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Danse sur la mousse, au son des kithares.
Ni sanglants autels, ni rites barbares :
Des hymnes joyeux, des rires, des fleurs !

Ni Faunes ni Pans ne troublent les danses. Un jeune homme ceint d'un myrte embaumé Conduit de la voix le chœur animé;

Eros et Kypris règlent les cadences.

Ni Faunes ni Pans ne troublent les danses: Des pieds délicats, un sol embaumé !

Ni foudres ni vents dont l'âme s'effraie.
Dans le bleu du ciel volent les chansons,
Et de beaux enfants servent d'échansons
Aux vieillards assis sous la verte haie.
Ni foudres ni vents dont l'âme s'effraie :
Un ciel diaphane et plein de chansons!

IV

Sur la montagne aux sombres gorges
Où nul vivant ne pénétra,

Dans les antres de Lipara

Héphaistos allume ses forges.

Il lève, l'illustre ouvrier,
Ses bras dans la rouge fumée,
Et bat sur l'enclume enflammée
Le fer souple et le dur acier.

Les tridents, les dards, les épées
Sortent en foule de sa main;
Il forge des lances d'airain,

Des flèches aux pointes trempées ;

Et Kypris, assise à l'écart,
Rit de ces armes meurtrières,
Moins puissantes que ses prières,
Moins terribles que son regard.

V

Le divin bouvier des monts de Phrygie
Goûte, les yeux clos, l'éternel sommeil ;
Et de son beau corps, dans l'herbe rougie,
Coule un sang vermeil.

En boucles de lin, sur la pâle joue
Qu'enviaient les fruits honneur des vergers,
Tombent, du réseau pourpré qui les noue,
Ses cheveux légers.

Voici Kythéré, l'amante immortelle,
Qui gémit et pleure auprès du bouvier.
Les Amours chasseurs tiennent devant elle
Le noir sanglier.

Lui, pour expier d'amères offenses,
D'un autel qui fume attisant le feu,

Consume et punit ses blanches défenses
D'avoir fait un dieu.

LECONTE DE LISLE.

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La disette s'est abattue comme une plaie d'Egypte sur les théâtres de Paris, et, après trois mois de comédies grasses, nous venons d'avoir un long mois des pièces les plus maigres du monde. Chaque directeur s'en va crier famine chez son voisin, qui lui prête généreusement de quoi subsister jusqu'à la saison prochaine. C'est ainsi que le Vaudeville emprunte aux Variétés, les Variétés au Vaudeville, et le Gymnase à la Gaîté. Mais l'art et la littérature ne s'en portent pas mieux pour cela. Jamais peut-être on ne s'en est si peu soucié; ils sont comme s'ils n'étaient pas. L'esprit français semble endormi: la paix le réveillera-t-elle ? ou le souvenir des lauriers de l'Italie nous empêchera-t-il encore longtemps de travailler?

Il ne faut pas craindre de le dire; quand il se joue des drames sur le champ de bataille, on oublie d'en composer pour la scène du théâtre ; la guerre n'est point favorable aux travaux de l'esprit; les pièces qu'elle engendre ont peut-être valu la croix à leur héros, mais elles ne la mériteront jamais à leurs auteurs. Celle qui a eu le plus de succès est intitulée: la Voie sacrée ou les Etapes de la gloire; elle est signée de trois écrivains, et on comprend que ce n'était pas trop d'une trinité tout entière pour mener à fin une si grosse entreprise. Tous les trois, paraît-il, y ont travaillé, ce qui est rare, et si chacun d'eux touche des droits d'auteur, il faut leur rendre cette justice, qu'aucun ne les a usurpés. Le drame en soi n'a pas une haute valeur : les gens de bien y sont Italiens ou Français; les coquins font partie de l'empire d'Autriche; c'est ce qu'on peut y signaler de plus saillant. Il s'agit d'un baron croate ou autre qui a extorqué à une dame italienne la main de sa fille; la mère outragée est vengée par l'armée franco-sarde qui ne s'en doutait point, et voilà pour l'intrigue. Les auteurs n'ont pas imaginé d'autre moyen de faire intervenir les souverains alliés, ni trouvé de prétexte plus noble à leur intervention, il faut se contenter de celui-là. Ce n'est point d'ailleurs sur cette fable romanesque que repose l'intérêt de la pièce. L'intérêt, il est à Montebello, à Palestro, à Magenta, à Marignan, et c'est là qu'il faut le chercher. La poudre parle plus haut que les personnages dans cette épopée belliqueuse; et la baïon

nette en est le principal ressort. Il importait seulement de savoir si les décors répondaient aux splendides pays qu'ils étaient chargés de représenter et si les zouaves de la porte Saint-Martin se battaient aussi bien que leurs confrères de la Lombardie. Nous nous plaisons à constater qu'ils ne se battaient pas trop mal pour des zouaves de contrebande; en revanche, les Autrichiens du boulevard étaient très inférieurs aux Autrichiens du général Schlick, et on remarquait trop qu'ils avaient pour consigne de se rendre prisonniers et de livrer leurs étendards. J'ai vu un porte-drapeau hongrois chercher pendant plus de cinq minutes le turco chargé de lui crever la poitrine, et se retirer, tout penaud d'être vivant, sans avoir rencontré son ennemi. Mais ce sont là de petits inconvénients qu'il faut pardonner à l'incertitude des premières représentations. Peu à peu les conscrits s'aguerrissent, les retardataires se hâtent, les blessés se forment, les morts mêmes s'habituent, et on obtient un très beau spécimen d'escarmouche, de combat ou de bataille rangée. De pareils spectacles font de l'argent : mais ils n'appartiennent pas à la littérature; ils sont lucratifs et ne sont point salutaires; on peut même dire, avec tout le respect qu'on doit à la guerre, que, s'ils emplissent la caisse du directeur, ils produisent un effet contraire sur l'esprit du public. La politique ici n'est point en jeu, et Dieu nous garde de l'y mettre! il n'est question que de la littérature, laquelle est mal satisfaite de ces drames bruyants et de ces spectacles tumultueux. L'habit y a trop le pas sur le moine, et le plumage sur l'oiseau; c'est tout ce que je leur reproche; d'autres, des philosophes, trouveraient sans doute que la guerre y est trop glorifiée, et que le peuple français est assez ardent de sa nature pour n'avoir pas besoin de l'enthousiasme qu'on y respire. Cette observation semble un peu hors de propos, aujourd'hui que les besoins de la paix ont fait supprimer toutes les pièces militaires. Mais pourquoi ce qui est mauvais à dire aujourd'hui était-il bon à dire hier? La politique seraitelle devenue le criterium de la littérature? La paix et la guerre doiventelles présider aux destinées du théâtre? Le goût public change-t-il avec les ennemis de la France? Et une pièce acquiert-elle du prix ou perd-elle de la valeur au gré des caprices de la diplomatie? Non, assurément. C'est pourquoi il serait plus sage d'écarter toutes ces pièces de circonstance, et de se garder préalablement de toute insulte contre un drapeau que le vent de la politique fera flotter demain dans nos rues.

Je ne suis point un pédant — il n'y en a pas à la Revue Contemporaine, — mais j'aime à citer les Grecs. Ce peuple admirable connut toute l'ivresse des passions patriotiques et eut pour première vertu l'amour de l'indépendance. Pourtant ses poètes tragiques évitèrent généralement de mettre en scène les guerres nationales, surtout les guerres contemporaines, et Eschyle ne le fit qu'une seule fois dans sa tragédie des Perses. Mais c'était après Salamine; mais le poète lui-même avait combattu à Marathon; mais la liberté grecque était sauvée; tant d'enthousiasme, tant d'actions merveilleuses, tant de mâles vertus pouvaient être célébrées sans danger et livrées à l'admiration des spectateurs. Il eût suffi de mettre en présence les dix mille hommes de Miltiade et les trois cent mille du grand roi, les barques légères de Thémistocle et les lourds vaisseaux de Xerxès pour

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