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travaux; sa grande affaire était sa liberté. N'ayant plus les mêmes avantages, comment conserver les mêmes droits? Vos chmats plus durs vous donnent plus de besoins (1): six mois de l'année la place publique n'est pas tenable; vos langues sourdes ne peuvent se faire entendre en plein air; vous donnez plus à votre gain qu'à votre liberté, et vous craignez bien moins l'esclavage que la mi

sère.

Quoi! la liberté ne se maintient qu'à l'appui de la servitude? Peut-être les deux excès se touchent. Tout ce qui n'est point dans la nature a ses inconvéniens, et la société civile p'us que tout le reste. Il y a telles positions malheureuses où l'on ne pent conserver sa liberté qu'aux dépens de celle d'autrui, et ou le citoyen ne peut être parfaitement libre que l'esclave ne soit extrêmement esclave. Telle était la position de Sparte. Pour vous, peuples modernes, vous n'avez point d'esclaves, mais vous l'êtes; vous payez leur li

berté de la vôtre. Vous avez beau vanter cette préférence, j'y trouve plus de lâcheté

manité.

que

d'hu

Je n'entends point partout cela qu'il faille avoir des esclaves, ni ne le droit d'esclavage soit légitime, puisque j'ai prouvé le contraire : je dis seukment les raisons pourquoi les peuples modernes

(1) Adopter dans les pays froids le luxe et la mollesse des Orientaux, c'est vouloir se donner leurs claimes; c'est s'y soll mettre encore plus nécessairement qu'eux.

qui se croient libres ont des représentans, et pour quoi les peuples anciens n'en avaient pas. Quoi qu'il en soit, à l'instant qu'un peuple se donne des représentans, il n'est plus libre; il n'est plus. Tout bien examiné, je ne vois pas qu'il soit désormais possible au souverain de conserver parmi nous l'exercice de ses droits, si la cité n'est très-petite. Mais si elle est très-petite, elle sera subjuguée? Non. Je ferai voir ci-après (1) comment on peut réunir la puissance extérieure d'un grand peuple avec la police aisée et le bon ordre d'un petit état.

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Le pouvoir législatif une fois bien établi, il s'agit d'établir de même le pouvoir exécutif; car ce dernier, qui n'opère que par des actes particuliers, n'étant pas de l'essence de l'autre, en est naturellement séparé. S'il était possible que le

(1) C'est ce que je m'étais proposé de faire dans la suite de cet ouvrage, lorsqu'en traitant des relations externes j'en serais venu aux confédérations. Matière toute neuve, et où les principes sont encore à établir (*).

(*) Voyez à ce sujet une note du comte d'Antraigues, réimprimée à la fin de cet ouvrage.

souverain, considéré comme tel, eût la puissance exécutive, le droit et le fait seraient tellement confondus, qu'on ne saurait plus ce qui est loi et ce qui ne l'est pas; et le corps politique, ainsi dênaturé, serait bientôt en proie à la violence contre laquelle il fut institué.

Les citoyens étant tous égaux par le contrat social, ce que tons doivent faire, tous peuvent e prescrire, au lieu que nul n'a droit d'exiger qu'un autre fasse ce qu'il ne fait pas lui-même. Or, c'est proprement ce droit, indispensable pour faire vivre et mouvoir le corps politique, que le souverain donne au prince en instituant le gou

vernement.

Plusieurs ont prétendu que l'acte de cet établissement était un contrat entre le peuple et les chefs qu'il se donne, cofitrat par lequel on stipulait entre les deux parties les conditions sous lesquelles l'une s'obligeait à commander et l'autre å obéir. On conviendra, je m'assure, que voilà une étrange manière de contracter, Mais voyons si cette opinion est soutenable. Premièrement, l'autorité suprême ne peut pas plus se modifier que s'aliéner; la limiter, c'est la détruire. Il est absurde et contradictoire que le souverain se donne un supérieur; s'obliger d'obéir à tin maître, c'est se remettre en pleine liberté.

De plus, il est évident que ce contrat du peuple avec telles ou telles personnes serait un acte particulier; d'où il suit que ce contrat ne saurait

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être une loi ni un acte de souveraineté, et que par conséquent il serait illegitime

On voit encore que les parties contractantes seraient entre elles sous la scule loi de nature ct sans aucun garant de leurs engagemens réciproques, ce qui répugne de toutes manières à létat civil: celui qui a la force en main étaut, toujours le naitre de l'exécution, autant vaudrait donner le nom de contrat à l'acte d'un homme qui dirait à un autre. Je vous donne tout mon bien à condition que vous m'en rendrez ce qu'il vous plaira. Il n'y a qu'un contrat dans l'état, c'est celui de l'association: celui-là seul en exclut tout autre. On ne saurait imaginer aucun contrat public qui ne fut une violation du premier.

CHAPITRE XVIL

De l'institution du gouvernement.

Sors quelle idée faut-il donc concevoir l'acte par lequel le gouvernement est institué? Je remarquerai d'abord que cet acte est complexe, on composé de deux autres; savoir, l'établissement de la loi, et l'exécution de la loi

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Par le premier, le souverain statue qu'il y aura un corps de gouvernement établi sous telle ou telle forme; et il est clair que cet acte est une loi. Par le second, le peuple nomme les chefs qui

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seront chargés dn gouvernement établi. Or cette nomination étant un acte particulier n'est pas une seconde loi, mais seulement une suite de la première et une fonction du gouvernement.

le

La difficulté est d'entendre comment on peut avoir un acte de gouvernement avant que gouvernement existe, et comment le peuple, qui n'est que souverain ou sujet, peut devenir prince ou magistrat dans certaines circonstances. C'est encore ici que se découvre une de ces éton nantes propriétés du corps politique par lesquelles il concilie des opérations contradictoires en apfait se une conversion par parence; car celle-ci 'subite de la souveraineté en démocratie, en sorte que, sans aucun changement sensible, et seule ment par une nouvelle relation de tous à tous, les citoyens, devenus magistrats, passent des actes généraux aux actes particuliers, et de la loi à

l'exécution.

Ce changement de relation n'est point une subtilité de spéculation sans exemple dans la pratique : il a lieu tous les jours dans le parlement d'Angleterre, où la chambre basse, en certaines occasions, se tourne en grand comité, pour mieux discuter les affaires, et devient ainsi simple commission, de cour souveraine qu'elle était l'instant précédent; en telle sorte qu'elle se fait ensuite rapport à elle-même, comme chambre des communes, de ce qu'elle vient de régler en grand

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