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94.

Ses précieux résultats.

Cette cérémonie fut l'objet de l'édification de toute la cour le duc de Bourgogne en recueillit l'impression d'une piété sincère et profonde. Il chercha pendant tout le reste de sa vie, dans la fréquentation des sacrements, les forces et les consolations dont les princes ont encore plus souvent besoin que les particuliers, pour supporter les peines et les malheurs qui se cachent sous la fausse prospérité dont ils offrent l'image. Les mémoires du temps rapportent « qu'il communioit au moins tous « les quinze jours, avec un recueillement et un « abaissement qui frappoient tous ceux qui en « étoient témoins, et toujours en collier et en habit « de l'ordre du Saint-Esprit (1), » comme pour rendre un hommage plus solennel à la grandeur du Dieu qu'il venoit adorer.

Mais ces témoignages extérieurs de piété auroient perdu leur mérite réel, s'ils n'eussent attesté l'heureuse révolution que la religion étoit parvenue à opérer dans toutes les parties de son caractère. Cette révolution fut si sensible, qu'elle frappa toute la cour; et madame de Maintenon disoit ellemême (2): « Depuis la première communion de

(1) Mémoires de Saint-Simon.

(2) Le cardinal de Bausset indique ici en note les Entretiens de madame de Maintenon; nous y avons inutilement cherché ce passage. L'abbé Proyart le cite aussi, mais

« M. le duc de Bourgogne, nous avons vu dispa« roître peu à peu tous les défauts, qui, dans <«< son enfance, nous donnoient de grandes inquić<< tudes pour l'avenir. Ses progrès dans la vertu « étoient sensibles, d'une année à l'autre : d'abord « raillé de toute la cour, il étoit devenu l'admira<< tion des plus libertins; il continue à se faire vio«lence pour détruire entièrement ses défauts. Sa piété l'a tellement métamorphosé, que d'emporté qu'il étoit, il est devenu modéré, doux, complai<«< sant; on diroit que c'est là son caractère, et que << la vertu lui est naturelle. »

«

C'est ainsi que la religion opéroit chaque jour, dans le caractère de ce jeune prince, des miracles qui étonnoient tous ceux qui l'avoient vu dans ses premières années. On ne pouvoit plus reconnoître ce prince si redoutable par ses fureurs et ses emportements, sous ces formes douces et attachantes

que

la vertu donnoit à toutes ses actions et à tous ses discours.

Fénelon avoit tellement adouci l'humeur impćrieuse et violente du duc de Bourgogne, en gravant dans son âme les sublimes idées du respect dû à Dieu, que toutes ses fureurs et ses dépits venoient fléchir à ce seul nom. Il rapporte dans une lettre

comme tiré d'une Lettre de madame de Maintenon. (Vie du duc de Bourgogne, t. I, p. 42.) (ÉDIT.).

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dont nous avons déjà cité quelques fragments, qu'un jour que le jeune prince étoit en très-mau<«< vaise humeur, et qu'il vouloit cacher, dans sa passion, ce qu'il avoit fait en désobéissant, il le « pressa de lui dire la vérité devant Dieu. Alors il <«< se mit en grande colère, et il s'écria: Pourquoi me le demandez-vous devant Dieu? Hé « bien! puisque vous me le demandez ainsi, je « ne puis pas vous désavouer que j'ai fait telle «< chose. Il étoit comme hors de lui, par l'excès de « la colère; et cependant la religion le dominoit << tellement, qu'elle lui arrachoit un aveu si pé«< nible (1).

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Fénelon observe encore, que ce sentiment habituel de religion le dominoit au point, qu'il ne << l'avoit jamais vu, excepté dans les moments d'hu« meur, penser que selon la plus droite raison, et «< conformément aux plus pures maximes de l'É

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vangile. Par une suite de ces mêmes sentiments

religieux, il avoit de la complaisance et des égards « pour certaines personnes profanes qui en méri«< toient; mais il n'ouvroit son cœur, et ne se con<< fioit entièrement, qu'aux personnes qu'il croyoit « sincèrement pieuses.

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Enfin, la religion avoit tellement brisé ce carac

(1) Lettre de Fénelon au P. Martineau, du 14 nov. 1712. (Corresp. t. IV, p. 170, etc.)

tère si dur, si hautain, si plein de lui-même, « qu'on « ne lui disoit rien de ses défauts, qu'il ne connût,

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qu'il ne sentît, et qu'il n'écoutât avec reconnois

« sance. Je n'ai jamais vu personne, ajoute Fénelon, à qui j'eusse moins craint de déplaire, en lui <«< disant contre lui-même les plus dures vérités : j'en ai fait des expériences étonnantes. >>

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littéraires

du duc

étude de l'histoire.

On se tromperoit fort, si l'on pouvoit croire que Suite des études les principes de religion et les sentiments de piété, que les instituteurs du duc de Bourgogne s'atta- de Bourgogne; choient à lui inculquer, apportassent la plus légère diversion à ses études littéraires. Fénelon vouloit faire de son élève un prince aussi religieux qu'éclairé; il vouloit qu'il montât sur le trône avec toutes les vertus du christianisme, et toutes les connoissances nécessaires au gouvernement d'un grand empire.

C'étoit dans cette pensée, que Fénelon s'étoit attaché à donner au duc de Bourgogne une connoissance de l'histoire ancienne et moderne, aussi approfondie que son âge pouvoit le comporter. Il paroît qu'il en avoit fait lui-même une étude particulière, et qu'il y étoit autant attiré par un goût naturel, que par la considération des grands avantages qu'on peut en recueillir, lorsqu'on sait étudier l'histoire comme elle mérite d'être étudiée. Nous trouvons dans une de ses lettres au duc de Beauvilliers, qu'avant même d'être chargé de l'éducation

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Vie de Charlemagne, par Fénelon.

du duc de Bourgogne, Fénelon avoit composé un abrégé de la vie de Charlemagne; et ce qu'il dit des principes qu'il s'étoit faits, et du plan qu'il avoit suivi dans la composition de ce morceau d'histoire, laisse regretter que cet ouvrage ne se soit pas retrouvé parmi ses manuscrits. On voit, par sa lettre au duc de Beauvilliers, que Fénelon avoit été engagé à écrire cette vie de Charlemagne, par des motifs ou des considérations dont le secret n'est pas venu jusqu'à nous, mais qui étoient connus du duc de Beauvilliers. « Je suis très-persuadé, lui écrivoit « Fénelon (1), que la vie de Charlemagne pourra

beaucoup nous servir, pour donner à monseigneur « le duc de Bourgogne les sentiments et les maxi<«< mes qu'il doit avoir. Vous savez que je ne son«<geois pas néanmoins à me mêler de son instruc« tion, quand je fis cet abrégé de la vie de Charle<< magne; et personne ne peut mieux dire que « vous, comment j'ai été engagé à l'écrire. Mes « vues ont été simples et droites; on ne sauroit « me lire, sans voir que je vais droit, et peut-être << trop. »

Fénelon croyoit qu'il n'avoit peut-être jamais existé de prince « qui fût plus digne d'être étudié <«< en tout, ni d'une autorité plus grande pour don<< ner des leçons à ceux qui doivent régner.

(1) Lettre de Fénelon au duc de Beauvilliers. (Corresp. t. I, p. 58.)

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