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celles du purgatoire. Mais on me peut objecter, que les peynes se souffrent pour payer en ce monde; neantmoins sainct Augustin et les autres Peres l'entendent de l'autre monde, et ce d'autant plus, qu'il se peut faire qu'un homme meure sur la premiere ou seconde offense, de laquelle il est parlé; or, si ce cas arrive, où payera-t-il les peynes deues à ses offenses? Si vous voulez qu'il ne les paye point du tout, quel lieu luy assignerez-vous pour sa retraitte en l'autre monde? Vous ne luy donnerez pas l'enfer, sinon que vous voulussiez adjouster à la sentence de Nostre Seigneur, qui ne baille l'enfer pour peyne qu'à ceux qui auront fait la troisiesme offense; de le loger en paradis, vous ne le pouvez ny ne le devez pas faire, parce que la pureté de ce lieu celeste rejette toute sorte d'imperfection; n'alleguez pas icy la misericorde du Juge, car il desclare, en cest endroict, qu'il veut encore user de justice. Faites donc comme les anciens Peres, et dites qu'il y a un lieu où les ames seront purgées, et puis apres s'en iront toutes pures dans le ciel. En sainct Luc, au 16° ch., il est escrit: Facite vobis amicos de mammona iniquitatis, ut cùm defeceritis, recipiant vos in æterna tabernacula. Deffaillir en nature, c'est proprement mourir; les bien-heureux sont nos amys au ciel, qui peuvent secourir les hommes trespassez, puisqu'ils sont en faveur aupres du Juge: car en quel autre sens peut-on entendre ces parolles : Facite amicos, qui vos recipiant? on ne les peut entendre de l'aumosne, car souventesfois l'aumosne est bonne et saincte, et neantmoins elle ne nous acquiert pas tousjours des amys si puissans qu'ils nous puissent recevoir dans les tabernacles eternels: par exemple, quand elle est faite à des personnes criminelles devant Dieu, quoyqu'avec une saincte intention; ainsi est interpreté ce passage par sainct Ambroise et par sainct Augustin, liv. 12 de la Cité de Dieu, ch. 27. Mais la parabolle de laquelle se sert Nostre Seigneur est claire, trop pour nous laisser doubter de ceste interpretation; car la similitude est toute prinse d'un œconome, lequel estant demis de son office et endebté, demandoit du secours à ses amys, et Nostre Seigueur fait icy rapport d'un homme demis par la mort, et du secours qu'il peut demander aux amys, et qu'on peut recevoir apres la mort, par le secours de ceux desquels on a merité la grace et l'amitié; or, ceste ayde ne pouvant se recevoir ny par ceux qui sont en paradis, ny par ceux qui sont en enfer, c'est donc pour ceux qui sont resserrez dans le purgatoire.

DISCOURS LXXVIII.

De quelques autres lieux de l'Escriture par où, en forme de consequence, on conclud la verité du Purgatoire.

Ndit ces paroles: Ut in nomine Jesus omne genu flectatur cæles

sçavons que sainct Paul, en l'epistre aux Philippiens, chap. 2,

tium terrestrium, et infernorum; aux cieux on treuve assez de genouïlx qui flechissent au nom du Redempteur; sur la terre, on en treuve beaucoup en l'Eglise militante; mais en enfer, où est-ce que nous en treuverons ? David advoüe qu'on n'y en peut treuver aucun,

quand il dit: In inferno autem quis confitebitur tibi? On doit encore rapporter icy ce qu'il dit ailleurs: Peccatori autem dixit Deus, quare tu enarras justitias meas, et assumis testamentum meum per os tuum? Car si Dieu ne veut recevoir aucune chose du pecheur obstiné, comment voudroit-il permettre à ces miserables damnez d'entreprendre ce sainct office? Sainct Augustin fait grand compte de ce passage pour ce subjet au liv. 12 de la Genese, chap. 33, en l'Apocalypse 5: Qui dignus est aperire librum et solvere septem signacula ejus? Et nemo inventus est, neque in cœlo, neque in terra, neque sub terra. Et plus bas, au mesme chapitre : Et omnem creaturam, quæ in cælo est, et super terram, et sub terra, omnes audivi dicentes: Sedenti in throno Agno, benedictio et honor et gloria, et potestas in sæcula sæculorum et quatuor animalia dicebant: Amen. N'est-ce pas là establir une Eglise en laquelle Dieu soit loüé (sous terre)? Et quelle peut estre ceste Eglise, si ce n'est celle du purgatoire, qui prend interest à la gloire de Jesus-Christ son Redempteur?

DISCOURS LXXIX.

Le credit des Conciles qui ont receu le Purgatoire comme article de foy.

TOUS avons remarqué cy-dessus, que ce fut Arrius qui commença

N le premier à prescher contre les catholiques, touchant l'article

du purgatoire, et publier que les prieres qu'ils faysoient pour les morts, estoient vaines et superstitieuses; il a encore des sectateurs de son heresie en nostre aage; mais certes, Nostre Seigneur nous a donné des regles, en son Evangile, dont on se doit servir pour se bien comporter en semblables occasions: Si peccaverit frater tuus, etc., dic Ecclesiæ, si quis Ecclesiam non audierit, sit tibi tanquam Ethnicus et Publicanus. Voyons donc ce que dit l'Eglise en cest endroict: en Affrique, au 3e Concile de Carthage, ch. 29, et au 4, ch. 99; en Espagne, au Concile de Brachare, 8, 34, et 39; en France, au Concile de Chaalons, comme il est rapporté, Cap. de confirm. d. 2. can. visum est; au Concile d'Orleans, 2, ch. 14. En Allemagne, au Concile de Wormes, 8, 10; en Italie, au Concile 6, sous Symmachus; en Grece, comme on peut voir en leur Synode, recueilly par Martin Bracharesse, chap. 69; et dans plusieurs autres Conciles, vous verrez que l'Eglise tient de tout tems, pour authentique, la priere pour les trespassez, par consequent le purgatoire. Depuis ce tems, ce que l'Eglise autresfois avoit definy fut confirmé au Concile de Latran, sous Innocent III, chap. 66; au Concile de Florence, où se treuverent toutes les nations, et finalement au sainct Concile de Trente, sess. 25.

Mais quelle plus saincte resolution de l'Eglise pourroit-on en avoir, apres celle qui est couchée en toutes ses ceremonies; regardez les liturgies de sainct Jacques, de sainct Marc, de sainct Basile, de sainct Chrysostome et de sainct Ambroise, desquelles se servent encore a present tous les chrestiens orientaux et occidentaux en la celebrité des messes; vous y verrez la commemoration

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pour les morts, comme elle se void en la nostre ; mais apres que Pierre Martyr, l'un des habiles qui ont suivy vostre reforme pretendue, sur le 3e chap. de la 1re aux Corinth., a confessé luy-mesme, que toute l'Eglise a suivy ceste opinion, je perds le tems de m'amuser sur ceste preuve : Quis es tu, qui judicas Ecclesiam Dei?

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Si quis Ecclesiam non audierit, sit tibi tanquam Ethnicus et Publicanus. Ecclesia est firmamentum, et columna veritatis; et portæ inferi non prævalebunt adversus eam. Si sal evanuerit, in quo salietur ? si Eeclesia erraverit à quo corripietur? si Ecclesia fida custos veritatis, veritatem amiserit, veritas à quo reperietur? Si Christianus Ecclesiam abjecerit, quem recipiet, qui neminem nisi per Ecclesiam admittit? En un mot, si l'Eglise peut errer, et vous Pierre Martyr, ne pourrez-vous pas errer? ouy, sans doubte; je croiray donc plutost que vous avez erré, que toute l'Eglise de Dieu, en laquelle je veux vivre et mourir.

DISCOURS LXXX.

L'authorité des Peres anciens qui ont souscrit à la creance
du Purgatoire.

NFIN, c'est chose belle et toute pleyne de consolation, de voir E l'admirable rapport que l'Eglise presente a gardé avec l'ancienne, particulierement en la creance du purgatoire. Disons ce qui fait à nostre propos, et touschant le secours des trespassez; tous les anciens Peres ont creu et attesté, que c'estoit un article de foy apostolique. Voicy les autheurs que nous produisons: entre les disciples des Apostres, sainct Clement et sainct Denys; entre les Peres, sainct Athanase, sainct Basile, sainct Gregoire Nazianzene, sainct Ephrem, sainct Cyrille, sainct Epiphane, sainct Chrysostome, sainct Gregoire Nissene, Tertullien, sainct Cyprien, sainct Ambroise, sainct Hierosme, sainct Augustin, Origene, Boëce, sainct Hilaire; cela veut dire toute l'antiquité, au delà mesnie de douze cens ans, que tous ces Peres ont vescu, dont il m'eust esté tres-aysé de produire des tesmoignages, qui sont recueillis fort exactement dans les livres de nos catholiques. Le docte Canisius en son Catechisme, Sanderus, De visibili Monarchia, Genebrard en sa Chronologie, Bellarmin en sa Controverse du purgatoire, et Stapleton en son Promptuaire, en ont beaucoup parlé; mais surtout, qui voudra voir au long et fidellement citez les passages des Peres anciens, qu'il prenne en main l'œuvre de Canisius, reveuë par Buzée. Apres tout, Calvin nous deslivre de ceste peyne, 1. 3 de ses Institut., chap. 5, sess. 10, où il dit ainsi : Fateor à mille trecentis annis usu receptum fuit ut precationes fierent pro defunctis; Et par apres, il adjouste: Omnes fateor in errorem abrepti fuerunt. Nous n'avons donc que faire de citer le nom et le lieu de ces anciens Peres pour preuver la verité du purgatoire, puisque, pour se mettre en meilleur compte, Calvin les met en zero; mais quelle apparence y a-t-il qu'un seul Calvin soit infaillible, et que toute

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l'antiquité ayt broché depuis treize cens ans? Il dit que les anciens Peres ont creu le purgatoire pour s'accommoder au vulgaire la belle excuse! N'estoit-ce pas aux Peres d'oster d'erreur tout ce peuple fidelle? non pas laschement de l'y entretenir et y condescendre; ceste eschappatoire ne fait qu'accuser les anciens avec impudencé. Mais par où preuver que les Peres n'ont pas creu veritablement le purgatoire? puisque Arrius, comme j'ay dit cy-devant, a esté tenu pour un heretique, parce qu'il le nyoit: c'est pityé dé voir l'audace avec laquelle Calvin traitte sainct Augustin, parce qu'il pria et fit prier pour sa mere saincte Monique; et pour pretexte, il apporte que sainct Augustin mesme, 1. 12 de sa Cité, ch. 26, semble doubter du feu du purgatoire; mais cecy ne fait rien à nostre propos: car il est vray que sainct Augustin dit qu'on peut doubter, nom du feu, mais de la qualité de ce feu, sans toutesfois doubter de la realité du purgatoire. Or, soit que la purgation se fasse, ou par le feu ou autrement, soit que le feu ayt les conditions de celuy d'enfer ou non, si est-ce qu'il ne laisse pas d'y recognoistre une purgation ou un purgatoire; il ne met donc pas en doubte le purgatoire, mais la qualité de ses peynes, ce que ne mettront jamais en doubte ceux qui verront comme il en parle chap. 16 et 24 du mesme livre de sa Cité, et au traitté de Cura pro mortuis agenda, et en mille autres lieux. Voylà donc comme nous sommes au chemin des Peres anciens touschant cest article du purgatoire.

Adjoustons à cela deux invincibles preuves du purgatoire. La premiere, qu'il y a des pechez legers, comparez à d'autres, qui ne rendent pas l'homme coupable de l'enfer. Si donc l'homme meurt avec ces pechez, que deviendra-t-il? le paradis ne retient rien qui soit soüille; l'enfer est une peyne irremediable, qui n'est pas deuë à ces petits pechez remissibles; d'où s'ensuit necessairement qu'ils seront remis, ou en ce monde, ou en purgatoire, où, estant bien emondez, l'amo prendra la route du ciel. Qu'il y ayt des pechez qui ne rendent pas l'homme coupable de l'enfer, Nostre Seigneur le dit en sainct Matthieu : Qui irascitur fratri suo, reus erit judicio; qui dixerit fratri suo, raca, reus erit concilio; qui dixerit fratri suo, fatue, reus erit gehennæ ignis '. Qu'est-ce donc, je vous prie, estre coupable de la gehenne du feu, sinon estre coupable de l'enfer? Or ceste peyne n'est deuë qu'à ceux qui nomment leur frere fol et insensé; ceux simplement qui se mettent en cholere, et qui expriment leur cholere par des parolles qui ne sont ny injurieuses ny diffamatoires, ne sont pas en ce mesme rang; car les uns meritent le jugement, c'est-à-dire, que leur cholere soit mise en jugement; il en est ainsi de la parolle oyseuse, en sainct Matthieu 12, de laquelle Nostre Seigneur dit : Reddent rationem in die judicii, il en faut rendre compte; les autres meritent la censeure, c'est-à-dire qu'on delibere si leur peché sera condamné ou non (car Nostre Seigneur s'accommode à la façon de parler des hommes). Reste que les troisiesmes soyent infailliblement damnez; ainsi les premiers et les seconds sont punis pour des pechez qui ne rendent pas l'homme coupable de la mort eternelle, mais d'une correction

'Ce même argument est traité au Discours LXXVII.

temporelle, et partant si l'homme meurt avec ces pechez veniels, par accident ou autrement, il faut qu'il subisse le jugement d'une peyne passagere, moyennant laquelle son ame_estant purgée, il sera receu au ciel avec les bien-heureux. Le Sage parle de ces pechez au chap. 24 des Proverbes Septies in die cadit justus; car le juste ne peut pecher (pendant qu'il est juste) d'un peché qui merite la damnation, il s'entend donc qu'il tombé en des pechez auxquels la damnation n'est pas deue, que les catholiques appellent veniels, pardonnables et remissibles, qui se peuvent purger en l'autre monde par les peynes du purgatoire. La seconde rayson, c'est qu'apres le pardon du peché, il demeure dans l'homme un reste d'obligation à la peyne qu'il meritoit, ce qui se void au second des Roys, ch. 12, où le peché est pardonné à David, mais le prophete l'advertit que sa peyne n'est point toute remise: Deus quoque transtulit peccatum tuum, sed quoniam blasphemare fecisti inimicos nomen Domini, filius tuus morte morietur.

FIN

DES

CONTROVERSES.

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