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avaient donné du scandale et que les évêques de France, de temps immémorial, étaient en possession de faire distribuer leurs mandements dans la capitale du royaume. Une délicatesse excessive ferma dans son esprit tout accès à ces raisons péremptoires; toujours il se persuada qu'on n'avait censuré ce livre que parce qu'il l'avait approuvé, et il fit éclater son ressentiment contre les auteurs de la censure. L'amour-propre, dans tous les rangs, est sujet à d'étranges petitesses!

« MM. de la Rochelle et de Luçon avaient chacun au séminaire de Saint-Sulpice un de leurs neveux. Le premier effet du ressentiment tomba sur ces jeunes abbés. L'archevêque voulut croire qu'ils avaient affiché aux portes de son palais le mandement de leurs oncles. Rien n'était plus faux que cette imputation dénuée de toute apparence, même de preuve. Ces abbés vivaient au séminaire avec édification, dans toute la régularité et l'esprit de retraite qu'on a toujours maintenu avec tant de soin dans cette pieuse maison. N'importe; le supérieur eut ordre de les renvoyer sur l'unique raison qu'on était mécontent de leurs oncles. Surpris et vivement piqués d'une pareille insulte, ces prélats portèrent directement leurs plaintes

au roi : >>

Cette lettre est un monument de sagesse, de modération et d'orthodoxie; nous la citons textuellement :

SIRE,

« La voix publique a sans doute appris à Votre Majesté comment M. le cardinal de Noailles a cru devoir punir, dans la personne de nos neveux, la censure que nous avons prononcée contre le Nouveau Testament du P. Quesnel.

« Nous sommes bien persuadés, Sire, que Votre Majesté ne saurait approuver une conduite qu'elle vient encore tout récemment de condamner par un exemple éclatant'. Ce n'est donc point pour Ini faire connaître l'injustice qui nous est faite, que nous prenons la liberté de lui écrire; mais ce n'est pas non plus pour nous en plaindre par rapport à nos intérêts particuliers.

« Oui, Sire, s'il n'y avait que nos deux personnes et celles de nos proches intéressées dans cette affaire, nous prendrions le parti de souffrir en silence, et nous nous ferions même un plaisir de souffrir pour une si juste cause. Mais nous est-il permis d'oublier ce que nous devons en cette occasion à l'Église, et en particulier à la liberté du saint ministère dont il a plu à Dieu de nous honorer par le choix de Votre Majesté ?

« En effet, Sire, il ne s'agit de rien moins ici que de laisser prévaloir l'hérésie, si les évêques se taisent; ou, s'ils parlent, de scandaliser les

On croit que Louis XIV avait déjà manifesté son mécontentement au cardinal de Noailles.

peuples, qui verront un autre évêque s'élever publiquement contre ses confrères, et leur donner les marques les plus éclatantes de son ressen

timent.

« Nous le disons à Votre Majesté, avec la plus vive douleur : l'erreur fait chaque jour d'immenses progrès par le moyen de plusieurs livres, les uns dédiés à M. le cardinal, d'autres approuvés de lui, ou par gens à lui, tous venant d'auteurs qui lui sont chers. L'étrange situation que celle où les évêques vont se trouver! Regarderont-ils tranquillement, chacun dans leur diocèse, la portion du troupeau que le Seigneur leur a confiée, s'empoisonner dans ces livres pernicieux? Parleront-ils, au péril, ne disons point de se voir maltraités dans leurs personnes ou dans les membres de leur famille, car ils doivent compter cela pour rien; mais au péril de voir éclater des ressentiments scandaleux qui déshonorent l'épiscopat, au péril de voir ces mauvais livres soutenus et autorisés par ceux qui devraient être les premiers à les proscrire?

«Mais, pour ne parler ici que du Nouveau Testament du P. Quesnel, le plus contagieux de tous ces livres, feu M. l'évêque de Chartres, (Votre Majesté le sait) après l'avoir supprimé dans son diocèse autant qu'il lui avait été possible, s'était enfin résolu de le flétrir juridiquement par une censure publique, lorsque la mort nous a enlevé

ce prélat, dont la mémoire sera toujours précieuse au clergé de France. Votre Majesté le sait encore; plusieurs évêques ont effectivement condamné ce dangereux ouvrage, sans que M. le cardinal ait cru devoir en prendre la défense. Devions-nous attendre que, faisant seulement ce que plusieurs autres de nos confrères avaient fait avant nous, sans qu'il parût y trouver à redire, nous verrions éclater son indignation contre nous seuls?

Respectant, à la tête du Nouveau Testament dont il s'agit, l'approbation dont M. le cardinal l'avait malheureusement honoré, nous aurions bien voulu ne le condamner qu'après qu'il l'aurait condamné lui-même. Nous nous sommes même flattés qu'il donnerait enfin cet exemple à l'Église, surtout depuis que nous avons vu le SouverainPontife s'expliquer, et condamner ce pernicieux ouvrage. Enfin, nous n'avons parlé que quand nous avons désespéré que M. le cardinal voulût parler lui-même, et lorsque la contagion, gagnant de tous côtés, ne nous a plus permis de nous

taire.

« Les raisons que l'on a eues, Sire, de suspendre en France la publication du jugement du Souverain-Pontife, touchant le Nouveau Testament du P. Quesnel, bien loin de nous dispenser de publier notre jugement particulier, nous obligeaient au contraire à le faire au plus tôt. Plus le mal était reconnu, plus il paraissait grand,

moins il y avait de temps à perdre pour arrêter la contagion.

:

« Nous avons donc parlé, Sire, parce qu'il ne nous était plus possible de garder le silence mais comment l'avons nous fait? M. le cardinal peut-il se plaindre que nous ayons manqué en rien à ce qui était dû à son rang et à son caractère? Avons-nous dit, dans la censure, un seul mot de lui, ou qu'il dût prendre pour lui? Tout notre crime donc est d'avoir condamné un livre qui inspire la révolte et l'erreur, et qu'il avait eu le malheur d'approuver.

<< En effet, sommes-nous la cause que M. le cardinal ait approuvé ce livre ? L'avons-nous empêché de rectifier ce qu'il avait fait, et de se conformer en cela au jugement du Souverain-Pontife? Fallaitil laisser entre les mains des fidèles un livre qui corrompait leur foi, qui portait et qui nourrissait, dans les communautés où il était admis, le mépris de toutes les puissances légitimes? Fallait-il le laisser, ce livre, entre les mains des fidèles, , parce que M. le cardinal avait été surpris, et l'avait trouvé orthodoxe ? Où en serait l'Église, si les évêques étaient touchés de ces vues humaines, jusqu'à oublier ce qu'ils doivent au dépôt de la foi et au salut de leur troupeau ?

<< Tout le monde le sait, ce fut par une foule de ces prétendus livres de piété, et surtout de livres sur l'Écriture, que les premiers Calvinistes infec

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