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lumieres en l'Eglise, pour les cacher en certains deserts incogneus? S. Augustin poursuit: Voicy le mont qui remplit l'univers, et environne la face de la terre. Voicy la cité, de laquelle il est dit : La cité ne se peut cacher, quand elle est située sur le mont. Les Donatistes (les Calvinistes) et autres heretiques, rencontrent le mont, quand on leur dit: Montez; Ce n'est pas, disent-ils, une montaigne; ce qui fait qu'ils s'y heurtent et tresbuchent miserablement, au lieu d'y establir et chercher une demeure. Isaïe, qu'on lisoit hyer, annonce aux leçons de l'office: Vous verrez dans les derniers jours, il y aura un mont preparé sur le coupeau des montaignes, pour estre la demeure du Seigneur, où tous les peuples viendront en foule (Is. 2). Est-il rien de plus apparent qu'une montaigne? Mais nos esgarez se font des monts incogneus, parce qu'ils sont assis en un coin de la terre: qui d'entre vous cognoist le mont Olympe? personne certes, quoy qu'il soit beaucoup eslevé; non plus que les habitans d'Olympe scavent ce que c'est que nostre mont Chidabbe', parce que les montaignes particulieres sont retirées en certains quartiers. Mais le mont d'Isaïe n'est pas de mesme, c'est un mont dominant, qui a remply toute la face de la terre. La pierre de ce mont, taillée et incisée sans œuvre d'homme (Dan. 2), n'est-ce pas Jesus-Christ, descendu de la race juifve sans œuvre de maryage? ceste pierre n'a-t-elle pas abattu tous les royaumes du monde, c'est-à-dire, toutes les dominations des idoles et des démons? ne s'accreut-elle pas jusques à remplir tout l'univers? C'est donc de ce mont qu'il est dit: Il est preparé sur la cime des collines; c'est un mont eslevé sur le sommet de tous les monts, qui s'humilient, ou qui se brisent contre son pied qui peut ignorer la cité mise sur ce mont? Il est vray qu'il est incogneu; mais c'est seulement à ceux-cy, qui hayssent l'Eglise; car, comme ils marchent par les tenebres, ils ne sçavent où ils vont, ils se sont separez de l'unité du corps; ils se sont aveuglez dans leur ignorance. Et voylà nos preuves par les parolles de sainct Augustin contre les Donatistes; apres tout, comme l'Eglise presente exprime parfaictement l'Eglise ancienne, ainsi les heretiques de nostre aage ressemblent pareillement aux anciens heretiques, sans changer autre chose que les noms d'où s'ensuit que les raysons anciennes combattent les Lutheriens et les Calvinistes, comme elles faysoient autresfois les Donatistes.

Mais voyons comme sainct Hierosme entre en ceste lice de son costé. En verité, Messieurs, il vous est aussi redoubtable que l'autre; car il fait voir clairement, que ceste dissipation pretendue, ceste retraitte et bannissement de l'Eglise, abolit la gloire de lá croix de Nostre Seigneur, puisque, parlant à un schismatique reüny à l'Eglise, il luy dit ces parolles (Avers. Lucif.): Je me resjouy avec toy, et rends graces à Jesus-Christ, mon Dieu, de ce que tu t'es reduict de bon courage de l'erreur et de la fausseté, au goust et sentiment de tout le monde, et que tu ne dy pas comme quelques-uns: O Dieu! sauvez-moy, car le sainct a manqué et a deffailly. Leur voix impie evacue la croix de Jesus-Christ, s'ils

• Chidabbe était le nom d'une montagne près d'Hippone.

assubjettissent le Fils de Dieu au diable, et si le regret que le Seigneur a tesmoigné contre les pecheurs est entendu de Jesus-Christ, aussi bien que de tous les hommes: mais gardons-nous de croire que Dieu soit mort pour neant, le puissant est lyé et saccagé, la parolle du Pere est accomplie, demande-moy et je te donneray les nations pour heritage, et pour tes possessions les bornes de la terre (Ps. 2); où sont, je vous prie, ces gens trop religieux, ou plutost trop prophanes, qui sont plus de la Synagogue que de l'Eglise? comme seront destruites les citez du diable et comme seront abattuës les idoles, à la consommation des siecles? Si Nostre Seigneur n'a point eu d'Eglise; ou s'il l'a euë en la seule isle de Sardaigne, ou autre lieu caché, certes, il est trop appauvri. Hé! si Satan possede une fois l'Angleterre, la France, le Levant, les Indes, les nations barbares et tout le monde, comment auront esté retrecis et resserrez les trophées de la croix en un seul coin du monde? Voylà ce que dit sainct Hierosme. Mais que diroit ce grand personnage, de ceux qui, non-seulement nyent qu'elle ayt esté generale et universelle, mais qui soustiennent encore hardyment, qu'elle n'est qu'en certaines personnes incogneues, sans vouloir determiner un seul petit bourg, où elle se fust preservée depuis mille ans? n'estce pas bien avilir le glorieux mystere de la Redemption? Le Pere celeste, pour la grande humiliation et aneantissement que son Fils avoit souffert en sa passion et sur la croix, avoit rendu son nom si auguste, que toute nation devoit se plier pour sa reverence; mais ceux-cy ne prisent pas tant la croix, ny les actions du Crucifié: ils ostent du compte de sa gloire les generations de mille ans. Le Pere luy avoit donné en heritage beaucoup de gens, parce qu'il avoit livré sa vie à la mort, il avoit livré son corps à la croix, et avoit esté mis au rang des impies, des meschans et des voleurs; mais ceux-cy luy diminuent beaucoup ses honneurs, et rognent si fort sa portion, qu'à grand'peyne en l'espace de mille ans, aurat-il cu certains serviteurs secrets et cachez, ou pour mieux dire point du tout selon leur doctrine. Mais je m'addresse à vous, ô devanciers, qui portastes le nom de chrestiens, et qui avez creu estre en la vraye Eglise ou vous aviez la vraye foy, où vous ne l'aviez pas; si vous ne l'aviez pas, ô miserables! vous estes tous damnez, et si vous l'aviez, pourquoy la cachiez-vous aux autres? que n'en laissiezvous des mémoires? que ne vous opposiez-vous à l'impieté et à l'idolastrie? ne sçaviez-vous pas que Dieu a recommandé à un chascun le salut de son prochain (Eccli. 17)? Certes, on croit de cœur pour la justice (Rom. 10); mais qui veut obtenir le salut, il faut faire la confession de sa foy (Luc. 12). Et comment pourriezvous dire J'ay creu, et par ce j'ay parlé (Ps. 115). O miserables en toute maniere! qui, ayant un si beau talent, l'avez enfoüy en terre (Matth. 25)! S'il est ainsi, vous estes dans les tenebres exterieures mais sí, au contraire, ô Luther! ô Calvin! si, au contraire, la vraye foy a tousjours esté publiée et continuellement preschée par tous nos devanciers, vous estes miserables vous-mesmes, qui en avez forgé une toute nouvelle, et qui, pour treuver quelque excuse à vos volontez et à vos phantaysies, accusez indignement tous les chrestiens, ou d'impieté s'ils ont mal creu, ou de lascheté s'ils se sont tus.

DISCOURS XIV.

L'Eglise ne peut errer, et c'est en vain qu'on suppose une mission extraordinaire, pour la corriger de ses erreurs.

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ПN ce tems mesme que le perfide Absalon voulut former la conspiration contre son pere David, il s'assit à la porte du palais, et disoit à tous ceux qui passoient: Il n'y a personne constitué dé la part du roy pour vous ouyr: hé! qui mè constituëra juge sur la terre, afin que tous ceux qui auront quelque negociation, viennent à moy, et que je juge justement (11. Reg. 15). Ainsi il sollicitoit et seduisoit le courage des Israëlites. O combien d'Absalons se sont treuvez en nostre aage, qui, pour seduire et distraire les peuples de l'obeyssance de l'Eglise et des pasteurs, et solliciter les cœurs des chrestiens à la rebellion, ont crié par toutes les advenuës d'Allemagne et de la France: Il n'y a personne establi de Dieu, pour ouyr tes doubtes de la foy, et les resoudre: l'Eglise mesme, et les magistrats n'ont point le pouvoir de determiner ce qu'il faut tenir en la foy, et ce qu'il faut rejetter; car l'Eglise peut errer en ses decrets et en ses regles! O Dieu! quelle plus dommageable et plus temeraire persuasion pouvoient-ils inspirer au Christianisme, que celle-là? Si donc l'Eglise peut errer, ô Calvin! ô Luther! à qui auray-je recours en mes difficultez? à l'Escriture, disent-ils; mais que feray-je, pauyre homme? c'est sur l'Escriture mesme où j'ay difficulté je ne suis point en doubte s'il faut adjouster foy à l'Escriture, ou non, je sçay et je suppose que c'est la parolle de verité; ce qui me tient en peyne, c'est l'intelligence de ceste Escriture, ce sont les consequences qu'on en peut tirer, lesquelles estant sans nombre, et ce semble contraires sur un mesme subjet, un chascun peut prendre l'equivoque diversement selon son sens je demande et je desire sçavoir quel de tous ses sens est le vray et le salutaire? Mon Dieu! qui me fera cognoistre la bonne exposition parmy tant de mauvaises? qui me fera voir la solide verité au travers plusieurs apparences? Je suis persuadé que chascun se voudroit embarquer sur le navire, qui est le vaisseau du Sainct-Esprit. D'ailleurs, je sçay qu'il n'y en a qu'un, et que celuy-là seul peut prendre port; car tout le reste court au naufrage. Ha! helas! que le danger est grand de se meprendre! la vanité, l'avarice, et la temeraire promesse des patrons en deçoit la pluspart, car tous se vantent d'en estre les maistres. Celuy qui dit, que Dieu ne nous a pas laissé des guides en un chemin si perilleux et si difficile, impose à Dieu, et croit qu'il nous veut perdre; celuy qui dit qu'il nous a embarquez à la mercy des vens et de la mer, sans nous donner un bon et sage pilote, qui scache bien prendre le poinct de la carte et de la boussole, est comme s'il disoit, que faute de prevoyance le peril est tres-grand; celuy qui dit que nostre Maistre nous a envoyez en l'eschole de son Eglise, sçachant que l'erreur y estoit receue et enseignée, conclud assez, qu'il a voulu nourrir nostre vice et nostre ignorance. Mais de grace! qui jamais a estimé une academie, où le maistre enseigne l'erreur et le mensonge, et où personne ne fut jamais son auditeur? Certes, telle seroit la

saincte Eglise, si les particuliers avoient tousjours esté dans l'imposture; car si l'Eglise erre elle-mesme, qui n'errera? et si chascun y erre avec elle, ou peut errer, à qui m'addresseray-je pour estre instruict? sera-ce à Calvin? mais pourquoy plutost qu'à Luther, ou à Brence, ou à Pacimontain? Nous n'aurions plus sans doubte à qui recourir en nos difficultez, si l'Eglise erroit: mais qui considerera, de bon sens, le credit tres-authentique que Dieu a donné à l'Eglise, inferera certainement, que celuy qui dit que l'Eglise peut errer, peut dire que Dieu erre, ou se playst dans l'erreur, et veut qu'on erre, ce qui ne peut estre qu'un grand blaspheme. N'est-ce pas Jesus-Christ qui nous enseigne: Si ton frere a peché contre toy, dy-le à l'Eglise si quelqu'un n'entend point l'Eglise, qu'il te soit comme un infidelle et un estranger (Matth. 18)?

Voyez-vous comme Nostre Seigneur nous renvoye à l'Eglise en nos differens, quels qu'ils soyent: mais bien plus, quand les subjets sont de plus grande consequence. A dire vray si je suis obligé, apres l'ordre de la correction fraternelle, d'aller à l'Eglise, pour reduire en justice un vicieux qui m'aura offensé, combien plus seray-je obligé d'y defferer celuy qui appelle toute l'Eglise une Babylonne, une adultere, une idolastre, une mensongere, une parjure? et que je le feray d'autant plus justement, qu'avec sa malice et son artifice il fait effort pour debaucher et infecter toute une province, puisque le vice d'heresie est si contagieux, que comme un chancre il se va tousjours insinuant dans les parties nobles (11. Tim. 2). Quand donc j'en verray quelqu'un qui me dira, que tous nos peres, nos ayeulx et nos bisayeulx ont esté idolastres, qu'ils ont corrompu l'Evangile, et qu'ils ont prattiqué toutes les meschancetez qui s'ensuivent de la cheute de la religion, je m'addresseray à l'Eglise, dont le jugement me doit estre recommandable. Mais, ô Dieu! si elle peut errer, ce ne sera plus moy, ny l'homme qui sera coupable d'erreur, ce sera le Fils de Dieu mesme, qui l'authorise, et luy donne son credit, puis qu'il nous commande d'aller à son tribunal, pour y poursuivre et recevoir justice. Il faut certes de deux choses l'une ou que Jesus-Christ ne cognoisse pas ce qui s'y fait, ou qu'il nous veuille decevoir; ou que c'est là, en conscience, que la vraye justice s'administre, ou que c'est à tort que les sentences y sont irrevocables. L'Eglise a condamné Berangaire; celuy qui le voudroit justifier seroit contre l'Eglise, et je l'estimerois comme payen et publicain. Obeyssons donc au Seigneur, qui ne nous laisse pas la liberté en cest endroict, mais nous commande souverainement d'escouter son Eglise. Sainct Paul desclare la mesme verité, quand il appelle l'Eglise une colomne de fermeté et de verité (1. Tim. 3), pour signifier que la verité est soustenuë fortement en l'Eglise. Il dit ailleurs : La verité n'est soustenuë que par intervalle, elle tombe souvent; mais en l'Eglise elle est sans vicissitude, et immuablement, sans chanceler, parce que l'Eglise est stable et perpetuelle. Si vous respliquez que sainct Paul veut dire en cest endroict, que l'Escriture à esté remise en garde à l'Eglise, et rien plus; certes, c'est trop ravaler la similitude qu'il propose, car c'est bien plus de soustenir la verité, que de garder le depost de l'Escriture. Les Juifs gardent une partie de l'Escriture, et

beaucoup d'heretiques pareillement la tiennent et la conservent à leur maniere; mais pour cela, ils ne sont pas les colomnes de fermeté et de verité : l'ecorce de la lettre n'est ny veritable ny fausse; elle n'est telle, que selon le sens qu'on luy baille, bon ou mauvais. Supposons que la verité consiste au sens, qui est comme la mouelle; il s'ensuit, si l'Eglise est gardienne de la verité, que le sens dé l'Escriture luy est remis, et qu'il le faut chercher chez elle, et non pas en la cervelle de Luther, ou de Calvin, ou de quelqu'autre : ainsi elle ne pourroit errer aucunement, ayant tousjours chez elle le sens de l'Escriture. Et de fait, si l'on eust mis dans ce sacré depost la lettre sans le sens, on auroit mis la bourse sans l'argent, la coquille sans le noyau, la guaîne sans l'espée, la boëte sans l'unguent, la feüille sans le fruict, et l'ombre sans le corps. Mais ditesmoy, si l'Eglise tient en sa garde les Escritures, pourquoy est-ce que Luther les a prinses, et transportées hors de chez elle? pourquoy est-ce que vous mesprisez de les prendre de ses mains, et pourquoy non les Machabées, l'Ecclesiastique, et tout le reste, comme l'Epistre aux Hebrieux? car elle proteste avoir aussi cherement en sa garde les uns comme les autres. Escoutons les parolles de sainct Paul, qui ne peuvent souffrir le sens oblique et forcé que vous leur donnez; il parle de l'Eglise visible et cogneue, car où addresseroit-il son Timothée pour converser? il l'appelle la mayson du Seigneur : elle est donc bien fondée, bien rangée, et bien couverte contre tous les orages et les tempestes; elle est une colomne de fermeté et de verité la verité donc est chez elle, elle y loge, elle y demeure, et qui la cherche ailleurs, la perd de vue; elle est tellement asseurée, remparée et fermée, que toutes les portes d'enfer (Matth. 16), c'est-à-dire, toutes les forces ennemyes, ne sçauroient s'en rendre maistresses (Ephes. 1); mais ne seroit-ce pas ville gaignée pour l'ennemy, si l'erreur y entroit touschant les choses qui sont pour l'honneur et pour le service de son Espoux? S'il est vray que Nostre Seigneur est le chef de l'Eglise, n'a-t-on point de honte de dire que le corps d'un chef si sainct et si venerable soit adultere, prophané et corrompu? C'est en vain qu'on fait une exception de l'Eglise invisible; car il n'y a point icy-bas d'Eglise qui ne soit visible, comme j'ay monstré cy-dessus : le Fils de Dieu en est le chef. Escoutez la voix de sainct Paul: Et ipsum dedit caput supra omnem Ecclesiam (Ephes. 1): non sur une Eglise, ou sur deux, comme vous l'imaginez; maís sur toute l'Eglise. dit luy-mesme: Là où deux, ou trois, se treuveront assemblez au nom de Nostre Seigneur, il se treuvera au milieu d'eux (Matth. 18). Qui osera donc advancer ceste fausseté, que l'assemblée universelle de l'Eglise, depuis mille ans et plus, ayt esté abandonnée à la mercy de l'erreur et de l'impieté? Je conclus de toutes ces preuves, que s'il est impossible que l'Eglise catholique soit dans l'erreur de quelque article de la foy (soit que nous le voyons exprez dans l'Escriture, soit qu'il en soit tiré par quelque deduction, ou par tradition), nous devons croire à son authorité, sans aucunement controsler, ou disputer, ou doubter de sa decision; mais luy porter l'obeyssance et l'hommaige qui est deu à ceste reyne, à qui Nostre Seigneur a commandé de regler nostre foy par le Sainct

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