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puis-je dire avec l'Apostre, et s'est donné pour moy seul, tout autant que s'il n'eust rien fait pour le reste.

Mais, mon Dieu, quand commençastes-vous à m'aymer? Ah! vous commençastes quand vous commençastes à estre Dieu. Mais quand commençastes-vous à estre Dieu? Jamais; car vous l'avez tousjours esté, sans commencement et sans fin : c'est pourquoy vous m'avez aymé dés l'eternité. Et comme vous m'avez aymée d'une charité perpetuelle, et m'avez attirée à vous, vous m'avez aussi donné le desir et la resolution de vous servir. O Dieu! quelles resolutions sont cecy, que Dieu a pensées, meditées et projettées dés son eternité! Hé! combien m'estes-vous cheres et precieuses? Que devroisje souffrir, ô mon Dieu, plutost que d'en quitter un brin? Non pas, certes, si tout le monde devoit perir; car aussi, tout le monde ensemble ne vaut pas une ame, et une ame ne vaut rien sans resolutions.

Sur la perseverance et fidellité à ses resolutions

O cheres resolutions! vous estes le bel arbre de vie que mon Dieu a planté de sa main au milieu de mon cœur, que mon Sauveur veut arrouser de son sang pour le fayre fructifier! Plutost mille morts, que de permettre qu'aucun vent vous arrache. Non, ny la vanité, ny les delices, ny les richesses, ny les tribulations ne m'arracheront jamais mon dessein.

Helas! Seigneur, mais vous l'avez planté, et avez dans vostre sein paternel gardé eternellement ce bel arbre pour mon jardin. Helas! combien y a-t-il d'ames qui n'ont point esté favorisées de ceste grace! Et comment donc pourrois-je assez m'humilier sous vostre misericorde?

O belles et sainctes resolutions! si je vous conserve, vous me conserverez; si vous vivez en mon ame, mon ame vivra en vous. Vivez donc à jamais, o resolutions, qui estes eternelles en la misericorde de Dieu! soyez et vivez eternellement en moy; que jamais je ne vous abandonne.

O Dieu, Pere tres-pitoyable et tout bon, puisque c'est par l'inspiration de vostre divine grace que mon cœur a receu de nouveau le desir, et formé la resolution de vous servir, recevez-le, ce chetif et miserable cœur, en sacrifice de bonne odeur et de suavité : c'est tout de nouveau que je vous le desdie, le consacre, le sacrifie et l'immole à vostre divine majesté, pour suivre en tout et partout, plus fidellement que jamais, vos souveraines ordonnances. Qu'il soit donc, ô mon Dieu! par consecratien et protestation, tout renouvellé fortifiez-le de vostre saincte grace, à ce que j'y sois fidelle. Tres-saincte Vierge, mere tres-pitoyable de mon Redempteur; et vous, mon bon ange et fidelle gardien, et tous les saincts du paradis, impetrez-moy ceste grace, qne j'y sois à jamais fidelle.

Protestation solemnelle d'estre tout à Dieu.

C'est maintenant, ô mon Dieu, que je puis dire que je ne suis plus mienne soit que je vive, ou que je meure, je suis à mon Sauveur. Non, je n'ay plus de moy, ny de mien mon moy c'est

Jesus, mon mien c'est d'estre sienne. O monde! vous estes tousjours vous-mesme, et moy jusques icy j'ay tousjours esté moy-mesme; mais doresnavant je ne seray plus moy-mesme, mais à Jesus-Christ, à qui je suis, et pour lequel, je veux vivre et souffrir en ceste vie, pour le posseder dans l'eternité bien-heureuse. Amen.

DIVERS ADVIS ET RESOLUTIONS

TOUSCHANT LA CONFESSION TANT GENERALE QU'ANNUELLE.

EMANDE I. S'il est à propos de fayre une confession generale auD que de noopos paravant que de mourir? Mon advis va à deux choses : l'une, faites une revue generale de toute vostre vie pour fayre une penitence generale; c'est une chose sans laquelle nul homme d'honneur ne doit mourir : l'autre, essayez-vous petit à petit de vous desprendre des affections du monde. Pour cela, il faut, non pas du tout rompre les lyens d'allyance qu'on a aux affaires du monde, mais les descoudre et desnoüer.

C'est une charité indispensable que vous vous devez de vous acheminer à une heureuse fin, et nul respect ne vous doit empescher de vous y employer avec ardeur. Car, puisque Dieu nous commande d'aymer nostre prochain comme nous-mesme, il suppose que nous nous devons aymer; et la premiere partie que vous devez aymer en vous, c'est l'ame, et en l'ame, la conscience, et en la conscience, la pureté, et en la pureté, l'apprehension du salut eternel.

DEMANDE II. Quels sont les advantages d'une bonne confession, et les pechez à quoy comparez? — Tandis que nos fautes sont dans nos ames, elles sont des espines; sortant dehors par la volontaire accusation, elles sont converties en roses et parfums, d'autant que, comme nostre malice les tire dans nos cœurs, aussi c'est la bonté du Sainct-Esprit qui les pousse dehors.

DEMANDE III. S'il est à propos de se confesser à Pasques à sa paroisse, et d'y fayre sa reveuë generale? -Vous confessant à de bons confesseurs, ne doubtez nullement car s'ils n'avoient le pouvoir de vous ouyr, ils vous renverroient; et il n'est nullement besoin de faire ces reveues generales en la paroisse, desquelles vous m'escrivez il suffit d'y rendre son devoir à Pasques, en s'y confessant, et au moins s'y communiant. Estant aux champs, les prestres que vous treuverez aux paroisses vous pourront aussi confesser. Ne vous laissez point presser de scrupules ny de trop de desirs cheminez doucement et courageusement.

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DEMANDE IV. Si le secret est reciproque et esgalement obligeant de la part du penitent comme du confesseur. Vous devez estre ferme en la resolution que je vous ay donnée, que ce qui se dit au secret

de la penitence est tellement sacré, qu'il ne se doit pas dire hors d'icelle. Et quiconque demande, si vous avez dit ce que vous avez dit avec le sceau tres-sainct de la confession, vous luy pouvez parler hardyment et sans peril de duplicité dire que nenny: il n'y a nul difficulté en cela. Une autrefois doncques, demeurez ferme, et tenez pour non dit et totalement tout ce qui est couvert du voyle sacramental; et cependant ne vous mettez nullement en scrupule, car vous n'avez point offensé, le disant, bien qu'à l'adventure vous eussiez mieux fait le celant, à cause de la reverence du sacrement, qui doit estre si grande que hors iceluy il ne soit rien mentionné de ce qui s'y dit.

DEMANDE V. Que dire de la confession des frequentes recheutes? Ne vous troublez point de quoy vous ne remarquez pas toutes vos meneues cheutes pour vous en confesser. Non, car comme vous tombez souvent sans vous en appercevoir, aussi n'est-il pas dit, au passage que vous alleguez, que le juste se void ou sent tomber sept fois le jour, mais qu'il tombe sept fois : aussi il se releve sans attention à ses rélevées. Ne vous mettez doncques pas en peyne pour cela, mais allez humblement et franchement dire ce que vous aurez remarqué; et pour ce que vous n'aurez pas remarqué, remettez-le à la douce misericorde de celuy-là qui met la main au-dessous de ceux qui tombent sans malice, afin qu'ils ne se froissent point, et les releve si doucement et vistement, qu'ils ne s'apperçoivent pas, ny d'estre tombez, parce que la main de Dieu les a recueillis en leurs cheutes, ny d'estre relevez, parce qu'il les a retirez si soudain, qu'ils n'y ont pas pensé.

DEMANDE VI. Si les confessions annuelles sont à conseiller, si les escrire, et quel examen y apporter? - Pour escrire la confession, cela est indifferent; et plusieurs n'appreuvent pas qu'on escrive, c'est-à-dire ayment mieux qu'on s'accuse par cœur.

Les confessions annuelles sont bien bonnes, car elles nous rappellent à la consideration de nostre misere, et nous font recognoistre si nous advançons ou reculons, nous font raffraischir plus vivement nos bons propos; mais il les faut fayre sans inquiettude et sans scrupule, non tant pour estre absoutes que pour estre encouragées. Il n'est pas requis de fayre si exactement l'examen mais seulement de gros en gros. Si vous les pouvez fayre de la sorte, je vous les conseille; si moins, je ne desire pas que vous les fassiez.

DEMANDE VII. Quelles sont les marques de la validité de la confession generale? - J'ay treuvé en vostre confession generale toutes les marques d'une vraye, bonne et solide confession, et que jamais je n'en avois reçeuë qui m'eust plus entierement contenté. C'est la vraye verité, et croyez qu'en telles occasions je parle fort purement. Que si vous avez obmis quelque chose à dire, considerez si ç'a esté à vostre escient et volontairement, car en ce cas-là vous devriez sans doubte refayre la confession, si ce que vous auriez obmis estoit peché mortel, ou que vous pensassiez à ceste heure-là que ce le fust;

mais si ce n'est que peché veniel, ou que vous l'ayez obmis par oublyance et deffaut de memoire, né doubtez point: car, au peril de mon ame, vous n'etes nullement obligée de refayre vostre confession; mais il suffira de dire à vostre confesseur ordinaire le poinct qué vous avez obmis. De cela j'en respons. N'ayez pas crainte non plus de n'avoir pas apporté tant de diligence qu'il falloit à vostre confession generale, car je vous redy fort clairement et asseurement, que si vous n'avez point fait d'obmission volontaire, vous ne devez nullement refayre la confession, laquelle pour vray a esté tres-suffisamment faite. Demeurez en paix de ce costé-là.

DEMANDE VIII. Confession de huict jours, pourquoy conseillée, et en quelle occasion?· N'oublyez pas de vous confesser tous les huict jours, et quand vous aurez quelque grand ennuy de conscience.

DEMANDE IX. Quelle preparation est requise à la reveuë et à la confession generale et annuelle? - Touschant la reveuë de vostre estat interieur, 1o preparez bien tout ce qui sera requis pour rendre ce voyage fructueux, et telle que ceste entreveue puisse suffire pour plusieurs années; 26 recommandez-le à Nostre Seigneur; 3° feüilletez tous les replys, et voyez tous les ressorts de vostre ame, et considerez tout ce qui aura besoin d'estre ou rhabillé ou remis; 4o de mon costé, je presenteray à Dieu plusieurs sacrifices, pour obtenir de sa bonté la lumiere et la grace necessaires pour vous servir en ceste occasion; 5o preparez une grande, mais je dy tresgrande et absoluë confiance en la misericorde de Dieu, puis en mon affection mais je sçay que de cela la provision est toute faite; 6o s'il vous semble qu'à mesure que vostre sousvenance et vostre consideration vous suggereront quelque chose, il vous soit utile de le marquer avec la plume, je l'appreuverois fort; 7° le plus que vous pourrez apporter d'abnegation ou d'indifference de vostre propre volonté, c'est-à-dire de desir et de resolution de bien obeyr aux inspirations et instructions que Dieu vous donnera, quelles qu'elles soyent, ce sera le mieux car Nostre Seigneur agit dans les ames qui sont purement siennes, et non preoccupées d'affections et de propre volonté; 8° mais surtout gardez de vous inquietter en ceste preparation faites-la doucement et en liberté d'esprit.

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DEMANDE X. Que dire des fautes obmises en confession. Pour avoir obmis quelque verset de l'office ou quelque ceremonie, il n'y a qu'un peché veniel; et quand la memoire de telles fautes vous arrive apres la confession, il n'est pas requis de retourner vers le confesseur pour aller à la communion; mais au contraire, il est bon de n'y pas retourner, mais le reserver à dire pour l'autre confession suivante, afin de le dire si on s'en souvient.

DEMANDE XI. Quelles circonstances doivent estre exprimées en la confession. Ceste grande crainte, qui vous a cy-devant si

cruellement angoissée, doit estre desormais terminée, puisque vous avez toutes les asseurances qui se peuvent avoir en ce monde, d'avoir fort entierement expié vos pechez par le sainct sacrement de penitence. Non, il ne faut nullement revocquer en doubte que les despendances de vos fautes n'ayent esté suffisamment exprimées; car tous les theologiens sont d'accord qu'il n'est nullement besoin de dire toutes les despendances ny les acheminemens du peché. Qui dit: J'ay tué un homme, il n'est pas besoin qu'il die qu'il a tiré son espée, ny qu'il a esté cause de plusieurs deplaysirs aux parens, ny qu'il a scandalizé ceux qui l'ont veu, ny qu'il a troublé la ruë en laquelle il a tué; car tout cela s'entend assez sans qu'on le die il suffit seulement de dire qu'il a tué par cholere, ou de guetà-pens, par vengeance, qu'il estoit un homme simple ou ecclesiastique; et puis laisser le jugement à celuy qui l'escoute. Qui dit qu'il a bruslé une mayson, il n'est pas requis qu'il die ce qui estoit dedans par le meneu, mais il suffit de dire s'il y avoit des gens dedans, ou s'il n'y en avoit pas. Demeurez tout à fait en paix; vos confessions ont esté bonnes jusques à l'excez : pensez desormais à vostre advancement à la vertu, et ne pensez pas aux pechez passez, sinon pour vous humilier doucement devant Dieu, et benir sa misericorde qui vous les a pardonnez par l'application du divin sacrement.

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DEMANDE XII. Que fayre touschant les pechez oublyez en la confession generale, et avec quelle simplicité il faut agir? - Ceste bonne ame que vous et moy cherissons tant, me fait demander si elle pourra attendre la presence de son pere spirituel pour s'accuser de quelque poinct duquel elle n'eut point souvenance en sa confession generale; et à ce que je voy, elle le desireroit fort. Mais ditesluy, je vous supplie, que cela ne se peut en aucune façon: je trahyrois son ame si je luy permettois cest abus. Il faut qu'à la fine premiere confession qu'elle fera, tout au commencement, elle s'accuse de ce peché oublyé (j'en dy de mesme s'il y en a plusieurs), purement et simplement, et sans repeter autre chose de sa confession generale, laquelle fut fort bonne.

Et partant nonobstant les choses oublyées, ceste ame ne se doit nullement troubler; car la verité est que le premier et principal poinct de la simplicité chrestienne gist en ceste franchise d'accuser ses pechez quand il en est besoin, purement et nuëment, sans apprehender l'aureille du confesseur, laquelle n'est apprestée que pour ouyr des pechez et non des vertus, et des pechez de toutes

sortes.

Que donc hardyment et courageusement elle se descharge pour ce regard avec une grande humilité et mespris de soy-mesme, sans avoir crainte de fayre voir sa misere à celuy par l'entremise duquel Dieu la veut guerir.

Mais si son confesseur ordinaire luy donne trop de honte ou d'apprehension, elle pourra bien aller ailleurs; mais je voudrois en cela toute simplicité, et croy que tout ce qu'elle a à dire est fort peu de chose en effect, et l'apprehension la fait paroistre estrange mais dites-luy tout cecy avec une grande charitél, et l'as

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