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sed quia creditur? nous ne disons rien au contraire: car à la verité, les parolles de benediction et de sanctification, avec lesquelles on forme et on parfaict les sacremens, n'ont point de vertu, sinon estant proferées; et sans la generalé attention, elles seroient dites voirement, mais pour neant, parce que, non quia dicitur, sed quia creditur, dicendo tamen creditur, et credendo dicitur.

DISCOURS LXXI.

De l'intention requise en l'administration des Sacremens.

vos

IN verité, je n'ay jamais treuvé aucune preuve puisée des EscriEtures, tures, de l'opinion que vos predicans ont debitée en cest endroict. Ils disent que, quoyque le ministre n'eust aucune intention de faire la cene, ou de baptizer, ains seulement de se mocquer et badiner, neantmoins, pourveu qu'il fasse l'action exterieure du sacrement, le mystere y est complet. »

Tout cecy se dit à credit, sans produire autre chose que de certaines consequences sans parolles de Dieu, par forme de chicanerie. Au contraire, le Concile de Florence, et celuy de Trente, desclarent expressement que si quelqu'un dit que l'intention au moins de faire ce que fait l'Eglise, n'est pas requise aux mi⚫nistres, quand ils conferent les sacremens, il est anatheme: » ce sont les termes du Concile de Trente. Le Concile ne dit pas qu'il soit requis d'avoir l'intention particuliere de l'Eglise; car autrement les Calvinistes (qui n'ont pas intention au baptesme de laver le peché originel) ne baptizeroient pas, puisque l'Eglise a ceste intention; mais seulement de faire en general ce que l'Eglise fait quand elle baptize, sans particulariser, ny determiner en quoy, ny comment.

Le Concile ne dit pas non plus qu'il soit necessaire de vouloir faire ce que l'Eglise romaine fait; mais seulement en general, ce que l'Eglise fait, en supposant, sans particulariser, quelle est la vraye Eglise. Ainsi qui, pensant que l'Eglise de Geneve pretenduě est la vraye Eglise, limiteroit son intention à l'intention de l'Eglise de Geneve, se tromperoit, si jamais homme se trompa, en la cognoissance de la vraye Eglise; mais son intention suffiroit en cest endroict, puisqu'encore qu'elle se terminast à l'intention d'une Eglise fausse, si est-ce qu'elle ne s'y termineroit que sous la condition et conception de la vraye Eglise ainsi l'erreur ne seroit que materielle et non formelle, comme le disent nos docteurs. J'adjouste encore qu'il n'est pas requis que nous ayons ceste intention actuellement, quand nous conferons les Sacremens; mais il suffit qu'on puisse dire avec verité que nous faysons telle et telle ceremonie, et disons telle et telle parolle (comme en jettant l'eau nous prononçons: Je te baptize au nom du Pere, en intention de faire reellement tout ce que font les vrays chrestiens, et que Nostre Seigneur a luy-mesme commencé, quoyque pour lors nous ne soyons pas en attention, et n'y pensions pas si precisement comme il suffit pour dire que je presche pour servir Dieu, et pour le salut des ames, si lorsque je me suis voulu preparer, j'ay dressé ceste inten

tion, quoyque quand je suis presentement en chaire, je pense seulement à ce que j'ay à dire, et à m'en retenir le fil en memoire, sans plus penser à ceste premiere intention: ou comme celuy qui á resolu de donner cent ecus pour l'amour de Dieu, puis sortant de sa mayson pour ce faire, pense à d'autres choses, et neantmoins distribue la somme promise, encore qu'il n'ayt pas en ce tems la pensée dressée actuellement à Dieu, si ne peut-on pas dire qu'il n'ayt pas son intention à Dieu, puisque c'est en vertu de sa premiere deliberation, qu'il accomplit effectivement ceste œuvre de charité, deliberement et de son plein gré. Ceste intention est du moins requise, et suffit aussi pour la collation du sacrement.

Puisque la proposition du Concile est esclaircie à fond, voyons si elle est, comme celle des adversaires, sans fondement de l'Escriture. On ne peut raysonnablement doubter, que pour faire la cene de Nostre Seigneur, ou administrer le baptesme, il ne faille faire au moins ce que le Fils de Dieu a commandé pour cest effect; et non-seulement qui le faille faire, mais qu'il le faille exercer encore en vertu de ce commandement et institution. Il est certain que quelqu'un pourroit faire ceste action en vertu d'une autre rayson, que du commandement de Nostre Seigneur; exemple, d'un homme qui, en dormant, songeroit et baptizeroit, ou d'un homme estant yvre pour vray, les parolles y seroient, et l'eslement aussi; mais elles n'auroient point de force, ne procedant pas du commandement de celuy qui, seul, les peut rendre vigoureuses et efficaces : tout ce qu'un juge dit et ce qu'il escrit, ne sont pas des sentences judiciaires, mais seulement ce qu'il dit en qualité de juge. Or, comme pourroit-on mettre la difference entre les actions sacramentales, estant faites en vertu du sacrement qui les rend effectives, et ces mesmes actions faites à autre fin? Certes, la difference n'y peut estre considerée que par l'intention avec laquelle on les employe. Il faut donc, apres tout, que les parolles soient proferées, avec intention de faire le commandement de Nostre Seigneur en la cene: Hoc facite, etc., au baptesme: Baptizantes eos, in nomine Patris, et Filii, et Spiritus sancti. Mais, à le dire de bonne foy, n'est-il pas vray que ce commandement: Hoc facite, s'addresse proprement aux ministres de ce sacrement? Cela est hors de doubte. Or, il n'est pas dit simplement : Hoc facite, mais: Facite in meam commemorationem. Comme donc peut-on faire ceste sacrée action, en commemoration de Nostre Seigneur, sans avoir aucune intention d'y faire ce que Nostre Seigneur a commandé, ou du moins, ce que les chrestiens disciples de Nostre Seigneur font, afin que, sinon immediatement, au moins par l'entremise de l'intention des chrestiens, ou de l'Église, on fasse ceste action en commemoration de Nostre Seigneur? Je croy qu'il est impossible d'imaginer qu'un homme fasse la cene en commemoration de Nostre Seigneur, s'il n'a l'intention de prattiquer ce que Nostre Seigneur a commandé, ou au moins de faire ce que font ceux qui le font en commemoration de Nostre Seigneur. Il ne suffit donc pas de faire ce que Nostre Seigneur a commandé, quand il dit : Hoc facite; mais il le faut faire selon l'intention que Nostre Seigneur a commandée, c'est-à-dire, in sui commemorationem: sinon avec ceste

intention particuliere, au moins generale, sinon immediatement au moins mediatement, c'est-à-dire, en voulant faire ce que l'Eglise fait, laquelle a intention de faire ce que Nostre Seigneur a commandé; en ce cas, on s'en rapporte à l'intention de l'espouse. qui est adjustée au commandement de l'espoux. Pareillement Nostre Seigneur n'ordonne pas qu'on dise ces parolles : Ego te baptizo, simplement à la lettre, mais il a commandé que le baptesme se fist, in nomine Patris, si bien qu'il ne suffit pas qu'on dise en badinant, Ego te baptizo, mais il faut que l'aspersion, ou le lavement exterieur se fasse in nomine Patris, et que ceste authorité anime et vivifie non-seulement la parolle, mais toute l'action du sacrement, laquelle de soy n'auroit point de vertu surnaturelle sans l'intention. En quel sens se pourroit estre faite une action au nom de Dieu, qui se feroit pour se mocquer de Dieu ? Certainement l'action du baptesme ne depend pas tellement des parolles, qu'elle ne se puisse faire en une vertu et authorité toute contraire à ces parolles, si le cœur, qui est le moteur des parolles et des actions, les venoit addresser à une fin et intention opposée. De fait, ces parolles Au nom du Pere, etc., pourroient estre dites au nom de l'ennemy du Pere, comme ces parolles, en verité, peuvent estre et sont souventesfois dites en mensonge. Si donc Nostre Seigneur né commande pas qu'on fasse simplement la chose du baptesme, ny qu'on prononce simplement les parolles, mais veut encore que l'action se fasse et les parolles se disent, Au nom du Pere, etc., il faut avoir au moins une intention de faire le baptesme au nom de Nostre Seigneur, et en son nom, et de sa part. Pour le regard de l'absolution sacramentale, l'intention sans doubte y est requise, et ces parolles en font foy : Quorum remiseritis peccata remittuntur eis. Il laisse l'effect de ce ministere à leur deliberation, et c'est pour cela que je repete ceste belle sentence de sainct Augustin: Unde tanta vis aquæ, ut corpus tangat, et corpus abluat, nisi faciente verbo, non quia dicitur, sed quia creditur? Ce qui monstre que les parolles, de soy, estant proferées sans aucune intention et sans foy, n'ont point de vertu; mais estant dites en intention et en foy, et selon la fin generale de l'Eglise, elles font cest effect salutaire. S'il se treuve dans nos histoires certains baptesmes qui semblent avoir esté faits par jeu, ils ont esté appreuvez par les circonstances; et il ne le faut pas treuver estrange, parce qu'on peut faire en jeu plusieurs choses, et neantmoins avec l'intention de les faire veritablement et sans feintise: si l'on l'appelle jeu, en ces rencontres, c'est parce que cela se fait hors de sayson.

SAN

DISCOURS LXXII.

Du Purgatoire et des suffrages pour les morts.

PREFACE.

A Messieurs de la ville de Thonon.

ANS doubte, Messieurs, la saincte Eglise a esté tres-temerairement accusée, par les novateurs de nostre aage, de superstition, en

la priere qu'elle fait pour les fidelles trespassez, d'autant que cest usage doit supposer deux veritez que l'on pretend n'estre point du tout, à sçavoir, que les ames en l'autre monde soyent en necessité et indigence, et que l'on les puisse secourir. Voicy comme raysonnent nos adversaires : Les deffuncts sont ou damnez ou sauvez les damnez sont veritablement dans les peynes, mais elles sont irremediables; les sauvez sont comblez de tout playsir, et n'ont point besoin de secours. Ainsi, aux uns manque l'indigence, aux autres le moyen de recevoir de l'ayde; d'où s'ensuit, qu'il n'y a aucune rayson de prier pour les trespassez. Voylà les deux chefs de l'accusation; mais, certes, on doit informer à fond tout le monde, pour faire un juste jugement sur ceste procedure, que les reformateurs sont des personnes particulieres, et l'accusé est le corps de l'Eglise universelle; neantmoins, parce que l'humeur de nostre siecle veut, qu'on sousmette au controsle et à la censeure d'un chascun toutes les choses les plus sacrées, les plus religieuses et authentiques, plusieurs sçavans, personnes d'honneur et de marque, ont prins le droict de l'Eglise en main pour la deffendre, estimant ne pouvoir mieux employer leur pieté et leur doctrine, qu'e u'en la deffense d'une mere, du sein et par les mains de laquelle ils ont receu tout leur bien spirituel, comme sont, le baptesme, la doctrine chrestienne et les Escritures mesmes. Leurs raysons sont si fortes, que si elles estoient bien balancées et contre-pesées avec celles des accusateurs, on cognoistroit incontinent leur bon calibre. Mais quoy? on a porté sentence sans ouyr les parties: n'avons-nous pas rayson, tous autant que nous sommes de domestiques et enfans de l'Eglise, de nous porter pour appellans, et de nous plaindre de la partialité des juges? Laissant donc à part, pour ceste heure, l'incompetence de leur tribunal, au moins nous appellons des juges non instruicts, aux mesmes mieux instruicts, et des jugemens faits, parties non ouyes, à des jugemens parties entendues, suppliant ceux qui voudront juger sur ce differend, de considerer nos raysons et allegations d'autant plus attentivement, qu'il s'y agit, non pas de la condamnation d'une partie supresme accusée (qui ne peut estre condamnée par ses inférieurs), mais de l'absolution et du salut de ceux-là mesme qui en jugeront.

DISCOURS LXXIII.

Du nom du Purgatoire.

VONS-NOUS pas rayson de soustenir que l'on peut prier pour les A fidelles trespassez, que les suffrages et bonnes actions des gens de bien vivans les peuvent beaucoup souslager et leur sont profittables, parce que tous ceux qui decedent en la grace de Dieu, et qui, par consequent, sont du nombre de ses esleus, ne vont pas tous, ny tousjours de premier abord en paradis; mais plusieurs vont en purgatoire, où ils souffrent en satisfaction une peyne temporelle, que nos prieres et bonnes œuvres, faites en bonne disposition, peuvent ayder et servir tres-utilement? Voylà le gros de nostre difficulté.

:

Nous sommes d'accord que le sang de nostre Redempteur est le vray Purgatoire des ames pecheresses; car c'est par son merite que toutes les ames du monde sont nettoyées. Sainct Paul l'appelle, aux Hebr. 1 Purgationem peccatorum facientem. Les tribulations que souffrent les fidelles sont pareillement de certaines purgations, par lesquelles nos ames sont rendues plus pures, de mesme que l'or est affiné en la fournaise (Eccli. 27): Vasa figuli probat fornax justos autem tentatio tribulationis. La penitence et la contrition sont encore une espece de purgatoire; David en parle au psalme 50: Asperges me, Domine, hyssopo et mundabor. On sçayt aussi que le baptesme, dans lequel nos pechez sont tous lavez, peut estre appellé purgatoire. En un mot, nous pouvons nommer purgatoire tout ce qui sert à la purgation de nos offenses. Mais icy nous appellons proprement purgatoire, « un lieu dans » lequel, apres ceste vie presente, les ames qui partent de ce » monde, si elles ne sont parfaictement epurées des soüillures » qu'elles ont contractées icy-bas, sont purifiées, ne pouvant >> entrer dans le paradis sans estre nettoyées et purgées des » moindres taches. Si on veut sçavoir pour quelle rayson ce lieu est plutost appellé simplement purgatoire, que les autres moyens qui servent icy-bas à la purgation des ames, on respondra que c'est parce qu'en ce lieu-là on n'y fait autre chose que la purgation des restes du peché, qui sont demeurez dans l'ame au partir de ce monde; mais au baptesme, en la penitence, et aux autres moyens non-seulement l'ame s'epure de ses imperfections, mais encore s'enrichit de plusieurs graces et dons spirituels : ce qui fait qu'on a laissé le nom de purgatoire à ce lieu de l'autre monde, lequel, à proprement parler, n'est pour aucune autre rayson, que pour la purification des ames. Mais pour le regard du sang de Nostre Seigneur, nous cognoissons tellement la vertu de son merite, que nous protestons en toutes nos prieres, que la purgation des ames, soit en ce monde, soit en l'autre, ne se fait que par la puissance de son application; et nous sommes plus jaloux de l'honneur deu à ceste précieuse médecine, que ceux qui, pour la priser, en mesprisent les usages. Ainsi, par le purgatoire, nous entendons un certain lieu où les ames, pour un tems, sont purgées des taches venielles et imperfections qu'elles emportent de ceste vie mortelle, et pour lesquelles elles n'ont point pleynement satisfait.

DISCOURS LXXIV.

De ceux qui ont nyé et aboly le Purgatoire, et des moyens de le preuver contre les novateurs.

OR

R, la doctrine du purgatoire n'est pas une opinion receuë à la volée, ny nouvelle parmy les chrestiens; il y a longtems que l'Eglise a soustenu ceste creance envers tous et contre tous les heretiques: il semble que le premier qui l'a combattuě, ayt esté Arrius, et, depuis luy, les Arriens, ainsi que sainct Epiphane le tesmoigne en l'her. 75. Sainct Augustin en l'her. 53. et Socrate, lib. 2, cap. 35. Il y a environ deux cens ans que parurent certaines gens

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