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fuyant devant la croix, il a fait comme ceux qui reculent, pour » plus advancer.

40 Et parlant de l'exemple de Julien l'Apostat, il dit : « Que » l'exemple d'un tel miserable ne doit estre advancé, pour establyr ⚫ une doctrine en l'Eglise; car tel exemple n'est pas loüable: tel»lement qu'on peut bien faire ceste conclusion: Puisque Julieu l'Apostat, et semblables autres, ont fait ce signe, et en ont » esté, comme on dit, secourus, il est apparent que cela ne pro» cede de Dieu ains il est venu de Satan, qui l'a de plus en plus >> voulu troubler et enlacer par le juste jugement de Dieu; car » ce cas, advenu extraordinairement, a servy pourtant pour con» fondre cest abominable, tant en sa conscience que deyant les >> hommes, et devant Dieu. Voylà en somme les responses du traitteur.

On leur oppose: 1o Leur contrarieté, incertitude et doubte; il ne sçayt à qui bailler l'honneur de ces evenemens : « Si c'est par » la force de Jesus-Christ, si c'est par mauvais moyen, il s'est peu » faire pour en graver uné plus profonde pensée de la mort et pas>>sion de Jesus-Christ..... Que si ç'a esté Dieu, donnant efficace » d'erreur à Satan pour decevoir les hommes...., » quels embarrassemens? Monstre-t-il pas, avec ses irresolutions, qu'il est bien empesché, et qu'il va sondant le guay pour essayer s'il pourra treuver quelque response?

20 Je leur oppose toute l'antiquité, laquelle, avec un consentement nonpareil, enseigne que ces merveilles advenues sont de la main de Dieu. Ces grands Peres que nous avons citez, et en si grand nombre, nous inviteroient-ils bien à faire le signe de la croix, s'ils doubtoient que le diable en fust l'autheur? Et qui doubtera qué Jesus-Christ en soit l'auteur, s'il considere, comme Lactance deduict, combien cela tend à l'honneur de Dieu, que le simple signe de sa passion chasse ses ennemys.

3° J'oppose que ces responses ressentent puamment l'heretique et desesperé: ç'a esté le train ordinaire des anciens rebelles, d'attribuer les miracles aux charmes et à l'operation des diables. Tesmoins les Scribes et Pharisiens qui attribuoient les œuvres de JesusChrist à Beelzebuth (Matth. 12), les Vigilantiens, au rapport de sainct Hierosme, et les Ariens, selon sainct Ambroise. Le mot de Tertullien est memorable, persuadant à sa femme de ne se remaryer point à un infidelle: Te cacheras-tu, dit-il, lorsque tu signes ton lict et ton corps? ne semblera-t-il pas que tu fasses une action magique? Voyez-vous comme Tertullien attribue aux payens le dire des huguenots, à sçavoir, que le signe de la croix sert à la magie.

4° J'oppose que la consequence de tels effects a tousjours esté à la gloire de Dieu, et tendoit au salut des hommes; tous les Peres l'ont ainsi remarqué. N'est-ce pas la gloire de Dieu et le bien des hommes, que le diable soit dompté et rejetté ? Certes, entre les grands effects de la crucifixion du Fils de Dieu, il y compte luymesme celuy-cy: Maintenant le prince de ce monde sera mis dehors (Joan. 12). Et c'est cela qui fait que le diable fuyt devant la croix, comme devant la vive representation de ceste crucifixion.

5o J'oppose que, puisqu'il s'est peu faire que les merveilles faites à la croix ayent esté faites par la force de Dieu pour en graver la pensée de la mort et passion de nostre Sauveur au cœur des hommes, comme le traitteur confesse, il a eu tort, et s'est monstré trop passionné, d'aller rechercher une autre cause de ces miracles; car celle-cy est plus à l'honneur de Dieu, et au salut des hommes que non pas de dire que le nyable en a esté l'autheur, comme le mesme traitteur dit par apres.

6o J'oppose que c'est ouvrir la porte à la mesme creance, laquelle à tous les miracles des exorcismes, tant de Nostre Seigneur que de ses disciples, respondra que le diable fait semblant de reculer pour mieux advancer. Et quant à ce que le traitteur dit, que le diable a employé à cest effect la simplicité des chrestiens, il y auroit de l'apparence, si on luy produisoit le tesmoignage dé quelques idiots. Mais quand on luy produict les Martial, Ignace, Origene, Chrysostome, Augustin, comme ose-t-il les accuser d'une simplicité folle ou plutost de niayserie? Y a-t-il homme qui vive qui leur soit comparable, non plus en suffisance qu'en saincteté, parlant de la pluspart?

7 Et quant au fait de Julien l'Apostat, lequel le trait teur dit ne devoir estre suivy, ains plutost rejetté, je remonstre que c'est un traict de mauvaise foy au traitteur, de gauchir ainsi à la rayson vive; car qui produisit jamais ce faict comme de Julien l'Apostat? On l'advance, pour monstrer que le signe de la croix a tant de vertu contre les malins, que non-seulement ils le craignent en bonnes mains, mais encore és mains de qui que ce soit : dequoy le cas advenu à Julien fait une preuve manifeste.

Pour vray, sainct Gregoire Nazianzene, et Theodoret, tiennent resolument que les diables fuyrent pour la crainte qu'ils eurent, voyant la croix. Permettez-nous, traitteur, que nous soyons de leur opinion, plutost que de la vostre, ou de celle du maistre charmeur. Le devin, au recit des anciens Peres, pour ne confesser pas la honteuse fuyté de ses maistres estre procedée de peur, dit à Julien qu'ils avoient eu la croix en abomination, non à crainte. Vincit quod deterius est, dit sainct Gregoire Nazianzene, le pis l'emporte. Mais s'il eust veu lé traitteur attribuer la fuyte des malins à ruse et stratageme, comme s'ils faysoient les fins, feignant de fuyr pour surprendre leur homme, je croy qu'il eust dit : Vincit quod pessimum est, Le pis du pire l'emporte. Et de vray, qu'y aura-t-il de resolu au monde, s'il est loysible de bailler ces sens aux miracles et actions extraordinaires? Sera-t-il pas aysé à l'obstination d'attribuer la resurrection des morts mesme aux illusions diaboliques?

80 Mais qu'estoit-il besoin au diable de faire le fin avec Julien l'Apostat, non plus qu'avec le Juif, duquel sainct Grégoire le Grand fait le recit? Qu'eust-il pretendu avec ceste simulation envers des gens qui luy estoient desjà tout voüez? que pouvoit-il acquerir davantage sur Julien qui l'adoroit, et descendoit pour se rendre à luy? Notez, je vous prie, le mot de sainct Gregoire Nazianzene, quand il dit que Julien eut recours au vieil remede, c'est à sçavoir, à la croix, remede qu'il avoit apprins du tems qu'il estoit catholique. Ah! traitteur, vous rendrez un jour compte de ces vaines

subtilitez, par lesquelles vous destournez toutes choses à vostre impieté.

90 Non, traitteur, vos finesses sont cousues de fil blanc; le diable en tient la maistrise sur vous. Quelle finesse seroit-ce au diable de fuyr devant la croix, puisque par ceste fuyte les siens entrent en deffiance de son pouvoir, et les bons sont consolez, comme font foy tant de Peres, qui tous reprochent au malin, et à ceux de son party, ceste sienne fuyte, et Julien qui en fut tout esbranlé, et le Juif converty?

10° Mais, dit le traitteur, Moyse advise qu'il ne faut croire aux effects prodigieux des faux prophetes. Cela va bien loin; mais la croix n'est pas faux prophete; c'est un signe sainct, signe du Christianisme, comme a confessé le traitteur mesme de sorte qu'en quelque main qu'il se treuve, le diable le craint. Et tant de saincts qui ont employé ce signe à œuvres miraculeuses, les oserat-on bien infamer du nom de faux-prophetes?

11o Or, quand de ces merveilles quelqu'un auroit prins occasion de superstition, si ne faudroit-il pas attribuer ces merveilles au diable: les merveilles advenuës par le serpent d'airain furent divines, quoyque le peuple en prist occasion d'idolastrer. Il faudroit donc corriger l'abus, et retenir l'usage, comme on fait, non-seulement des choses bonnes et sainctes, telles que la croix, mais des nuisibles et venimeuses.

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120 Enfin, tant d'autres miracles se sont faits par le signe de la croix, oultre la fuyte des malins, qui ne se peuvent rapporter à aucune simulation ou stratageme d'iceluy, qu'on ne doit pas non plus le croire de ceux-cy.

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CHAPITRE XI.

Force du signe de la Croix en d'autres occasions.

A croix, pour deux raysons, a grande vigueur contre l'ennemy: l'une, d'autant qu'elle luy represente la mort du Sauveur qui le dompta et subjugua, ce que la superbe obstinée hayt et craint extresmement; l'autre, parce que le signe de la croix est une courte et preignante invocation du Redempteur. Et en ceste derniere consideration il peut estre employé en toutes occasions où peut estre employée la priere et orayson or, quelle occasion peut-on penser où la priere ne soit utile, soit pour chasser les venins, rendre la vue aux aveugles, guerir les maladies, estre garanty de ses ennemys? Tel est l'usage du sainct signe.

Certes, Porcherus, autheur non vulgaire, recite que sainct Jean Evangeliste guerit un malade febricitant, faysant le signe de la croix, et invoquant le nom de Jesus, et que le mesme sainct signa du signe de la croix un boiteux des deux jambes, luy commandant de se lever, et tout soudain il se leya.

L'histoire de Cyrola, evesque arien, et de son aveugle, est illustre. Cyrola, voyant Eugene avec Vindemialis et Longinus, evesques catholiques, faire plusieurs miracles pour confirmation du party catholique, estima faire un grand coup pour sa secte, s'il

ouvoit tant faire qu'on creust qu'il avoit la mesme vertu; et prend in miserable, l'appaste et le manye en sorte qu'il le fait contreaire l'aveugle, et se mettre en pleyne assemblée, pour l'attendre, [uand il passeroit, et luy demander guerison.

Ce pauvre abusé se met en posture, et joue son personnage. Cyrola pense jouer le sien, retire, met la main sur cest aveugle et avec certaines parolles luy commande d'ouvrir les yeux et voir. Mais ce fut un vray miracle heretique; car ce pauvre homme, qui feignoit d'estre aveugle, se treuva reellement aveugle, avec une si vehemente douleur d'yeux, qu'il luy sembloit qu'on les luy crevast. Il accusa sa feinte et simulation, et son seducteur tout ensemble, avec la somme d'argent qu'il avoit receuë pour ce jeu, auquel perdit la vue, et demanda ayde et remede à nos evesques catholiques, lesquels ayant sondé sa foy, eurent pityé de luy.

Et se prevenant l'un l'autre d'un mutuel honneur (ce sont les parolles de sainct Gregoire de Tours, qui est mon autheur), une saincte contention s'esmeut entr'eux, qui seroit celuy-là qui feroit le signe de la bien-heureuse croix sur ses yeux. Vindemialis et Longinus prioient Eugene. Eugene au contraire les prioit de luy imposer la main. Ce qu'ayant fait, et la luy tenant sur la teste, sainct Eugene faysant le signe de la croix sur les yeux de l'aveugle, dit : Au nom du Pere, et du Fils, et du Sainct-Esprit, vray Dieu, lequel nous confessons trine en une esgalité de toute-puissance, que tes yeux soient ouverts; et tout aussi-tost la douleur ostée, il revint å sa premiere santé. » Avez-vous veu, traitteur, le signe de la croix employé à la restitution de la vue de ce miserable, et comme les saincts evesques s'entre-presentent l'honneur de la faire? Direzvous que le diable fit ce jeu en faveur des catholiques contre les Ariens? Quelle eschappatoire pourrez-vous treuver?

Les Ariens de Nicée obtinrent de Valens, empereur heretique, l'eglise des catholiques. Sainct Basile adverty de cela, recourt à l'empereur mesme, et luy remonstre si vivement le tort qu'il faysoit aux catholiques, que l'empereur enfin laissa au pouvoir de sainct Basile de decider ce differend, avec ceste seule condition qu'il ne se laisseroit point transporter au zele de son party, c'est-àdire des catholiques, au prejudice des Ariens. Sainct Basile reçoit ceste charge et fit ceste ordonnance, inspiré sans doubte du ciel, que l'eglise fust bien fermée et cachetée, ou scellée, tant par les Ariens que par les catholiques; puis, que les Ariens employent trois jours et trois nuicts en prieres, et viennent par apres à l'eglise : que si elle s'ouvroit pour eux, ils en demeureroient maistres pour jamais; si moins, les catholiques veilleroient une nuict, apres laquelle ils iroient à l'eglise psalmodiant avec la litanie; et si elle s'ouvroit pour eux, ils en demeureroient possesseurs perpetuels; si elle ne s'ouvroit, qu'elle fust aux Ariens.

Les Ariens eurent la sentence pour aggreable; mais les catholiques murmuroient qu'elle estoit trop favorable aux Ariens, et qu'elle avoit esté proferée par crainte de l'empereur. Cependant elle s'execute les Ariens prient trois jours et trois nuicts, viennent aux portes de l'Eglise, extresmement bien fermées (car l'un et l'autre party en avoit esté fort curieux), y arrestent dès le matin.

jusques à sexte, criant leur Kyrie eleison; mais pour neant, si qu'enfin, ennuyez de l'attente, ils s'en vont.

Apres cela sainct Basile convoquant generalement tout le peuple fidelle, le conduict hors la ville en l'eglise de sainct Diomede martyr, où il employe toute la nuict en prieres, et le matin l'ameine vers l'eglise, chantant ce verset: Dieu sainct, Sainct fort, Sainct et immortel, ayez misericorde de nous. Puis arrivé au parvis du temple, où les Ariens s'estoient arrestez precedemment, il dit au peuple Dressez les mains en haut au ciel vers le Seigneur, et criez Kyrie eleison. Ce que faysant le peuple, sainct Basile les signant et benissant, il commande que l'on fasse silence, et signant par trois fois les portes de l'eglise, dit: Beny soit le Dieu des chrestiens és siecles des siecles, Amen. Le peuple respliquant: Amen, en vertu de l'orayson, les verroux et serrures se deffont, et les portes, comme poussées par quelque vent impetuenx, s'ouvrent soudainement. Lors ce grand evesque chanta O princes, levez vos portes, et vous, portes eternelles, eslevez-vous, et le Roy de gloire entrera (Psal. 2) et entrant dedans le temple avec le sainct peuple, il y fit le divin mystere.

Il y a en ceste histoire trois ou quatre poincts de mauvaise digestion pour vostre estomach, o traitteur; si vous n'estes guery depuis vostre traitté. Les eglises des saincts, où l'on va prier Dieu; les sainctes psalmodies, avec les litanies en forme de processions; la benediction episcopale sur le peuple, avec le signe de la croix (Sanctus episcopus illos consignans, dit sainct Amphilochius qui est mon autheur); le signe de la croix employé pour faire ce miracle, et ce qui est dit, que sainct Basile estant entré, fit le divin mystere Fecit divinum mysterium: car c'est une phrase qui n'est pas sortable, ny à la priere, laquelle ils avoient desjà faite toute la nuict, ny au sermon, car prescher ne s'appelle pas faire, mais publier le divin mystere, ny certes à vostre cene, en laquelle il ne se fait rien de divin, mais s'administrer seulement un pain desjà fait et preparé.

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Je ne voy pas que vous puissiez respondre à ce tesmoignage de la vertu de la croix; car si vous dites que le diable fit cela pour faire le matois, sainct Amphiloche vous remonstre que par ce miracle les catholiques furent consolez, et plusieurs Ariens se convertirent quel advantage donc eut recherché le diable en ceste affaire? Et je vous remonstre que vous n'avez pas assez d'honneur pour rendre suspect sainct Basile de magie ou sorcellerie, ny sainct Amphiloche de mensonge ou fadaise.

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Si vous dites que sainct Amphiloche attribue le miracle à la vertu de l'orayson, c'est ce que je veux; car le signe de la croix est une partie de l'orayson que fit sainct Basile, tant sur le peuple, le benissant, que sur les portes, les en signant; et à quel autre effect l'eust-il employé?

Une dame carthaginoise avoit un chancre au tetin, mal, selon l'advis d'Hippocrate, du tout incurable; elle se recommande à Dieu, et s'approchant Pasques, elle est advertie en sommeil d'aller au baptistere, et se faire signer de la croix, par la premiere femme baptizée qu'elle rencontreroit: elle le fait, et soudain elle est guerie.

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