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tous costez; aussi est-ce le plus frequent, le plus dangereux et le plus dommageable.

C'est de celuy-là seul, duquel Nostre Seigneur est devenu l'object des ames qui se sont mises en proye à l'iniquité; mais un peu de patience, Nostre Seigneur ne peut jamais estre scandaleux; car tout est en luy souverainement bon, et rien scandalizable, parce qu'il est souverainement puissant et sage; comment donc se peut-il faire qu'on se scandalize de luy, et qu'il soit mis à la ruyne de plusieurs? Ce seroit un horrible blaspheme, d'attribuer nostre mal à sa Majesté; elle veut que chascun soit sauvé, et vienne à la cognoissance de la verité; elle ne veut qu'aucun perisse; car nostre perdition vient seulement de nous; et nostre ayde de la Bonté divine: ainsi donc Jesus-Christ, et sa saincte parolle, ne peuvent nous scandalizer; mais c'est nous-mesmes qui nous scandalizons en luy et c'est en ce sens qu'il faut expliquer ce que luy-mesme enseigne, disant, bien-heureux qui ne sera point scandalizé en moy, et autre part, il a esté mis à la ruyne de plusieurs; car on le doit verifier de l'evenement qui fut tel, que plusieurs s'y sont ruynez, non pas selon l'intention de la Bonté supresme, qui ne l'avoit envoyé que pour estre la lumiere en revelation aux Gentils, et à la gloire d'Israël. S'il se treuve des gens qui veuillent dire le contraire, il ne leur restera, sinon d'inferer avec impieté contre leur Sauveur, par sa propre parolle, Malheur par qui vient le scandale!

Cherchons, je vous prie, en nous-mesmes la cause de nos vices; nous treuverons que nostre volonté en est la seule source: nostre mere Eve voulut bien s'excuser sur le serpent, et son mary sur elle; mais l'excuse ne fut pas recevable; ils eussent mieux fait d'advoüer, et dire le bon peccavi, comme David, auquel incontinent la faute fut remise.

J'ay dit cecy, Messieurs, pour vous faire cognoistre d'où vient ceste grande dissension de volontez, au fait de la Religon, que nous voyons, parmy ceux qui font profession de bouche du Christianisme. Celuy-cy, sans doubte, est le principal et le souverain scandale, il semble que ce soit quasy la mesme chose, quand Nostre Seigneur dit : Il est necessaire que le scandale advienne; et quand sainct Paul dit: Il faut qu'il y ayt des heresies (1. Cor. 11). Ce scandale se va diversifiant et multipliant avec le tems; mais comme un mouvement violent ne peut durer, ainsi sa malice s'esmousse et s'affoiblit enfin. Je conclus donc que ceux qui commencent une division et une guerre civile entre les chrestiens, par l'heresie, commettent un scandale purement passif prins ab intrinsequo; puisqu'il n'y a point de mal dans l'heresiarque, qui ne soit produict de sa volonté, personne n'y a part que luy. Le scandale des premiers, qui corrompent la Religion, tombe sur plusieurs, mais inesgalement; car l'heresiarque y a sa meilleure part, à cause de la sollicitation: les sectateurs y en ont une d'autant plus grande, qu'ils ont eu moins d'occasion de le suivre; mais l'heresie dans son progrez ayant prins pied, ceux qui nayssent parmy les heretiques, de parens heretiques, ont tousjours moins de part à la faute neantmoins il n'arrive jamais que les uns et les autres ne soyent coupables de leur erreur, particulierement ceux de nostre aage, qui sont tous en scandale, presque purement passif, attendu que l'Escriture, qu'ils manyent, le voisinage des vrays chrestiens, les marques qu'ils voyent en la vraye Eglise (de laquelle ils se sont separez), leur peuvent mettre en avant ces parolles de son Espoux: Recherchez dans mes Escritures, par lesquelles vous pensez avoir la vie eternelle ; ce sont ellesmesmes qui rendent tesmoignage de moy (Joan. 5); et autre part: Les œuvres

que je fais au nom de mon Pere, rendent aussi tesmoignage pour moy (Ibid). J'ay dit que leur scandale est purement, ou presque purement passif, et voicy de quelle maniere. On sçayt bien que l'occasion de leur division et de leur divorce d'avec nous, est l'erreur imaginaire, l'ignorance et l'idolastrie qu'ils disent estre en l'Esglise, laquelle ils ont abandonnée : neantmoins c'est chose toute certaine, que l'Eglise en son corps general ne peut estre scandaleuse, et l'on peut dire aussi qu'elle est inscandalizable, comme son Espoux, qui luy a communiqué par grace et assistance particuliere, ce qui luy est naturel en proprieté; car estant le Chef, il a conduict ses pas au droict chemin; comme ceste Eglise est son corps mystique, il prend à soy l'honneur et le mespris qui luy est fait. Ainsi l'on ne peut dire qu'elle puisse prendre ou donner ou recevoir aucun scandale : ceux donc qui se scandalizent en elle, en ont tout le tort et toute la faute en eux-mesmes; leur scandale n'a point d'autre subjet que leur propre malice, qui les va chastoüillant, pour les faire rire et complayre en leurs iniquitez. Voicy donc, Messieurs, ce que je pretens monstrer en ce Traitté; je n'ay point d'autre intention, que de vous faire voir, que ceste Suzanne mystique est accusée injustement, et qu'elle a rayson de se plaindre de tous ceux qui se sont distraicts de sa societé, avec les parolles mesmes de son Espoux: Ils m'ont hay d'une hayne injuste (Psal. 24). Je preuveray mon dire en deux façons premierement, par certaines raysons tres-generales; secondement, par des exemples particuliers, où je proposeray sur les principales difficultez, comme par maniere d'essay, tout ce que tant de doctes hommes en ont escrit : car tout tend là et y revient, quoy que par divers moyens, estant libre à chascun de se proposer un chemin particulier, qui tend au mesme lieu. Pour moy je tascheray de reduire toutes les lignes de mon discours à ce poinct, comme au centre, et le plus justement que je pourray. La premiere partie servira presque esgalement à combattre toutes sortes d'heretiques. La seconde s'addressera plus specialement à ceux, à la reunyon desquels nous avons plus d'inclination, d'obligation et de devoir. La premiere fera voir les deffauts de Mission, dans ceux qui ont presché et enseigné contre l'Eglise Catholique, Apostolique-Romaine; la seconde traittera de l'Eglise mesme, de son Chef, de son Ordre, de ses Marques, de ses Sacremens, et de la Doctrine constante touchant le Purgatoire.

Tant de grands personnages ont escrit en nostre aage sur ce subjet, que la posterité n'a presque plus rien à y desirer, ains seulement à considerer, apprendre, imiter et admirer : je ne diray donc rien qui soit nouveau, et je ne le voudrois pas faire; car tout est ancien dans cest escrit, il n'y a presque rien du mien que le fil et l'esguille. Le dessein ne m'a cousté qu'à le descoudre et le recoudre à ma façon, en suivant cest advis de Vincent de Lerins, c. 27: Doce tu, quæ didicisti; sed ità doce, ut cum dicas nové, non dicas nova. Ce Traitté semblera peut-estre un peu trop accourcy et trop devestu; cela ne vient pas de ma chicheté, mais de ma pauvreté et de mon peu de tems. Ma memoire a fort peu de moyens de reserve, et ne s'entretient que du jour à la journée; je n'ay que fort peu de livres en ce lieu, dont je me puisse enrichir : prenez neantmoins à gré ceste production, telle qu'elle est; je vous l'offre, Messieurs, et quoy que vous ayez veu plusieurs autres livres mieux faits et mieux parez, arrestez un peu vostre attention sur celuy-cy, qui peut-estre sera plus sortable à vostre complexion que les autres car son air est du tout Savoysien, et l'une des plus salutaires recestes et derniers remedes, puisque c'est le retour à l'air naturel. Si pour

tant il ne profitte point en tout, l'on vous en monstrera d'autres plus riches et plus subtils. Je vay donc commencer au nom de Dieu; lequel je supplie tres-humblement, de faire couler tout doucement la saincte parolle, comme une fraische rosée, dans vos cœurs, et je vous prie, Messieurs, de vous ressouvenir, et ceux qui liront cecy, des parolles de sainct Paul, que toute amertume, hyre, dedains, crieries, blasphemes et toute malice soyent ostez de nous et de vous (Ephes. 4). Amen.

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PREMIERE PARTIE.

DE LA MISSION FAUSSE ET VERITABLE.

DISCOURS PREMIER.

Que Calvin, Luther, et les autres heresiarques,
n'ont point eu de veritable mission.

:

Tous devons avant toutes choses, Messieurs, vous faire confesser, que vos premiers ministres, et vous aussi, avez commis une faute inexcusable, quand vous avez presté l'aureille à ceux qui estoient separez dé l'Eglise : car ce n'estoient point des personnes qualifiées, comme il falloit, pour prescher la saincte parolle: ils portoient l'Evangile, à ce qu'ils disoient, de la part de Dieu contre l'Eglise; ils se vantoient de publier le libelle de divorce de la part du Fils de Dieu mesme. Mais à qui? à l'Eglise, son Espouse ancienne pour quelle fin? pour se maryer à une jeune assemblée, refaicte et reformée mais sur quel fondement pouviez-vous croire ces nouvelles, sans leur faire monstrer leur charge et leur commission bien authentique? Vous commençastes de premier abord à ne plus recognoistre ceste Reyne pour vostre Princesse, et à crier par tout, que c'estoit une corrompue et une adultere; vos reformateurs couroient çà et là, pour semer ces fausses nouvelles; mais qui les en avoit chargez? on ne peut s'enrosler sous un capitaine, sans l'adveu du prince chez lequel on demeure. Or, comment fustesvous si prompts à vous ranger sous ces premiers ministres, sans sçavoir si vos pasteurs legitimes, qui estoient parmy vous, vous advoüeroient, n'ignorant pas que cês novateurs vous sortoient de l'estat où vous estiez nays et nourrys? Ceux-là donc sont inexcusables, de ce que sous l'authorité du magistrat, ils ont fait ceste levée de boucliers, et vous de les avoir suivis.

Vous voyez bien, mes Freres, où je vay battre; c'est sur la faute de mission et de vocation, que Luther, Zuingle, Calvin et les autres n'ont jamais eue. Car c'est chose certaine, que quiconque veut enseigner, et tenir rang parmy les pasteurs en l'Eglise, doit estre envoyé. Sainct Paul le dit : Quomodò prædicabunt nisi mittantur (Rom. 10)? Comment prescheront-ils, s'ils ne sont envoyez? Et Jeremie dit: Ces prophetes prophetisent à faux, je ne les ay pas envoyez Non mittebam Prophetas, et ipsi currebant (Jer. 23); Je ne les envoyois pas, et ils courroient. La mission est donc tout à fait necessaire, vous ne le nyerez pas, si vous ne sçavez quelque chose plus que vos maistres; mais je vous vois venir en trois escadrons, pour vous maintenir; car les uns d'entre vous diront : Qu'ils ont eu leur vocation et mission du peuple; d'autres, du magistrat seculier et temporel; les autres, de l'Eglise mesme. Comment cela? Parce, disent-ils, que Luther, OEcolampade, Buçer, Zuingle,

et leurs semblables, estoient prestres de l'Eglise romaine, comme les nostres. Mais les plus subtils soustiennent, qu'ils ont esté envoyez de Dieu par une mission extraordinaire; examinons le premier chef. Comment croyons-nous que le peuple, et les princes seculiers ayent appellé Calvin, Brence, et Luther, pour enseigner la doctrine, que jamais ils n'avoient ouye? En quel tems commencerent-ils à semer et prescher ceste doctrine? Qui les avoit obligez à le faire? Vous desclarez que le peuple devoit les avoir appellez; mais quel peuple? Car, ou il estoit catholique, ou il ne l'estoit pas; s'il estoit catholique, comment vous eust-il envoyez prescher ce qu'il ne croyoit pas? Ceste vocation de quelque petite partie du peuple, lors catholique, pouvoit-elle contrevenir à tout le reste qui s'y opposa? mais de quelle maniere une partie du peuple pouvoit-elle vous donner authorité contre l'autre partie, afin que vous allassiez de peuple en peuple, detournant tant que vous pourriez les ames de l'ancienne obeyssance? Vous sçavez bien qu'un peuple ne peut, au plus, donner l'authorité que sur et pour soy-mesme, non pas contre soy-mesme; il a donc fallu ne point prescher, si non là où vous estiez appellez du peuple; ce que si vous eussiez fait simplement, vous n'eussiez pas tant eu de suitte. Mais descendons dans le particulier. Quand Luther commença, qui l'appella? Il n'y avoit en ce tems aucun peuple qui pensast aux opinions qu'il a publiées; comme donc l'eut-il appellé pour les prescher? S'il n'estoit pas catholique, qu'estoit-il donc? Lutherien? non pas, car je parle de la premiere predication. Quoy donc? qu'on nous responde si l'on peut qui a donné l'authorité aux premiers d'assembler les peuples, de dresser des compaignies et des bandes à part? Ce n'estoit pas le peuple, car il n'estoit pas encore assemblé. Mais ne seroit-ce pas tout brouiller et tout confondre, de permettre à chascun de dire ce que bon luy sembleroit? A ce compte, chascun seroit envoyé, car il n'y a si chetif qui ne puisse treuver des compaignons, tesmoins les anabaptistes, les libertins, les adamites, etc. Mais enfin, s'il se faut ranger à l'Escriture, on n'y treuvera jamais que les peuples ayent eu pouvoir de se donner eux-mesmes des pasteurs, et des predicateurs evangeliques.

DISCOURS II.

Faute de mission, tous les ministres de la nouvelle et pretenduë Eglises sont in-excusables; et aussi ceux qui les ont ouys, et suivys.

faut inferer des choses dites cy-dessus, que l'Estat de vos mi

I nistres, qui n'avoient point les conditions requises pour meriter le rang qu'ils vouloient tenir, et conduire l'entreprinse qu'ils ont faite, les rend in-excusables, et vous aussi, qui les suivez, et qui sçavez encore, ou devez sçavoir, que par deffaut de mission, vous avez eu grand tort de les recevoir à telles enseignes. La qualité qu'ils demandoient, estoit celle d'ambassadeurs de Jesus-Christ Nostre Seigneur; l'entreprinse qu'ils se proposoient, estoit de desclarer un divorce juré entre l'Espoux et l'ancienne Eglise son

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