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> gesse autant que sa valeur dans les >> divers travaux, dans les nombreux pé»rils que lui fit essuyer cette glorieuse » conquête. En vain l'enfer déchaîné vou>> lut s'opposer à son entreprise : en vain » se liguèrent contre lui les peuples ar» més de l'Asie et de l'Afrique. Le ciel >> daigna favoriser ses efforts; et le héros >> ramena sous les saints étendards ses >> compagnons égarés ».

Quoique le début doive être simple, il n'exclut cependant pas une certaine élévation, pourvu qu'il n'y ait rien d'affecté, pourvu que le ton qu'y prend le poète, soit soutenu jusqu'à la fin, et remplisse l'attente du lecteur. Tel est celuici de la Lusiade.

<< Je chante ces hommes extraordinai>> res, qui, des rives occidentales de la » Lusitanie, portés sur des mers qui » n'avoient point encore vu de vaisseaux, >> allèrent étonner la Taprobane de leur » audace; eux dont le courage patient » à souffrir des travaux au-dessus, des. » forces humaines, établit un nouvel em»pire sous un ciel inconnu et sous d'au» tres étoiles. Qu'on ne me vante plus » les voyages du fameux Troyen, qui » porta ses Dieux en Italie; ni ceux du »sage Grec, qui revit Ithaque après vingt >> ans d'absence; ni ceux d'Alexandre, >> cet impétueux conquérant; disparois» sez, drapeaux, que Trajan déployoit

» sur les frontières de l'Inde. Voici un >> homme à qui Neptune a abandonné >> son trident; voici des travaux qui sur» passent tous les vôtres ».

Après avoir exposé le sujet, le poète, qui ne peut pas savoir humainement les causes surnaturelles de l'action qu'il va raconter, adresse une prière à une divinité, pour qu'elle les lui révèle : c'est l'invocation; elle doit être courte. Telle est celle-ci de l'Eneide.

<< Muse, dis-moi quelle Divinité le » prince troyen avoit offensée; dis-moi » Îa cause de cette haine implacable de » Junon, qui fit essuyer tant de périls et » de malheurs à ce pieux héros ».

Elle peut être d'un style élevé, avoir de la chaleur et de la dignité. On en voit un exemple dans celle-ci de la Jérusalem délivrée.

«O muse, toi qui ne ceins point ta tête, » au sommet de l'Hélicon, d'un laurier » périssable, mais qui, assise au milieu » des célestes choeurs, pares ton front >> d'une rayonnante couronne d'étoiles >> immortelles, souffle dans mon ame une >> ardeur divine; échauffe, élève mes » chants; et pardonne, si, prêtant des » ornemens à la vérité, j'embellis quel>> quefois mes vers d'autres charmes que » les tiens. Tu sais que l'homme court » admirer ce que le riant Parnasse offre » de plus enchanteur, et que la vérité

>> animée du coloris d'une élégante poé» sie, attire par le plaisir, persuade et » maîtrise les coeurs les plus rebelles. » Ainsi nous présentons à un enfant ma» lade, un vase dont les bords sont hu» mectés d'une douce liqueur. Trompé >> par cet artifice, il boit des sucs amers, >> et retrouve la vie dans le sein même » de son erreur ».

Le poète se supposant exaucé, com- De la formence son récit : il peut le faire de deux me et du style du manières. La première consiste à suivre récit dans l'ordre naturel des événemens, comme le poème le Tasse, qui fait assembler les Croisés épique. au retour du printemps, les fait marcher vers Jérusalem, et suit directement la chaîne des divers événemens qui se succèdent durant ce siége. Alors la fable se nomme simple.

La seconde manière consiste à se jeter brusquement au milieu des événemens, pour dire ensuite ou faire dire à son héros ce qui a précédé l'événement, par lequel le récit a été commencé; comme Virgile, qui représente tout-à-coup la flotte des Troyens voguant sur la mer de Toscane, jetée par une tempête sur les côtes de Carthage, et qui met ensuite dans la bouche d'Enée le récit de la destruction de Troie, et celui de tous les revers qu'a essuyés ce héros, depuis son départ de la Troade. Alors la fable se nomme composée. Celle-ci a un avantage

sur la première, parce que le personnage qui raconte, paroît toujours, aux yeux du lecteur, plus intéressé et plus inté ressant que le poète même.

On doitjuger de là que la poésie a deux formes différentes dans le récit épique; celle où le poète se montre et parle en son nom, et celle où il fait parler ses personnages, en rapporiant leurs discours; ce qui fait alors une espèce de dramatique. Lorsque le poète raconte, il doit raconter comme un témoin qui a tout vu; mais qui, en voyant tout, a éprouvé la plus vive émotion. Il faut donc que toute la chaleur et toute la sensibilité de son ame passent dans son récit, et le rendent agréable, enjoué, terrible ou touchant, selon la nature du sujet. On peut voir (Enéïde, livre 9o) le sentiment et l'expression dont Virgile anime le récit de la mort de Nisus et d'Euryale, tendres amis, que le poète a immortalisés. Ces deux jeunes guerriers, après avoir fait un carnage affreux des Rutules plongés dans l'ivresse et le sommeil, alloient poursuivre leur route, lorsqu'au milieu des ténèbres qui commençoient à se dissiper, ils furent apperçus et pris par un gros de cavalerie qu'Amate, reine des Latins, envoyoit à Turnus, roi des Rutules.

Il faut voir aussi (livre 5) le récit d'un combat du ceste entre Entelle et

Darès. Il est plein de feu, d'énergie et de traits vraiment pittoresques.

Mais je ne craindrai point ici d'en mettre sous les yeux un autre, qui est à-peu-près dans le même genre, et qu'on ne lira pas avec moins de plaisir. C'est celui du combat de Tancrède et d'Argant dans la Jérusalem délivrée.

<< Leurs lances sont en arrêt; ils se » précipitent l'un sur l'autre. L'aigle qui » fond sur sa proie, le trait qui fend les >> airs, sont moins rapides. Rien n'égala » jamais leur furie leurs lances se bri>> sent sur leurs casques mille éclats, >> mille étincelles volent à-la-fois. Le >> bruit seul du coup fait trembler la » terre; les montagnes en mugissent: >> mais ni le choc ni le coup ne font plier >> le front superbe de ces deux rivaux. » Leurs chevaux se heurtent, tombent, » et font pour se relever, de lents et pé>> nibles efforts: les guerriers les aban>> donnent, prennent leurs épées, et >> combattent à pied. Chacun de la main >> suit la main de son ennemi, de ses

regards cherche ses regards, mesure » ses pas sur ses pas, varie l'attaque et » la défense, trompe l'art par l'art, la >> feinte par la feinte, tourne, s'avance, >> recule, menace un côté, frappe l'autre, » se découvre afin de forcer son adver» saire à se découvrir à son tour. Tan» crède offre son flanc nu et désarmé :

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