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donné parole pour s'épouser. Léonor ayant appris que cet amaut rebuté d'Isabelle, est sur le point de partir, et voulant rompre ce départ, l'a priée de souffrir qu'elle entrelînt ce soir Valère sous le nom d'Isabelle, par la petite rue où la chambre de celle-ci répond, et lui donnât quelques espérances, pour l'engager à rester. Elle m'a tant priée, poursuit Isabelle,

A tant versé de pleurs, tant poussé de soupirs,
Tant dit qu'au désespoir je porterois son ame,
Si je lui refusois ce qu'exige sa flamme,
Qu'à céder malgré moi mon cœur s'est vu réduit;
Et pour justifier cette intrigue de nuit,
Où me faisoit du sang relâcher la tendresse,
J'allois faire avec moi venir coucher Lucrèce,
Dont vous me vantez tant les vertus chaque jour.

Sganarelle loin d'approuver cela, veut aller chasser Léonor. Isabelle le prie de ne point lui faire un si cruel affront, et de permettre qu'elle aille elle-même la faire sortir. Son tuteur y consent. Isabelle le prie sur-tout de se bien cacher et de ne rien dire à Léonor quand elle sortira. Elle rentre dans la maison; et parlant à haute voix, elle fait semblant de renvoyer sa sceur, et sort dans le même instant. Sganarelle la prenant pour Léonor, va fermer à clef la porte, de peur que cette Léonor ne revienne: il la suit d'un peu loin, et voit qu'elle va au logis de Valère, lorsque celui-ci sort brusquement dans le dessein de tenter quelque

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entreprise. Isabelle lui dit aussi - tôt de ne point faire de bruit, et se nomme. Sganarelle entendant le nom d'Isabelle, dit:

Vous en avez menti, chienne, ce n'est pas elle.
De l'honneur que tu fuis, elle suit trop les loix,
Et tu prends faussement et son nom et sa voix.

Isabelle dit à Valère qu'à moins de le voir par le mariage......... Valère l'interrompt, lui protestant que c'est là son unique desir, et que dès le lendemain, il ira recevoir sa main où elle voudra. Pauvre sot qui s'abuse, dit à part Sga- narelle.

Les deux amans étant entrés dans la maison, le tuteur veut les faire surprendre, et va frapper à la porte d'un commissaire re qui arrive avec un notaire. Il les fait entrer au logis de Valère, et va lui-même chercher Ariste. Il lui demande d'un ton railleur où est sa Léonor. Celui-ci répond qu'il croit qu'elle est au bal chez son amie. Sgana- relle après quelques plaisanteries amères, lui dit que le bal de sa pupille est chez monsieur Valère, où il l'a vue lui-même entrer, et que l'honneur l'a aussi-tôt engagé à faire venir un commissaire et un notaire pour les marier. Ariste, qui n'a jamais gêné en rien sa pupille, ne peut croire qu'elle se soit jetée dans cette intrigue à son insu. Le commissaire reve

nant avec le notaire, dit que la force ne doit pas ici être employée, si les deux tuteurs consentent au mariage des deux amans, parce qu'ils sont eux-mêmes portés à s'épouser, et que Valère a déjà signé le contrat. Celui-ci se met à la fenêtre, pour confirmer la proposition du commissaire. Il ne s'est point encore détrompé d'Isabelle, dit Sganarelle bas à part; profitons de Perreur. II presse Ariste de signer. Celui-ci ne comprenant rien à ce mystère, parce que Valère parle d'Isabelle, et Sganarelle de Léonor, signe cependant, ainsi que son frère. Aussi tôt arrive Léonor avec sa suivante. Ariste lui fait de doux et tendres reproches sur son prétendu procédé. Léonor étonnée lui répond.:

Je ne sais pas sur quoi vous tenez ce discours :
Mais croyez que je suis la même que toujours
Que rien ne peut pour vous altérer mon estime ,
Que toute autre amitié me paroîtroit un crime,
Et que, si vous voulez satisfaire mes vœux,
Un saint noeud dès demain nous unira tous deux.

Sganarelle n'est pas peu surpris d'entendre cette réponse. Il l'est encore bien davantage lorsqu'il voit paroître Valère, et Isabelle, qui demande pardon à sa sœur d'avoir emprunté son nom, pour faire réussir son stratagême. Le tuteur confondu, ne sort de l'accablement dans lequel il étoit plongé, que pour lancer les plus fortes malédictions con

tre les femmes, et se retire comme un furieux.

L'analyse d'une pièce de théâtre ne peut pas donner une parfaite idée de la manière dont elle est conduite. Il faut lire la pièce même, pour bien voir et bien sentir l'art avec lequel le poète a lié et filé les scènes, a ménagé et présenté les situations, a excité et gradué l'intérêt. Cependant on a pu voir, dans l'analyse de celle-ci, que le premier acte ne renferme en grande partie que des discours qui font connoître les personnages, et qu'il n'y a pas beaucoup d'action : c'est ce qu'il ne faut pas non plus. Il suffit que les caractères y soient bien annoncés, et les machines préparées. Mais on a vu dans le second et le troisième acte, que les caractères s'y développent successivement pour se montrer à la fin dans tout leur jour; que l'action y est vive, pressée, qu'elle marche avec la plus grande rapidité, sans qu'elle soit jamais interrompue, sans qu'elle s'éloigne un seul instant de son terme; que les situations s'y succèdent aussi trèsrapidement, et que l'une y amène toujours l'autre, jusqu'à l'entier dénouement, de la manière la plus vraisemblable et la plus naturelle. C'est à de pa reils modèles que doit s'attacher le poète comique. Il faut qu'il les feuillette, qu'il les lise nuit et jour, comme le disoit

Différens

Horace aux Romains, en parlant des excellens ouvrages de théâtre que les Grecs ont laissés.

La comédie se divise selon les sujets genres de qu'elle traite. Si le poète peint les vices comique. et les ridicules des grands, c'est le haut

comique ou le comique noble. S'il peint ceux de la bourgeoisie, c'est le comique bourgeois. S'il peint ceux du peuple, c'est le bas comique.

Les ridicules et les vices des grands sont à peine visibles, parce qu'ils sont colorés par le vernis de la politesse, qui en fait presque des hommes aimables. Ces ridicules ont même quelque chose de si imposant, qu'ils paroissent ne pouvoir être un objet de plaisanterie. C'est au poète à les mettre en jeu, à les faire ressortir par les situations et les contrastes.

Les prétentions déplacées, les faux airs, et les autres ridicules de la bourgeoisie ne sont pas rares, et sont bien moins encore difficiles à saisir : ils prêtent merveilleusement au comique. Il suffit de les peindre suivant les règles de l'art.

Le bas comique, qui n'est qu'une imitation des mœurs du bas peuple, a sa finesse et ses graces. Il faut qu'il y ait de la délicatesse et de l'honnêteté ; et l'on ne doit pas le confondre avec le comique grossier. Qu'une soubrette

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