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Les mots, dans lesquels l'e muet, précédé d'une voyelle, et suivi d'une où de plusieurs consonnes, ne peut point se confondre, par la prononciation, avec une autre syllabe, tels que orgies, hardies, frappées, trompées, emploient, déploient, confient, essuient, avouent, dénouent, effraient, soustraient, elc. ces mots, dis-je, ne peuvent jamais entrer dans le corps d'un vers. Ainsi les suivans ne valent rien :

Ces-fem-mes-ont-é-té | pu-ni-es-à-pro-pos.

Ils-voi-ent-en-tous-lieux | des-ob-jets-en-chan-teurs. As-sas-sins-ef-fron-tés | ils-dé-ni-ent-leurs crimes.

Ils-vous-lou-ent-tout-haut | et-vous-jou-ent-tout-bas.

L'e muet au-dedans d'un mot, et précédé d'une voyelle, se supprime toujours en poésie. Ainsi, au lieu d'écrire agréerai, ralliera, crierons, oublierois, gaieté, maniement, dévouement, etc. on écrit agrérai, rallíra, crírons, oublírois, gallé, maníment, dévoúment,etc. C'est ce qu'on voit dans ces vers:

L'es-prit-et-la-gai-té | la-gra-ce-l'en-jou-ment
Or-nent-tout-à-la-fois | vo-tre-sty-le-char-mant.

Et-ce-sont-ces-plai-sirs | et-ces-pleurs-que-j'en-vie, Que-tout-au-tro-que-lui | me-paî-roit-de-sa-vie !

De

Saus-les-re-mords-af-freux | qui-dé-chi-rent-men-cœur,
Hi-é-ron-j'ou-bli-rois | qu'il-est-un-ciel-ven-geur.

Il faut absolument éviter dans les vers la rencontre des voyelles, ou d'une h non aspirée, qui ne se mangent point dans la prononciation: c'est ce qu'on appelle hiatus. On ne pourroit jamais faire entrer dans un vers ces mots, loi évangélique, Dieu immuable, vérité éternelle, vrai honneur, foi assurée, etc. Il en est de même de la conjonction et avant un mot qui commence par une voyelle.

On peut cependant répéter la conjonction oui, ou la mettre après une interjection, comme on le voit dans ces

vers:

Oui, oui, je veux venger votre honneur et le mien.

He! oui, je ferai tout pour ne pas vous déplaire.

Les vers tirent leur plus grande beauté la rime. de la rime. Elle est une convenance de sons à la fin des mots qui terminent plusieurs vers. La rime qu'on appelle masculine, est celle qui termine les vers masculins; et la féminine, celle qui termine les féminins, comme on va le voir dans ceux-ci :

Au pied du mont Adulle, entre mille roseaux,
Le Rhin tranquille et fier du progrès de ses eaux,

Appuyé d'une main sur son urne penchante,
Dormoit au bruit flatteur de son onde naissante;
Lorsqu'un cri tout-à-coup suivi de mille cris,
Vient d'un calme si doux retirer ses esprits.
Il se trouble, il regarde, et par-tout sur ses rives,
Il voit fair à grands pas ses Naïades craintives,
Qui toutes accourant vers leur humide roi,
Far un récit affreux redoublent son effroi.

On ne considère pour la rime masculine, que le son de la dernière syllabe des mots, soit que cette dernière syllabe s'écrive de même, soit qu'elle s'écrive différemment. Ainsi, les mots plaisir, repos, candeur, rimeront, non-seulement avec desir, dispos, froideur, mais encore avec soupir, berceaux, douleur. Cependant le seul e fermé ne suffit point pour cette rime. Frivolité ne peut pas rimer avec aimé; consterné avec embrásé. Il faut que la lettre qui précède cet e fermé, soit la même dans les deux mots. Ainsi, frivolité rimera fort bien avec vanité; consterné avec enchaîné.

Le son de la dernière syllabe des mots ne suffit pas pour la rime féminine, parce que la prononciation sourde et obscure de l'e muet empêche d'y appercevoir une convenance sensible. Ainsi monde ne rime point avec demande, quoique la dernière syllabe de ces deux mots soit la même. Il faut pour la rime féminine prendre la convenance des sons de la dernière syllabe des mots, comme dans ceux-ci: monde, féconde | bocage,

ombrage | cantique, portique | nature, verdure jaillissent, bondissent | instruire, conduire, etc. Mais guerre, terre, tonnerre, ne peuvent pas rimer avec père, hémisphère, colère, la convenance des sons ne se trouvant pas dans l'avantdernière syllabe de ces mots; non pas précisément parce que les premiers ont deux rr, et que les autres n'en ont qu'un; mais parce que dans les mots guerre, terre, tonnerre, le premier e est fort ouvert, et que dans les autres, il est seulement un peu ouvert.

Le seul e fermé dans l'avant-dernière syllabe d'un mot terminé par une muet, ne suffit point pour la rime féminine. Adorée, trompée, épouvantée, etc. ne rimeront pas avec charmée, brisée, consolée, etc. et ne pourront rimer qu'avec sacrée, frappée, enchantée, ou autres mots semblables.

Les pluriels ne riment point avec les singuliers, à moins que ces deux nombres ne soient terminés par la même consonne, ou une consonne équivalente. Ainsi, agréable, jeu, bijou, complot, vérité, au singulier, ne rimeront pas avec aimables, feux, verrous, pivots, frivolités, au pluriel. Mais fastueux, courroux, voix, repos, quoiqu'au singulier, rimeront avec jeux, bijoux, exploits, côteaux, au pluriel.

Suivant cette règle, deux mots qui

seroient au singulier, mais dont l'un seroit terminé par une voyelle, et l'autre par une consonne, quoique précédée de cette même voyelle, ne rimeroient pas ensemble. Ne faites donc point rimer loi avec bois, voix, ou exploit; non plus que genou avec courroux, etc. Les versificateurs rigides ne veulent même pas que détour rime avec secours ; sultan avec instant; essor avec transport, parce que ces mots ne sont pas terminés par la même consonne, ou par une consonne équivalente. Mais ils font rimer ensemble instant et attend, accord et fort, etc.

Sur l'argent, c'est tout dire, on est déjà d'accord: Ton beau-père futur vide son coffre-fort.

Un mot peut rimer avec lui-même. Mais ce n'est que quand il est pris dans des significations différentes, comme dans ces vers:

Chaque objet frappe, éveille et satisfait mes sens : Je reconnois les dieux au plaisir que je sens,

Le cardinal de Richelieu entendant la lecture que lui faisoit Colletet d'une de ses comédies, lui donna six cents. livres pour six vers seulement qu'il trouvoit fort beaux. Le poète adressa au ministre ce distique :

Armand, qui pour six vers m'as donné six cents livres, Que ne puis-je à ce prix te vendre tous mes livres !

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