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espouse, traitter et passer par parolles de present, comme legitimes procureurs, un second et nouveau maryage avec ceste jeune venue, de meilleure grace, disoient-ils, et mieux advenante que l'autre. En effect, s'eriger en predicateur de la parolle de Dieu, et pasteur des ames, n'est-ce pas se dire ambassadeur et legat de Nostre Seigneur, selon le dire de l'Apostre: Nous sommes donc ambassadeurs pour Jesus-Christ (11. Cor. 5)? et qu'est-ce dire, sinon que tout le Christianisme a failly, que toute l'Eglise a erré, et que par tout la verité s'est esvanoüie? sinon dire que Nostre Seigneur a abandonné son Eglise, a rompu le sacré lyen du maryage qu'il avoit contracté avec elle (Ephes. 5), pour introduire une Eglise nouvelle? n'est-ce pas vouloir donner le change à ce sacré et sainct Espoux, le faysant prendre une seconde femme? A dire vray, c'est ce que les ministres de l'Eglise pretenduë ont entreprins; c'est ce de quoy ils se sont vantez ceste pretention a esté le but de leurs presches, de leurs desseins, et de leurs escrits. Mais quelle injustice n'avez-vous pas commise les croyant si legerement? Comment vous estes-vous arrestez si simplement à leurs parolles? Comment leur avez-vous peu donner une si prompte credulité? Si vous les avez receus pour des legats et ambassadeurs, ils devoient estre envoyez, ils devoient avoir des Lettres de creance de celuy dont ils se vantoient estre advoüez. Les affaires estoient de tres-grande importance: il s'agissoit d'un remuëment general de toute l'Eglise, et les personnes qui entreprenoient une chose si extraordinaire, estoient de basse qualité, et mesme privée. Les pasteurs ordinaires estoient des gens de marque, et de tres-ancienne et authentique resputation, qui leur contredisoient et protestoient que ces extraordinaires n'avoient point de charge, ny de commandement du Maistre. Dites-donc, de grace! quelle occasion eustes-vous de les ouyr et de les croire, sans avoir aucune asseurance de leur commission, ny l'adveu de Nostre Seigneur, dont ils se disoient les nonces et les apostres? C'est, en un mot, avoir laschement abandonné l'Eglise ancienne, en laquelle vous avez esté baptisez, que d'avoir creu à des prescheurs qui n'avoient point de mission legitime du Maistre, et n'en pouvoient avoir d'eux-mesmes, ny de vous, en aucune façon : vous ne le pouvez ignorer.

Si Jesus-Christ les avoit envoyez, ou c'eust esté mediatement ou immediatement. Nous appellons une mission mediate, quand nous sommes envoyez de celuy qui en a le pouvoir de Dieu, selon l'ordre qu'il a mis en son Eglise. Telle fut la mission de sainct Denys en France par Clement pape, et de Timothée par sainct Paul (11. Tim. 1). L'immediate mission se fait, lorsque Dieu commande luy-mesme, et en baille la charge, sans s'arrester à l'authorité de l'Ordinaire, qu'il a commise aux prelats et pasteurs de son Eglise, comme fut envoyé sainct Pierre et les Apostres, qui receurent de la propre bouche de Nostre Seigneur ce commandement: Allez par tout le monde, et preschez l'Evangile à toute creature (Marc. 16); et celle de Moyse vers Pharaon et le peuple d'Israël (Exod. 3). Mais vos ministres n'ont eu leur mission de l'une ny de l'autre maniere. Ainsi avec quelle licence ont-ils entreprins la predication,contre le dire de l'Apostre: Prescheront-ils s'ils ne sont envoyez (Rom. 10)?

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DISCOURS III.

Les heretiques n'ont point eu, et n'ont peu avoir la mission du peuple, ny du prince seculier.

ONFESSONS que l'Eglise pretenduë ne sçauroit faire voir qu'elle ayt dans ses ministres la mission du peuple laïque, ny mediate, ni immediate, ny de droict ny de faict; car, ou ils sont envoyez par les peuples et princes seculiers, ou ils sont envoyez par l'imposition des mains des evesques, qui les firent prestres, dignité à laquelle ils sont enfin forcez d'avoir recours, quoy qu'ils la mesprisent en tout et par tout. S'ils disent que les magistrats et le peuple seculier les ont envoyez, ils sont obligez à faire deux preuves, qu'ils ne feront jamais l'une que les seculiers l'ayent fait effectivement; l'autre, qu'ils l'ayent peu faire, car nous nyons et le faict et le droict: Factum, et jus faciendi.

Qu'ils l'ayent peu faire, la rayson du contraire est evidente, car ils ne treuveront jamais dans les Escritures, que les peuples et princes seculiers ayent pouvoir d'establir et constituer les pasteurs ou les evesques en l'Eglise. Ils treuveront bien, à la verité, que les peuples ont rendu tesmoignage, et assisté aux ordinations; ils treuveront encore, que le choix leur en fut permis, comme celuy des diacres, au rapport de sainct Luc (Act. 6), que toute la troupe des disciples proposa; mais ils ne monstreront jamais que les peuples, ou princes seculiers, ayent eu ou prins l'authorité des mis sions, pour constituer, ordonner, et authoriser des pasteurs: comment donc allegueront-ils la mission par les peuples, et par les princes, qui n'a point de fondement dans l'Escriture? Au contraire. nous produirons l'expresse et commune prattique de toute l'Eglise, qui a le pouvoir de tout tems, d'ordonner des pasteurs, avec l'impo sition des mains des autres pasteurs et des evesques ainsi fut ordonné Timothée (II. Tim. 1), et mesme les sept diacres, qui furent bien proposez pour cela par le peuple chrestien; mais ils furent ordonnez par l'imposition des mains des Apostres (Act. 6); ainsi l'ont reglé les mesmes Apostres en leurs Constitutions (1. Tim. 4), aussi bien que le grand Concile de Nicée (Can. 1), qu'on ne dedaignera point ce me semble; le second de Carthage (Can. 4), le troisiesme et le quatriesme tenus au mesme lieu (Can. 12), où sainct Augustin se treuva. Supposé donc que ces reformateurs eussent esté envoyez par les seculiers, ils n'auroient pas esté envoyez à l'apostolique, ny legitimement, et leur mission seroit nulle; et par effect les seculiers n'ont point droict de mission, et comment donc les religieux la donneront-ils? pourroient-ils communiquer une authorité qu'ils n'ont pas eux-mesmes? C'est pour cela que sainct Paul, parlant de l'ordre de la prestrise, et de l'office pastoral, a tres-bien dit: Nul ne s'attribue cest honneur, sinon celuy qui est appellé de Dieu comme Aaron (Hebr. 5). Mais Aaron (Lev. 8) fut ordonné, et sacré (Exod. 28) par les mains de Moyse, qui fut prestre luy-mesme, lon la saincte parolle de David: Moyse et Aaron sont comptez entre ses prêtres, et Samuel entre ceux qui invoquent son nom (Psal. 98): aussi il est dit tout clair en l'Exode: Associé et joins avec toy Aaron,

se

pour exercer l'estat sacerdotal (Exod. 28). Et à cela s'accorde une grande troupe de nos anciens Peres. Celuy donc qui veut alleguer sa mission, ne la doit pas tirer du peuple, ny des princes laïques; car Aaron ne fut pas appellé de ceste maniere, ny les pasteurs de l'ancienne Eglise. Celuy qui est le moindre est beny par le plus grand, comme dit sainct Paul (Hebr. 7), d'où s'ensuit que les peuples ne peuvent point envoyer les pasteurs; car les pasteurs sont plus grands que les brebis, et la mission ne se fait jamais sans benediction (Joan. 20; . Tim. 1). Sainct Jean confirme la mesme verité par ces parolles: Amen, amen dico vobis; non est servus major domino suo, neque subditus major eo qui misit illum (Joan. 13): car apres ceste magnifique mission, le peuple demeure tousjours brebis, et le pasteur tousjours pasteur; autrement l'estat seroit confondu. Je laisse à part ce que je preuveray cy-apres, que l'Eglise est une sacrée monarchie, et partant qu'il appartient au grand pasteur d'envoyer, non pas au peuple. Je laisse encore à part le desordre qui arriveroit tous les jours, si les peuples envoyoient, car ils ne pourroient envoyer les uns aux autres, n'ayant point d'authorité les uns sur les autres. Et comme ce seroit faire ouverture à toutes sortes d'heresies, il faut conclurre que les brebis reçoivent le berger d'ailleurs que d'elles-mesmes; et de là l'on doit tirer ceste consequence, que les peuples n'ont peu donner mission, ny de commission legitime à ces nouveaux ambassadeurs.

Mais j'adjouste pour second chef, que quand ils l'auroient peu, ils ne l'ont pas fait, parce que le peuple, où le magistrat qui a appellé Calvin et Luther, estoit ou catholique, ou non. S'ils disent que ce peuple estoit catholique, comment les auroit-il appellez à prescher ce qu'il ne croyoit pas, puisque ce peuple et ce magistrat estoient encore de la vraye Eglise, ou non. S'il estoit de la vraye Eglise, pourquoy est-ce que Luther l'a tiré de sa croyance? l'eust-il appellé pour estre mis hors de sa bonne place, et de l'Eglise? ct s'il n'en estoit pas, comment pouvoit-il avoir droict de mission et de vocation, puisque, hors l'enclos de la vraye Eglise, il ne peut se treuver aucune legitime authorité? Que s'ils disent qu'ils n'estoient pas ou qu'ils n'estoient plus catholiques romains, qu'estoient-ils donc? ils n'estoient pas encore Lutheriens, car l'on sçayt le tems où Luther commença de prescher en Allemagne, il n'y avoit alors de Lutheriens, puisque c'est luy qui en est l'origine. Que s'ils n'estoient pas de la vraye Eglise, ils n'ont donc point eu de vocation de ce costé-là. Comment pouvoient-ils establir une mission veritable pour la predication evangelique, sinon qu'ils ayent recours à la mission invisible de ces principautez aëriennes, à ces puissances de tenebres du monde, enfin à ces malices spirituelles, contre lesquelles tous les vrays enfans de l'Eglise ont tousjours eu la guerre (Ephes. 6).

S. Francois. - 3

DISCOURS IV.

L'Eglise pretendue n'a point dans ses ministres
la mission episcopale.

R, les descendans des heresiarques, qui se voyent poussez de OR tant de raysons, prennent en nos jours un autre chemin pour se deffendre. Ils disent, mais ils disent mal, que les premiers maistres et reformateurs de leurs Eglises, Luther, Buçer et OEcolampade, ont esté envoyez par les evesques, qui les firent prestres, et que ceux-cy ont envoyé les autres, qui les ont suivys, et vont ainsi enchaisnant leur mission et vocation à celle des Apostres.

Veritablement ceste confession est assez ingenue, de recognoistre au moins, que leur mission ne peut estre derivée de leurs ministres, que par la succession et l'authorité de nos evesques, et par l'imposition de leurs mains. La chose est telle, sans aucun doubte; car on ne peut pas faire sauter aysement ceste mission de si haut que les Apostres, qu'elle soit tombée sans succession entre les mains des predicateurs de ce tems, sans avoir esté traduite jusqu'à nous par nos devanciers : il eust fallu une bien longue sarbacane en la bouche des premiers fondateurs de l'Eglise, pour avoir ainsi appellé Luther et les autres, sans que ceux qui estoient entre eux, et au milieu, s'en fussent aperceus; ou bien il eust fallu, comme dit Calvin en une autre occasion, et mal à propos, que ceux-cy eussent eu les aureilles bien grandes. Nos reformateurs doivent accorder que ceste mission s'est conservée entiere, si ceux-cy la devoient treuver. Nous ne nyons pas que la mission n'ayt esté dans nos evesques, et principalement és mains de leur chef, l'Evesque romain; mais nous nyons formellement, que vos ministres en ayent eu aucune communication pour prescher ce qu'ils ont presché, parce qu'ils ont annoncé quantité de choses contraires à l'Eglise, en laquelle ils ont esté choysis et ordonnez prestres. Or, il est necessaire, ou qu'ils errent, ou que l'Eglise qui les a envoyez fust dans l'erreur; par consequent, ou leur Eglise est fausse, ou celle de laquelle ils ont prins leur premiere mission est abusée. Nous faysons mieux d'inferer que leur mission est absolument fausse; car d'une Eglise fausse, telle qu'ils la descrient chez nous, ne peut sortir une vraye mission: si leur Eglise est fausse, où est leur mission, puisque dans une Eglise fausse on ne peut treuver une legitime mission? ainsi, en tous sens, ils n'ont point eu de mission pour prescher ce qu'ils ont presché. En sens contraire, si l'Eglise, en laquelle ils ont esté instruicts et ordonnez, estoit veritable, ils sont donc inexcusables d'heresie d'en estre sortis, et d'avoir presché contre sa croyance; si elle n'estoit pas la vraye Eglise, elle n'a pas eu le pouvoir de les envoyer ny de les ordonner. Mais accordons qu'ils ayent receu leur mission en l'Eglise romaine; ils ne l'ont pas eue pour en sortir, et se distraire de son obeyssance avec ses enfans. Certes, le commissaire ne doit pas exceder les bornes de sa commission; et s'il le fait, il est desadvoüé.

Luther, OEcolampade et Calvin n'estoient pas evesques; dites donc pour eux en quel sens il est possible qu'ils ayent peu commu

DISCOURS V.

niquer aucune mission à leurs successeurs de la part de l'Eglise romaine, qui proteste en tout et par tout, qu'il n'y a que les seuls evesques qui puissent envoyer, soit d'une maniere immediate, soit d'une maniere mediate, et que cela n'appartient aucunement aux simples prestres c'est pourquoy sainct Hierosme a tres-bien observé la difference qu'il y a entre le simple prestre et l'evesque en l'epistre ad Evagrium. Sainct Augustin et sainct Ephiphane (de Hæres. 53 et 75) ont mis Arius dans le rang des heretiques, parce qu'il tenoit le contraire, parmy d'autres erreurs. La legitime mission doit estre une mission episcopale et canonique, et non une mission protestante ou menaçante.

DISCOURS V.

L'Eglise pretenduë n'a point, dans ses ministres, la mission extraordinaire et immediate de Dieu.

Es raysons susdites sont si fortes, que les plus asseurez des

Le vostres ont prins party ailleurs qu'en la mission ordinaire, fay

sant effort de nous persuader, que leurs reformateurs estoient envoyez extraordinairement de Dieu, parce que la mission ordinaire avoit esté gastée, et enfin abolie avec la vraye Eglise, sous la elle tyrannie de l'Ante-Christ. Voicy leur plus invincible retraitte; et parce qu'elle est commune à toutes les sectes des heretiques, merite d'estre attaquée par de bonnes raysons, et ruynée de fond en comble mettons par ordre nos argumens, pour voir si nous pourrons forcer ceste derniere barricade.

1o Je soustiens que personne ne doit alleguer une mission extraordinaire, qu'il ne la preuve par des miracles; car je vous prie, à quoy en serions-nous reduicts, si ce pretexte de mission extraordinaire estoit recevable, sans bonne preuve? ne seroit-ce pas un voyle asseuré à toutes sortes de libertins? Arius, Marcion, Montanus, et Messalius' ne pourroient-ils pas estre receus avec honneur dans le rang des reformateurs, en nous payant de ceste monnoye, et prestant le mesme serment?

2o Je tiens pour asseuré, que jamais personne ne fut envoyé extraordinairement, qui n'ayt prins ceste lettre de creance de la divine Majesté. Moyse fut envoyé immediatement de Dieu pour gouverner le peuple d'Israël; auparavant il voulut sçavoir le nom de celuy qui l'envoyoit (Exod. 3); et quand il eut apprins le nom admirable de Dieu, il demanda des marques et des lettres patentes de sa mission; ce que Dieu mesme treuva si juste, qu'il luy donna la grace d'operer trois sortes de prodiges et de merveilles, qui furent comme trois publiques attestations en trois divers langages, de la charge qu'il luy donnoit, afin que celuy qui n'entendroit pas l'une de ces langues, entendist l'autre (Exod. 4). Si donc nos pretendus apostres alleguent la mission extraordinaire, qu'ils nous monstrent quelque prodige au delà du commun; autrement nous ne sommes pas obligez de les croire. Vrayement, Moyse monstra

Il faudrait dire Sabas, auteur de la secte des Messaliens.

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