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On eut toute facilité de revoir ses dires, de les expliquer. Un jeune Parisien, nommé Nézel, fut retenu d'après ses dires. Il était professeur dans un établissement nouveau, connu sous le nom de Communauté des clercs de Saint-Sulpice. Le commissaire lui adressa cette question obligée : Avez-vous enseigné les droits de l'homme? Il aurait pu répondre que l'âge de ses élèves ne leur permettait pas de saisir une telle instruction; mais, comme il ne redoutait rien tant que de retourner dans sa famille, qui l'avait souvent sollicité de communiquer avec l'intrus de sa paroisse, il répondit que, loin d'enseigner les droits de l'homme, il n'avait même pas cherché à les connaître. On lui représenta que cette réponse le ferait demeurer aux Carmes. C'était son désir; il ne voulut rien changer à ses dires et fut, quelques heures après, réuni à ceux qui se trouvaient dans les ordres. Il partagea leur sort et leur gloire ...

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1 M. l'abbé de Méchinet ajoute cette note:

<< Il n'est point de fait mieux gravé dans ma mémoire que celui-ci; qu'on juge de ma surprise lorsque, tout récemment, j'ai lu, dans la Vie de Monseigneur de Quélen (tom. I. pag. 12), une note de M. d'Exauvillez, où, donnant une liste des Sulpiciens morts pour la foi, il y comprend M. Nézel, sous-diacre. S'il eût été sous-diacre, il serait resté dans l'église des Carmes, on ne l'aurait pas réuni à ceux qui n'étaient pas dans les ordres; il n'aurait eu aucun interrogatoire à subir. La note de M. d'Exauvillez comprend à tort, parmi les Sulpiciens, M. Guérin,

« Sur les quatre heures du soir, un commissaire vint annoncer aux élèves qu'ils étaient libres et pouvaient sortir des Carmes à l'instant même. M. Nézel était seul excepté. Il fut de suite réintégré dans l'église des Carmes avec ceux que l'on ne voulait point élargir. En quittant cette prison, il ne nous fut point permis de faire nos adieux aux prêtres détenus.

« Nous sortions, et l'un des élèves, le seul qui fùt en soutane, allait franchir le seuil de la porte, sans penser au danger auquel il s'exposait en paraissant dans les rues avec un costume proscrit depuis deux mois; le commissaire pria un officier de la garde nationale d'escorter ce jeune homme et de lui donner le bras. Sous cette égide, l'élève se rendit au séminaire sans éprouver le moindre désagrément. Quoique la persécution ne s'étendit encore que sur le clergé, un grand nombre de personnes se hâtaient de sortir de Paris: toutes les places se trouvaient arrêtées aux diligences, pour plusieurs jours; les élèves furent donc

jeune prêtre de la Rochelle, et M. Ploquin, de Tours, qu'elle nomme Ploquier, et suppose qu'ils étaient directeurs à Nantes avec M. de Luzeau; ce dernier était véritablement Sulpicien, mais non les deux autres. De ces faits, qui sont bien à ma connaissance, il résulte que l'on a donné à l'estimable M. d'Exauvillez des renseignements qui manquent d'exactitude. (Voyez les pages 13 et 14).

Cet élève était encore M. l'abbé de Méchinet.

obligés de se réfugier au séminaire', un petit nombre seulement chez des parents ou des amis bien dévoués, et tous, à peu près, se trouvaient dans la capitale au 2 septembre, époque du massacre. A la difficulté de trouver des places dans les diligences se joignait celle d'obtenir des passeports qui devaient être revêtus de diverses formalités. Ce fut vers le milieu de septembre que, dispersés par la tempête, nous quittâmes, avec regret, un asile qui nous était bien cher 2.... » Nous aurons encore recours aux notes précieuses de M. l'abbé de Méchinet.

Vers la fin de l'assemblée constituante, l'évêque de Saintes, comme nous le savons, s'était rendu à Paris pour y concerter, avec ses collègues dans l'épiscopat, les mesures qu'il convenait de prendre dans l'intérêt de l'Eglise de France. L'évêque de

:

L'auteur de la notice ajoute: « Je vais transcrire les noms de ces élèves; quelques-uns échapperont sans doute à ma mémoire MM. Le Douhet Dauzer, qui est devenu évêque de Nevers; Blanquet de Rouville, mort coadjuteur de Reims, évêque de Numidie; de Forcade, de Marmande ; de la Gardiole, de Nîmes; de Teste, d'Avignon; de Montant, de Nérac; de Solminiac; Courtade, de Saint - Chéli; Martin, de Castelnaudary; Fauché, de Bordeaux; de Montfleuri, de Caen, prêtre qui se sauva pendant le massacre; de Ravinelli, de Belloc, Clémenceau, de Vannes; Lami de Huret, de Limoges, etc...

2 Relation de ce qui se passa à la campagne du séminaire de Saint-Sulpice et dans la prison des Carmes, pendant les journées des 15 et 16 Août 1792, par M. l'abbé de Méchinet, aumônier de l'hôp. de Saint-Jean-d'Angély.

Beauvais fut dénoncé en 1792, le 4 juin, dans la séance de l'assemblée législative, par l'abject et renégat Chabot, capucin d'horrible mémoire; il l'accusait d'avoir pris part au prétendu comité autrichien. Comme cette atroce et ridicule calomnie pouvait exposer les deux frères, ils se retirèrent à Soissons, chez leur soeur, l'abbesse de NotreDame. Les révolutionnaires ayant envoyé dans cette ville quelques détachements de troupes imbues de l'affreux esprit de l'époque, les deux évêques furent bientôt obligés de retourner à la capitale, afin de ne pas exposer leur sœur et ses religieuses aux vexations et aux poursuites de ces cannibales. L'évêque de Beauvais fut arrêté à Paris ; l'évêque de Saintes, aussi généreux par sa foi que fidèle à l'amitié fraternelle, ne put pas résister au désir de partager avec son frère la prison et même la mort, quand le jour en sera venu. Ils furent conduits aux Carmes 1. Ceux qui arrêtèrent l'évêque de Beauvais paraissaient vouloir laisser la liberté à l'évêque de Saintes. << Messieurs, leur dit-il avec force et sensibilité, j'ai toujours été uni à mon frère par les liens de la plus tendre amitié; je le suis encore par mon attachement à la même cause.

Cette maison, illustrée par la confession et la mort de tant de martyrs, vient d'être acquise par M. l'archevêque de Paris. L'Église de Saintes, en particulier, applaudit à cette louable inspiration du prélat.

Puisque son amour pour la religion et son horreur pour le parjure font tout son crime, je vous supplie de croire que je ne suis pas moins coupable. Il me serait d'ailleurs impossible de voir mon frère conduit en prison et de ne pas aller lui tenir compagnie; je demande à y être conduit avec lui...» En vain son valet de chambre parvint-il à s'introduire dans la maison de détention, offrant à son maître un déguisement propre à lui faire recouvrer sa liberté; dans l'impossibilité d'offrir la même ressource à l'évêque de Beauvais, il ne put obtenir de lui de le faire évader seul. Les deux frères restèrent donc prisonniers. Mais pour mieux connaître les scènes sanglantes du 2 septembre 1792, où la palme du triomphe éternel leur fut décernée à l'un et à l'autre, laissons parler l'éloquent vicomte de Conny dans son histoire de la révolution :

« Il était cinq heures du soir. Billaud de Varennes, le substitut du procureur de la commune, arrive; il est revêtu de son écharpe; il marche sur les cadavres : -- Peuple, s'écrie-t-il, tu immoles tes ennemis, tu fais ton devoir!... Les tueurs demandent à grands cris de nouvelles victimes; une voix s'élève : c'est celle de Maillard Il n'y a plus rien à faire ici, allons aux Carmes! Une bande d'assassins marche sur la prison des Carmes; depuis plusieurs jours, les brigands qui veillaient autour de cette en

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