût pas livrée à l'esprit de secte et à la déplorable ambition de se distinguer par une rigidité d'opinions et de maximes qui apporta plus de troubles que d'édification dans

(1) Richard Simon, Lettres choisies, t. IV, p. 6; édit. de 1730.

l'es

l'Église. On devra éternellement regretter que prit de secte, dont l'école de Port-Royal fut infectée dès son berceau (1), ait suscité de si funestes divisions entre ces deux célèbres sociétés, dont l'une, dans sa longue durée, a formé une nombreuse succession d'hommes de mérite dans tous les genres; et l'autre, dans sa courte existence, s'est illustrée par les grands écrivains qu'elle a produits par une espèce de création subite. L'une et l'autre paroissoient animées du désir sincère de servir la religion, et comptoient au nombre de leurs disciples des hommes vraiment recommandables; l'une et l'autre pouvoient opposer une digue inébranlable aux ennemis de l'Église, et offrir aux premiers pasteurs les secours les plus utiles pour l'instruction des peuples, et pour le succès du ministère évangélique. L'une et l'autre existeroient peut-être encore | sans leurs fâcheuses divisions; et nous n'aurions pas aujourd'hui à gémir sur les maux encore plus irréparables qui ont été la suite de ces longues inimitiés. ||

(1) On sait que, plusieurs années avant les éclats du jansénisme, saint Vincent de Paul, qui avoit des liaisons particulières avec l'abbé de Saint-Cyran, directeur des religieuses de Port-Royal, fut obligé de rompre avec lui, à l'occasion des sentiments hérétiques que cet abbé lui avoit plusieurs fois manifestés, sur l'autorité de l'Église. (Vie de saint Vincent de Paul, par Abelly, liv. II, ch. 37, 38. Notice sur Port-Royal, par M. Petitot, I part. p. 22-25). (ÉDIT.)

11.

Congrégation

Ce qui doit encore ajouter aux regrets qu'excite le souvenir de ces déplorables contestations, c'est qu'elles vinrent troubler la paix de l'Église de France dans ses plus beaux jours, dans un temps où les lumières répandues dans toutes les classes du clergé, les talents et les vertus qui brilloient dans l'épiscopat, l'esprit religieux qui formoit encore le caractère national, et la protection d'un roi tel que Louis XIV, permettoient d'espérer que, conformément au vœu des plus saints évêques, la réunion des Protestants à l'Eglise catholique pourroit s'opérer par les seuls moyens d'instruction, de douceur, de confiance et d'édification appropriés à une fin aussi désirable.

La controverse du jansénisme agitoit tous les esde S. Sulpice. prits, lorsque le marquis de Fénelon plaça son

neveu au séminaire de Saint-Sulpice, et le mit sous la direction de M. Tronson. Il ne pouvoit assurément choisir une institution et un instituteur plus propres au succès de ses pieuses intentions.

Cette congrégation, établie si récemment encore, jouissoit déjà de la plus haute considération, par l'heureuse expérience de tous les biens qu'elle avoit opérés en si peu d'années. Son principal établissement étoit l'ouvrage de la bienfaisance d'un simple particulier, et n'avoit coûté au gouvernement aucun effort, ni au peuple aucun sacrifice. M. Olier, qui en avoit été l'instituteur et le fondateur, avoit eu le

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