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ceux qui nous aiment. Enfin la vanité. Des amis qui nous font honneur nous sont toujours chers; il semble qu'en les aimant nous entrons en part avec eux de la distinction qu'ils ont dans le monde; nous cherchons à nous parer, pour ainsi dire, de leur réputation; et, ne pouvant atteindre à leur mérite, nous nous honorons de leur société, pour faire penser du moins qu'il n'y a pas loin d'eux à nous, et que nous n'aimons que nos semblables.

CARÊME, I.

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ZELE INCONSIDER É.

ON N voit tous les jours des ministres qu'un zèle inconsidéré jette dans des inconvénients capables d'anéantir tout le fruit de leurs fonctions, et où l'honneur même de leur caractère est avili. Ils entreprennent tout; tout ce qui a l'apparence du bien les anime et les met en mouvement; rien ne leur paroît impossible, et rien ne leur semble à la place où il doit être : ils voudroient tout changer, tout déplacer ils commencent par mettre une confusion universelle à tout ce qu'ils touchent, sous prétexte d'y rétablir l'ordre. Esprits inquiets, bornés, téméraires, entreprenants, pourvu qu'ils s'agitent, ils sont contents d'eux-mêmes, et croient remplir toute justice : ils vont hardiment heurter de front à tous les inconvénients les plus délicats, les plus dignes d'être ménagés, les plus exposés à des suites grandes et fâcheuses, les plus

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capables d'arrêter la prudence et l'habileté la plus consommée et au sortir de cet écueil, où ils viennent de se briser, et de donner au public une scène toujours désagréable au ministère, ils vont avec la même sécurité tenter une autre entreprise qui ne leur offre pas moins de péril, et ne leur promet pas moins de confusion.

CONFÉRENCES.

ལ་་་་་ལ

PASSIONS.

PARCOUREZ toutes les passions; c'est sur le cœur des grands qui vivent dans l'oubli de Dieu qu'elles exercent un empire plus triste et plus tyrannique. Leurs disgrâces sont plus accablantes : plus l'orgueil est excessif, plus l'humiliation est amère. Leurs haines plus violentes comme une fausse gloire les rend plus vains, le mépris aussi les trouve plus furieux et plus inexorables. Leurs craintes plus excessives : exempts de maux réels, ils s'en forment même de chimériques, et la feuille que le vent agite est comme la montagne qui va s'écrouler sur eux. Leurs infirmités plus affligeantes plus on tient à la vie, plus tout ce qui la menace nous alarme. Accoutumés à tout ce que les sens offrent de plus doux et de plus riant, la plus légère douleur déconcerte toute leur félicité, et leur est insoutenable: ils ne savent user sagement ni de la maladie ni de la santé, ni des biens ni des maux inséparables de la condition humaine.

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Les plaisirs abrégent leurs jours; et les chagrins, qui suivent toujours les plaisirs, précipitent le reste de leurs années. La santé, déjà ruinée par l'intempérance, succombe sous la multiplicité des remèdes. L'excès des attentions achève ce que n'avoit pu faire l'excès des plaisirs; et s'ils se sont défendu les excès, la mollesse et l'oisiveté toute seule devient pour eux une espèce de maladie et de langueur qui épuise toutes les précautions de l'art, et que les précautions usent et épuisent elles-mêmes. Enfin, leurs assujettissements plús tristes élevés à vivre d'humeur et de caprice, tout ce qui les gêne et les contraint les accable. Loin de la cour, ils croient vivre dans un triste exil; sous les yeux du maître, ils se plaignent sans cesse de l'assujettissement des devoirs, et de la contrainte des bienséances: ils ne peuvent porter ni la tranquillité d'une condition privée, ni la dignité d'une vie publique. Le repos leur est aussi insupportable que l'agitation, ou plutôt ils sont partout à charge à eux-mêmes. Tout est un joug pesant à quiconque veut vivre sans joug et sans règle.

PETIT CARÈME.

PASSIONS.

PLUS ON DIFFÈRE DE LES GUÉRIR, PLUS ELLES SE

PLUS

FORTIFIENT.

LUS Vous différez, plus vous jetez de profondes racines dans le crime, plus vos chaines forment de nouveaux replis sur votre cœur, plus ce levain de corruption que vous portez au-dedans de vous se dilate, s'étend, aigrit et corrompt toute la capacité de votre âme. Jugez-en par le progrès que la passion a fait jusqu'ici dans votre cœur. Ce n'étoient d'abord que des libertés timides, et où, pour vous calmer, vous cherchiez encore une ombre d'innocence : ce n'étoient ensuite que des actions douteuses, et où vous aviez encore peine à démêler le crime de la simple offense : le désordre suivit de près; mais les excès marqués en étoient encore rares : vous vous les reprochiez aussitôt à vousmême : vous ne pouviez les porter long-temps sur la conscience encore effrayée de son état : insensiblement les chutes se sont multipliées : le désor dre est devenu un état fixe et habituel la conscience n'a plus crié que foiblement contre l'empire de la passion le crime vous est devenu nécessaire : il n'a plus réveillé de remords: vous l'avez avalé comme de l'eau qui coule sans se faire sentir, et sans piquer d'aucun goût le palais par où elle passe. Plus vous avancez, plus le venin

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gagne; plus un reste de force que la pudeur, que la raison, que la grâce avoit mise en vous, s'affoiblit; plus ce qui étoit encore sain dans votre âme s'infecte et se souille. Quelle folie donc de laisser vieillir et corrompre des plaies, sous prétexte qu'elles seront plus aisées à guérir! et que faitesvous en différant, que rendre vos maux plus incurables, et vous priver de toutes les ressources qui pourroient vous rester encore?

Pourquoi donc ne pas commencer dès à présent? La chose ne vaut-elle pas du moins la peine d'être tentée? Est-ce qu'un homme que la tempête a jeté au milieu de la mer, et qui seroit à la merci des flots, et sur le point d'un triste naufrage, ne tente pas premièrement s'il pourra aborder au port à la nage, avant de se laisser submerger aux ondes? ne fait-ilpoint d'efforts? n'essaie-t-il rien? se dit-il à lui-même pour ne rien tenter : Peutêtre je ne me soutiendrai pas; les forces peut-être me manqueront en chemin? Ah! il essaie, il fait des efforts, il combat contre le danger, il va jusqu'au dernier moment de sa force, et ne succombe enfin que lorsque, gagné par la violence des flots, il est forcé de céder au malheur de sa destinée. Vous périssez, mon cher auditeur; les ondes vous gagnent, le torrent vous entiaine, et vous balancez si vous essaierez de vous sauver du danger; et vous mettez à sonder vos forces les seuls moments qui vous restent pour pourvoir à votre sûreté; et vous perdez à délibérer un temps qui ne

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