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lon dirigea, avec le plus d'ardeur, tout son zèle et tous ses soins. Il fut secondé, dans ce noble dessein, par celui de tous les hommes qui étoit le plus digne et le plus capable d'en assurer l'exécution. La religion ne pouvoit pas emprunter un organe plus pur, ni un interprète plus éclairé que l'abbé Fleury.

Nous avons déjà observé, au sujet du traité De l'Éducation des filles, que Fénelon croyoit devoir initier les enfants à la connoissance de la religion, bien plus par la narration des faits que par des raisonnements abstraits. L'abbé Fleury étoit du même sentiment (1): « Entre les ouvrages « des Pères, dit-il, nous avons un grand nom«bre d'instructions pour ceux qui se vouloient « faire chrétiens. Elles sont, la plupart, fondées «< sur les faits; et le corps du discours est d'or<«< dinaire une narration de tout ce que Dieu a << fait pour le genre humain... Rien n'est plus <«< clair que ce que saint Augustin en a écrit dans « le livre De la vraie Religion, et dans celui qu'il « a composé exprès, De la manière dont il faut « catéchiser les ignorants. Il parle toujours de << narration; il suppose toujours que l'instrucation doit se faire en racontant les faits, et les

«

(1) Fleury, Discours sur le dessein et l'usage du CATECHISME HISTORIQUE, édit. in-12 de 1821, p. 15, 16, 20.

92. Méthode

de Fénelon,

pour l'étude de la religion.

<< étendant plus ou moins, selon l'importance et la «< capacité du disciple; et le modèle de catéchisme

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qu'il donne lui-même à la fin de ce traité, est un

abrégé de toute l'histoire de la religion, mêlé de « diverses réflexions... Cette manière d'instruire « n'est pas seulement la plus sûre, et la plus propor<«<tionnée à toutes sortes d'esprits; c'est encore la « plus facile et la plus agréable. Tout le monde << peut entendre et retenir une histoire ;... les en«fants surtout en sont très-avides. »

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Bossuet avoit exécuté le même plan pour l'éducation du Dauphin, fils de Louis XIV; et c'est à cette grande conception, que nous devons son chefd'œuvre, son Discours sur l'Histoire universelle.

Fénelon vouloit que le duc de Bourgogne fût assez instruit, et qu'il eût une religion assez éclairée, pour n'avoir rien à redouter des sophismes de l'impiété, ni des illusions d'une crédulité superstitieuse il vouloit former un prince profondément pénétré de sa dépendance d'un Être plus puissant que les rois les plus puissants: il vouloit que ce prince eût toujours présent à la pensée, le compte redoutable qu'il auroit à rendre de l'usage de son autorité, dans ce jour solennel, où ses propres sujets seroient admis comme témoins, accusateurs et victimes de ses injustices.

C'étoit dans cette vertueuse intention, que Fénelon s'attachoit à nourrir dans l'âme du duc de Bour

gogne des sentiments vraiment religieux, et les saintes habitudes des pratiques et des devoirs que la religion prescrit. L'expérience fait assez voir, que, sans l'exercice habituel de ces pratiques, la pensée même de Dieu s'évanouit au milieu du tourbillon des passions et des plaisirs, et se réduit à une vaine théorie, qui ne dit rien au cœur, n'a aucune influence sur la morale, et n'offre pas un frein assez fort contre les abus de la puissance.

93.

Première communion

du duc

Lorsque Fénelon se fut convaincu que la raison et l'instruction du duc de Bourgogne étoient assez avancées, pour qu'il pût s'approcher des sacrements de Bourgogne. avec l'esprit de foi et de piété que demande cet acte de religion, il s'occupa sérieusement de le disposer à sa première communion. Persuadé que cette action si importante doit faire époque dans la vie du chrétien, et surtout d'un prince destiné au gouvernement du royaume très - chrétien, il ne négligea rien pour y bien préparer son auguste élève; et le succès répondit parfaitement à ses soins. « Longtemps avant sa première communion, dit l'abbé Proyart (1), le prince s'en occu«< poit uniquement. Sa crainte étoit de ne pas y ap<< porter la disposition la plus parfaite ; et tout son « regret, de n'avoir pas senti plus tôt, que le bon<< heur est dans la pratique de la vertu. Il fit, à cette

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(1) Proyart, Vie du Dauphin, père de Louis XV, liv. Ier,

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occasion, une retraite de plusieurs jours, avant

laquelle il voulut aller demander pardon au Roi «<et à Monseigneur, des sujets de mécontentement <«< qu'il leur avoit donnés. Louis XIV lui dit, en « l'embrassant: Je suis ravi, mon fils, des senti«ments où je vous vois; je prie Dieu qu'il vous « les conserve; je tácherai de communier le « même jour que vous; et il le fit. Un trait de cette « nature, que les historiens ont coutume de négli« ger, annonce mieux, selon moi, la foi d'un sou<«< verain, qu'un édit qu'il donneroit en faveur de la religion. Le duc de Bourgogne, d'après l'idée que «< lui suggéra madame de Maintenon, et qu'il saisit « avec empressement, dit au Roi, qu'il désireroit « bien que, pendant la retraite qui devoit le dis« poser prochainement à sa première communion, « on priát Dieu pour lui dans les communautés religieuses de la capitale; et le ministre de la « cour eut ordre d'informer l'archevêque de Paris « des pieux désirs du jeune prince. Il fit en même << temps distribuer aux pauvres, par anticipation, la <«< somme destinée à fournir pendant trois mois à <«< ses menus plaisirs.

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Nous avons sous les yeux le manuscrit original du discours que Fénelon lui adressa dans une circonstance qui laisse souvent un long et profond souvenir dans un jeune cœur, nourri du goût et des maximes d'une piété pure et affectueuse. Au moment

où le duc de Bourgogne se présenta à l'autel, Fénelon lui adressa le discours suivant (1): « Le voilà « enfin arrivé, Monseigneur, ce jour que vous avez << tant désiré et attendu, ce jour qui doit apparem<< ment décider de tous les autres de votre vie jusqu'à celui de votre mort. Votre Sauveur vient à « vous sous les apparences de l'aliment le plus fa«<milier, afin de nourrir votre âme, comme le pain « nourrit tous les jours votre corps. Il ne vous pa« roîtra qu'une parcelle d'un pain commun; mais << la vertu de Dieu y sera cachée, et votre foi saura « bien l'y trouver. Dites-lui, comme Isaïe le disoit : « Vere tu es Deus absconditus (2). C'est un Dieu « caché par amour; il nous voile sa gloire, de peur « que nos yeux n'en soient éblouis, et afin que nous puissions en approcher plus familièrement. C'est « là que vous trouverez la manne cachée, avec les « divers goûts de toutes les vertus célestes. Vous << mangerez le pain qui est au-dessus de toute sub«stance. Il ne se changera pas en vous, homme << vil et mortel; mais vous serez changé en lui, <«< pour être un membre vivant du Sauveur. Que <«< la foi et l'amour vous fassent goûter le don de « Dieu! Gustate, et videte quoniam suavis est Do« minus (3). »

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(1) OEuvres de Fénelon, t. XVIII, p. 181.

(2) Isai. XLV, 15.

(3) Ps. XXXIII, 9.

T. I.

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