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lequel par excellence et superiorité est appellé pierre et fondement, c'est celuy auquel Nostre Seigneur a dit: Tu es Cephas. Il est lapis, qui vient à ce lapidem probatum. Escoutez sainct Matthieu : il desclare que Nostre Seigneur y jettera une pierre espreuvée. Or, quelle preuve voulez-vous autre que celle-cy? Quem dicunt homines esse filium hominis? Question tres-difficile, à laquelle sainct Pierre, expliquant le secret et tres-haut mystere de la communication des idiomes, respond si pertinemment que rien plus, et confesse qu'il est vrayément pierre, disant : Tu es Christus filius Dei vivi. Isaïe poursuit, et dit: Lapidem prætiosum. Mais escoutez l'estime que Nostre Seigneur fait de sainct Pierre: Beatus es, Simon Barjona. Le prophete adjouste: Angularem; Nostre Seigneur ne dit pas qu'il fondera une seule muraille de l'Eglise, mais toute l'Eglise : Ecclesiam meam. Il est donc une pierre angulaire, in fundamento fundatum, c'est-à-dire fondé sur le fondement; mais non pas le premier, car il y aura un autre fondement, ipso summo angulari lapide Christo Jesu. Voylà comme Isaye explique sainct Matthieu, et sainct Matthieu Isaye. Je n'aurois jamais fait, si je voulois dire tout ce qui me vient en pensée sur ce subjet. Ce que j'ay dit suffit pour le present.

DISCOURS XXXVI.

Que sainct Pierre a eu des successeurs au vicariat general

de Nostre Seigneur.

J'AY 'AY fermement preuvé cy-dessus que l'Eglise catholique estoit une monarchie en laquelle un chef ministerial gouvernoit tout le reste. Ce n'a donc pas esté sainct Pierre seulement qui en a esté le chef, mais faut que, comme l'Eglise n'a pas manqué par la mort de sainct Pierre, ainsi l'authorité d'un chef n'ayt pas manqué; autrement elle ne seroit pas une, ny au train auquel son fondateur l'avoit mise. Et de vray, toutes les raysons pour lesquelles Nostre Seigneur mit un chef en ce corps, ne demandent pas tant qu'il y fust en ce commencement, où les Apostres qui gouvernoient l'Eglise estoient saincts, humbles, charitables, amateurs d'unité et concorde, qu'au progrez et suitté d'icelle, quand, la charité raffroidie, chascun s'ayme soy-mesme, personne ne se veut tenir au dire d'autruy, ny subir la discipline.

Je vous prie, si les Apostres, à l'entendement desquels le SainctEsprit esclairoit de si prez, si fermes et puissans, avoient besoin de confirmateur et de pasteur pour la forme de leur unyon, combien plus maintenant l'Eglise en a necessité, quand il y a tant d'infirmitez et foiblesse és membres de l'Eglise? La rayson de sainct Hierosme a bien maintenant lieu, autrement que du tems des Apostres : Inter omnes unus eligitur, ut, capite constituto, schismatis tollatur occasio. La bergerie de Nostre Seigneur doit durer jusques à la consommation du monde en unité : l'unité doneques d'un pasteur y doit encore durer.

Tout cecy a esté bien preveu cy-dessus dont il s'ensuit manifestement que sainct Pierre a eu des successeurs, en a encore et en aura jusques à la consommation des siècles.

Des conditions requises pour succeder.

Je ne fay pas icy profession de traitter les difficultez à fonds de cuve. Il me suffit d'avancer quelques principales raysons, et mettre au net nostre creance. Que si je voulois m'amuser aux objections qu'on fait sur ce point, j'aurois plus d'ennuy que de peyne, et la pluspart sont si legeres qu'elles ne meritent pas qu'on y perde le tems. Voyons quelles conditions sont requises pour succeder à une charge.

On ne succede qu'à celuy qui cede et quitte sa place, soit par deposition ou par la mort, qui fait que Nostre Seigneur est tousjours chef et souverain Pontife de l'Eglise, et auquel personne ne succede, parce qu'il est tousjours vivant et n'a cedé ou quitté ce sacerdocé pontifical, quoy qu'il exerce en partie par ses ministres et serviteurs icy-bas, en l'Eglise militante.

Mais ces ministres et lieutenans, tous tant qu'il y a des pasteurs, peuvent ceder et cedent, soit par deposition ou par la mort, leurs offices et dignitez.

Or, nous avons monstré que sainct Pierre a esté supresme chef ministeriel de l'Eglise et que cest office ou dignité ne luy a pas esté baillé pour luy seulement, mais pour le bien et profict de toute l'Eglise, si que ce doit estre un office perpetuel en l'Eglise militante; mais comme seroit-il perpetuel, si sainct Pierre n'avoit point de successeur? Car on ne peut pas doubter que sainct Pierre ne soit pasteur, quoyqu'il n'est plus en l'Eglise militante, ny mesme homme visible, qui est une condition requise pour administrer en l'Eglise visible."

Reste à sçavoir comme il a fait ceste cession, comme il a quitté ce sien pontificat, si c'est, ou par deposition faite entre vivans, ou par la mort naturelle. Puis on verra qui luy a succedé, et par quel droict.

Et d'un costé, personne ne doubte que sainct Pierre ayt continué en sa charge toute sa vie. Car ces parolles de Nostre Seigneur : Pasce oves meas, luy firent non-seulement une institution en ceste supresme charge pastorale, mais un mandement absolu, qui n'avoit point d'autre limitation que le terme de sa vie, non plus que cest autre: Prædicate Evangelium omni creaturæ, à quoy les Apostres vacquerent jusques à la mort. Pendant doncques que sainct Pierre vesquit ceste vie mortelle, il n'eut point de successeur, et ne deposa point sa charge, ny n'en fut point deposé. Car il ne le pouvoit estre sinon par l'heresie, qui n'eut jamais accez chez les Apostres, beaucoup moins chez leur chef; sinon que le maistre de la bergerie l'en eust levé, ce que non.

Ce fut doncques la mort qui le leva de la sentinelle et de ce guet general qu'il faysoit comme pasteur ordinaire sur toute la bergerie de son maistre. Mais qui succeda en sa place? Et quant à ce poinct, toute l'antiquité est d'accord que c'est l'evesque de Rome, avec ceste rayson, sainct Pierre mourut evesque de Rome. Doncques l'evesché de Rome fut le dernier siege du chef de l'Eglise. Doncques l'evesque de Rome qui fut apres la mort de sainct Pierre succeda au chef de l'Eglise, et par consequent fut chef de l'Eglise. Quel

qu'un pourroit dire qu'il succeda au chef de l'Eglise quant à l'evesché de Rome, mais non quant à la monarchie du monde; mais celuy-là devroit monstrer que sainct Pierre eut deux sieges, dont l'un fut pour Rome, l'autre pour l'univers, ce qui n'est point. Il eut bien à la verité un siege en Antioche, mais celuy qui l'eut apres luy n'eut pas le vicariat general, parce que sainct Pierre vesquit longtems apres, et n'avoit pas déposé ceste charge; mais ayant choysi Rome pour son siege, il en mourut evesque, et celuy qui luy succeda, luy succeda simplement, et s'assied en son siege, qui estoit siege general de tout le monde, et de l'evesque de Rome en particulier, si que l'evesque de Rome demeura general lieutenant en l'Eglise, et successeur de sainct Pierre. Ce que je vay preuver maintenant si solidement, qu'autre que les opiniastres n'en pourra doubter.

DISCOURS XXXVII.

Que l'evesque de Rome est vray successeur de sainct Pierre, et chef de l'Eglise militante.

J'A 'AY presupposé que sainct Pierre ayt esté evesque de Rome et soit mort tel. Ce que tous les adversaires nyent: mesme que plusieurs d'entre eux nyent qu'il ayt esté jamais à Rome. Mais je n'ay que faire de combattre toutes ces negatives par le menu, puisque, quand j'auray bien preuvé que sainct Pierre a esté, et est mort evesque de Rome, j'auray suffisamment preuvé que l'evesque de Rome est successeur de sainct Pierre. Oultre ce que toutes mes raysons, et mes tesmoins, portent en termes expres que l'evesque de Rome a succedé à sainct Pierre, qui est mon intention, de laquelle neantmoins reüssira une claire certitude que sainct Pierre a esté à Rome, et y est mort.

Et voicy mon premier tesmoin, sainct Clement, disciple de sainct Pierre, en l'epistre premiere qu'il a escrit ad Jacobum fratrem Domini, laquelle est si authentique, que Ruffin en a esté traducteur il y a environ douze cens ans. Or, il dit ces parolles: Simon Petrus apostolus primus regem sæculorum, usque ad Romanæ urbis notitiam, ut etiam ipsa salvaretur, invexit. Hic pro pietate patrum volens, apprehensa manu mea in conventu fratrum, dixit: Clementem hunc episcopum vobis ordino, cui soli meam prædicationis et doctrina cathedram trado. Et peu apres : Ipsi trado a Domino mihi traditam potestatem ligandi et solvendi. Et quant à l'authorité de ceste epistre: Damasus in Pontificali, en la vie de Clement, en parle ainsi : In epistola quæ ad Jacobum scripta est, qualiter Clementi commissa est a B. Petro Ecclesia, reperies. Et Ruffin, en la Preface sur le livre des Recognoissances de sainct Clement, en parle fort honnorablement, et dit qu'il l'avoit mise en latin, et que sainct Clement y tesmoignoit de son institution, et quod eum reliquerit successorem cathedra. Ce tesmoignage fait voir, et que sainct Pierre a presché à Rome, et qu'il y a esté evesque; car, s'il n'y eust esté evesque, comme eust-il baillé la chaire à sainct Clement, qu'il n'y eust pas euë?

Le 2, sainct Irenée (1. 3. č. 3): Maximæ, et antiquissimæ et

omnibus cognitæ a duobus gloriosissimis apostolis Petro et Paulo Romæ fundatæ Ecclesiæ, etc.; et peu apres: Fundantes igitur et instruentes beati apostoli Ecclesiam, ejus administrandæ episcopatum Lino tradiderunt. Succedit ei Anacletus. Post eum, tertio ab apostolis loco, episcopatum sortitur Clemens.

Le 3e, Tertullien (de Prescript.): Romanorum Ecclesia Clementem a Petro ordinatum edit, id est, per instrumenta et rationes publicas demonstrat. Et au mesme livre: Felix Ecclesia cui totam doctrinam apostoli cum sanguine suo profuderunt, et parle de l'Eglise romaine, ubi passioni dominicæ Petrus adæquatur. Où vous voyez que sainct Pierre est mort à Rome, et y a constitué sainct Clement; si que, joignant ce tesmoignage aux autres, on void qu'il y a esté évesque, et y est mort enseignant.

Le 4, sainct Cyprien (ep. 55, ad Cornel.): Navigare audent ad Petri cathedram, atque ad Ecclesiam principalem, unde unitas sacerdotalis exorta est; et parle de l'Eglise romaine.

Eusebe, in Chronico anni 44: Petrus, natione Galilæus, epi coporum pontifex I, cum primum Antiochenam Ecclesiam fundasset, Romam proficiscitur, ubi Evangelium prædicans 'XXV annis, ejusdem urbis episcopus perseverat.

Epiphan., hæres. 21: Episcoporum in Roma successio hanc habuit consequentiam : Petrus et Paulus, Linus, Cletus, Clemens, etc.

Dorothæus, in Synopsi: Linus post coryphæum Petrum Romæ episcopus fuit.

Optat. Milev. Negare non potes scire te in urbe Roma, Petro primo cathedram episcopalem esse collatam, in qua sederit omnium apostolorum caput Petrus. Et peu apres: Sedit prior Petrus, cui succedit Linus, Lino successit Clemens.

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Hieron., ad Damas. Cum successore piscatoris et discipuli crucis loquor; ego beatitudini tuæ in Cathedræ Petri communione consocior.

Sainct Augustin, ep. 165, ad Generos.: Petro successit Linus, Lino Clemens.

Au 4 Concile general de Chalcedoine, act. 3, quand les legats du Sainct-Siege veulent porter sentence contre Dioscorus, ils disent en ceste façon: Unde SSmus et beatissimus magnæ et senioris Roma, Leo, per nos et præsentem sanctam synodum, una cum te beatissimo, et omni laude digno, beato Petro, apostolo qui est petra et crepido Ecclesiæ catholicæ, nudavit eum tam episcopatus dignitate, quam etiam ab sacerdotali alienavit ministerio. Notez un peu ces traicts, que le seul evesque de Rome le prive par ses legats, et par le Concile; qu'ils joignent l'evesque de Rome avec sainct Pierre car ils monstrent que l'evesque de Rome tient le lieu de sainct Pierre.

Le Synode d'Alexandrie, où estoit Athanase, en sa lettre à Felix II, dit merveilles à ce propos, et entre autres choses, raconte qu'au Concile de Nicée on avoit determiné, qu'il n'estoit loysible de celebrer aucun Concile sans l'authorité du Sainct-Siege de Rome; mais que les canons qui avoient esté faits à ce propos avoient esté bruslez par les heretiques ariens. Et de fait, Jules I, in Rescripto contra

S. François. 3

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Orientales pro Athanasio, c. 2 et c. 3, recite deux canons du Concile de Nicée qui tirent sur ce propos; lequel escrit de Jules I a esté cité par Gratien, il y a 400 ans, et par Isidore il y en a 900. Et le grand Pere Vincent Lyrinois en fait mention il y a environ mille ans. Ce que je dy parce que tous les canons du Concile de Nicée ne sont pas en estre, n'en estant demeuré que vingt; mais tant de graves autheurs en citent tant d'autres oultre les 20, que nous avons à croire ce que disent ces bons Peres Alexandrins cy-dessus, que les Ariens en ont fait perdre la pluspart.

Pour Dieu, jettons l'œil sur ceste tres-ancienne et tres-pure Eglise des six premieres centaines, et la regardons de toutes parts. Que si nous la voyons croire fermement que le Pape fut successeur de sainct Pierre, quelle temerité sera-ce de le nyer!

Voicy, ce me semble, une rayson qui ne demande plus aucun credit, mais consiste en beau comptant. Sainct Pierre a eu des successeurs en son vicariat. Et qui a jamais esté en resputation en l'Eglise ancienne d'estre successeur de sainct Pierre, et chef de l'Eglise que l'evesque de Rome? Certes, tous tant qu'il y a d'autheurs anciens, donnent tous ce tiltre au pape, et jamais aux autres.

Et comme doncques dirons-nous qu'il ne le soit pas? Certes, c'est nyer la verité cogneue, ou qu'ils nous dient quel autre evesque est le chef de l'Eglise, et successeur de sainct Pierre. Au Concile de Nicée, en celuy de Constantinople, et de Chalcedoine, on ne void pas qu'aucun evesque s'usurpe la primauté. Elle est déferée, selon l'ancienne coustume, au pape : autre quelconque n'y est nommé en pareil grade, Bref, jamais il ne fut dit, ny doubté d'aucun evesque és premiers cinq cens ans, qu'il fut chef ou superieur aux autres, que de celuy de Rome, duquel on ne doubta voirement jamais mais on a tenu pour tout resolu qu'il estoit tel. A quel propos doncques, apres quinze cens ans passez, veut-on mettre ceste ancienne tradition en compromis? Je n'aurois jamais fait, si je voulois apporter sur table toutes les asseurances et recharges que nous avons de ceste verité és escrits des anciens; cecy cependant suffira de ce costé, pour preuver que l'evesque de Rome est successeur de sainct Pierre, et que sainct Pierre a esté, et est mort evesque à Rome.

DISCOURS XXXVIII.

Briefve description de la vie de sainct Pierre, et de l'institution de ses premiers successeurs.

Il n'y a point de question où les ministres s'exercent si fort de combattre qu'en celle-cy. Car ils taschent, à force de conjectures, presomptions, dilemmes, explications, et par tous moyens, de monstrer que sainct Pierre ne fut oncques à Rome. Sauf Calvin, qui, voyant que c'estoit dementir toute l'antiquité, et que cela n'estoit pas requis pour son opinion, se contente de dire qu'au moins sainct Pierre ne fut pas longtems evesque à Rome: Propter scriptorum consensum, non pugno quin illic mortuus fuerit; sed episcopum fuisse, præsertim longo tempore, persuaderi nequeo. Mais à la verité, quoy qu'il n'eust pas esté que fort peu de tems

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