Et si la pièce est mal représentée, Pour notre argent nous sifflons les acteurs. En voici une autre dans le genre familier, et dont le sujet est tiré de la my thologie: elle est pleine d'esprit et de sel. J'ai désarmé l'amour; et de tout son bagage J'ai fait une serviette. J'ai fondu son carquois pour m'en faire une assiette; Ce superbe vainqueur, à présent mon esclave, Les meilleurs épigrammatistes latins sont Catulle, né à Véronne l'an 86 avant J. C., et Martial, qui, né en Espagne vers le milieu du premier siècle de l'ère chrétienne, passa la plus grande partie de sa vie à Rome. Le premier a plus de sentiment, plus de délicatesse; le second plus de feu, plus de saillie. Mais l'un et l'autre ne doivent être lus qu'avec la plus grande précaution. Catulle n'a pas été bien traduit par Pezay; et Martial l'a été encore moins bien par l'abbé de Marolles. Parmi nous, ce sont Marot et J. B. Rousseau. Après eux viennent Racine, qui nous a laissé quelques bonnes épigrammes, Mainard, Boileau, et Piron. Mais, encore une fois, si l'on veut s'adon Du Madrigal. ner à ce genre de poésie, on doit se faire une loi inviolable de ne point franchir les bornes de la pudeur, et de n’offenser, non-seulement aucune personne en particulier, mais même aucun corps en général. Piron n'est pas excusable d'avoir dit: Cy git Piron, qui ne fut rien, Pas même académicien : quoique ce trait ne tombât individuellement sur aucun membre de cette illustre compagnie. Le madrigal, peut avoir le même nom, bre de vers que l'épigramme: il consiste également dans une seule pensée ; et ces deux petits poèmes ne différent que par le caractère mème de cette pensée. Elle est saillante dans l'épigramme, plus particulièrement réservée pour des sujets plaisans ou satiriques. Elle est délicate dans le madrigal, spécialement consacré à des sujets tendres ou galans. L'épigramme a dans sa chute quelque chose de plus vif, de plus piquant, de plus étudié. Le madrigal au contraire a quelque chose de plus doux, de plus simple, de plus gracieux. En voici un qui peut servir de modèle : c'est une réponse de Pradon à quelqu'un qui lui avoit écrit, et qui avoit mis dans sa lettre beaucoup d'esprit. Vous n'écrivez que pour écrirc ! Moi, qui vous aime tendrement, On peut citer encore pour modèle de madrigal ces jolis vers que fit Desmarets sur la violette, pour la guirlande de Julie de Rambouillet. Modeste en ma couleur, medeste en mon séjour, Ceux de nos auteurs qui ont laissé le Du Son. Le sonnet qu'on rapporte, aussi bien que le madrigal, à l'épigramme, con- net, siste dans quelques pensées, dont la dernière doit avoir quelque chose de frappant et d'extraordinaire. Sa forme artificielle ou mécanique est absolument invariable. Il est composé de quatorze vers. Les huit premiers sont partagés en quatrains de même mesure, et qui roulent sur deux rimes, qu'il faut y placer dans le même ordre. Les six derniers vers riment différemment des premiers, et sont partagés en deux tercets. Les deux pre miers vers du premier tercet riment ensemble, et le troisième rime avec le second du second tercet. Le sens doit être complet après chaque quatrain et chaque tercet. Quand le sujet du sonnet est grave et sérieux, on doit y employer des vers alexandrins quand il ne l'est pas, on peut employer des vers de dix ou même de huit syllabes. Tout doit être exact, poli, châtié dans ce petit ouvrage. On n'y souffre ni le moindre écart du sujet, ni un vers foible ou négligé, ni une expression impropre ou superflue, ni la répétition du même mot. La précision et la justesse des pensées, l'élégance des expressions, l'harmonie des vers, la richesse des rimes n'y doivent rien laisser à desirer: en un mot, tout doit y être d'une beauté achevée. Aussi n'y a-t-il aucun poète qui ait atteint à ce degré de perfection qu'on exige dans ce petit poème ; et ce qu'a dit Boileau, il y a plus d'un siècle, nous pouvons le répéter aujourd'hui, qu'un sonnet sans défauts est un heureux phénix qui est encore à trouver. Le meilleur de tous est celui de des Barreaux. C'est par cette raison qu'en le proposant pour modèle, je ne ferai point difficulté de le citer, quoiqu'il soit connu de tout le monde. Grand Dieu, tes jugemens sont remplis d'équité; Mais Mais j'ai tant fait de mal, que jamais ta boaté Oui, mon Dieu, la grandeur de mon impiété Et ta clémence même attend que je périsse. Contente ton desir, puisqu'il t'est glorieux; J'adore en périssant la raison qui t'aigrit. ARTICLE III. Du Rondeau et du Triolet. LA naïveté fait le principal caractère du rondeau. Mais cette naïveté n'exclut Rondeau. pas la délicatesse, la finesse même, pourvu qu'elles ne s'y trouvent pas aux dépens de l'aimable simplicité. Ce petit poème, particulièrement propre à des sujets badins, est composé de treize vers de dix ou de huit syllabes, qui roulent sur deux rimes, dont huit sont féminines, et cinq masculines, ou huit masculines, et cinq féminines. De quelque manière qu'on dispose ces rimes, il s'en rencontre en quelqu'endroit trois féminines ou masculines de suite. Il doit y avoir, après le cinquième vers, un repos ou un sens. complet. Le premier hémistiche, ou les premiers mots du rondeau, doivent se |