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Par les mains, dit-il, desquels il eut cest honneur d'estre benit. Sainct Augustin ayant visité un malade, chez lequel il treuva l'evesque du lieu Ayant, dit-il, receu la benediction de l'evesque, nous nous retirasmes. Ce fut sans doubte par le signe de la croix, sans lequel il n'y a rien de sainct. « Le preteur d'Orient, arrivé en la cité d'Apamée, voulut renverser un temple de Jupiter, selon le » pouvoir qu'il en avoit de Constantin; mais il le treuva tellement »cimenté et entreserré et lyé avec du fer et du plomb, qu'il ne » pensoit qu'aucune force humaine le peust dissoudre. Un certain » simple homme print charge de le faire, et creusant sous les principales colomnes l'une apres l'autre, mettoit du bois dessous pour » les appuyer: puis y voulut mettre le feu, afin que les colomnes >> tombassent; mais le diable, en forme horrible et noire, venoit › empescher la force et prise du feu. Ce qui fut soudain rapporté à » Marcel, evesque du lieu, lequel courant à l'eglise, fit apporter » de l'eau, laquelle ayant esté mise à l'autel, prosterné en terre, il prioit nostre doux Seigneur qu'il ne laissast pas faire plus grands » progrez à l'impieté; et faysant le signe de là croix sur l'eau, il » commande à Equitus, son diacre, qu'il courre et aille arrouser le » feu de ceste eau beniste, ce qu'il fit; et soudain le diable, qui ne » pouvoit souffrir la force de ceste eau, s'enfuyt, et le feu allumé » par l'eau, son contraire, comme si c'eust esté de l'huyle, s'attache >> au bois, et en peu de tems le consomme, si que les colomnes » n'ayant plus leur appuy, cheurent, et tirerent à ruyne apres elles » toutes les autres avec ce qu'elles portoient le fracas de ceste cheute fut ouy par toute la ville, laquelle s'assemblant à ce spec»tacle, et voyant la fuyte du malín, se mit à louer Dieu tout-puis

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Avez-vous veu, traitteur, faire l'eau beniste par le signe de la croix? Theodoret en est mon autheur. Un bon personnage nommé Joseph, voulant bastir une eglise en la ville de Tiberias, à quoy il avoit besoin d'une grande quantité de chaux, fit faire environ sept fourneaux les Juifs empeschent par sorcelleries que le feu ne se puisse allumer, ny ne brusle; ce qu'appercevant Joseph, il prend un vase pleyn d'eau, et devant tous (car une grande troupe de Juifs etoit là à voir ce que feroit ce bon-homme) criant fort haut, il fait de sa propre main la croix sur icelle, et invoquant le nom de Jesus, il dit: Au nom de Jesus de Nazareth que mes peres ont crucifié, que vertu soit faite en ceste eau, pour rejetter tout charme et enchantement fait par ces gens. Ainsi prend-il de l'eau en sa mayson, en arrousant tous les fourneaux, et tout aussi-tost les charmes furent aneantis, et le feu sortit devant tous, dont le peuple present s'en retourna jettant ce grand cri: Il n'y a qu'un Dieu qui ayde aux chrestiens. Ce recit est de sainct Epiphane, qui met le signe de la croix en usage pour les benedictions.

La mere de sainct Gregoire Nazianzene restant malade, ne pouvoit aucunement manger: si qu'elle couroit grande fortune de mourir faute de nourriture. Or voicy comme le mesme sainct Gregoire recite qu'elle fut secourue et nourrie.

Il luy sembla, dit-il, que je venois à elle de nuict avec un panier, et que je la paissois de pains tres-blancs, benis et signez

» selon ma façon ordinaire, et qu'ainsi elle estoit guerie, et avoit »reprins ses forces: et ceste vision de nuict fut suivie de la verité; » car dés lors elle revint à soy, et conceut une meilleure esperance, » comme on recogneut evidemment. » La coustume de faire le signe de la croix sur la viande estoit ordinaire à ce grand et ancien theologien.

Julien l'Apostat fit peindre aupres de sa statue (laquelle estoit en la place publique, selon la coustume) l'imaige de Jupiter comme venant du ciel luy apportant la couronne et pourpre, qui sont les habicts imperiaux. Item, Mars et Mercure vis-à-vis de luy le regardant, comme pour tesmoigner qu'il estoit homme et vaillant et bien disant, afin que par là, sous pretexte de l'honneur qu'on avoit decreté aux empereurs, il forçast tacitement ses subjets à honnorer les idoles peinctes avec l'imaige d'iceluy; car voicy son project: S'il leur pouvoit persuader d'honnorer ces idoles, sa cause s'en alloit gaignée; s'ils s'y rendoient difficiles, il pouvoit prendre occasion de se venger d'eux, comme de perturbateurs des coustumes romaines, qui auroient par ce refus offensé et la respublique et l'empereur. Or peu s'apperceurent de ceste tromperie, qui ne voulant plus adorer (c'est-à-dire honnorer), comme ils faysoient auparavant, l'imaige de l'empereur, ainsi mise parmy ces idoles, comme elle estoit, en furent enfin martyrisez; mais le menu peuple allant à la bonne foy, sans y entendre autre mal, pensant seulement rendre l'honneur ordinaire à l'empereur, faysoit la reverence à ces idoles.

Cependant l'empereur taschant tousjours plus à l'advancement de ce dessein, le tems estant venu de faire faire monstre aux soldats et les payer, il fit apporter pres de soy et de ces idoles du feu et de l'encens, et faysoit commander aux soldats qui recevoient leur paye, de jetter de l'encens sur le feu, comme si c'eust esté une ordinaire ceremonie militaire entre les Romains. Quelques-uns descouvrant la ruse, refuserent tout à fait de commettre ceste impieté : les autres, plus simples, firent ce qu'on leur commandoit, sans autre malice; les autres, ou par avarice, ou par crainte, se laisserent aller à ce peché. Or, aucuns de ceux qui avoient fait cest acte par ignorance et inconsideration, se treuvant le soir à table beuvant les uns aux autres selon la coustume, invoquoient JesusChrist sur leur breuvage, et faysoient le signe de la croix; un de ceux qui estoient assis leur dit comme ils osoient invoquer JesusChrist et faire son signe, veu qu'ils l'avoient renyé peu auparavant. Eux, ayant descouvert la tromperie qu'on leur avoit faite, sortant aux places et ruës, crioient par tout lamentablement, qu'on les avoit trahis, qu'ils n'avoient commis le paganisme qu'avec les mains, et que leur cœur en avoit tousjours esté tres-esloigné : et venant à l'empereur, jettent à ses pieds l'argent qu'il leur avoit donné, luy demandant la mort en punition du crime qu'ils avoient commis, quoyqu'ignoramment. Sur quoy l'empereur bien qu'extresmement despitě, ne les voulut faire mourir, de peur qu'ils ne fussent tenus pour martyrs; mais les fit simplement casser.

Sozomene, qui raconte ceste histoire, ne dit pas qu'ils fissent le signe de la croix, afin que mon adversaire ne se trompe à penser que je me sois trompé, comme luy-mesme a fait si souvent, mais

c'est sainct Gregoire Nazianzene. Ny ne faut pas treuver estrange que ces bons soldats fissent le signe de la croix pour boire; car c'estoit anciennement la coustume de benir non-seulement la table et le repas, mais encore chaque viande à part, et le boire aussi.

Nous avons une grande preuve de cecy, en la gracieuse histoire que sainct Gregoire de Tours escrit d'un prestre heretique, qui voulant prevenir non-seulement à benir, mais encore à manger, un bon prestre catholique romain (car le mot y est), qui estoit en mesme table, et l'ayant en effect prevenu aux premier, second et troisiesme plat qu'on apporta sur table, au quatriesme enfin l'ayant signé, l'humeur de son heresie ne portoit pas de rejetter le signe de la croix, comme fait celle des reformateurs, mettant le premier morceau en bouche, il le treuva si chaud qu'il en creva, faysant un grand bruict, qui bailla occasion au nostre de dire: Periit memoria hujus cum sonitu, et à celuy qui les avoit chez soy tous deux, de se faire catholique sur-le-champ.

Ainsi sainct Chrysostome atteste qu'on faysoit la croix : In symposiis et thalamis, c'est-à-dire, aux festins et licts nuptiaux. Tertullien aux bains, aux tables, aux chandelles; Ephrem, soit qu'on beust, soit qu'on mangeast; Cyrille mangeant les pains, beuvant les coupes. Et de plus, mal est prins bien souvent à ceux qui ont mesprisé de faire ce sainct signe avant que de manger et boire. Tesmoin la religieuse, qui mangea une laictuë, et le religieux qui beust sans faire le signe de la croix, qui furent aussi-tost saysis du malin.

Le traitteur fait deux reproches à ces tesmoignages; l'un: « Qui » ne void, dit-il, que c'est fables? » l'autre : « Sainct Paul dit : » Que la viande nous est sanctifiée par la parolle de Dieu, et par » la priere (1. Tim. 4), et ne parle point du signe de la croix, n'y » d'autre chose. »

Il a tort car ces recits n'ont rien d'impossible, rien d'inepte, et partent d'une bouche honnorable. C'est de sainct Gregoire le Grand, qui vaut mieux que tous ces reformez, en doctrine et authorité. Sera-t-il donc permis au premier venu de desmentir ainsi les anciens? Au demeurant, le dire de sainct Paul, que les viandes sont sanctifiées par la priere, confirme ce que nous avons dit; car, parce que le signe de la croix est une priere briefve, aysée, vigoureuse, et ordinaire és benedictions des viandes, dire qu'à faute de faire la croix, le diable saysit un religieux et une religieuse, c'està-dire que ce fut à faute de faire ceste priere-là, qui estoit la plus aysée et familiere, et à plus forte rayson qu'autre quelconque : bien qu'encore soit-il vray que le signe de là croix a une particuliere force contre les diables, oultre celle qui est commune à toute priere, comme nous verrons cy-apres.

CHAPITRE VI.

La Croix est employée és consecrations et benedictions
sacramentelles.

L' E costé du Sauveur percé par la lance sur la croix fut la vive source de toutes les graces, dont les ames sont arrousées par les saincts sacremens. Nos anciens l'ont ainsi remarqué. Où est-ce donc que le signe de la croix est plus sortable qu'aux sacremens. Quand ce ne seroit que pour protester que la Passion est la fontaine des eaux salutaires qu'ils nous communiquent? les consecrations sont les plus excellentes invocations qui se fassent en l'Eglise. Le sainct signe, estant un si propre moyen de prier, ne peut estre mieux employé qu'à cest effect. Aussi ç'a esté une forme ordinaire à l'ancienne Eglise de consacrer avec le signe de la croix. Oyons les tesmoins.

Sainct Chrysostome: «Ainsi la croix reluict en la table sacrée, és » ordinations des prestres; ainsi derechef avec le corps de Jesus» Christ, és cenes mystiques. » Et ailleurs, parlant de la croix : « Tout ce qui profitte à nostre salut est consommé par icelle : car >> estant regenerez, la croix y est, quand nous sommes nourris de » la tres-sacrée viande, lorsque nous sommes establis pour estre » consacrez en l'ordre, par tout, et tousjours ceste enseigne de >> victoire nous assiste. Sainct Augustin: Si ce signe n'est ap»pliqué ou au front des croyans, ou à l'eau mesme par laquelle ils » sont regenerez, ou à l'huyle avec laquelle ils sont oingts de » chresme, ou au sacrifice duquel ils sont nourris, rien de tout cela n'est deuëment parfaict. Mais j'ay desjà produict ces tesmoignages ailleurs avec plusieurs autres qui peuvent estre rapportez icy, en voicy d'autres.

Sainct Cyprien : « Nous nous glorifions en la croix du Seigneur, » de laquelle la vertu parfait tous les sacremens, sans lequel signe » il n'y a rien de sainct, ny aucune consecration est reduicte à son effect. Et ailleurs : « Enfin, quels que soyent les administrateurs » des sacremens, quelles que soyent les mains avec lesquelles on baigne, ou oigne ceux qui viennent au baptesme, quelle que » soit la poictrine de laquelle les mots sacrez sortent, l'authorité » ou vigueur de l'operation donne l'effect à tous les sacremens en » la figure de la croix. »

Sainct Denys areopagite tesmoigne que le chresme estoit versé dans le baptistere, en forme de croix, comme nous faysons encore maintenant. Et traittant de la saincte onction : « L'evesque, dit-il, » commençant l'onction par le signe de la saincte croix, laisse » l'homme aux prestres pour estre oingt par iceux, par tout le corps. Parlant des saincts ordres : « Or, dit-il, à chascun d'i» ceux, le signe de la croix est imprimé par l'evesque benissant. » Sainct Clement dit que les premiers prelats du Christianisme, » venant à l'autel, se signoient de la croix : « Doncques l'evesque » priant à part soy avec les prestres, mettant une robbe splendide » ou reluisante, et demeurant debout vers l'autel, se signant au » front du trophée de la croix, qu'il die : La grace de Dieu tout

» puissant, et la charité de Nostre Seigneur Jesus-Christ, et la > communication du Sainct-Esprit soit avec vous tous.

Sainct Augustin tousche la coustume de signer les enfans au baptesme, quand il dit que dés le ventre de sa mere il estoit jà signé du signe de la croix, et assaysonné de son sel: voulant dire que sa mere le destinoit au baptesme, auquel on signoit, et donnoit-on le sel comme on fait de ce tems. Le traitteur le récognoit presque ainsi; mais il ne peut jamais dire verité nettement. Es lithurgies de sainct Jacques, et de sainct Chrysostome, il est fort souvent commandé au prestre de faire le signe de la croix; en celle de sainct Basile, non-seulement le prestre fait le signe de la croix sur les offrandes, mais en fait encore trois sur le peuple en forme de nos benedictions episcopales. C'est assez.

CHAPITRE VII.

Raysons pour lesquelles on fait le signe de la croix sur le front de ceux qu'on baptize, et en d'autres occasions.

N faysoit anciennement le signe de la croix sur tous les membres generalement : « Peignons ceste enseigne vivifiante en nos » portes, dit S. Ephrem, en nos fronts, en la bouche, en la poictrine, » et en tous nos membres. » Neantmoins, pour l'ordinaire, on se signoit sur le front, comme on peut assez recueillir de ce que j'ay dit jusques icy. Mais en voicy quelques raysons :

« I. Tant s'en faut que j'aye honte de la croix de Jesus-Christ, » que ne l'ay pas en un lieu secret; mais je la porte au front. Nous >> recevons plusieurs sacremens en diverses manieres nous en » prenons quelques-uns en la bouche, comme vous sçavez, et » quelques-uns en tout le corps. Or, parce qu'on a la honte au » front, celuy qui a dit: De celuy qui a honte de moy devant les » hommes, j'auray honte de luy devant mon Pere qui est és cieux; » il a mis sur le lieu de la honte et pudeur la mesme ignominie » que les payens mesprisent. Vous oyez un homme tançant quelque » impudent dire: Il est effronté; qu'est-ce à dire cela? Il n'a point » de front; c'est-à-dire il est eshonté. Or çà donc, que je n'aye pas » le front nud, que la croix de mon Seigneur le couvre. Voylà à la verité une belle rayson produicte par les propres mots de sainct Augustin, le traitteur citant à ce propos un autre lieu du mesme docteur.

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II. Voicy la seconde rayson : « Les posteaux des maysons d'Israël > estoient oingts et enduicts de sang, pour chasser le mal-encontre » (Exod. 12); les peuples chrestiens sont signez du signe de la Pas»sion du Sauveur, pour un preservatif de salut. » Če sont encore parolles de sainct Augustin, par lesquelles il monstre que comme les enfans d'Israël marquoient du sang de l'agneau paschal les posteaux et surseuils de leurs domiciles, pour estre garantis de l'extermination; ainsi les chrestiens sont signez au front, comme au surseuil de tout l'homme, du signe du sang et de la passion de l'Agneau, qui lave les pechez du monde, pour estre en asseurance contre tous les ennemys de son salut. Lactance dit le mesme en

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